LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, ordonne la jonction des pourvois n° G 12-13. 326 et M 12-13. 329 ;
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 2 du code civil, ensemble l'article 333, alinéa 2, du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 15 août 1995 ; que Mme Y... a donné naissance à deux enfants, le 30 novembre 1998 et le 25 septembre 2000 ; que le divorce des époux a été prononcé le15 septembre 2009 ; que, le 4 février 2009, Mme Y... a saisi le tribunal de grande instance de deux actions en contestation de paternité concernant les deux enfants ; que ses demandes ont été rejetées par jugements du 18 novembre 2009 ;
Attendu que, pour déclarer irrecevables les actions en contestation de paternité engagées par Mme Y..., les arrêts retiennent que les enfants ont une possession d'état conforme au titre depuis leur naissance, soit depuis plus de cinq ans ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 était entrée en vigueur le 1er juillet 2006, de sorte que le délai de cinq ans prévu par l'alinéa 2 de l'article 333 du code civil courait à compter de cette date, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 7 avril 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour Mme Y... (demanderesse au pourvoi n° G 12-13. 326).
Il est fait grief à la Cour d'appel d'avoir déclaré irrecevable l'action en contestation de paternité intentée par Madame Pascale Y... comme étant prescrite et débouté celle-ci de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« aux termes de l'article 333 du Code civil, lorsque la possession d'état est conforme au titre, seuls peuvent agir l'enfant, l'un de ses père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable. L'action se prescrit par cinq ans à compter du jour où la possession d'état a cessé ou du décès du parent dont le lien de filiation est contesté ; que l'enfant est née le 30/ 11/ 1998 alors que ses parents étaient mariés depuis trois ans ; qu'Angélique porte le nom de son père avec lequel elle a vécu jusqu'à ce que sa mère quitte le domicile conjugal en 2008 ; qu'Angélique, comme d'ailleurs son frère, ont une possession d'état conforme à leur titre de naissance depuis plus de cinq ans ; qu'Angélique a toujours considéré Monsieur X... comme son père, et celui-ci lui a toujours manifesté beaucoup d'attachement ; que les enfants sont placés par le juge des enfants depuis le 30/ 11/ 2000 et depuis cette date, Monsieur X... bénéficie d'un droit de visite et d'hébergement qu'il exerce effectivement ; que depuis le placement en famille d'accueil (qui n'interrompt en rien le délai de prescription), Monsieur X... assume plus que jamais son rôle de père et entretient une relation forte avec son enfant ainsi qu'il résulte du rapport de l'UDAF ; que l'UDAF relève qu'Angélique est très attachée à son père et qu'il n'est pas de son intérêt de modifier sa filiation qui correspond à la vérité sociale et affective ; que la preuve est ainsi faite qu'Angélique a la possession d'état d'enfant légitime depuis sa naissance, qu'elle l'a d'ailleurs toujours, et que l'action engagée par sa mère n'est pas de son intérêt ; que dès lors, la première décision déclarant l'action en contestation de paternité prescrite sera confirmée » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « selon l'article 333 du Code civil « lorsque la possession d'état est conforme au titre, seuls peuvent agir l'enfant, l'un de ses père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable. L'action se prescrit par cinq ans à compter du jour où la possession d'état a cessé. Nul ne peut contester la filiation lorsque la possession d'état conforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance si elle a été faite ultérieurement » ; or qu'en l'espèce, il est constant qu'Angélique est née en 1998 alors que Madame Pascale Y...-X... et Monsieur Bernard X... étaient mariés ; qu'il est en outre constant que Monsieur Bernard X... a accepté la paternité d'Angélique dès la naissance de cette dernière, ce que reconnaît d'ailleurs Madame Pascale Y...-X... dans ses écritures et que la possession d'état de père conforme au titre n'a pas cessé, de l'aveu même de la mère de l'enfant, et a donc duré plus de cinq ans ; qu'il en résulte que conformément à l'alinéa 2 de l'article 333 précité, nul ne peut plus contester la filiation établie entre Monsieur Bernard X... et Angélique X... ; que dès lors, le Tribunal déboutera Madame Pascale Y...-X... de ses demandes » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en relevant que Madame Pascale Y... aurait reconnu, dans ses écritures d'appel, que Monsieur Bernard X... avait accepté la paternité d'Angélique dès sa naissance et que « sa possession d'état de père conforme au titre n'a jamais cessé », cependant que Madame Pascale Y... y faisait, au contraire, précisément valoir que Monsieur Bernard X... ne pouvait se prévaloir de la possession d'état, puisqu'il avait lui-même confirmé en 2000, devant le juge des enfants, qu'il n'était pas le père biologique d'Angélique, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de Madame Y..., en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui révèlent, de manière non équivoque, le lien de filiation et de parenté entre une personne et la famille à laquelle elle est dite appartenir ; qu'en retenant qu'Angélique avait la possession d'état d'enfant légitime depuis sa naissance, sans rechercher, comme elle y était invitée (cf. conclusions d'appel de Madame Y... signifiées le 10 février 2011, p. 3) si les déclarations de Monsieur X... confirmant, devant le juge des enfants en 2000, qu'il n'était pas le père biologique d'Angélique, n'étaient pas de nature à entacher cette possession d'équivoque, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 311-1, 311-2 et 333 du Code civil ;
ALORS, ENFIN, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE la mère de l'enfant est en droit d'exercer une action en contestation de paternité en son nom personnel, dès lors qu'elle justifie d'un intérêt propre ; qu'en relevant que l'action engagée par Madame Y... ne serait pas dans l'intérêt d'Angélique, sans constater que Madame Y... n'aurait aucun intérêt à agir en son nom personnel, la Cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, en violation des articles 333 et 334 du Code civil. Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour Mme Y... (demanderesse au pourvoi n° M 12-13. 329).
