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22/05/2013 | FRANCE | N°11-27352

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 mai 2013, 11-27352


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Transports Frigo 7 - Locatex, la société Ajire et la société Goic, respectivement en qualité d'administrateur et de représentant des créanciers de la société Frigo 7 - Locatex, que sur le pourvoi incident relevé par la société Gefco ;
Attendu, selon les arrêts attaqués et les productions, que la société Locatex, devenue la société Transports Frigo 7-Locatex, voiturier, a réalisé des transports à la demande de la société Gefco,

commissionnaire de transport, les parties étant convenues d'une clause d'indexatio...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Transports Frigo 7 - Locatex, la société Ajire et la société Goic, respectivement en qualité d'administrateur et de représentant des créanciers de la société Frigo 7 - Locatex, que sur le pourvoi incident relevé par la société Gefco ;
Attendu, selon les arrêts attaqués et les productions, que la société Locatex, devenue la société Transports Frigo 7-Locatex, voiturier, a réalisé des transports à la demande de la société Gefco, commissionnaire de transport, les parties étant convenues d'une clause d'indexation tarifaire incluant le prix du gazole selon courriers des 21 et 23 juin 2005 ; qu'estimant cette indexation insuffisante, la société Frigo 7 - Locatex a fait assigner en paiement par acte du 11 mars 2008 devant le juge des référés la société Gefco qui a opposé une fin de non-recevoir tirée de la prescription annale de l'article L. 133-6 du code de commerce ; que par ordonnance de référé du 18 avril 2008, l'affaire a été renvoyée au fond ; que la société Transports Frigo 7 - Locatex ayant été mise en redressement judiciaire, la société Ajire a été désignée en qualité d'administrateur et la société Goic en qualité de représentant des créanciers ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa première branche, qui est préalable :
Attendu que la société Gefco fait grief à l'arrêt du 9 mars 2010 d'avoir confirmé le jugement du 22 janvier 2009 en ce qu'il avait rejeté sa demande tendant à voir acquise la prescription annale de l'article L. 133-6 du code de commerce et dit la société Transports Frigo 7 - Locatex bien fondée en sa demande de révision des comptes, alors, selon le moyen, que l'article L. 133-6 du code de commerce énonce, dans son alinéa 1er, que « les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité », tandis qu'il dispose, dans son alinéa 2, que « toutes les autres actions auxquelles ce contrat peut donner lieu, tant contre le voiturier ou le commissionnaire que contre l'expéditeur ou le destinataire, aussi bien que celles qui naissent des dispositions de l'article 1269 du code de procédure civile, sont prescrites dans le délai d'un an » ; qu'ainsi, la réserve « des cas de fraude ou d'infidélité » n'est prévue que pour les actions, limitativement énumérées par l'alinéa 1er, relatives aux avaries, pertes ou retard ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'action de la société Frigo 7 - Locatex relevait de l'alinéa 2 de l'article L. 133-6 du code de commerce ; que pourtant, elle a décidé de faire application à cette action de la réserve « des cas de fraude et d'infidélité » prévue uniquement pour les actions limitativement énumérées par l'alinéa 1 de l'article L. 133-6 du code de commerce ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 133-6 du code de commerce ;
Mais attendu que sont également soumises à la prescription annale, sauf au cas de fraude ou d'infidélité, toutes les autres actions auxquelles le contrat de transport peut donner lieu ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a énoncé que la fraude ou l'infidélité pouvaient faire échec à la prescription annale des actions auxquelles peuvent donner lieu le contrat de transport, aussi bien que celles qui naissent de l'article 1269 du code de procédure civile ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le même moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 133-6 du code de commerce ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt du 9 mars 2010 retient que le mode de révision du prix par les sociétés Gefco et Frigo 7 - Locatex était unilatéral, non concerté et purement potestatif, ce qui suffit à démontrer une dissimulation malicieuse de la part de la société Gefco ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser un cas de fraude ou d'infidélité en présence d'une convention dont elle a relevé qu'elle avait été mise en place d'un commun accord à la demande de la société Frigo 7 - Locatex, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 3222-1 et L. 3222-2 du code des transports ;
