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15/01/2013 | FRANCE | N°11-26700

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 janvier 2013, 11-26700


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'administration des douanes et droits indirects ayant notifié un avis de mise en recouvrement de droits d'accises à la Banque populaire de Côte d'Azur (la BPCA), caution de la société Intermedium, entrepositaire agréé, la BPCA a contesté cet avis devant le tribunal d'instance ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la BPCA fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré sa demande irrecevable alors, selon le moyen, que le contentieux du recouvrem

ent des créances de toute nature constatées et recouvrées par l'administrat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'administration des douanes et droits indirects ayant notifié un avis de mise en recouvrement de droits d'accises à la Banque populaire de Côte d'Azur (la BPCA), caution de la société Intermedium, entrepositaire agréé, la BPCA a contesté cet avis devant le tribunal d'instance ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la BPCA fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré sa demande irrecevable alors, selon le moyen, que le contentieux du recouvrement des créances de toute nature constatées et recouvrées par l'administration des douanes, et ayant donné lieu à un avis de mise en recouvrement émis par celle-ci, est soumis à la procédure prévue aux articles 345 et suivants du code des douanes ; qu'en application de l'article 346 du code des douanes, le directeur régional des douanes dispose d'un délai de six mois pour statuer sur la contestation de la créance, à compter de la réception de celle-ci, et qu'en cas d'absence de réponse expresse dans ce délai, le redevable peut saisir le tribunal d'instance ; qu'en l'espèce, pour déclarer l'action de la BPCA en contestation d'un avis de mise en recouvrement relatif à des droits d'accises constatés et recouvrés par les services douaniers irrecevable, la cour d'appel a jugé que les dispositions précitées n'étaient pas applicables au litige dans la mesure où celui-ci était relatif non à des créances de nature douanière, mais à des contributions indirectes, de sorte que la procédure était régie par les dispositions du livre des procédures fiscales, en particulier l'article R.198-10 de ce livre, prévoyant la possibilité pour l'administration fiscale ou douanière de disposer, au-delà du délai de six mois pour formuler sa réponse à la réclamation du contribuable, d'un délai supplémentaire d'instruction ne pouvant excéder trois mois ; que faisant application de ces dispositions, la cour d'appel a estimé qu'en l'espèce, l'administration des douanes avait bénéficié d'un délai supplémentaire de trois mois pour répondre à la réclamation de la BPCA, dans la mesure où celle-ci n'avait que tardivement motivé sa contestation, et en a déduit que l'action de la BPCA devant le tribunal d'instance était prématurée car engagée avant l'expiration de ce délai supplémentaire de trois mois ; qu'en statuant de la sorte, quand l'action de la BPCA, relative à des droits d'accises constatés et recouvrés par l'administration des douanes, relevait de la seule procédure prévue aux articles 345 et suivants code des douanes, laquelle ne prévoit pas de délai supplémentaire de trois mois, la cour d'appel a violé les articles 345, 346 et 347 du code des douanes, par refus d'application, et les articles R.198-10 et R.199-1 du livre des procédures fiscales, par fausse application ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu à bon droit que les dispositions des articles R. 198-10 et R.199-1 du livre des procédures fiscales étaient applicables à la mise en recouvrement des droits d'accises par l'administration des douanes et des droits indirects ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles R.198-10 et R.199-1 du livre des procédures fiscales ;
Attendu que pour déclarer l'action de la BPCA irrecevable, l'arrêt retient tout d'abord que celle-ci n'ayant, dans son courrier du 7 septembre 2005, formulé aucun grief précis à l'encontre de l'AMR, l'administration des douanes et droits indirects n'était pas en mesure de prendre une décision sur sa réclamation ; qu'ayant ensuite relevé que la BPCA n'avait fait connaître les motifs de sa contestation que le 7 mars 2006, soit dans un délai qui ne permettait plus à l'administration des douanes de prendre une décision dans le délai de six mois de la réception de la contestation intervenue le 8 septembre 2005, l'arrêt retient, que dans ces conditions, celle-ci bénéficiait à tout le moins du délai complémentaire ne pouvant excéder trois mois prévu par l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales pour prendre une décision constituant le préalable nécessaire à la saisine du tribunal ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'administration des douanes avait informé la BPCA, dans le délai de six mois initial ayant couru à compter de la contestation de l'avis de mise en recouvrement, qu'elle entendait bénéficier du délai complémentaire de trois mois, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne le directeur général des douanes et des droits indirects aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à la BPCA la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la Banque populaire Côte d'Azur
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable l'action de la BANQUE POPULAIRE CÔTE D'AZUR (BPCA) contre l'administration des douanes et droits indirects ;
