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15/01/2013 | FRANCE | N°11-15646

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 janvier 2013, 11-15646


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 16 février 2011), que M. X..., salarié de la société Jacob immobilier, a été mis à la retraite par décision du 24 décembre 2008 avec effet au 28 avril 2009, date à laquelle le salarié a atteint l'âge de 65 ans ; que celui-ci a saisi la juridiction prud'homale en contestant les conditions de sa mise à la retraite ;
Attendu que la société Jacob immobilier fait grief à l'arrêt de dire la mise à la retraite du sala

rié constitutive d'un licenciement nul, alors, selon le moyen :
1°/ que la contra...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 16 février 2011), que M. X..., salarié de la société Jacob immobilier, a été mis à la retraite par décision du 24 décembre 2008 avec effet au 28 avril 2009, date à laquelle le salarié a atteint l'âge de 65 ans ; que celui-ci a saisi la juridiction prud'homale en contestant les conditions de sa mise à la retraite ;
Attendu que la société Jacob immobilier fait grief à l'arrêt de dire la mise à la retraite du salarié constitutive d'un licenciement nul, alors, selon le moyen :
1°/ que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que les juges d'appel, après avoir expressément constaté que "la notification de la mise à la retraite est intervenue le 24 décembre 2008", ce dont il résultait effectivement des éléments de preuve versés à la procédure, ne pouvaient, ensuite, afin de considérer que l'employeur aurait méconnu les dispositions de l'article 34 de la convention collective de l'immobilier, indiquer que "la notification de la mise à la retraite a eu lieu au cours de cet entretien (du 19 décembre 2008)" ; qu'en se prononçant ainsi par des motifs entachés d'une contrariété de fait évidente, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que si les dispositions de l'article 34 de la convention collective de l'immobilier prévoient effectivement qu'"en cas de départ à l'initiative de l'employeur, celui-ci est tenu d'avoir avec le salarié un entretien préalable à la notification de mise à la retraite et de respecter le préavis prévu à l'article 32 en cas de licenciement.", ces dispositions ne font aucun renvoi exprès à celles de l'article L. 1232-2 du code du travail (anciennement L. 122-4) relatives à l'entretien préalable précédant une mesure de licenciement ; qu'il en résulte que, si, en application de ladite convention, l'employeur est tenu de rencontrer le salarié dont il a décidé la mise à retraite dans le respect de ses futurs droits à pension, aucun formalisme ne préside à un tel entretien ; qu'en considérant que l'entretien qui s'est déroulé le 19 décembre 2008 était irrégulier, la cour d'appel a violé les dispositions précitées de l'article 34 de la convention collective de l'immobilier ;
3°/ qu'à supposer même que l'employeur soit tenu en cas de mise à la retraite du salarié ayant atteint 65 ans, de respecter le formalisme des dispositions applicables en cas d'entretien préalable au licenciement par référence à celles du code du travail, le non-respect de celles-ci ne saurait, pour cet unique motif, faire tenir la rupture du contrat de travail comme irrégulière et dénuée de motif légitime ; qu'en considérant pour ce motif la mise en retraite irrégulière, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 34 de la convention collective de l'immobilier, ensemble celles de l'article L. 1237-5 du code du travail dans leur version applicable aux faits de l'espèce, ainsi qu'admis par l'arrêt attaqué ;
4°/ que si l'article 34 de la convention collective fait obligation à l'employeur en cas de mise à la retraite du salarié de respecter le préavis de trois mois prévu à l'article 32, cet article ne prévoit pas expressément que le fait pour l'employeur de fixer ce délai à quatre mois, est de nature à entraîner une requalification du mode initial de rupture du contrat de travail dès lors surtout que le délai de trois mois est un délai minimal ; qu'en retenant cette circonstance pour requalifier la mise à la retraite de M. X... en licenciement irrégulier, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 32 de ladite convention collective, ensemble celles de l'article L. 1237-5 du code du travail ;