Attendu que pour dire que l'indice initial était la moyenne de l'indice retenu par l'expert pour les mois de janvier à avril 2005, l'arrêt du 9 mars 2010 retient que c'est à compter du 23 juin 2005 que s'est concrétisée la volonté commune des parties de changer le mode de tarification de prix fixe en prix révisable, que dès lors les indices pertinents à prendre en compte comme indice de départ sont ceux existant au 1er juin 2005, et que le fait que la loi du 5 janvier 2006 ne soit pas rétroactive n'a pour conséquence que de rechercher à compter de cette date les nouveaux prix applicables pour facturer les prestations sans que soit remise en cause la base tarifaire de la commande de transport, le prix initialement convenu étant révisé de plein droit ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'à défaut de stipulations contractuelles identifiant les charges de carburant, celles-ci devaient, à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 5 janvier 2006, être déterminées, au jour de chaque commande de transport passée en exécution du contrat-cadre liant les parties, par référence au prix du gazole publié par le comité national routier et à la part des charges de carburant dans le prix du transport, telle qu'établie dans les indices synthétiques de ce comité, ce prix étant révisé de plein droit en appliquant aux charges de carburant la variation de l'indice gazole depuis la date de la commande, et non pas des mois de janvier à avril 2005, jusqu'à celle de sa réalisation, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par fausse application et le second par refus d'application ;
Et vu l'article 625 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation de l'arrêt du 9 mars 2010 entraîne l'annulation par voie de conséquence du chef du dispositif de l'arrêt du 22 septembre 2011 condamnant la société Gefco à payer à la société Frigo 7 - Locatex la somme de 122 662,10 euros en principal, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
CONSTATE L'ANNULATION, en toutes ses dispositions, de l'arrêt rendu le 22 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassé et annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les sociétés Transports Frigo 7 Locatex, Ajire et Goic, ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE MOYEN reproche à l'arrêt du 9 mars 2010 :
D'AVOIR dit que l'indice initial sera la moyenne de l'indice retenu par l'expert pour les mois de janvier à avril 2005 ;
AUX MOTIFS QUE « la société Transports Frigo 7-Locatex limite son action aux transports intervenus entre le 1er janvier 2006 et le 31 juillet 2008 ; que si la société Locatex travaillait de longue date avec lu société Gefco, il doit être rappelé que la société Frigo 7 a repris la société Locatex en 2005 ; que dans une lettre du 25 avril 2005 cette société a proposé à la société Gefco la mise en place d'une grille d'indexation carburant ; que le 23 juin 2005 la société Gefco confirmait son accord de principe de prise en charge de la surtaxe gazole qu'elle fixait à 1 % en pied de facture à compter du 1er juin 2005 ; qu'il importe peu que des bases tarifaires aient préexisté pour les différentes lignes de transport exploitées antérieurement, puisque c'est à cette date du 23 juin 2005 que s'est concrétisée la volonté commune des parties de changer le mode de tarification de prix fixe en prix révisable ; qu'ainsi les indices pertinents à prendre en compte comme indice de départ sont ceux existant au 1er juin 2005 ; que le fait que la loi du 5 janvier 2006 ne soit pas rétroactive n'a pour conséquence que de