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15/01/2013 | FRANCE | N°11-27648

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 janvier 2013, 11-27648


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 1er décembre 2009, pourvoi n° 08-18. 896), que la Compagnie linière, actionnaire de la Société française du lin et du chanvre (la société) s'est portée caution solidaire de celle-ci pour le remboursement d'un prêt consenti par la Société de développement régional du Nord-Pas-de-Calais, devenue Batinorest, puis Bati Lease (Bati Lease) ; que la Société coopérative agricole linière de la rÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 1er décembre 2009, pourvoi n° 08-18. 896), que la Compagnie linière, actionnaire de la Société française du lin et du chanvre (la société) s'est portée caution solidaire de celle-ci pour le remboursement d'un prêt consenti par la Société de développement régional du Nord-Pas-de-Calais, devenue Batinorest, puis Bati Lease (Bati Lease) ; que la Société coopérative agricole linière de la région d'Abbeville et la société Coopérative agricole linière de Goderville (la SCA linière de Goderville), devenue Agy lin, ont acquis les actions de la société détenues par la Compagnie linière et se sont engagées à se substituer en totalité à la société cédante dans son engagement de caution ; que la société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, Bati Lease a assigné la Compagnie linière en exécution de son engagement, laquelle a assigné en garantie la société coopérative Agy lin et la société Teillage six, à laquelle la société Agy lin avait cédé ses parts dans la société ; que Bati Lease s'est désistée de sa demande contre la Compagnie linière et l'a étendue aux sociétés appelées en garantie, qui ont invoqué l'inopposabilité de l'engagement de caution en l'absence d'autorisation préalable du conseil d'administration ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Vu l'article L. 225-35, alinéa 4, du code de commerce ;
Attendu que pour condamner les sociétés Agy lin et Teillage six à payer une certaine somme à la société Bati Lease, l'arrêt retient que l'engagement de substitution de cautionnement donné par la SCA Linière de Goderville dans l'acte de cession du 21 février 2002 constitue lui-même un engagement autonome de garantie qui nécessitait l'autorisation préalable de son conseil d'administration et qu'il est constant qu'un tel engagement n'a pas été donné préalablement, l'autorisation d'acquérir les parts de la société n'emportant pas l'autorisation de constituer une garantie ; qu'il retient encore que la SCA Linière de Goderville n'a pas régularisé d'engagement de caution malgré son engagement contractuel et que l'engagement de substitution dans un cautionnement s'analyse en une obligation de faire, la partie qui y est engagée ayant l'obligation de se porter caution ; qu'il en déduit que le défaut d'exécution de cette obligation engage la responsabilité contractuelle de la partie qui s'y est soustraite à l'égard du bénéficiaire de l'engagement, la Compagnie linière et, s'il y a lieu, sa responsabilité délictuelle à l'égard d'un tiers, la société Bati Lease ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que l'engagement de substitution de cautionnement nécessitait l'autorisation préalable du conseil d'administration de la SCA linière de Goderville, ce dont il résultait qu'en l'absence d'une telle autorisation, cet engagement était inopposable à cette société et ne pouvait faire peser sur elle aucune obligation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu les articles 623, 625 et 638 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes de garantie présentées par les sociétés Agy lin et Teillage six à l'encontre de la Compagnie linière, l'arrêt retient que le rejet de ces demandes par l'arrêt du 22 mai 2008 n'a pas été contesté devant la Cour de Cassation et que la décision est définitive sur ce point ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la cassation de l'arrêt du 22 mai 2008 " dans toutes ses dispositions " ne laissait subsister aucun chef de dispositif de cette décision, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne la société Bati Lease et la société Compagnie linière aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Bati Lease et condamne les sociétés Bati Lease et Compagnie linière à payer aux sociétés Agy lin et Teillage six la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils, pour la société coopérative agricole Agy lin et la société Teillage six