5°/ qu'il ne saurait être procédé à la requalification de la décision de mise à la retraite en licenciement irrégulier fondé sur l'âge du salarié dès lors qu'il n'est pas formellement établi que l'employeur a, en prononçant la mise à la retraite d'un salarié, agi précipitamment et dans le but de se soustraire aux nouvelles conditions légales de celle-ci ; que, la cour d'appel, en se fondant sur la circonstance que la société Jacob immobilier aurait voulu échapper aux exigences de la loi nouvelle, soit la loi n° 2008-130 dite de financement de la sécurité sociale pour 2009 en retenant que celle-ci, parce qu'elle aurait été promulguée le 18 novembre 2008 était parfaitement connue de l'employeur quand il résultait du Journal officiel que cette loi avait été promulguée le 18 décembre 2008, a statué par un motif inopérant, et a, partant, entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article L. 1237-5 du code du travail ;
6°/ que la société Jacob immobilier avait souligné que la mise à la retraite de M. X... s'était inscrite dans une démarche de parfaite transparence puisque les délégués du personnel en avaient été informés immédiatement, que M. X... en avait été tenu informé par des entretiens informels que la gestion des emplois et des compétences avait été abordée dès le début de l'année 2008, ce qui l'avait conduite à signer un contrat au profit d'un candidat au poste de M. X... en octobre 2008 et donc à recruter M. Serge Y... ; que, dès lors, la cour d'appel, faute de s'expliquer sur de tels éléments, qui étaient exclusifs d'agissements hâtifs de l'employeur, et a pourtant retenu à son encontre la volonté de contrer l'application des nouvelles dispositions légales en mettant en oeuvre un licenciement discriminatoire, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1237-5 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a souverainement estimé qu'il était établi que l'employeur avait, en prononçant la mise à la retraite du salarié, agi précipitamment et dans le but de se soustraire aux nouvelles conditions de mise à la retraite alors en discussion devant le Parlement, notamment en effectuant l'entretien préalable exigé par l'article 34 de la convention collective de l'immobilier de façon précipitée et sans que le salarié soit informé préalablement de son objet ainsi qu'en allongeant le délai de préavis de trois mois prévu par la convention collective sans en justifier objectivement la nécessité, a pu décider que l'employeur avait manqué à l'obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail et que la mise à la retraite constituait une discrimination fondée sur l'âge et dès lors un licenciement nul ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Jacob immobilier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils, pour la société Jacob immobilier
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, ayant considéré que la rupture du contrat de travail s'analysait comme un licenciement irrégulier et par suite nul, condamné la société JACOB IMMOBILIER à verser à Monsieur X... les sommes de 6.000 € à titre d'indemnité de licenciement et de 25.000 € à titre de dommagesintérêts ;
AUX MOTIFS QUE la mise à la retraite est un mode de rupture autonome à l'initiative de l'employeur auquel il revient, en cas de contestation, d'établir que les conditions légales, et d'ordre public, sont satisfaites, que les dispositions légales sont celles de la date de la notification de la mesure ; qu'à cet égard, la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, publiée au Journal officiel le 18 décembre 2008 prévoit en son article 90 la modification de l'article L.1237-5 du Code du travail relative à la mise à la retraite par l'employeur d'un salarié âgé de 65 ans ; qu'en vertu de ces dispositions, l'employeur est tenu d'interroger le salarié par écrit, trois mois avant la date anniversaire de ses 65 ans, sur son intention de quitter volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de vieillesse ; qu'en cas de réponse négative du salarié dans un délai d'un mois à compter de la date à laquelle l'employeur l'aura interrogé, ou à défaut d'avoir respecté la procédure mentionnée ci-dessus, l'employeur ne peut faire usage de la possibilité de mettre le salarié à la retraite pendant l'année qui suit la date de son anniversaire ; que, par dérogation à cette loi, le décret n° 2008-1515 du 3 0 décembre 2008, paru le 31 décembre au journal officiel, prévoit une période transitoire du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009 au cours de laquelle une mise à la retraite d'office peut prendre effet par dérogation aux dispositions cidessus rappelées si celle-ci a été notifiée avant le 1er janvier 2009 ou si le salarié interrogé par l'employeur au moins trois mois avant la date d'effet de la mise en retraite n'a pas, dans le délai d'un mois manifesté son intention de poursuivre son activité ; qu'en l'espèce, la notification de la mise à la retraite est intervenue le 24 décembre 2008 ; que les nouvelles dispositions relatives au droit de refus du salarié n'étaient par conséquent pas encore applicables ; que l'employeur était néanmoins tenu de respecter les dispositions de la convention collective ; que la convention collective de l'immobilier à laquelle le salarié comme l'employeur étaient soumis prévoit en son article 34 :