rechercher à compter de cette date les nouveaux prix applicables pour facturer les prestations, sans que soit remise en cause la base tarifaire de la commande de transport, le prix initialement convenu étant révisé de plein droit ; qu'il ressort de la lettre de la société Transports Frigo 7-Locatex du 21 juin 2005 qu'une telle indexation de 1 % en pied de facture correspondait, selon sa grille d'indexation proposée à un prix du mètre cube de gazole à 808 euros, la base 0 couvrant les variations entre 718 et 807 € durant les mois de janvier à avril 2005 ; que les demandes de complément de prix formulées par la société Transports Frigo 7-Locatex sont essentiellement calculées sur une hase de gazole décembre 2003 ; que le montant des sommes restant dues après révision telles que calculées par l'expert doit donc être recalculé sur les bases ainsi déterminées ; qu'il y a donc lieu d'ordonner un complément d'expertise, afin d'actualiser le montant des sommes restant dues à la société Transports Frigo 7-Locatex » ;
1°/ ALORS, d'une part, QU'aux termes de l'article L. 3222-1 du Code des transports, lorsque le contrat de transport mentionne les charges de carburant retenues pour l'établissement du prix de l'opération de transport, le prix de transport initialement convenu est révisé de plein droit pour couvrir la variation des charges liée à la variation du coût du carburant entre la date du contrat et la date de réalisation de l'opération de transport ; qu'aux termes de l'article L. 3222-2 du Code des transports, à défaut de stipulations contractuelles identifiant les charges de carburant dans les conditions définies par l'article L. 3222-1, celles-ci sont déterminées, au jour de la commande de transport, par référence au prix du gazole publié par le comité national routier et à la part des charges de carburant dans le prix du transport, telle qu'établie dans les indices synthétiques du Comité national routier ; qu'aux termes du même texte, le prix du transport initialement convenu est révisé de plein droit en appliquant aux charges de carburant la variation de l'indice gazole publié par le Comité national routier sur la période allant de la date de la commande de l'opération de transport à sa date de réalisation ; et que la révision du prix du transport initialement convenu ne saurait s'opérer sur la base d'une moyenne des indices publiés par le Comité national routier sur une période déterminée, laquelle intègre nécessairement une éventuelle variation à la baisse du coût du carburant ; que l'indice initial à retenir est celui en vigueur à la date de la commande de transport ; qu'en décidant cependant que l'indice initial sera la moyenne de l'indice retenu par l'expert pour les mois de janvier à avril 2005, la Cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
2°/ ALORS, d'autre part et en toutes hypothèses, QUE, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que la Cour d'appel a décidé que l'indice initial sera la moyenne de l'indice retenu par l'expert pour les mois de janvier à avril 2005 ; qu'en relevant d'office cette modalité de révision du prix du transport, sans avoir invité les parties à présenter au préalable leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué du 22 septembre 2011 :
D'AVOIR, réformant le jugement du 30 juillet 2009 et statuant à nouveau, condamné la société GEFCO à payer à la société TRANSPORTS FRIGO 7- LOCATEX la somme de 122.662,10 € en principal ;
AUX MOTIFS QUE « … ; que la Cour, dans son arrêt du 9 mars 2010 prévoyant que l'indexation des prix de transports entre le 1er janvier 2006 et le 31 juillet 2008 serait calculé sur la base d'un indice gazole publié par le comité national routier, a dit que l'indice initial serait la moyenne de l'indice des mois de janvier à avril 2005 ; que les parties s'accordent à reconnaître que l'indice moyen est de 121,20 entre janvier et avril 2005 ; que la société Gefco rapproche cet indice de l'indice 121,2, moyenne janvier à avril 2005 pour en déduire qu'il ne serait dû par celle-ci à la société Frigo 7- Locatex que la somme de 25.888,76 € ; que la société Frigo 7-Locatex critique le calcul de la société Gefco en ce que l'indice