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10/07/2013 | FRANCE | N°13-83025

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 juillet 2013, 13-83025


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Alberto X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BOURGES, en date du 16 avril 2013, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du gouvernement espagnol, a émis un avis favorable ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., par ailleurs détenu en France pour l'exécution de peines criminelles et correctionnelles, a fait l'objet d'une d

emande d'extradition formée par les autorités judiciaires espagnoles à la su...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Alberto X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BOURGES, en date du 16 avril 2013, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du gouvernement espagnol, a émis un avis favorable ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., par ailleurs détenu en France pour l'exécution de peines criminelles et correctionnelles, a fait l'objet d'une demande d'extradition formée par les autorités judiciaires espagnoles à la suite d'une ordonnance de mise en accusation et d'emprisonnement qu'elles ont décernée à son encontre, le 29 octobre 2001, pour des faits d'association illicite et participation à un groupe terroriste, ainsi que de détention d'explosifs, commis au cours des années 1993 et 1994 ;
Qu'après exécution d'un complément d'information diligenté auprès des autorités espagnoles aux fins de vérifier que la prescription de l'action publique n'était pas acquise, la chambre de l'instruction a émis un avis favorable à la demande d'extradition ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des réserves du gouvernement français à la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, des articles 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 696-5 7e, 696-15 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale, défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a émis un avis favorable à l'extradition de M. X... au profit des autorités espagnoles ;
" aux motifs qu'il résulte des documents récemment produits que l'infraction de participation à une organisation terroriste était prévue et réprimée avant 1995 par les articles 173 et 174 de l'ancien code pénal espagnol par une peine d'emprisonnement majeur, à savoir jusqu'à douze ans, puis, après cette date, par les articles 5 15 et 5 16 du code pénal espagnol actuellement en vigueur prévoyant une peine d'emprisonnement de six à douze ans ; que pour ce qui est du délit de dépôt d'armes et d'explosifs anciennement prévu par les articles 257 et 258 de l'ancien code pénal espagnol, il est réprimé par la même peine d'emprisonnement majeur ; qu'il est, après 1995, prévu et réprimé par les articles 566, 567 et 573 du code pénal espagnol actuellement en vigueur prévoyant une peine d'emprisonnement de six à dix ans ; que l'article 13 1 du même code prévoit que les infractions se prescrivent au bout de quinze ans lorsque la peine maximale signalée par la loi est l'emprisonnement de plus de dix ans et moins de 15 ans et au bout de dix ans lorsque la peine maximale signalée par la loi est l'emprisonnement de plus de cinq ans et moins de dix ans ; qu'ainsi, en l'espèce, la prescription est de dix ans ; qu'il résulte de la procédure que si les faits imputés à M. X... ont été commis en 1993 et 1994, la prescription a été interrompue par la procédure diligentée par le tribunal central de l'instruction de l'Audience Nationale, notamment par une ordonnance d'emprisonnement ainsi qu'un mandat d'arrêt international décerné contre M. X..., en date du 27 mai 1996, puis par une première demande d'extradition du 3 juillet 2002 suivie d'un arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris du 17 décembre 2003 ; qu'en conséquence, l'infraction de participation à une organisation terroriste n'est pas prescrite selon la loi espagnole, peu importe qu'elle le soit selon la législation française en application de l'article 8 de la Convention du 27 septembre 1996 relative à l'extradition entre les Etats membres de l'union européenne, laquelle n'était pas applicable au moment, où la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a rendu sa décision ; qu'en conséquence, il convient de mettre un avis favorable à la remise de M. X... aux autorités espagnoles mandantes mais en raison du fait que celui-ci purge actuellement des peines criminelles et correctionnelles en France, sa remise, conformément aux dispositions de l'article 19-2 de la convention européenne de l'extradition de 1957, sera temporaire pour une durée de huit mois ;
" alors qu'il ressort des propres constatations de la chambre de l'instruction que M. X... a, pour s'opposer à sa remise aux autorités espagnoles, soutenu lors de l'audience que les déclarations des personnes qui le mettent en cause ont été recueillies sous la torture ; qu'en ne s'expliquant nulle part sur ces circonstances, la chambre de l'instruction a privé sa décision, en la forme, des conditions essentielles de son existence légale " ;
Attendu que M. X... ne peut se faire un grief de ce que l'arrêt ne tire aucune conséquence de ses déclarations selon lesquelles les personnes le mettant en cause auraient fait l'objet de tortures, dès lors que, ne comportant aucune précision de nature à convaincre les juges que de tels faits seraient l'objet d'une plainte, d'une enquête ou d'une poursuite en Espagne, ces affirmations sont restées à l'état de pures allégations ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation de la Convention d'extradition entre Etats membres de l'Union européenne du 27 septembre 1996, des articles 695-7, 696-15 et 696-16, 591 et 593 du code de procédure pénale, excès de pouvoir ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que la remise de M. X... aux autorités espagnoles sera temporaire « pour une durée de huit mois » ;
" 1°) alors qu'il appartient à la chambre de l'instruction d'émettre seulement un avis sur la demande d'extradition présentée par l'autorité étrangère, sans avoir le pouvoir de prendre de décision ; qu'en décidant, dans le dispositif de son « avis » que la remise de M. X... aux autorités espagnoles sera faite pour une durée de huit mois, la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs ;
" 2° alors, au surplus, qu'il résulte de l'article 696-7 du code de procédure pénale que lorsque la personne réclamée est détenue en France, elle peut être envoyée temporairement pour comparaître devant les tribunaux de l'Etat étranger sous la condition expresse qu'elle sera renvoyée « dès que la justice étrangère aura statué » ; qu'en fixant à huit mois la durée de la remise aux autorités espagnoles, la chambre de l'instruction a méconnu les exigences du texte susvisé " ;
Vu l'article 19, alinéa 2, de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte que les modalités de la remise de la personne extradée, qui procèdent d'un accord entre les Etats parties à l'extradition, ne relèvent pas de la compétence de la chambre de l'instruction ;
Attendu qu'après avoir émis un avis favorable sur la demande d'extradition de M. X..., formulée par les autorités judiciaires espagnoles, l'arrêt limite à une durée de huit mois la remise, qualifiée de " temporaire ", motif pris de l'exécution, par la personne réclamée, de peines criminelles et correctionnelles sur le territoire français ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs, au regard du texte susvisé et du principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bourges, en date du 16 avril 2013, en ses seules dispositions relatives à la remise temporaire de la personne réclamée, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bourges et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Straehli conseiller rapporteur, Mme Guirimand, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Leprey ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-83025
Date de la décision : 10/07/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle par voie de retranchement sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

