LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 avril 2012), statuant sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 15 juin 2010, n° 09-67.290), que la société de droit britannique Millbrook, dont le siège est à Londres, est titulaire de 180 des 200 parts de la société Anemos, elle-même propriétaire d'un bien situé à Antibes ; que la société Millbrook a déposé le 22 janvier 2001 des déclarations au titre de la taxe de 3% sur les immeubles possédés en France par des personnes morales, pour les années 1990 à 2000, en sollicitant son exonération en application de l'article 990 E du code général des impôts; que, les déclarations étant incomplètes, l'administration fiscale lui a adressé le 10 novembre 2004 une proposition de rectification remettant en cause l'exonération pour les années 1995 à 2000 ; que les impositions ont été mises en recouvrement, à l'encontre de la société Millbrook, puis de la société Anemos qui, après rejet de ses réclamations, a saisi le tribunal de grande instance afin d'obtenir le dégrèvement des impositions mises à sa charge ;
Attendu que la société Anemos fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen :
1°) qu' en se référant, pour déclarer l'appel recevable, à l'article L. 199 alinéa 2 du livre des procédures fiscales, qui ne détermine pas l'autorité compétente pour faire appel dans les matières qu'il concerne, ainsi qu'à la circonstance que le tribunal était saisi d'une demande d'annulation d'une décision du directeur des services fiscaux, ce qui n'impliquait pas la compétence de cette autorité pour faire appel, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, privant ainsi son arrêt de base légale au regard des articles R. 202-2 et suivants du livre des procédures fiscales ;
2°) que devant la cour d'appel statuant en matière de contentieux fiscal d'assiette, l'Etat est représenté par le ministre ; qu'en ne déclarant pas irrecevable l'appel formé par «La direction générale des impôts. Direction des services fiscaux des Alpes Maritimes – Division des affaires juridiques et législatives – représentée par son directeur en exercice domicilié en cette qualité en ses bureaux sis 3-5 avenue Durante 06046 Nice», lequel appel n'émanait donc pas du ministre, la cour d'appel a méconnu le principe suivant lequel le ministre est compétent, en toutes matières, pour faire appel au nom de l'Etat et a violé les articles R. 202-2 et suivants du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que, dans les instances engagées en vertu de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales, les agents de la direction générale des Impôts territorialement compétents agissent en qualité de représentant de l'Etat, partie à ces instances ; qu'ayant relevé que l'appel formé par le directeur des services fiscaux des Alpes-Maritimes avait pour but de faire réformer le jugement ayant annulé, à la demande de la société Anemos, la procédure de rectification engagée par les services fiscaux qu'il dirigeait, ce dont il résulte que ce directeur était recevable à faire appel, la cour d'appel, sans méconnaître aucun texte, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le second moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Anemos aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour la société Anemos
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
La SCI Anemos fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes.
AUX MOTIFS QUE la réclamation a été portée devant le directeur des services fiscaux, supérieur hiérarchique des agents de l'administration fiscale et non devant le ministre du budget.Le tribunal de grande instance était saisi d'une assignation aux fins d'annulation de la décision de rejet du directeur des services fiscaux en date du 4 octobre 2006.Cette décision de rejet répondait â une double réclamation :- -en restitution d'un trop versé de 535.906,92€ au titre de la solidarité de la SCI ANEMOS pour la taxe de 3% de l'article 990 D. du code général des impôts pour les années 1990 à 2000, à la suite d'un dégrèvernent pour vice de forme de l'imposition mise à la charge de la société Millbrooks Estates,- en contestation de la taxe de 3 % de l'article 990 D. du code général des impôts due par la société Millbrook Estates pour les années 1995 à 2000, demandée â titre solidaire à la SCI ANEMOS.Le contentieux est relatif à une taxe de la nature de celles visées à l'article L. 199 alinéa deux du livre des procédures fiscales.C'est le directeur des services fiscaux compétent, correspondant aujourd'hui au directeur général des finances publiques, en l'occurrence celui des services fiscaux des Alpes- Maritimes qui avait seul compétence pour former une déclaration d'appel de ce jugement.L'appel est recevable.