applicable serait 103,33 ainsi que l'expert l'aurait déterminé ; que l'expert, dans son rapport du 15 novembre 2010, relève qu'à la suite des travaux qu'il a menés il a pu recueillir contradictoirement les observations des parties ; que cependant, ses travaux ont été arrêtés en l'état dès lors que suite à l'accedit du 12 mai 2010, à l'audience du 21 septembre 2010 devant le conseiller chargé du contrôle des expertises il se trouvait confronté à deux hypothèses: l'une, qu'il nomme « l'indice retenu par la société Gefco », moyenne de janvier à avril 2005 = 121,2, dont il remarque qu'elle permettrait de valider l'absence de pied de facture ; l'autre, qu'il nomme « l'indice retenu par la société Frigo 7 – Locatex », figeant le point de départ à 718 € la tonne de gazole = 103,33, cohérente en ce que les pieds de facture seraient correctement rétablis ; qu'en l'état, le rapport de l'expert a pu établir une analyse circonstanciée de l'augmentation de la charge gazole de la société Frigo 7 - Locatex depuis janvier 2004 , dont le tableau récapitulatif n°2 du 20 mai 2010 permet de connaître depuis décembre 2003 jusqu'à juillet 2008 tant le prix moyen à la tonne de gazole que les indices gazole publiés par le comité national routier ; que l'expert, dans la phase analytique de ses travaux, a recherché le chiffre d'affaire hors indexation de la société Frigo 7 - Locatex, et a pu estimer, sans être contredit par l'une ou l'autre des parties, la part réelle de gazole supportée par la société Frigo 7 - Locatex selon des ratios nationaux reconnus par le comité national routier ; qu'à la suite de cette recherche, il a déterminé l'augmentation de la charge gazole supportée par la société Frigo 7 - Locatex depuis 2004, en prenant en compte depuis décembre 2003 le coût réel du carburant sur la base des indications du comité national routier ; que la cour, dans son arrêt du 9 mars 2010, a précisément fixé la méthode de révision des comptes entre les parties pour la période du 1er janvier 2006 au 31 juillet 2008 ; qu'elle a notamment dit que l'indexation des prix des transports sur cette période serait calculée sur la base des indices publiés, l'indice initial dans la formule de révision applicable étant la moyenne des indices des mois de janvier à avril 2005 ; que la Cour a pu vérifier que l'expert, en mesurant l'impact de l'évolution du gazole sur le chiffre d'affaires, s'est basée sur toute la période allant de janvier 2004 à juillet 2010 sur les valeurs initiales de prix du gazole et des indices CNR telles que fixées en décembre 2003 ; qu'il convient donc, sur la base des volumes d'activités relevés par l'expert, de rechercher l'augmentation effective de la part gazole depuis le 1er janvier 2006 au 31 juillet 2006, l'indice initial étant fixé à 121,20, auquel correspond un prix de gazole de 808 euros le m3, et en déduire au mois le mois les augmentations de gazole supportées par la société Frigo 7 – Locatex ; que ces augmentations ont été de 314,726,36 € en 2006, 360.460,19 € en 2007 et 565.181,68 euros sur le premier semestre de 2008 ; que, sur les mêmes périodes, la société Gefco a compensé cette surcharge gazole par des « hausses en pied de facture », méthode dont le caractère potestatif a été suffisamment relevé dans l'arrêt du 9 mars 2010 ; qu'il ressort du rapport d'expertise que ces sommes étaient respectivement de 294.716,91 €, 298.032,52 € et 524.956,71 € ; que les sommes alors versés à la société Frigo7 - Locatex viennent en déduction des sommes allouées au titre de la révision tarifaire précédente, qu'après compensation il reste dû à la société Frigo 7 - Locatex une somme de 122.662,10 € » ;