EXTRADITION - Conventions - Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 - Article 19 § 2 - Application - Modalités de la remise - Détermination - Compétence de la chambre de l'instruction (non)

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Conventions relatives à l'extradition - Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 - Article 19 § 2 - Application - Modalités de la remise - Détermination - Compétence de la chambre de l'instruction (non) CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Extradition - Avis - Avis favorable - Modalités de la remise - Compétence - Détermination - Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 - Article 19 § 2 - Portée

Il se déduit de l'article 19, alinéa 2, de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 que, lorsqu'elle a émis un avis favorable à la demande de l'Etat requérant, la chambre de l'instruction n'a pas compétence pour fixer les modalités de la remise de la personne concernée, celles-ci relevant d'un accord entre les Etats parties à l'extradition. Encourt la cassation pour excès de pouvoir l'arrêt d'une chambre de l'instruction qui fixe elle-même la durée d'une remise temporaire à l'Etat requérant au motif que la personne dont l'extradition est demandée exécute une peine d'emprisonnement sur le territoire français


Références :

article 19 § 2 de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bourges, 16 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 jui. 2013, pourvoi n°13-83025, Bull. crim. criminel 2013, n° 174
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2013, n° 174

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Boccon-Gibod
Rapporteur ?: M. Straehli
Avocat(s) : SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:13.83025
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