AUX MOTIFS QUE « ni l'arrêt de la Cour de cassation, qui a seulement statué au visa de l'article 347 bis du code des douanes aux termes duquel les tribunaux d'instance connaissent des contestations concernant le paiement, la garantie ou le remboursement des créances de toute nature recouvrées par l'administration des douanes et des autres affaires de douanes n' entrant pas dans la compétence des juridictions répressives, ni l'arrêt de cette cour prononcé le 16 juin 2009 qui, statuant sur renvoi après cassation, a fait application de l'article 347 bis du code des douanes pour infirmer le jugement du tribunal d'instance du 11ème arrondissement qui s'était déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris, n'ont écarté les règles de procédure tirées du livre des procédures fiscales ; Qu'à l'opposé, s'agissant d'un avis de mise en recouvrement concernant des droits d'accises, l'administration des douanes est fondée à rappeler que sont notamment applicables en l'espèce les dispositions des articles L.256, L.257, L. 257 A, L. 281 du livre des procédures fiscales ainsi que les dispositions des articles R281-1, R281-2, R281-3, R. 198-10 et R 199-11 du même livre ; Que l'alinéa 1er de l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au présent litige énonce : « L'administration des impôts ou l'administration des douanes et droits indirects, selon le cas, statue sur les réclamations dans le délai de six mois suivant la date de leur présentation. Si elle n'est pas en mesure de le faire, elle doit, avant l'expiration de ce délai, en informer le contribuable en précisant le terme du délai complémentaire estimé nécessaire. Ce délai complémentaire ne peut, toutefois, excéder trois mois. » ; Que l'article R.199 1 du même code précise : « L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par Iequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur la réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévus à l'article R. 198-10. Toutefois le contribuable qui n'a pas reçu la décision de l'administration dans un délai de six mois mentionné au premier alinéa peut saisir le tribunal dès l'expiration de ce délai. L'administration peut soumettre d'office au tribunal la réclamation présentée par un contribuable. Elle doit en informer ce dernier. » ; Considérant qu'il est constant que, dans son courrier de réclamation du 7 septembre 2005, la redevable ne formulait alors aucun grief précis à l'encontre de l'AMR, en indiquant qu'elle se réservait de développer et de compléter son argumentation en fonction des pièces qui seraient produites ; que, dès lors, l'administration des douanes est fondée à soutenir que, faute d'explication et de précision sur les motifs de la réclamation, les services des douanes qui en étaient saisis n'étaient pas mis en mesure de prendre une décision sur la réclamation ; Considérant que la BPCA, qui a obtenu aussitôt, tant les pièces justificatives demandées dans son courrier de réclamation que les pièces complémentaires réclamées le 13 février 2006, n'a finalement fait connaître les motifs de sa réclamation que le 7 mars 2006, soit dans un délai qui ne permettait plus à l'administration des douanes de prendre une décision dans le délai six mois de la réception de la contestation intervenue le 8 septembre 2006 ; Que, dans ces conditions, quelle que soit la formulation de la réponse du 9 septembre 2005 apportée à la redevable, l'administration des douanes bénéficiait, à tout le moins, du délai complémentaire ne pouvant excéder trois mois qui est prévu par l'article R198 10 du livre des procédures fiscales pour prendre une décision constituant un préalable nécessaire à la saisine du tribunal d'instance ; Considérant que l'action de la BPCA sera donc déclarée irrecevable, étant par surcroît observé que la banque n'est pas fondée à soutenir que l'irrecevabilité aurait de toute façon cessé de produire ses effets à compter du 7 septembre 2006, faute par l'administration des douanes d'avoir pris à ce moment- là une décision faisant droit à sa contestation, alors qu'elle venait précisément de saisir le tribunal d'instance et qu'une instance était en cours ; Que le jugement doit, en conséquence, être infirmé de ce chef » ;
1°) ALORS, D'UNE PART, QUE le contentieux du recouvrement des créances de toute nature constatées et recouvrées par l'administration des douanes, et ayant donné lieu à un avis de mise en recouvrement émis par celle-ci, est soumis à la procédure prévue aux articles 345 et suivants du code des douanes ; qu'en application de l'article 346 du code des douanes, le directeur régional des douanes dispose d'un délai de six mois pour statuer sur la contestation de la créance, à compter de la réception de celle-ci, et qu'en cas d'absence de réponse expresse dans ce délai, le redevable peut saisir le tribunal d'instance ; qu'en l'espèce, pour déclarer l'action de la BPCA en contestation d'un avis de mise en recouvrement relatif à des droits d'accises constatés et recouvrés par les services douaniers irrecevable, la Cour d'appel a jugé que les dispositions précitées n'étaient pas applicables au litige dans la mesure où celui-ci était relatif non à des créances de nature douanière, mais à des contributions indirectes, de sorte que la procédure était régie par les dispositions du livre des procédures fiscales, en particulier l'article R.198-10 de ce livre, prévoyant la possibilité pour l'administration fiscale ou douanière de disposer, au-delà du délai de six mois pour formuler sa réponse à la réclamation du contribuable, d'un délai supplémentaire d'instruction ne pouvant excéder trois mois ; que faisant application de ces dispositions, la Cour d'appel a estimé qu'en l'espèce, l'administration des douanes avait bénéficié d'un délai supplémentaire de trois mois pour répondre à la réclamation de la BPCA, dans la mesure où celle-ci n'avait que tardivement motivé sa contestation, et en a déduit que l'action de la BPCA devant le tribunal d'instance était prématurée car engagée avant l'expiration de ce délai supplémentaire de trois mois ; qu'en statuant de la sorte, quand l'action de la BPCA, relative à des droits d'accises constatés et recouvrés par l'administration des douanes, relevait de la seule procédure prévue aux articles 345 et suivants code des douanes, laquelle ne prévoit pas de délai supplémentaire de trois mois, la Cour d'appel a violé les articles 345, 346 et 347 du code des douanes, par refus d'application, et les articles R.198-10 et R.199-1 du livre des procédures fiscales, par fausse application ;