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer luimême le principe de la contradiction ; que, dans les conclusions de son rapport, l'expert avait retenu les deux hypothèses suivantes (p. 26) : « 1°) dans l'hypothèse de « l'indice retenu par GEFCO : moyenne de janvier à avril 2005 = 121.20 », aucune indexation gazole ne serait due, validant de facto l'absence de pied de factures sur la période de janvier 2006 à juillet 2008 au préjudice quasiment total de la société Frigo 7-Locatex. Il ne serait dû que 25.888,76 € au lieu et place des 1.804.604,98 €. Si ce montant est positif, cela provient des lignes Sochaux et Courbevoie pour lesquelles, je le précise, il n'y avait pas d'indexation réelle gazole en pied de factures et les augmentations de tarifs n'obéissaient quasiment pas à une formule claire et nette. Je rappelle que les pieds de factures qui étaient des « indexations » étaient en fait des « substituts » de prix, un « déguisement » de prix. Ces derniers ne peuvent en aucun cas être validés comme de véritables indexations gazole tels que calculés par mes soins et arrêtés à 1.804 650,98 € (cf. la section A de ce présent Chapitre plus haut). Cette hypothèse ne peut pas être validée. 2°) dans l'hypothèse de l'« indice retenu par Frigo 7 – Locatex : point de départ à 718 € la tonne de gazole = 103,33 » GEFCO serait redevable de 1.336 597,99 € au lieu et place de 1.804.650,98 €. Cette hypothèse est cohérente et peut être validée » ; qu'en retenant cependant une modalité de calcul de la révision du prix du transport litigieux pour aboutir à une somme différente de celles retenues par l'expert, sans avoir invité les parties à présenter au préalable leurs observations, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Gefco.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué du 9 mars 2010 d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la Société GEFCO de sa demande tendant à voir acquise la prescription annale de l'article L. 133-6 du Code de commerce et dit la Société TRANSPORTS FRIGO7-LOCATEX bien fondé en sa demande de révision des comptes à l'égard de la Société GEFCO ;
AUX MOTIFS QU' « que l'article L.133-6 du Code de commerce instaure une prescription annale pour les actions engagées à l'encontre du voiturier pour avaries, pertes ou retard sans préjudice des cas de faute (sic) ou d'infidélité ; Qu'il étend cette prescription à toutes les autres actions auxquelles le contrat de transport peut donner lieu, tant contre le voiturier ou le commissionnaire que contre l'expéditeur ou le destinataire ; Que cette prescription a été étendue à celle des actions qui naissent des dispositions de l'article 1269 du Code de procédure civile ; Que ce dernier article prévoit qu'aucune demande en révision de compte n'est recevable, sauf si elle est présentée en cas d'erreur, d'omission ou de présentation inexacte ; Que l'action engagée par la Société FRIGO7-LOCATEX est bien une action en révision des comptes au sens de l'article 1269, en ce que celle-ci tend à voir dire que l'ensemble des factures émises au titre des diverses opérations de transport confiées par la Société GEFCO à la société FRIGO7-LOCATEX depuis le 1er janvier 2006 sont entachées d'erreur de calcul par fausse application des dispositions régissant la répercussion des variations du prix du gazole au regard des dispositions règlementaires applicables ; Que la société GEFCO soutient que le tribunal a écarté la prescription annale en retenant l'argument de la fraude invoquée par l'intimé, alors que l'article L. 133-6 du Code de commerce réserve l'exception de la fraude ou de l'infidélité aux seuls cas visés dans le premier alinéa de l'article précité, à savoir les avaries, pertes ou retard ; Que cependant l'exception de fraude ou d'infidélité pour écarter la rigueur de la prescription annale concerne non seulement les actions contre le transporteur telles qu'énoncées au premier alinéa de l'article précité mais aussi toutes autres actions auxquelles le contrat de transport peut donner lieu entre les divers intervenants impliqués dans ce contrat, en ce compris les actions énumérés dans l'article 1269 du Code de procédure civile ; Que les critères de la fraude ou de l'infidélités visée dans l'article L.133-6 du Code de commerce ne sauraient être ceux de la faute inexcusable équipollente au dol de l'article L. 133-8 du Code de commerce, agissant directement sur la responsabilité de l'intervenant de transport concerné, mais sont suffisamment qualifiés en présence d'une volonté malveillante, d'une déloyauté ou d'une dissimulation malicieuse ; Que pour déterminer si ces critères d'exclusion de la prescription annale sont susceptibles d'être remplis, il convient