Il est fait grief à la Cour d'appel d'avoir déclaré irrecevable l'action en contestation de paternité intentée par Madame Pascale Y... comme étant prescrite et débouté celle-ci de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« aux termes de l'article 333 du Code civil, lorsque la possession d'état est conforme au titre, seuls peuvent agir l'enfant, l'un de ses père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable. L'action se prescrit par cinq ans à compter du jour où la possession d'état a cessé ou du décès du parent dont le lien de filiation est contesté ; que l'enfant est né le 25/ 09/ 2000 alors que ses parents étaient mariés depuis cinq ans ; que Daniel-David porte le nom de son père avec lequel elle a vécu jusqu'à ce que sa mère quitte le domicile conjugal en 2008 ; que Daniel-David a une possession d'état conforme à son titre de naissance depuis plus de cinq ans ; que Daniel-David a toujours considéré Monsieur X... comme son père, et celui-ci lui a toujours manifesté beaucoup d'attachement ; que les enfants sont placés par le juge des enfants depuis le 30/ 11/ 2000 et depuis cette date, Monsieur X... bénéficie d'un droit de visite et d'hébergement qu'il exerce effectivement ; que depuis le placement en famille d'accueil (qui n'interrompt en rien le délai de prescription), Monsieur X... assume plus que jamais son rôle de père et entretient une relation forte avec son enfant ainsi qu'il résulte du rapport de l'UDAF ; que l'UDAF relève que Daniel-David est très attaché à son père et qu'il n'est pas de son intérêt de modifier sa filiation qui correspond à la vérité sociale et affective ; que la preuve est ainsi faite que Daniel-David a la possession d'état d'enfant légitime depuis sa naissance, qu'il l'a d'ailleurs toujours, et que l'action engagée par sa mère n'est pas de son intérêt ; que dès lors, la première décision déclarant l'action en contestation de paternité prescrite sera confirmée » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « selon l'article 333 du Code civil « lorsque la possession d'état est conforme au titre, seuls peuvent agir l'enfant, l'un de ses père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable. L'action se prescrit par cinq ans à compter du jour où la possession d'état a cessé. Nul ne peut contester la filiation lorsque la possession d'état conforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance si elle a été faite ultérieurement » ; or qu'en l'espèce, il est constant que Daniel-David est né en 2000 alors que Madame Pascale Y...-X... et Monsieur Bernard X... étaient mariés ; qu'il est en outre constant que Monsieur Bernard X... a accepté la paternité de Daniel-David dès la naissance de ce dernier, ce que reconnaît d'ailleurs Madame Pascale Y...-X... dans ses écritures et que la possession d'état de père conforme au titre n'a pas cessé, de l'aveu même de la mère de l'enfant, et a donc duré plus de cinq ans ; qu'il en résulte que conformément à l'alinéa 2 de l'article 333 précité, nul ne peut plus contester la filiation établie entre Monsieur Bernard X... et Daniel-David X... ; que dès lors, le Tribunal déboutera Madame Pascale Y...-X... de ses demandes » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en relevant que Madame Pascale Y... aurait reconnu, dans ses écritures d'appel, que Monsieur Bernard X... avait accepté la paternité de Daniel-David dès sa naissance et que « sa possession d'état de père conforme au titre n'a jamais cessé », cependant que Madame Pascale Y... y faisait, au contraire, précisément valoir que Monsieur Bernard X... ne pouvait se prévaloir de la possession d'état d'enfant légitime, puisqu'il avait lui-même confirmé en 2000, devant le juge des enfants, qu'il n'était pas le père biologique de Daniel-David, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de Madame Y..., en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui révèlent, de manière non équivoque, le lien de filiation et de parenté entre une personne et la famille à laquelle elle est dite appartenir ; qu'en retenant que Daniel-David avait la possession d'état d'enfant légitime depuis sa naissance, sans rechercher, comme elle y était invitée (cf. conclusions d'appel de Madame Y... signifiées le 10 février 2011, p. 3) si les déclarations de Monsieur X... confirmant, devant le juge des enfants en 2000, qu'il n'était pas le père biologique de Daniel-David, n'étaient pas de nature à entacher cette possession d'équivoque, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 311-1, 311-2 et 333 du Code civil ;
ALORS, ENFIN, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE la mère de l'enfant est en droit d'exercer une action en contestation de paternité en son nom personnel, dès lors qu'elle justifie d'un intérêt propre ; qu'en relevant que l'action engagée par Madame Y... ne serait pas dans l'intérêt de Daniel-David, sans constater qu'elle n'aurait aucun intérêt à agir en son nom personnel, la Cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, en violation des articles 333 et 334 du Code civil.