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement les sociétés AGYLIN et TEILLAGE SIX à payer à la société BATINOREST une somme de 39. 960, 45 € avec intérêts,
AUX MOTIFS QUE « (...) par acte du 31 juillet 2001, la société SDR, devenue ensuite société BATINOREST puis BATI LEASE, a consenti à la société FRANÇAISE DU LIN ET DU CHANVRE un prêt de 322 985 euros ; que la SA COMPAGNIE LINIERE, détentrice d'environ 80 % des parts sociales de la société FRANÇAISE DU LIN ET DU CHANVRE, s'est portée caution de ce prêt ;
« que, par acte du 21 février 2002, la société COMPAGNIE LINIERE a cédé sa participation dans la société FRANÇAISE DU LIN ET DU CHANVRE à deux coopératives agricoles, d'une part, CAL IRA (coopérative agricole linière de la région d'Abbeville) pour environ deux tiers des parts et, d'autre part, la COOPÉRATIVE AGRICOLE LINIERE DE GODERVILLE, devenue ensuite AGY LIN, pour un tiers des parts, cette société ayant elle-même cédé ses parts le 25 juillet 2002 à la société TEILLAGE SIX ; que, dans la convention du 21 février 2002, les cessionnaires s'engageaient à se substituer en totalité à la COMPAGNIE LINIERE dans son engagement de caution ;
« que la société FRANÇAISE DU LIN ET DU CHANVRE a fait l'objet d'un redressement judiciaire le 17 juillet 2003 converti en liquidation le 28 octobre 2003 ; que la société COMPAGNIE LINIERE a elle-même fait l'objet d'une liquidation amiable suivie d'une dissolution puis d'une radiation du RCS le 11 mars 2003 ;
« que le 22 juillet 2004, la SDR a assigné devant le tribunal de commerce de Roubaix Tourcoing la COMPAGNIE LINIERE en la personne d'un mandataire ad hoc, M. Jean-Luc X..., pour obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 30 960, 45 euros au titre de son engagement de caution ; que, l'acte de cautionnement n'ayant pas été autorisé préalablement par le conseil d'administration de la COMPAGNIE LINIERE, la SDR s'est désistée de son action à l'égard de celle-ci mais a formulé des demandes à l'égard de la SCA GODERVILLE devenue AGY LIN et de la société TEILLAGE SIX qui avait elle-même été appelée en garantie par la COMPAGNIE LINIERE.
« attendu en premier lieu que l'engagement de caution initialement donné par la COMPAGNE LINIERE à la SDR n'a pas été préalablement autorisé par le conseil d'administration de la compagnie ; qu'il en est résulté que cet engagement a été inopposable à celle-ci ; que cette inopposabilité n'a pas pour effet de rendre nul l'engagement de caution mais de permettre à la COMPAGNIE LINIERE, dont le conseil d'administration n'a pas préalablement autorisé l'opération, de se prévaloir de l'inopposabilité de cet engagement à son égard ; qu'il en résulte que la société AGY LIN et la société Teillage SIX ne peuvent utilement soutenir que l'engagement de caution initialement donné par la COMPAGNIE LINIERE serait nul et rendrait sans objet leur engagement de substitution dans l'engagement de la COMPAGNIE LINIERE ;
« attendu en second lieu que l'engagement de substitution de cautionnement donné par la SCA de GODERVILLE dans l'acte de cession du 21 février 2002 constitue lui-même un engagement autonome de garantie qui nécessitait l'autorisation préalable du conseil d'administration de ladite société ; qu'il est constant qu'un tel engagement n'a pas été donné préalablement, l'autorisation d'acquérir les parts de la société n'emportant pas l'autorisation de constituer une garantie ; que la SCA de GODERVILLE n'a donc pas régularisé d'engagement de caution malgré son engagement contractuel dans l'acte du 21 février 2002 ;
« que l'engagement de substitution dans un cautionnement s'analyse en une obligation de faire, la partie qui y est engagée ayant l'obligation de se porter caution ; que le défaut d'exécution de cette obligation engage la responsabilité contractuelle de la partie qui s'y est soustrait à l'égard du bénéficiaire de l'engagement, en l'espèce la COMPAGNIE LINIERE et, s'il y a lieu, sa responsabilité délictuelle à l'égard des tiers telle la SDR aux droits de laquelle vient la société BATILEASE ; qu'ainsi la société BATILEASE est fondée à soutenir que la SCA de GODERVILLE a engagé à son égard sa responsabilité délictuelle et lui a causé un préjudice résultant de la perte de sa garantie ; que la valeur de ce préjudice est égale à celle de la créance garantie à savoir 39 960, 45 euros ; que la décision du premier juge doit donc être confirmée à ce titre tant à l'égard de la SCA de GODERVILLE devenue AGY LIN qu'à l'égard de la société TEILLAGE SDC, cessionnaire des parts de la SCA de GODERVILLE dans la société FRANÇAISE DU LIN ET DU CHANVRE (...) »,