d'examiner si le mécanisme de formation des prix instauré entre la Société GEFCO et la Société FRIGO7-LOCATEX traduit de la part de la Société un tel comportement ; Qu'il faut préalablement rappeler que la Société LOCATEX est de longue date partenaire de la Société GEFCO ; Que la rentabilité du transport routier est très sensiblement influencé par l'évolution du prix du gazole, principal intrant dans la structure des coûts du transporteur ; Qu'une loi du 5 janvier 2006 a instauré une révision de plein droit des charges de carburant ; Que la société GEFCO soutient avoir, préalablement à cette disposition législative, pris des dispositions pour répercuter l'évolution du prix du gazole auprès de ses prestataires de transport ; Que dans un courrier adressée à la société GEFCO le 25 avril 2005, la Société FRIGO7-LOCATEX aborde parmi les problèmes concernant la reprise de la société LOCATEX le point crucial des coûts du carburant et joint une proposition d'indexation selon une grille qu'elle propose ; Que la Société GEFCO dans son contrat type sous-traitance transport retient dans son article 12 que ces conditions tarifaires seront renégociés une fois par an en prenant en compte un ajustement éventuel de la variation du coût du gazole dans les prix de la prestation, ajoutant qu'en cas de variation significative du coût du gazole dans les prix de la prestation depuis le début du contrat ou de la dernière révision du prix une proposition devra être formulée au voiturier pour tenir compte de cette variation ; Que le 23 juin 2005, la Société GEFCO, confirmant son accord des prise en charge de la surtaxe gazole a prévu une bonification d'un montant de 1% en pied de facture ; Que dans la lettre du 13 décembre 2007 la société GEFCO rappelle avoir mis en place dès septembre 2005 une hausse en pied de facture tenant compte de l'évolution des prix du carburant ; Que ces hausses pied de facture sont déterminés par la société GEFCO seule, au moment où elle estime qu'il y a eu une variation significative du coût du gazole, et sans qu'elle informe en quelque façon que ce soit les transporteurs des paramètres de révision qu'elle applique ; Que ceux-ci sont dans l'impossibilité de vérifier le montant de la hausse qui leur est consenti en l'absence d'éléments de calcul tels que la pondération du coût du carburant dans le prix de la prestation ou les indices synthétiques du CNR qu'elle a retenus pour fixer le pourcentage qu'elle accorde à ses prestataires ; Que ce mécanisme de révision du prix, purement potestatif suffit à qualifier une dissimulation malicieuse ; qu'il y a lieu de confirmer la décision déférée, qui a rejeté l'exception de prescription soulevée par la société GEFCO » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « GEFCO soutient qu'il convient d'appliquer la prescription annale de l'action usuelle en matière de transport ; Que l'article L.1336-6 du Code de commerce dispose que Les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité. Toutes les autres actions auxquelles ce contrat peut donner lieu, tant contre le voiturier ou le commissionnaire que contre l'expéditeur ou le destinataire, aussi bien que celles qui naissent des dispositions de l'article 1269 du code de procédure civile, sont prescrites dans le délai d'un an ; Que l'assignation en référé, interruptive de prescription a été délivrée le 11 mars 2008 ; Que le tribunal dira recevable la demande de GEFCO ; Que toutefois, ce même article dispose que la prescription annale ne vaut pas en cas de fraude ou d'infidélité ; Que pour la part non négligeable qui dépendait de son bureau de Courbevoie, GEFCO s'est abstenue d'appliquer la loi en n'appliquant pas la moindre indexation jusqu'en décembre 2007 ; Que plus généralement il apparaît à la lecture des pièces que GEFCO a appliqué une politique unilatérale et non concertée d'octroi d'augmentations en pied de facture ; Qu'elle a ainsi contrevenu à la loi ; Qu'elle a généré un manque à gagner considérable en faveur d'abord de LOCATEX, qui a de ce fait perdu son indépendance en se faisant racheter par FRIGO7, puis de FRIGO7-LOCATEX, plongeant cette dernière dans de très sérieuses difficultés financières ; Que ce comportement présente un caractère à la fois déloyal sur le fondement de l'article 1134 du Code civil et frauduleux par défaut d'application de la loi du 5 janvier 2006 ; Que l'article L. 133-6 dispose que les actions sont prescrites sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélités ; Qu'en conséquence le tribunal dira que la prescription annale usuelle en matières de transport ne s'appliquera pas, que la relation contractuelle s'inscrira dans le cadre de la prescription décennale de droit commun et que le calcul de l'indexation basé sur l'indice CNR de décembre 2003 s'appliquera à toutes les prestations de transports de lignes régulières effectuées par FRIGO7-LOCATEX pour GEFCO postérieures au janvier 2006 » ;
1) ALORS QUE l'article L. 133-6 du Code de commerce énonce, dans son alinéa 1er, que « les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité », tandis qu'il dispose, dans son alinéa 2, que « toutes les autres actions auxquelles ce contrat peut donner lieu, tant contre le voiturier ou le commissionnaire que contre l'expéditeur ou le destinataire, aussi bien que celles qui naissent des dispositions de l'article 1269 du code de procédure civile, sont prescrites dans le délai d'un an » ; Qu'ainsi, la réserve « des cas de fraude ou d'infidélité » n'est prévue que pour les actions, limitativement énumérées par l'alinéa 1, relatives aux avaries, pertes ou retard ; Qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que l'action de la Société FRIGO7-LOCATEX relevait de l'alinéa 2 de l'article L. 133-6 du Code de commerce ; Que pourtant, elle a décidé de faire application à cette action de la réserve « des cas de fraude et d'infidélité » prévue uniquement pour les actions limitativement énumérées par l'alinéa 1 de l'article L. 133-6 du Code de commerce ; Qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article L. 133-6 du Code de commerce ;
2) ALORS QUE, à supposer que la réserve des cas de fraude et d'infidélité s'applique à toutes les actions de l'article L. 133-6 du Code de commerce, la fraude ou l'infidélité s'entend d'un comportement qui met une partie dans l'impossibilité de faire valoir ses droits en temps utile ; Qu'en l'espèce, pour décider d'appliquer la réserve des cas de fraude et d'infidélité, la Cour d'appel a estimé par motifs propres et adoptés que le mode de révision du prix mis en place d'un commun accord par les Sociétés GEFCO et FRIGO7-LOCATEX était « unilatérale et non concertée », et que ce mode de révision, « purement potestatif », suffisait à démontrer une « dissimulation malicieuse » de la part de la Société GEFCO ; Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à démontrer que la Société GEFCO avait mis la Société FRIGO7-LOCATEX dans l'impossibilité de faire valoir ses droits en temps utile, de sorte que la Société GEFCO aurait fait preuve de fraude ou d'infidélité, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 133-6 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-27352
Date de la décision : 22/05/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

TRANSPORTS ROUTIERS - Marchandises - Prescription - Prescription annale (article L. 133-6 du code de commerce) - Exception - Fraude ou infidélité - Domaine d'application - Cas - Caractérisation nécessaire

Se détermine par des motifs impropres à caractériser un cas de fraude ou d'infidélité, la cour d'appel qui, en présence d'une convention dont elle a relevé qu'elle avait été mise en place d'un commun accord à la demande d'un contractant, retient qu'une stipulation démontrait une dissimulation malicieuse de la part de l'autre contractant


Références :

Sur le numéro 1 : article L. 133-6, alinéas 1 et 2, du code de commerce
Sur le numéro 2 : article L. 133-6 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 22 septembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 mai. 2013, pourvoi n°11-27352, Bull. civ. 2013, IV, n° 88
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 88

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Pénichon
Rapporteur ?: M. Lecaroz
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.27352
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