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09/07/2013 | FRANCE | N°12-20468

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 juillet 2013, 12-20468


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société X..., était concessionnaire de la marque Braud depuis 1957 pour la commercialisation de matériels agricoles ; que la société Fiat Agri devenue CNH France (la société CNH), venant aux droits du concédant, a conclu le 7 juillet 1995 avec la société X... un contrat de concession exclusive pour la vente de matériels agricoles et viticoles Fiat Agri, Ford New Holland et pour celle de machines Braud pour lesquelles le concessionnaire bénéficiait déjà d'une exclus

ivité depuis 1981 ; que, le 25 juillet 2007, la société CNH a notifié...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société X..., était concessionnaire de la marque Braud depuis 1957 pour la commercialisation de matériels agricoles ; que la société Fiat Agri devenue CNH France (la société CNH), venant aux droits du concédant, a conclu le 7 juillet 1995 avec la société X... un contrat de concession exclusive pour la vente de matériels agricoles et viticoles Fiat Agri, Ford New Holland et pour celle de machines Braud pour lesquelles le concessionnaire bénéficiait déjà d'une exclusivité depuis 1981 ; que, le 25 juillet 2007, la société CNH a notifié à la société X... la résiliation du contrat, avec effet au 25 juillet 2008 conformément aux stipulations contractuelles ; que la société X... l'a assignée en responsabilité pour rupture brutale des relations commerciales ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts au titre de la rupture partielle des relations commerciales établies résultant de la suppression de l'exclusivité territoriale par la société CNH, alors, selon le moyen :
1°/ qu'engage sa responsabilité celui qui rompt des relations commerciales établies sans respecter un délai de préavis suffisant au regard de l'ancienneté de ces relations et destiné à permettre au partenaire évincé de bénéficier du maintien du courant d'affaire aux conditions contractuelles initiales ; que la suppression, pendant le délai de préavis, de la clause d'exclusivité territoriale initialement concédée au distributeur équivaut à une rupture brutale partielle des relations commerciales ; qu'en énonçant, pour refuser toute indemnisation à la société X..., que l'abandon de l'exclusivité, fût-il réciproque, décidé par la société CNH pendant la durée de préavis en application des stipulations contractuelles n'est pas assimilable à une rupture partielle des relations commerciales, la cour d'appel a violé l'article L. 422-6, I, 5° du code de commerce ;
2°/ engage sa responsabilité celui qui rompt des relations commerciales établies sans respecter un délai de préavis suffisant au regard de l'ancienneté de ces relations destiné à permettre au partenaire évincé de bénéficier du maintien du courant d'affaire aux conditions contractuelles initiales ; que la suppression pendant le délai de préavis de la clause d'exclusivité territoriale initialement concédée au distributeur équivaut à une rupture brutale partielle des relations commerciales ; qu'en retenant, pour rejeter la demande d'indemnisation formée par la société X... au titre de la rupture partielle des relations commerciales, qu'il n'était pas établi que la société X... avait dégagé, après la suppression de l'exclusivité qui lui avait été initialement accordée par le contrat de concession, un résultat d'exploitation inférieur à celui qu'elle aurait pu raisonnablement espérer, dans les mêmes conditions, en l'absence de perte de son exclusivité, la cour d'appel, qui a justifié sa décision par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 422-6, I, 5° du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt retient exactement que l'abandon réciproque de l'exclusivité conformément aux stipulations contractuelles n'est pas assimilable à une rupture partielle des relations commerciales ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ;
Attendu que le délai du préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances au moment de la notification de la rupture ; qu'en cas d'insuffisance du préavis, le préjudice en résultant est évalué en fonction de la durée du préavis jugée nécessaire ;
Attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts formée par la société X... contre la société CNH au titre de la rupture brutale d'une relation commerciale établie, l'arrêt retient que dans les jours suivant la fin du préavis, la société X... a réalisé sa reconversion en prenant en location-gérance un fonds de commerce de sorte qu'il n'y a pas eu rupture entre la fin de l'activité procédant de la concession litigieuse et la nouvelle activité sociale, qu'il résulte des pièces comptables et du rapport de gestion que le changement d'activité n'a pas eu d'effet sur le montant du capital social et des réserves et n'a pas non plus affecté la trésorerie de la société et qu'il n'est donc pas démontré que son changement d'activité se soit opéré dans des conditions défavorables pour elle ni que la durée du préavis l'ait privée de chances de reconversion plus avantageuses ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la durée du préavis était suffisante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de la société X... tendant à la condamnation de la société CNH France à lui payer une certaine somme au titre de la rupture brutale d'une relation commerciale établie, l'arrêt rendu le 13 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société CNH France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de la Société X... tendant à voir condamner la Société CNH FRANCE à lui verser la somme de 630. 047 euros de dommages-intérêts au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies entre les parties ;
Aux motifs que « dans le cadre de la présente procédure, la Société X... fait valoir que compte tenu de l'ancienneté des relations commerciales qui l'unissaient d'abord à la Société BRAUD depuis 1957, puis à la Société FIAT AGRI (devenue NEW HOLLAND) à compter du 1er juillet 1984, laquelle avait pris le contrôle de la Société BRAUD, et enfin à la Société CNH France, issue de la fusion de la Société CASE FRANCE et NEW HOLLAND France, le préavis de douze mois convenu contractuellement le 1er juillet 1995, confirmé le 24 octobre 2006, était objectivement insuffisant pour assurer une reconversion satisfaisante ; qu'il est constant que la durée du préavis convenu par les parties, même à une date proche de celle de la rupture comme en l'espèce, peut se révéler insuffisante compte tenu des circonstances de la rupture et notamment du caractère imprévisible qu'elle a revêtu ; mais qu'en l'occurrence, dès le mois d'octobre 2005, afin de préparer son départ à la retraite, monsieur Dominique X..., dirigeant des Etablissements X..., alors âgé de 57 ans, informait la Société CNH France de son souhait de rechercher des solutions de cession de sa société compatibles avec les options de son contractant ; qu'or, le contrat de concession étant conclu intuitu personae, le remplacement des dirigeants et détenteurs du capital social entraînait ipso facto la résiliation de ce contrat sauf autorisation écrite du concédant à la cession projetée ; que ceci constituait donc une circonstance de nature à introduire une certaine précarité dans le maintien du contrat de concession dont bénéficiait la société des Etablissements X... et à ôter à la rupture son caractère imprévisible d'autant qu'aucun candidat à la reprise ne s'était manifesté ; qu'ainsi, Monsieur X... expose avoir été alerté dès le mois de janvier 2007 par les investissements effectués par un concessionnaire concurrent sur son secteur, pressentant la décision de la Société CNH France de ne pas accorder la poursuite du contrat de concession à un éventuel repreneur présenté par lui ; que dans ce contexte, la Société des Etablissements X... ne soutient pas avoir procédé, dans les années précédant la rupture, à l'engagement d'investissements significatifs dans l'intérêt de l'activité en cause, investissements qui n'auraient pu être amortis et se seraient révélés inutiles pour la nouvelle activité ; que dans les jours suivant la fin du préavis, la Société X... a, le 1er août 2008, réalisé sa reconversion en prenant en location gérance le fonds de commerce de la société HILAIRE de sorte qu'il n'y a pas eu de rupture entre la fin de l'activité procédant de la concession litigieuse et la nouvelle activité sociale ; que certes, la reconversion de la société victime de la rupture des relations commerciales n'est pas une condition suffisante pour démontrer le caractère satisfaisant de la durée du préavis accordé dans la mesure où une reconversion précipitée peut se révéler défavorable pour la société et la priver d'opportunités plus intéressantes que celles qu'elle a dû accepter dans l'urgence ; que cependant, en l'occurrence, les pièces comptables révèlent que l'exercice comptable clôturé quatre mois après la rupture a dégagé un résultat d'exploitation de 116. 600 euros contre 56. 