ALORS QUE 1°), l'engagement contractuel souscrit par une société coopérative agricole sans l'autorisation préalable et nécessaire de son conseil d'administration, est inopposable à cette société ; qu'en l'espèce, il ressort de l'arrêt attaqué que l'engagement de substitution de cautionnement donné par la SCA de GODERVILLE dans l'acte de cession du 21 février 2002 nécessitait l'autorisation préalable du conseil d'administration, mais que cette autorisation n'a pas été donnée ; qu'il devait nécessairement s'en déduire que cet engagement lui était inopposable ; qu'en jugeant cependant que le défaut d'exécution de cet engagement aurait pu lui être reproché, et en considérant ainsi, implicitement mais nécessairement, qu'il s'agissait d'un engagement contractuel opposable, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1165 du Code civil,
ALORS QUE 2°), l'engagement contractuel souscrit par une société sans l'autorisation préalable et nécessaire du conseil d'administration, est inopposable à cette société ; que le défaut d'exécution d'un tel engagement contractuel inopposable ne peut donc générer aucune responsabilité entre contractants, ni constituer une faute délictuelle à l'égard des tiers ; qu'en l'espèce, il ressort de l'arrêt attaqué que l'engagement de substitution de cautionnement donné par la SCA de GODERVILLE dans l'acte de cession du 21 février 2002 nécessitait l'autorisation préalable du conseil d'administration, mais que cette autorisation n'a pas été donnée ; qu'en jugeant cependant que le défaut d'exécution d'un tel engagement aurait pu constituer une faute délictuelle à l'égard de la société tierce BATILEASE, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande de garantie présentée à l'égard de la société COMPAGNIE LINIERE par les sociétés AGYLIN et TEILLAGE SIX,
AUX MOTIFS QUE « (...) que les demandes formulées par la SCA GODERVILLE et TEILLAGE SIX à l'égard de la COMPAGNIE LINIERE ont été rejetées, par l'arrêt de la cour d'appel en date du 22 mai 2008 ; que le rejet de ces demandes n'a pas été contesté devant la Cour de Cassation et que la décision est définitive sur ce point ; qu'il en résulte que le mandat ad hoc de Jean-Pierre X... a pris fin et que les demandes de garantie présentées par la société AGY LIN et TEILLAGE SIX sont irrecevables (...) »,
ALORS QUE la cassation d'une décision « en toutes ses dispositions » investit la juridiction de renvoi de la connaissance de l'entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit, de sorte qu'elle ne laisse subsister aucun chef du dispositif de cette décision ; que l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 1er décembre 2009 avait cassé, « dans toutes ses dispositions », l'arrêt de la Cour d'appel en date du 22 mai 2008 ; qu'en jugeant cependant que cet arrêt du 22 mai 2008 serait devenu définitif en ce qu'il avait rejeté les demandes de la SCA GODERVILLE et TEILLAGE SIX à l'égard de la COMPAGNIE LINIERE, la Cour d'appel a violé l'article 625 du Code procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-27648
Date de la décision : 15/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

SOCIETE ANONYME - Conseil d'administration - Cautions, avals et garanties - Autorisation préalable - Domaine d'application - Cession d'actions - Substitution au cédant

La convention par laquelle une société cessionnaire des actions d'une autre société s'engage à se substituer au cédant dans les cautionnements qu'il avait consentis à un créancier de la société, constitue une garantie devant faire l'objet d'une autorisation préalable du conseil d'administration en application de l'article L. 225-35 du code de commerce


Références :

article L. 225-35, alinéa 4, du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 14 septembre 2011

Dans le même sens que :Com., 24 juin 2003, pourvoi n° 01-01464, Bull. 2003, IV, n° 109 (cassation sans renvoi)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 jan. 2013, pourvoi n°11-27648, Bull. civ. 2013, IV, n° 11
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 11

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Batut
Rapporteur ?: M. Pietton
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.27648
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