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24/04/2013 | FRANCE | N°12-11825

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 avril 2013, 12-11825


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 16 novembre 2011), que M. X... a été engagé par la société Gazocéan à compter du 1er février 2001, en qualité de directeur général adjoint, avec une période d'essai de trois mois et un stage de six mois, pendant lesquels les parties disposaient de la faculté de se délier sans préavis pendant le premier mois et moyennant un préavis d'un mois au-delà ; que nommé le 29 juin 2001, directeur général, par délibération du conseil d'adminis

tration de la société, M. X... a été révoqué de son mandat le 11 mars 2009 ; q...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 16 novembre 2011), que M. X... a été engagé par la société Gazocéan à compter du 1er février 2001, en qualité de directeur général adjoint, avec une période d'essai de trois mois et un stage de six mois, pendant lesquels les parties disposaient de la faculté de se délier sans préavis pendant le premier mois et moyennant un préavis d'un mois au-delà ; que nommé le 29 juin 2001, directeur général, par délibération du conseil d'administration de la société, M. X... a été révoqué de son mandat le 11 mars 2009 ; que par lettre du 13 mars suivant, la société a mis fin au contrat de travail en invoquant la rupture de la période " probatoire " ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour voir dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui verser diverses sommes au titre de la rupture ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que la rupture, notifiée le 13 mars 2009 par l'employeur, est intervenue en période d'essai et de le débouter de ses demandes en paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'est déraisonnable au regard de la finalité de la période d'essai et de l'exclusion des règles du licenciement durant cette période la période probatoire de neuf mois imposée par la convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation du 20 février 1951 à l'ensemble du personnel d'encadrement ; qu'en déboutant M. X..., embauché en qualité de directeur général adjoint par contrat du 1er février 2001, de ses demandes en paiement de dommages-intérêts et d'indemnités de rupture, motif pris de ce " qu'au regard du niveau de l'emploi occupé " cette période " n'excédait pas une durée raisonnable ", la cour d'appel a violé les principes posés par la Convention internationale n° 158 sur le licenciement du 28 juin 1982, ensemble l'article 11 de la convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation libre ;
2°/ que la période d'essai a pour but de permettre l'appréciation des qualités du salarié ; que l'employeur qui, au cours de l'exécution de la période d'essai d'un salarié embauché en qualité de directeur général adjoint, lui confie un mandat de directeur général et l'investit ainsi des pouvoirs les plus étendus dans la direction et la représentation de l'entreprise, reconnaît nécessairement que l'essai en tant que directeur général adjoint a été concluant et met ainsi fin à ce dernier ; qu'en décidant, le 29 juin 2001, de confier à M. X..., salarié recruté en qualité de directeur général adjoint le 1er février 2001 avec une période d'essai de neuf mois, un mandat de directeur général l'investissant, selon les propres constatations de la cour d'appel, " des pouvoirs les plus étendus ", la société Gazocéan avait nécessairement mis fin, au bout de cinq mois, à l'essai qu'elle avait jugé concluant ; qu'en considérant que la rupture, en date du 13 mars 2009, du contrat de travail de M. X..., dont le mandat de directeur général avait été révoqué le 11 mars 2009, était intervenue en cours de période d'essai, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du code civil et L. 1231-1 du code du travail ;
3°/ que subsidiairement, la suspension du contrat de travail de M. X..., salarié engagé en qualité de directeur général adjoint, en conséquence de sa nomination aux fonctions de directeur général au titre d'un mandat social révocable ad nutum dont l'exécution, selon la cour d'appel, avait permis à l'employeur d'apprécier pleinement ses capacités professionnelles, n'avait pas emporté suspension de la période d'essai ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1221-19 du code du travail ;
4°/ que l'article 11 de la convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation du 20 février 1951 prévoit une période d'essai de trois mois suivie d'une période de stage qui, pour les cadres, peut atteindre six mois ; que selon ces mêmes dispositions conventionnelles qui, moins favorables que la loi, doivent faire l'objet d'une interprétation restrictive, " les périodes de maladie n'entrent pas dans la durée du stage " ; qu'en déduisant de la durée du stage de M. X... la période de huit ans pendant laquelle le salarié, recruté en qualité de directeur général adjoint, avait exercé un mandat social dans l'entreprise la cour d'appel, qui a autorisé la prolongation du stage pour une cause non prévue, a violé la stipulation susvisée ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a exactement retenu que la durée de neuf mois de la période d'essai prévue par la convention collective pour le personnel d'encadrement était raisonnable ;