2°) ALORS, D'AUTRE PART, ET SUBSIDIAIREMENT, QUE l'administration ne peut bénéficier du délai complémentaire d'une durée maximale de trois mois, pour se prononcer sur la réclamation, prévu à l'article R.198-10 du livre des procédures fiscales, qu'à la condition d'en informer le requérant avant l'expiration du délai de six mois fixé par ce texte, en précisant le terme du délai supplémentaire estimé nécessaire pour répondre à la réclamation ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que la BPCA a formé le 7 septembre 2005 une réclamation contre un avis de mise en recouvrement du 16 mai 2005, réceptionnée le 8 septembre 2005, sans formuler de grief précis ; qu'elle a estimé que la BPCA, après avoir reçu les pièces justificatives de la créance objet de l'avis de mise en recouvrement litigieux, n'avait fait connaître les motifs de sa réclamation que le 7 mars 2006, « soit dans un délai qui ne permettait plus à l'administration des douanes de prendre une décision dans le délai de six mois de la réception de la contestation intervenue le 8 septembre 2006 », ce dont elle a déduit que «l'administration des douanes bénéficiait, à tout le moins, du délai complémentaire ne pouvant excéder trois mois qui est prévu par l'article R198-10 du livre des procédures fiscales pour prendre une décision constituant un préalable nécessaire à la saisine du tribunal d'instance » et que l'assignation de la BPCA, intervenue le 5 mai 2006 soit avant l'expiration du délai complémentaire de trois mois, était irrecevable car prématurée ; qu'en statuant de la sorte, sans constater que l'administration avait informé la BPCA, dans le délai de six mois ayant couru à compter de la réclamation, de ce qu'elle entendait bénéficier d'un délai complémentaire en application de l'article R.198-10 du livre des procédures fiscales, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte, ensemble l'article R.199-1 du livre des procédures fiscales ;
3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE l'administration des douanes n'a pas soutenu dans ses conclusions d'appel avoir bénéficié d'un délai complémentaire pour instruire la réclamation de la BPCA, en application des dispositions de l'article R.198-10 du livre des procédures fiscales ; qu'elle n'a, ni au cours de l'instruction de la réclamation, ni au cours de la présente instance, revendiqué l'application de ce délai complémentaire de trois mois ; qu'en soulevant d'office le moyen selon lequel l'administration des douanes aurait bénéficié d'un délai complémentaire de trois mois pour répondre à la réclamation de la BPCA, en vertu des dispositions de l'article R.198-10 du livre des procédures fiscales, pour en déduire que l'action de la banque était irrecevable car engagée avant l'expiration de ce délai complémentaire, sans rouvrir les débats pour recueillir les observations des parties sur ce point, la Cour d'appel n'a pas respecté le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile.
4°) ALORS, ENFIN, QUE si l'action en justice engagée avant l'expiration du délai dont dispose l'administration pour répondre à la réclamation est irrecevable comme prématurée, la procédure est régularisée dès lors que le requérant a déposé des conclusions en décharge après l'expiration du délai précité, sans que l'administration n'ait répondu et avant que le juge ne statue ; qu'en jugeant néanmoins que « la BPCA (…) n'est pas fondée à soutenir que l'irrecevabilité aurait de toute façon cessé de produire ses effets à compter du 7 septembre 2006, faute par l'administration des douanes d'avoir pris à ce moment- là une décision faisant droit à sa contestation, alors qu'elle venait précisément de saisir le tribunal d'instance et qu'une instance était en cours », quand la procédure avait été régularisée par les conclusions au fond de la BPCA postérieurement à l'expiration du délai dont bénéficiait l'administration pour répondre à sa réclamation, et avant que le juge saisi ne statue, la Cour d'appel a méconnu les articles R.198-10 et R.199-1 du livre des procédures fiscales.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-26700
Date de la décision : 15/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

DOUANES - Droits - Recouvrement - Avis de mise en recouvrement - Contestation en matière de contributions indirectes - Procédure applicable

Les dispositions des articles R. 198-10 et R. 199-1 du livre des procédures fiscales sont applicables à la mise en recouvrement des droits d'accises par l'administration des douanes et des droits indirects


Références :

article 345 du code des douanes

articles R. 198-10 et R. 199-1 du livre des procédures fiscales

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 septembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 jan. 2013, pourvoi n°11-26700, Bull. civ. 2013, IV, n° 5
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 5

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Mollard
Rapporteur ?: Mme Pezard
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.26700
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