030 euros à la fin de l'exercice précédent ; que si l'objectif annoncé d'amélioration du résultat de l'exercice comptable suivant grâce à une baisse des charges n'a pas été atteint, sans que le rapport de gestion contenant l'analyse de cet échec ne soit soumis à la Cour, force est de constater que ceci est à mettre en parallèle avec une augmentation importante des charges, et notamment des salaires et charges sociales subséquentes, de sorte que ceci ne préjuge pas de la rentabilité réelle de la nouvelle activité ; qu'une baisse du chiffre d'affaires était constatée à la clôture de l'exercice 2008 mais elle était mise en relation, non pas avec la rupture du contrat de concession mais avec le gel des vignes du Muscadet le 7 avril 2008, l'activité vente de matériels étant ensuite restée faible jusqu'au vendanges ; qu'à cet égard, le rapport de gestion du président du 10 avril 2009 comportait les indications suivantes : " S'il n'y a pas de gel au cours de l'année 2009, nous pouvons espérer une remontée du chiffre d'affaires au niveau de l'exercice 2006-2007 " ; que l'exercice clôturé le 31 octobre 2009 révélait un chiffre d'affaires de 4. 930. 569 euros, respectant en cela l'objectif assigné puisque le chiffre d'affaires de l'exercice clôturé en 2007 s'élevait à 4. 642. 991 euros ; qu'à l'issue du changement d'activité, l'effectif du personnel employé par la société est resté constant dans la mesure où les démissions spontanées de sept salariés au cours du premier semestre de l'année 2008 ont été compensées, au premier août suivant, par l'intégration des sept salariés attachés au fonds de commerce pris en location gérance ; que la société n'a donc eu, du fait de sa reconversion, ni à supporter des frais de licenciement, ni à supporter des frais d'embauché de personnel ; qu'elle a au contraire bénéficié d'une diminution de ses charges fixes de personnel au premier semestre 2008, parallèlement à la diminution du chiffre d'affaires réalisé au titre du contrat de concession ; qu'il ressort du rapport de gestion que le bénéfice net de la société en 2008 a été réduit du fait du déménagement du fonds pris en location gérance de Vertou à Vallet (charges exceptionnelles de 13. 000 euros), coût imputable à la reconversion, mais aussi des coûts liés au changement de l'actionnariat de la SAS X... (14. 000 euros), ces derniers n'étant en revanche pas la conséquence de la reconversion ; qu'en dépit de ces charges exceptionnelles pour partie étrangères au changement d'activité, le bénéfice net de l'exercice s'est révélé nettement supérieur à celui de l'exercice précédent (53. 635 euros contre 37. 528 euros) ; que certes ce dernier résultat était inférieur à celui des deux exercices précédents mais l'exercice clos le 31 octobre 2004 ne dégageait quant à lui qu'un résultat de 3. 531 euros ; qu'il n'est dès lors nullement établi qu'un préavis d'une durée supérieure aurait amélioré les résultats de la société et facilité la reconversion inéluctable de la société ; qu'ainsi le changement d'activité n'a pas eu d'effet sur le montant du capital social et des réserves et n'a pas non plus affecté la trésorerie de la société puisqu'aucun nouvel emprunt n'a été nécessaire alors même que l'intégralité du compte courant de l'ancien dirigeant a été remboursé et qu'une distribution exceptionnelle de dividendes d'un montant de 300. 000 euros a été décidée le 30 avril 2008 selon le procès-verbal des décisions de l'associé unique en date du 30 avril 2009 ; qu'en comparaison, les dividendes distribués en 2007 n'avaient pas dépassé 20. 000 euros et aucun dividende n'avait été distribué en 2006 ; qu'il n'est donc pas démontré que le changement d'activité de la Société X... se soit opéré dans des conditions défavorables pour elle et que la durée du préavis l'ait privée de chances de reconversion plus avantageuses ; (¿) que dès lors, la Société X... n'établit ni le caractère insuffisant du délai de préavis dont elle a bénéficié, ni l'existence d'un préjudice en relation de causalité avec la durée de ce préavis, étant fait remarquer que ne pouvant imposer son nouveau dirigeant à la société concédante, le cumul de son ancienne activité de concessionnaire CNH FRANCE avec sa nouvelle activité était en tout état de cause exclu » ;
Alors que, de première part, engage sa responsabilité celui qui rompt des relations commerciales établies sans respecter un délai de préavis suffisant au regard de l'ancienneté de ces relations ; que les juges ne peuvent prendre en compte des éléments postérieurs à la rupture des relations, comme la reconversion du partenaire évincé, fût-elle réussie, pour refuser d'indemniser le préjudice découlant pour ce dernier du caractère brutal de la rupture ; que pour rejeter la demande d'indemnisation formée par la Société X... à l'encontre de la Société CNH FRANCE, l'arrêt retient que la demanderesse n'établissait ni le caractère insuffisant du délai de préavis dont elle a bénéficié ni l'existence d'un préjudice en relation de causalité avec la durée de ce préavis dès lors que, dans les jours suivant la fin du préavis, la Société X... avait réalisé sa reconversion