Attendu, ensuite, que la désignation du salarié comme mandataire social, avec suspension du contrat de travail pendant la durée de ce mandat, en l'absence de fonctions techniques distinctes, ne mettant pas fin à la période d'essai en cours, la cour d'appel en a déduit à bon droit que celle-ci avait repris son cours après la révocation du mandat social ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la rupture notifiée le 13 mars 2009 par la Société Gazocéan à Monsieur X..., du contrat de travail conclu entre eux le 1er février 2001 était intervenue en période d'essai et débouté en conséquence Monsieur X... de ses demandes tendant à la condamnation de son employeur au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés, d'une indemnité compensatrice de préavis, d'une indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE " Monsieur Yves X... a été engagé par la Société Gazocéan à compter du 1er février 2001, en qualité de directeur général adjoint, par contrat à durée indéterminée prévoyant, conformément à la Convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation libre, une période probatoire de neuf mois comportant une période d'essai de trois mois et un stage de six mois, les parties disposant pendant cette période de la faculté de se délier sans préavis pendant le premier mois et moyennant un préavis réciproque d'un mois au-delà du premier mois ; que nommé directeur général par délibération du conseil d'administration de la Société le 29 juin 2001, Monsieur X... a été révoqué de son mandat de directeur général par délibération du 11 mars 2009 ; que par lettre recommandée avec avis de réception du 13 mars 2009, la Société Gazocéan a mis fin à son contrat de travail en invoquant la rupture en période probatoire, celle-ci ne lui ayant pas donné satisfaction (…) ;
QU'il résulte du procès-verbal de délibération du 29 juin 2001 qu'en application des dispositions de la loi du 15 mai 2001, le conseil d'administration de la SA Gazocéan a décidé de dissocier les fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général, le président du conseil d'administration élu ayant pour fonction de représenter le conseil d'administration dont il organise et dirige les travaux, veiller au bon fonctionnement des organes de la société et s'assurer que les administrateurs sont en mesure de remplir leur mission et le directeur général assumant, sous sa responsabilité, la direction de la société et la représentation de la société vis à vis des tiers ; que le même procès-verbal mentionne que le conseil d'administration a décidé que le contrat de travail de Monsieur X... était suspendu durant toute la période pendant laquelle il exercerait ses fonctions de directeur général de la société ; que Monsieur X... ne peut, dès lors, sérieusement faire valoir que son contrat de travail n'aurait subi aucune modification ni que ses pouvoirs et missions n'auraient jamais été précisés alors qu'en qualité de directeur général, il était investi des pouvoirs les plus étendus ; (…) que Monsieur X... ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce qu'il serait resté dans un lien de subordination, étant observé qu'il ne prétend pas avoir exercé au sein de l'entreprise des fonctions techniques relevant d'un contrat de travail qui aurait pu se cumuler avec son mandat social (…) ;
QUE sur la rupture du contrat de travail, … la suspension du contrat de travail par la désignation de Monsieur X... en qualité de directeur général, titulaire d'un mandat social, le 29 juin 2001, a entraîné ipso facto la suspension de la période de stage en cours ; que, de même, le contrat de travail ayant repris ses effets après qu'il a été mis fin au mandat social de Monsieur X... le 11 mars 2009, force est de constater que la période de stage qu'il comportait, demeurait inachevée ;
QU'il résulte du contrat de travail comme de la convention collective du Personnel Sédentaire des Entreprises de Navigation Libre à laquelle il se réfère expressément, que la période d'essai de trois mois, suivie d'une période de stage de six mois, constitue une période probatoire de neuf mois au cours de laquelle les règles du licenciement ne sont pas applicables et qui, eu égard au niveau de l'emploi occupé par Monsieur X..., n'excède pas une durée raisonnable ;
QUE la société, qui n'invoque aucune faute à l'encontre de Monsieur X..., n'avait pas davantage à respecter les dispositions de l'article 19 bis de la convention collective prescrivant la consultation d'une commission de discipline paritaire avant l'entretien préalable à toute sanction disciplinaire ;
QUE cependant … si la société pouvait ainsi mettre fin aux relations contractuelles avant l'expiration de la période probatoire, ce n'était que sous réserve de ne pas faire dégénérer ce droit en abus ; qu'en l'espèce, en décidant, le 11 mars 2009, immédiatement après avoir décidé de la révocation de son mandat social et constaté que cette révocation faisait revivre son contrat de travail, de rompre le contrat de travail de Monsieur X... en mettant fin à la période probatoire contractuelle qui ne lui aurait pas donné satisfaction, le conseil d'administration de la SA Gazocéan, qui avait pu évaluer ses capacités professionnelles depuis plus de huit années, a agi avec une légèreté blâmable ; que cette rupture abusive de la période de stage, qui ne donne pas lieu à application des règles et indemnités prévues en matière de licenciement, ouvre droit pour Monsieur X... à des dommages intérêts que la cour fixe à 15 000 euros au regard de l'ancienneté du contrat de travail, du préjudice invoqué et des justifications produites " ;
