LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1142-1, I, alinéa 2, et L. 1142-1-1 du code de la santé publique ;
Attendu qu'en vertu du second de ces textes, applicable aux infections nosocomiales contractées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 30 décembre 2002, soit au 1er janvier 2003, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale les dommages résultant d'infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 correspondant à un taux d'incapacité permanente ou d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales, de sorte que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) est seul tenu d'assurer la réparation de ces dommages, l'établissement de santé dans lequel l'infection a été contractée pouvant uniquement, en cas de faute, être appelé à indemniser l'ONIAM, au titre d'une action récursoire ou subrogatoire, de tout ou partie des sommes ainsi mises à sa charge ;
Attendu que pour mettre l'ONIAM hors de cause et condamner la société Clinique Villette (la clinique) à indemniser le préjudice de M. X..., atteint d'une incapacité permanente partielle de 45 % à la suite d'une infection nosocomiale, contractée à l'occasion d'une intervention réalisée le 12 mars 2003 dans ses locaux et qui a nécessité l'amputation d'un membre inférieur, et à verser certaines sommes à la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres, l'arrêt attaqué retient que le seul fait qu'il y ait eu contamination au sein de la clinique suffit à engager la responsabilité de cette dernière de plein droit dès lors qu'elle ne rapporte pas la preuve d'une cause étrangère telle que prévue à l'alinéa 2 de l'article L. 1142-1, I du code de la santé publique, que l'obligation légale de l'ONIAM, qui est subsidiaire, ne saurait de ce fait être mise en oeuvre et que le seuil de 25 % n'est applicable que dans le cas où la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé n'est pas engagée ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par fausse application, le second par refus d'application ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne l'ONIAM aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Nouvelle Clinique Villette.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la clinique VILLETTE responsable de l'infection nosocomiale contractée par Monsieur X..., de l'avoir condamnée à indemniser le préjudice de ce dernier et celui de la CPAM des FLANDRES et d'avoir mis l'ONIAM hors de cause ;
AUX MOTIFS QUE « cette infection nosocomiale a été contractée en premier lieu lors de l'intervention du 12 mars 2003 ; que si d'autres épisodes infectieux ont suivi, le seul fait qu'il y ait eu contamination par ce germe au sein de la CLINIQUE VILLETTE suffit à engager la responsabilité de cette dernière de plein droit ; que cette clinique ne rapporte pas la preuve d'une cause étrangère telle que prévue à l'alinéa 2 de l'article L. 1142-1 du Code de la santé publique ; qu'en effet elle se contente d'invoquer la faute du Docteur Y..., dont il vient d'être dit qu'elle n'était pas démontrée, et la participation du Centre Hospitalier de TOURCOING à l'infection, mais qu'en présence de premières manifestations de l'infection avant l'intervention du Centre Hospitalier de TOURCOING, cela ne peut dispenser la société CLINIQUE VILLETTE de sa responsabilité ; que celle-ci ne peut s'appuyer sur les conclusions des Docteurs A...et B... en page 40 de leur rapport, alors que ceux-ci partent du postulat que l'infection a été contractée le 7 février 2003 et mettent en cause la préparation de cette intervention, ce qui est totalement infirmé par les résultats bactériologiques et les observations des autres experts ; qu'il convient de retenir un taux d'IPP de 45 % ; que la responsabilité de l'ONIAM, qui est subsidiaire, ne saurait de ce fait être engagée, contrairement à ce que soutiennent François Y...et la société CLINIQUE VILLETTE ; que le seuil de 25 % n'est applicable que dans le cas où la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement n'est pas engagée ; que c'est donc à juste titre que cet organisme sollicite sa mise hors de cause » ;
ALORS QU'il résulte des dispositions des articles L. 1142-1-1 et L. 1142-21 du Code de la santé publique que l'ONIAM est seul tenu d'assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation des dommages résultant des infections nosocomiales contractées postérieurement au 1er janvier 2003 et ayant entraîné un taux d'incapacité permanente supérieur à 25 % ; que l'établissement de santé dans lequel l'infection a été contractée peut uniquement, en cas de faute, être appelé à indemniser l'ONIAM dans le cadre d'une action récursoire ou subrogatoire, de tout ou partie des sommes ainsi mises à sa charge ; qu'en affirmant, pour condamner la CLINIQUE VILLETTE à indemniser Monsieur X...du préjudice résultant d'une infection nosocomiale dont elle constatait qu'elle avait été contractée le 12 mars 2003 et avait entraîné une IPP de 45 %, que le seuil de 25 % n'était « applicable que dans le cas où la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement n'est pas engagée », la Cour d'appel a violé les textes susvisés.