en prenant en location-gérance un fonds de commerce de la Société HILAIRE de sorte qu'il n'y avait pas eu de rupture entre la fin de l'activité procédant de la concession " CNH FRANCE " et sa nouvelle activité, de première part, qu'il n'était pas établi qu'un préavis d'une durée supérieure à celui appliqué par la Société CNH FRANCE aurait amélioré ses résultats et facilité sa reconversion inéluctable, de deuxième part, que le changement d'activité n'a pas eu d'effet sur le montant de son capital social et de ses réserves ni affecté sa trésorerie, de troisième part, et qu'il n'est ainsi pas démontré que son changement d'activité se soit opéré dans des conditions défavorables pour elle ni que la durée du préavis l'ait privée de chances de reconversion plus avantageuses, de quatrième part ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que la Société CNH FRANCE, qui a rompu les relations qu'elle entretenait depuis un demi-siècle avec les Etablissements X... moyennant le respect d'un préavis contractuel limité à douze mois, n'avait pas causé à son partenaire un préjudice découlant du caractère brutal de la rupture, la Cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;
Alors que, de deuxième part, engage sa responsabilité celui qui rompt des relations commerciales établies sans respecter un délai de préavis suffisant au regard de l'ancienneté de ces relations ; que les juges ne peuvent prendre en compte des éléments postérieurs à la rupture des relations, comme la reconversion du partenaire évincé, fût-elle réussie, pour refuser d'indemniser le préjudice découlant pour ce dernier du caractère brutal de la rupture ; à l'appui de sa demande d'indemnisation, la Société X... faisait observer dans ses écritures d'appel qu'elle n'avait pu trouver de possibilités de reconversion dans la mesure où toutes les marques concurrentes étaient déjà représentées sur son secteur, et qu'aucune reconversion ne pouvait être inférée de la prise en location-gérance, postérieurement à la fin du préavis, du fonds de commerce de la Société HILAIRE dès lors que ce fonds n'avait pas pour activité la distribution de matériel agricole et viticole, comme cela avait été le cas dans le cadre du contrat de concession conclu avec la Société CNH FRANCE, mais simplement l'activité purement viti-vinicole et de distribution de matériels de cave, en l'occurrence tout ce qui concerne l'embouteillage ; qu'en se bornant à énoncer que la Société X... avait réalisé sa reconversion et qu'il en résultait qu'il n'y avait pas eu de rupture entre la fin de l'activité procédant de la concession " CNH FRANCE " et sa nouvelle activité, sans rechercher, ainsi qu'il lui était pourtant expressément demandé, si la circonstance selon laquelle la Société X... n'avait pu exercer, postérieurement à la rupture de ses relations commerciales avec la Société CNH FRANCE, une activité de même nature que celle qu'elle exerçait lorsqu'elle était concessionnaire de cette dernière, ne devait pas conduire à retenir qu'elle n'avait pas réalisé une véritable reconversion par le maintien d'une activité peu ou prou équivalente, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;
Alors que, de troisième part, engage sa responsabilité celui qui rompt des relations commerciales établies sans respecter un délai de préavis suffisant au regard de l'ancienneté de ces relations ; qu'en énonçant, pour retenir que la Société X... n'avait établi ni le caractère insuffisant du délai de préavis dont elle a bénéficié, ni l'existence d'un préjudice en relation de causalité avec la durée de ce préavis, que la rupture présentait un caractère de précarité dès lors que la volonté de Monsieur X... de céder son entreprise pour prendre sa retraite aurait conduit à la résiliation du contrat de concession conclu intuitu personae sauf en cas d'accord exprès du concédant à la cession envisagée, et que Monsieur X... devait pressentir qu'un tel accord ne serait pas accordé puisqu'il avait été alerté au mois de janvier 2007 par les investissements effectués par un concessionnaire concurrent sur son secteur, la Cour d'appel, qui a justifié sa décision par des motifs inopérants, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de la Société X... tendant à voir condamner la Société CNH FRANCE à lui verser la somme de 228. 652 euros de dommages-intérêts au titre de la rupture partielle des relations commerciales établies résultant de la suppression de l'exclusivité territoriale par la Société CNH FRANCE ;