1°) ALORS QU'est déraisonnable au regard de la finalité de la période d'essai et de l'exclusion des règles du licenciement durant cette période la période probatoire de neuf mois imposée par la Convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation du 20 février 1951 à l'ensemble du personnel d'encadrement ; qu'en déboutant Monsieur X..., embauché en qualité de directeur général adjoint par contrat du 1er février 2001, de ses demandes en paiement de dommages et intérêts et d'indemnités de rupture, motif pris de ce " qu'au regard du niveau de l'emploi occupé " cette période " n'excédait pas une durée raisonnable ", la Cour d'appel a violé les principes posés par la Convention internationale n° 158 sur le licenciement du 28 juin 1982, ensemble l'article 11 de la Convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation libre ;
2°) ALORS en toute hypothèse QUE la période d'essai a pour but de permettre l'appréciation des qualités du salarié ; que l'employeur qui, au cours de l'exécution de la période d'essai d'un salarié embauché en qualité de directeur général adjoint, lui confie un mandat de directeur général et l'investit ainsi des pouvoirs les plus étendus dans la direction et la représentation de l'entreprise, reconnait nécessairement que l'essai en tant que directeur général adjoint a été concluant et met ainsi fin à ce dernier ; qu'en décidant, le 29 juin 2001, de confier à Monsieur X..., salarié recruté en qualité de directeur général adjoint le 1er février 2001 avec une période d'essai de neuf mois, un mandat de directeur général l'investissant, selon les propres constatations de la Cour d'appel, " des pouvoirs les plus étendus ", la Société Gazocéan avait nécessairement mis fin, au bout de cinq mois, à l'essai qu'elle avait jugé concluant ; qu'en considérant que la rupture, en date du 13 mars 2009, du contrat de travail de Monsieur X..., dont le mandat de directeur général avait été révoqué le 11 mars 2009, était intervenue en cours de période d'essai la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du Code civil et L. 1231-1 du Code du travail ;
3°) ALORS très subsidiairement QUE la suspension du contrat de travail de Monsieur X..., salarié engagé en qualité de directeur général adjoint, en conséquence de sa nomination aux fonctions de directeur général au titre d'un mandat social révocable ad nutum dont l'exécution, selon la Cour d'appel, avait permis à l'employeur d'apprécier pleinement ses capacités professionnelles, n'avait pas emporté suspension de la période d'essai ; qu'en décidant le contraire la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1221-19 du Code du travail.
4°) ALORS enfin et en toute hypothèse QUE l'article 11 de la Convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation du 20 février 1951 prévoit une période d'essai de trois mois suivie d'une période de stage qui, pour les cadres, peut atteindre six mois ; que selon ces mêmes dispositions conventionnelles qui, moins favorables que la loi, doivent faire l'objet d'une interprétation restrictive, " les périodes de maladie n'entrent pas dans la durée du stage " ; qu'en déduisant de la durée du stage de Monsieur X... la période de huit ans pendant laquelle le salarié, recruté en qualité de directeur général adjoint, avait exercé un mandat social dans l'entreprise la Cour d'appel, qui a autorisé la prolongation du stage pour une cause non prévue, a violé la stipulation susvisée.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-11825
Date de la décision : 24/04/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Période d'essai - Durée - Durée raisonnable - Cas

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Période d'essai - Suspension - Cas - Désignation du salarié comme mandataire social - Effets - Poursuite de la période d'essai après révocation du mandat social - Conditions - Détermination STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation libre du 20 février 1951 - Article 11 - Essai et stage avant titularisation - Période d'essai du personnel d'encadrement - Durée raisonnable - Détermination - Portée

Une cour d'appel a exactement retenu qu'était raisonnable la durée de neuf mois de la période d'essai prévue pour l'ensemble du personnel d'encadrement, par la convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation libre du 20 février 1951 et a déduit à bon droit que la désignation du salarié comme mandataire social, avec suspension du contrat de travail pendant la durée de ce mandat, en l'absence de fonctions techniques distinctes, ne mettait pas fin à la période d'essai en cours qui avait repris son cours après la révocation du mandat social


Références :

article 11 de la convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation libre du 20 février 1951

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 16 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 avr. 2013, pourvoi n°12-11825, Bull. civ. 2013, V, n° 110
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, V, n° 110

Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : Mme Taffaleau
Rapporteur ?: Mme Wurtz
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.11825
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