« le départ en retraite du personnel peut intervenir :
- à l'initiative du salarié lorsqu'il est en droit de bénéficier d'une pension de vieillesse- à l'initiative de l'employeur à partir de 65 ans, soit à un âge inférieur mais au moins égal à 60 ans dès lors que les salariés remplissent les conditions pour bénéficier d'une retraite à taux plein du régime d'assurance vieillesse et que l'employeur s'engage à :
- favoriser la conclusion de contrats de professionnalisation ou d'apprentissage pour promouvoir l'emploi des jeunes.- mettre en oeuvre un bilan de compétences pour les salariés de 45 ans et plus.- donner un accès prioritaire au plan de formation pour les salariés de 45 ans et plus.(…)
En cas de départ à l'initiative de l'employeur, celui-ci est tenu d'avoir avec le salarié un entretien préalable à la notification de mise à la retraite et de respecter le préavis prévu à l'article 32 en cas de licenciement. ».
Le salarié s'est vu notifier par courrier du 24 décembre 2008 sa mise à la retraite d'office à l'âge de 65 ans, au 28 avril 2009 en ces termes :
« Vous allez atteindre le 28 avril 2009 l'âge de 65 ans ce qui vous permettra de faire valoir vos droits à la retraite à taux plein, quel que soit le nombre de trimestres pendant lesquels vous avez cotisé.
« Lors de nos entretiens de cet été et du 19 décembre 2008, nous vous avons fait part de notre intention de mettre fin à votre contrat de travail par une mise à la retraite, conformément aux dispositions de l'article L.1237-5 et L.1237-7 du code du travail et des dispositions de la convention collective de l'immobilier.
« Monsieur Y..., votre successeur a été embauché le 3 octobre pour une entrée en fonctions le 1er avril 2009.
Cette décision qui ne constitue pas un licenciement prendra effet à l'issue d'un préavis de quatre mois soit le 28 avril 2009. »
Par courrier du 16 janvier 2009, Gérard X... a confirmé son intention de poursuivre son activité en ces termes :
« Je conteste le terme « d'entretien » qui me paraît très abusif eu égard à sa forme et à son contenu. En effet, la veille, je reçois un simple appel téléphonique de votre part « est-ce que vous serez à votre bureau demain matin vers 8h.30 ? » Vous arrivez accompagné de M. Z..., notre directeur général qui m'annonce de manière ferme et définitive, assortie de menaces que je dois faire valoir mes droits à la retraite (si je n'accepte pas ce sera la guerre, ce sont ses propres termes ! avec mise à pied immédiate au 31/12/2008 !). Il ajoute, par ailleurs, que les nouvelles dispositions législatives à ce sujet ne prennent effet qu'au 1er janvier 2010 (…).
Par courrier en réponse du 26 janvier 2009, l'employeur a maintenu sa position comme suit :
« Sur la forme, je ne suis pas d'accord avec vous.
« En effet, l'entretien du 19 décembre au matin a été convenu entre nous, non pas au téléphone, mais dans votre bureau le mardi 16 décembre au matin (au moment de ma visite hebdomadaire) où je vous ai indiqué que je souhaitais vous rencontrer avec Laurent Z..., directeur général, le vendredi 19 pour discuter ensemble selon mes propres termes « des prochains mois à venir ».
« (…) Quant à l'entretien en lui-même, nous avons effectivement expliqué qu'à compter du 28 avril 2009, date de vos 65 ans, nous ferions valoir vos droits à la retraite.« (…) Comme vous le savez, puisque nous en avions déjà parlé ensemble cet été, nous étions en recherche d'une personne pour vous succéder et suite à divers entretiens avec Monsieur Y... Serge depuis juillet, nous avons décidé de le recruter, son contrat étant signé depuis le 3 octobre dernier.
« En aucun cas, nous ne pouvions prévoir qu'une nouvelle loi allait être discutée en fin d'année, alors même que ce recrutement était déjà fait depuis plusieurs mois.
« (…) Je regrette (...) qu'après plus de huit années de collaboration et alors même que vous connaissiez notre position quant à l'embauche de votre successeur, vous adoptiez aujourd'hui une attitude qui m'apparaît pleine d'opportunisme. »