Aux motifs que « la Société X... se plaint par ailleurs d'avoir, du fait de la perte de l'exclusivité de la commercialisation des matériels CNH au mois de février 2008, subi un préjudice consécutif à une rupture partielle de la relation commerciale ; mais que, d'une part, l'abandon réciproque de l'exclusivité conformément aux stipulations contractuelles n'était pas assimilable à une rupture partielle des relations commerciales et, d'autre part, les pièces produites ne démontrent pas que la Société X..., dont le préjudice d'exploitation a été indemnisé sur la base de son activité antérieure à la suite de l'incendie et de l'explosion dont elle a souffert le 15 février 2008 (qui a détruit l'atelier empêchant le fonctionnement normal de l'entreprise pendant quatre mois) et qui a subi les conséquences du gel des vignes survenu le 7 avril suivant affectant la vente du matériel viticole, a dégagé, des mois de février à juillet 2008, un résultat d'exploitation (indemnité d'assurance prise en compte) inférieur à celui qu'elle aurait pu raisonnablement espérer, dans les mêmes conditions, en l'absence de perte de son exclusivité, étant rappelé que parallèlement, ses charges fixes diminuaient du fait du départ de sept salariés ; que dès lors, la Société X... n'établit ni le caractère insuffisant du délai de préavis dont elle a bénéficié, ni l'existence d'un préjudice en relation de causalité avec la durée de ce préavis, étant fait remarquer que ne pouvant imposer son nouveau dirigeant à la société concédante, le cumul de son ancienne activité de concessionnaire CNH FRANCE avec sa nouvelle activité était en tout état de cause exclu » ;
Alors que, de première part, engage sa responsabilité celui qui rompt des relations commerciales établies sans respecter un délai de préavis suffisant au regard de l'ancienneté de ces relations et destiné à permettre au partenaire évincé de bénéficier du maintien du courant d'affaire aux conditions contractuelles initiales ; que la suppression, pendant le délai de préavis, de la clause d'exclusivité territoriale initialement concédée au distributeur équivaut à une rupture brutale partielle des relations commerciales ; qu'en énonçant, pour refuser toute indemnisation à la Société X..., que l'abandon de l'exclusivité, fût-il réciproque, décidé par la Société CNH FRANCE pendant la durée de préavis en application des stipulations contractuelles n'est pas assimilable à une rupture partielle des relations commerciales, la Cour d'appel a violé l'article L. 422-6, I, 5° du Code de commerce ;
Alors que, de seconde part, engage sa responsabilité celui qui rompt des relations commerciales établies sans respecter un délai de préavis suffisant au regard de l'ancienneté de ces relations destiné à permettre au partenaire évincé de bénéficier du maintien du courant d'affaire aux conditions contractuelles initiales ; que la suppression pendant le délai de préavis de la clause d'exclusivité territoriale initialement concédée au distributeur équivaut à une rupture brutale partielle des relations commerciales ; qu'en retenant, pour rejeter la demande d'indemnisation formée par la Société X... au titre de la rupture partielle des relations commerciales, qu'il n'était pas établi que la Société X... avait dégagé, après la suppression de l'exclusivité qui lui avait été initialement accordée par le contrat de concession, un résultat d'exploitation inférieur à celui qu'elle aurait pu raisonnablement espérer, dans les mêmes conditions, en l'absence de perte de son exclusivité, la Cour d'appel, qui a justifié sa décision par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 422-6, I, 5° du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-20468
Date de la décision : 09/07/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONCURRENCE - Transparence et pratiques restrictives - Rupture brutale des relations commerciales - Préavis - Délai - Critères et moment d'appréciation

CONCURRENCE - Transparence et pratiques restrictives - Rupture brutale des relations commerciales - Préavis - Insuffisance - Réparation du préjudice - Critère d'évaluation

Il résulte de l'article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce qu'en ce qui concerne la rupture de relations commerciales établies, le délai du préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances au moment de la notification de la rupture et qu'en cas d'insuffisance du préavis, le préjudice en résultant est évalué en fonction de la durée du préavis jugée nécessaire


Références :

Sur le numéro 1 : article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 13 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 09 jui. 2013, pourvoi n°12-20468, Bull. civ. 2013, IV, n° 115
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 115

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Carre-Pierrat
Rapporteur ?: Mme Riffault-Silk
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.20468
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