ALORS QU'en se référant, pour déclarer l'appel recevable, à l'article L.199 alinéa 2 du livre des procédures fiscales, qui ne détermine pas l'autorité compétente pour faire appel dans les matières qu'il concerne, ainsi qu'à la circonstance que le tribunal était saisi d'une demande d'annulation d'une décision du directeur des services fiscaux, ce qui n'impliquait pas la compétence de cette autorité pour faire appel, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, privant ainsi son arrêt de base légale au regard des articles R. 202-2 et suivants du livre des procédures fiscales.
ALORS QUE devant la cour d'appel statuant en matière de contentieux fiscal d'assiette, l'Etat est représenté par le ministre ; qu'en ne déclarant pas irrecevable l'appel formé par «La direction générale des impôts. Direction des services fiscaux des Alpes Maritimes – Division des affaires juridiques et législatives – représentée par son directeur en exercice domicilié en cette qualité en ses bureaux sis 3-5 avenue Durante 06046 NICE», lequel appel n'émanait donc pas du ministre, la cour d'appel a méconnu le principe suivant lequel le ministre est compétent, en toutes matières, pour faire appel au nom de l'Etat et a violé les articles R. 202-2 et suivants du livre des procédures fiscales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
La SCI Anemos fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes.
AUX MOTIFS QUE la SCI ANEMOS estime que la créance du Trésor public est prescrite par application des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales pour défaut de poursuite pondant quatre années consécutives à partir du jour de la mise en recouvrement.Les deux avis de mise en recouvrement édités à l'encontre de la SCI ANEMOS l'ont été le 30 mai 2006, soit l'avis de mise en recouvrement n° 2006 M 05 A pour les années 1995 à 1997, pour 164 377 € de droits, 127 738 € de pénalités et 1 265 € de frais de justice, et l'avis de mise en recouvrement n° 2006 M 05 B pour les années 1998 à 2000, pour 155 304 € de droits et 75 970 € de pénalités.Un avis à tiers détenteur a été effectué sur cette base par l'administration fiscale.A la suite du jugement du 15 février 2008, l'administration fiscale a formé appel le 10 mars 2008. Cet appel a interrompu le délai de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales.L'administration fiscale a formé une déclaration de saisine après cassation le 20 janvier 2011, et l'a dénoncée le 8 février 2011 au représentant de la SCI ANEMOS, ce qui a encore interrompu ce délai,La mainlevée le 28 décembre 2010 par l'administration fiscale de l'avis à tiers détenteur Crédit du Nord pour la somme de 522 654,89 € ne signifie pas abandon de poursuite par l'administration fiscale alors que celle-ci était toujours détentrice de la somme de 535 906,92 €, sur laquelle pouvait été décomptée celle de 522 654,89 €.La créance du Trésor public sur la SCI ANEMOS n'est pas prescrite.
1°/ ALORS QUE la prescription, lorsqu'elle a commencé à courir, est suspendue par l'impossibilité du créancier d'agir en recouvrement de sa créance pour ne reprendre son cours qu'à la cessation de cette impossibilité ; qu'en jugeant que le cours de la prescription de l'action en recouvrement avait été interrompu par l'appel formé par l'administration contre le jugement ayant déclaré irrégulière la procédure d'imposition litigieuse, lequel en rendant impossible la poursuite de l'action en recouvrement, en suspendait le délai de prescription sans effacer le délai déjà couru, la cour d'appel, qui a attribué à l'acte d'appel un effet interruptif qu'il ne pouvait légalement comporter a violé les articles 2230, 2234 et 2240 et suivants du code civil.
2°/ ALORS QUE l'arrêt de cassation ne rend à nouveau exécutoire le jugement annulé par l'arrêt cassé qu'à compter de sa signification ; que dès lors en jugeant que le cours de la prescription avait à nouveau été interrompu par le dénoncé, par l'administration, de sa déclaration de saisine de la juridiction de renvoi, alors que le cours de la prescription, qui avait repris par l'effet de la signification de l'arrêt de la cour d'appel ne pouvait être à nouveau suspendu que par l'effet de la signification de l'arrêt de la Cour de cassation restituant ses effets au jugement de première instance, la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'une telle signification ait été effectuée et a attribué au dénoncé de la saisine de la juridiction de renvoi un effet interruptif qu'il ne pouvait légalement comporter, a violé ensemble les articles 503 du code de procédure civile et 2230, 2234 et 2240 et suivants du code civil.