que Gérard X... soutient que sa mise à la retraite lui a été notifiée au terme d'un entretien préalable qui n'en était pas un, de façon anticipée, avec un délai de préavis supérieur au délai de préavis de trois mois prévu par la convention collective afin de contrer l'application de la loi du 17 décembre 2008 ; qu'à l'inverse, l'employeur fait valoir sa bonne foi et soutient que le salarié ne s'était pas opposé jusqu'alors à son projet de mise à la retraite ; qu'il ne pouvait prévoir l'évolution législative et qu'il ne peut lui être reproché d'avoir accordé un délai de préavis supérieur au délai minimum de la convention collective afin de lui permettre de bénéficier de l'intégralité de ses droits à la retraite ; qu'en l'espèce, il résulte du compte-rendu de la réunion du 15 février 2008 qui mentionne « la direction indique notamment envisager la mise à la retraite de M. Gérard X... (…) en contrepartie, conformément aux dispositions de l'article 34 de la convention collective, M. Z... indique que la société JACOB IMMOBILIER favorisera la conclusion de :
- contrat de professionnalisation pour l'insertion des jeunes salariés.- les actions de formation préalable à l'embauche.- la mise en oeuvre d'un bilan de compétence pour les salariés de 45 ans qui en feront la demande. » que, contrairement à ce que laisse entendre l'employeur, la mise à la retraite de Monsieur X... n'était pas envisagée avec son accord ; en effet, si tel avait été le cas, il n'était nul besoin de se référer aux conditions de la mise à la retraite à l'initiative de l'employeur, telles qu'elles résultent de l'article 34 de la convention collective nationale de l'immobilier ; que la convention collective de l'immobilier prévoit qu'en cas de départ à l'initiative de l'employeur, celui-ci est tenu d'avoir avec le salarié un entretien préalablement à la notification de mise à la retraite et de respecter le préavis prévu à l'article 32 en cas de licenciement, soit trois mois pour les cadres ; que la société JACOB IMMOBILIER a notifié à Monsieur X... sa mise à la retraite par courrier du 24 décembre 2008, soit plus de quatre mois avant la date de son 65ème anniversaire (le 28 avril 2009) ; que la société JACOB IMMOBILIER n'apporte aucune explication objective de nature à justifier l'allongement du délai de préavis prévu à l'article 32 de la convention collective de l'immobilier ; qu'elle ne produit aucune pièce démontrant que l'augmentation du délai de préavis de trois mois à quatre mois est une pratique régulière et établie au sein de la société ; qu'elle ne démontre pas davantage, alors que le compte rendu de la réunion mensuelle du 15 février 2008 expose que la direction de la société envisage « notamment » la mise à la retraite de M. X..., ce qui établit qu'il n'était pas le seul salarié concerné, avoir accordé à d'autres salariés mis à la retraite antérieurement ou consécutivement, un délai supérieur à celui prévu par la convention collective ; qu'il y a aussi lieu de constater qu'en employant le terme d'entretien préalable, la convention collective se référait à l'entretien préalable au licenciement lequel impose que cet entretien soit préalable à la décision de l'employeur qui soit précédé d'une convocation ;qu'il résulte des termes des courriers du salarié comme de l'employeur que cet entretien du 19 décembre 2008 a été effectué de manière précipitée et sans que le salarié ne soit informé de son objet, la discussion devant, selon l'employeur, porter sur « les prochains mois à venir » ; qu'il résulte, par ailleurs, du courrier même de l'employeur « quant à l'entretien en lui-même, nous vous avons effectivement expliqué qu'à compter du 28 avril 2009, date de vos 65 ans, nous ferions valoir vos droits à la retraite », qu'il ne s'agissait nullement d'un entretien préalable à la décision de l'employeur, puisque la notification de la mise à la retraite a eu lieu au cours de cet entretien ; qu'ainsi donc, force est de constater que l'employeur n'a pas respecté l'esprit des dispositions de l'article 34 de la convention collective ;
1°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que les juges d'appel, après avoir expressément constaté que « la notification de la mise à la retraite est intervenue le 24 décembre 2008 », ce dont il résultait effectivement des éléments de preuve versés à la procédure, ne pouvaient, ensuite, afin de considérer que l'employeur aurait méconnu les dispositions de l'article 34 de la convention collective de l'immobilier, indiquer que « la notification de la mise à la retraite a eu lieu au cours de cet entretien (du 19 décembre 2008) » ; qu'en se prononçant ainsi par des motifs entachés d'une contrariété de fait évidente, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE si les dispositions de l'article 34 de la convention collective de l'immobilier prévoient effectivement qu' «en cas de départ à l'initiative de l'employeur, celui-ci est tenu d'avoir avec le salarié un entretien préalable à la notification de mise à la retraite et de respecter le préavis prévu à l'article 32 en cas de licenciement. », ces dispositions ne font aucun renvoi exprès à celles de l'article L.1232-2 du Code du travail (anciennement L.122-4) relatives à l'entretien préalable précédant une mesure de licenciement ; qu'il en résulte que, si, en application de ladite convention, l'employeur est tenu de rencontrer le salarié dont il a décidé la mise à retraite dans le respect de ses futurs droits à pension, aucun formalisme ne préside à un tel entretien ; qu'en considérant que l'entretien qui s'est déroulé le 19 décembre 2008 était irrégulier, la Cour d'appel a violé les dispositions précitées de l'article 34 de la convention collective de l'immobilier ;
3°) ALORS QU' à supposer même que l'employeur soit tenu en cas de mise à la retraite du salarié ayant atteint 65 ans, de respecter le formalisme des dispositions applicables en cas d'entretien préalable au licenciement par référence à celles du Code du travail, le non-respect de celles-ci ne saurait, pour cet unique motif, faire tenir la rupture du contrat de travail comme irrégulière et dénuée de motif légitime ; qu'en considérant pour ce motif la mise en retraite irrégulière, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 34 de la convention collective de l'immobilier, ensemble celles de l'article L.1237-5 du Code du travail dans leur version applicable aux faits de l'espèce, ainsi qu'admis par l'arrêt attaqué ;
4°) ALORS QUE si l'article 34 de la convention collective fait obligation à l'employeur en cas de mise à la retraite du salarié de respecter le préavis de trois mois prévu à l'article 32, cet article ne prévoit pas expressément que le fait pour l'employeur de fixer ce délai à quatre mois, est de nature à entraîner une requalification du mode initial de rupture du contrat de travail dès lors surtout que le délai de 3 mois est un délai minimal ; qu'en retenant cette circonstance pour requalifier la mise à la retraite de Monsieur X... en licenciement irrégulier, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 32 de ladite convention collective, ensemble celles de l'article L.1237-5 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la décision de la société JACOB IMMOBILIER de mettre Monsieur X... à la retraite était constitutive d'un licenciement nul, et d'avoir condamné l'employeur au paiement de 6.000 € à titre d'indemnité de licenciement et de 25.000 € à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a été adopté par le Conseil des ministres le 13 octobre 2008, discuté en séance publique du 28 octobre au 4 novembre 2008, puis adopté par l'Assemblée le 26 novembre et par le Sénat le 27 novembre 2008 ; que ce texte a été déféré au Conseil Constitutionnel le 1er décembre ; lequel a reçu de Monsieur Gaston A..., sénateur, un mémoire enregistré le 9 décembre, et a rendu sa décision le 11 décembre 2008, de laquelle il résultait notamment que les articles 90, 91 et 92 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 étaient conformes à la Constitution ; que l'employeur ne peut donc valablement soutenir qu'il ne pouvait prévoir qu'une nouvelle loi allait être discutée en fin d'année ; que la loi n° 2008-1330 a été promulguée le 17 novembre 2008 et publiée le 18 novembre 2008 ; qu'elle prévoyait que « l'employeur interroge par écrit le salarié sur son intention de quitter volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de vieillesse. En cas de réponse négative du salarié dans un délai fixé par décret ou à défaut d'avoir respecté l'obligation mentionnée à l'alinéa précédent, l'employeur ne peut faire usage de la possibilité mentionnée au premier alinéa pendant l'année qui suit la date à laquelle le salarié atteint l'âge fixé au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale » ; qu'il y a également lieu de rappeler que les nouvelles dispositions étaient applicables à compter du lendemain de la publication de la loi au journal officiel ; toutefois, la mise en oeuvre de la procédure de mise à la retraite d'office avec consultation préalable du salarié demeurait suspendue à la publication du décret d'application ; que l'entretien réalisé à la hâte, dès le lendemain de la promulgation de la loi, dont l'employeur avait connaissance, ne peut, par conséquent, relever du hasard et n'avait pour seule fonction que d'assurer un semblant de respect des dispositions de la convention collective et de permettre la notification de la mise à la retraite avant la parution du décret ; qu'en cette situation, la notification de la mise à la retraite a été effectuée afin de contrer l'application des nouvelles dispositions législatives et la cause de la résiliation du contrat de travail à l'initiative de l'employeur réside dans l'âge du salarié ; que la décision de mettre le salarié à la retraite constitue par conséquent un licenciement fondé sur une discrimination dont l'illicéité entraîne la nullité ; qu'il convient donc de confirmer la décision entreprise sur ce point ; que Gérard X... ne sollicite pas sa réintégration ; que la Cour, pour évaluer son préjudice, tient compte non seulement de son salaire de 2.513 € mensuel, outre les indemnités perçues au titre des commissions, de son ancienneté de 7 ans, mais aussi du préjudice moral et matériel résultant de la discrimination ; les dommages-intérêts seront fixés à 25.000 € ;
1°) ALORS QU' il ne saurait être procédé à la requalification de la décision de mise à la retraite en licenciement irrégulier fondé sur l'âge du salarié dès lors qu'il n'est pas formellement établi que l'employeur a, en prononçant la mise à la retraite d'un salarié, agi précipitamment et dans le but de se soustraire aux nouvelles conditions légales de celle-ci ; que, la Cour d'appel, en se fondant sur la circonstance que la société JACOB IMMOBILIER aurait voulu échapper aux exigences de la loi nouvelle, soit la loi n° 2008-130 dite de financeme nt de la sécurité sociale pour 2009 en retenant que celle-ci, parce qu'elle aurait été promulguée le 18 novembre 2008 était parfaitement connue de l'employeur quand il résultait du Journal Officiel que cette loi avait été promulguée le 18 décembre 2008, a statué par un motif inopérant, et a, partant, entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article L.1237-5 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE la société JACOB IMMOBILIER avait souligné que la mise à la retraite de Monsieur X... s'était inscrite dans une démarche de parfaite transparence puisque les délégués du personnel en avaient été informés immédiatement , que Monsieur X... en avait été tenu informé par des entretiens informels que la gestion des emplois et des compétences avait été abordée dès le début de l'année 2008, ce qui l'avait conduite à signer un contrat au profit d'un candidat au poste de Monsieur X... en octobre 2008 et donc à recruter Monsieur Serge Y... ; que, dès lors, la Cour d'appel, faute de s'expliquer sur de tels éléments, qui étaient exclusifs d'agissements hâtifs de l'employeur, et a pourtant retenu à son encontre la volonté de contrer l'application des nouvelles dispositions légales en mettant en oeuvre un licenciement discriminatoire, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.1237-5 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-15646
Date de la décision : 15/01/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Retraite - Mise à la retraite - Obligation de l'employeur - Loi nouvelle - Mise en oeuvre - Obligation de loyauté - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Discrimination entre salariés - Discrimination fondée sur l'âge - Caractérisation - Cas - Mise à la retraite du salarié - Mesure destinée à éluder la loi nouvelle CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Nullité - Cas - Discrimination - Discrimination fondée sur l'âge

Une cour d'appel, qui a souverainement estimé qu'il était établi que l'employeur avait, en prononçant la mise à la retraite du salarié, agi précipitamment et dans le but de se soustraire aux nouvelles conditions de mise à la retraite alors en discussion devant le Parlement, a pu décider que l'employeur avait manqué à l'obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail et que la mise à la retraite constituait une discrimination fondée sur l'âge et dès lors un licenciement nul


Références :

articles L. 1232-2 et L. 1237-5 du code du travail

article 34 de la convention collective nationale de l'immobilier, administrateurs de biens, sociétés immobilières, agents immobiliers, etc... du 9 septembre 1988

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 16 février 2011

Sur l'appréciation souveraine des juges du fond de la mesure de mise à la retraite prise précipitamment par l'employeur et destinée à faire obstacle à l'application de la loi nouvelle, à rapprocher : Soc., 30 janvier 2008, pourvoi n° 06-41878, diffusé


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jan. 2013, pourvoi n°11-15646, Bull. civ. 2013, V, n° 8
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, V, n° 8

Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Foerst
Rapporteur ?: M. Huglo
Avocat(s) : SCP Laugier et Caston, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.15646
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