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11/10/2012 | FRANCE | N°11-18544

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 11 octobre 2012, 11-18544


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 mars 2011), que M. X..., salarié de la société BTI intérim, aux droits de laquelle vient la société MCM intérim (l'employeur), a déclaré, le 8 août 2008, avoir été victime d'un accident survenu la veille ; qu'un certificat médical constatant des lésions de type " épicondylite du coude droit " et prescrivant un arrêt de travail lui a été délivré le 11 août 2008 ; que l'employeur ayant transmis, le 2 septembre 2008, la déclaration d'accident du travail Ã

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 mars 2011), que M. X..., salarié de la société BTI intérim, aux droits de laquelle vient la société MCM intérim (l'employeur), a déclaré, le 8 août 2008, avoir été victime d'un accident survenu la veille ; qu'un certificat médical constatant des lésions de type " épicondylite du coude droit " et prescrivant un arrêt de travail lui a été délivré le 11 août 2008 ; que l'employeur ayant transmis, le 2 septembre 2008, la déclaration d'accident du travail à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain (la caisse), celle-ci a refusé de prendre en charge cet accident au titre de la législation professionnelle ; que M. X...a contesté ce refus devant une juridiction de sécurité sociale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que cet accident doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle, alors, selon le moyen :
1°/ que la présomption d'imputabilité au travail d'un accident n'a d'effet que si la victime rapporte la preuve de la réalité de cet accident au temps et au lieu du travail, ce qui n'est pas le cas lorsque le premier certificat médical fourni par le salarié a été établi plusieurs jours après les faits allégués, qu'existe une incertitude sur leur horaire et que le salarié a poursuivi son travail postérieurement auxdits faits ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a relevé que le salarié et son témoin prétendu étaient dans l'incapacité d'identifier l'heure à laquelle serait survenu l'accident, que le salarié avait ensuite poursuivi son travail et n'avait fait établir un certificat médical initial que quatre jours après les faits allégués ; qu'en déduisant cependant de telles énonciations qu'était survenu un accident au temps et sur le lieu du travail, devant par conséquent être pris en charge au titre de la législation professionnelle, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que, dans le questionnaire adressé à la caisse, à la question " témoin direct, sinon première personne avisée ", le salarié avait seulement indiqué " M. Y...Charles, Macon ", et, à la question " veuillez préciser s'il s'agit d'un témoin ou d'une première personne avisée ", avait répondu : " j'ai avisé M. Charles Y...qu'une douleur terrible venait de survenir au cours de notre intervention ", le salarié n'ayant ainsi jamais précisé que M. Y...aurait été " témoin " ; qu'en énonçant que, dans ledit questionnaire, le salarié avait désigné expressément en tant que témoin M. Y..., dont le témoignage corroborait les déclarations du salarié, la cour d'appel a dénaturé le contenu dudit questionnaire en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que M. Y..., collègue de travail de M. X...a confirmé, par une attestation régulièrement versée aux débats, que l'accident survenu le 7 août 2008 était arrivé alors que M. X...perçait un capot de protection, la perceuse s'étant bloquée et ayant fait vriller le bras de l'intéressé qui a eu du mal à finir le chantier ; que ce témoin précise avoir lui-même informé l'employeur de ce fait dès le soir-même ; que ce témoignage est en parfaite concordance avec les déclarations de M. X...; qu'il résulte de l'ensemble des éléments rappelés, déclarations du salarié corroborées par un témoin de l'accident, information le jour même de la société intérimaire et constatations médicales, que M. X...a été victime d'un accident survenu au temps et sur le lieu du travail ;
Que de ces constatations et énonciations, relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, la cour d'appel a pu, hors toute dénaturation, décider que l'accident devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à se voir déclarer inopposable la prise en charge d'un accident au titre de la législation professionnelle, alors, selon le moyen, que, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, une caisse primaire d'assurance maladie doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à compter de laquelle elle prévoit de prendre sa décision, peu en important le sens, la méconnaissance de cette obligation d'information entraînant l'inopposabilité de ladite décision à l'employeur, la date à laquelle il a souscrit la déclaration d'accident étant sans incidence à cet égard ; qu'en l'espèce, en déclarant opposable à l'employeur la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle, en dépit de la méconnaissance par la caisse de son obligation d'information, prétexte pris d'une prétendue tardiveté de la déclaration d'accident, la cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'un employeur n'est pas recevable, en application des dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, à invoquer l'irrégularité de la procédure administrative d'instruction d'une demande de prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle menée par une caisse, lorsque la prise en charge résulte d'une décision juridictionnelle rendue dans une instance engagée par le salarié qui conteste le refus opposé par la caisse, procédure dans laquelle l'employeur, qui y a été appelé, a pu faire valoir ses moyens de défense ;
Et attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'employeur a été mis en cause dans l'instance introduite par M. X...contre le refus de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident, et qu'il a pu faire valoir ses moyens de défense devant les juges du fond ; que par ce seul motif, substitué à celui critiqué par le moyen, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile, la décision de rejeter la demande d'inopposabilité se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société MCM intérim aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la société MCM intérim ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain la somme de 1 500 euros et à Me Georges la somme de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé et prononcé par M. Héderer, conseiller le plus ancien non empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du onze octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour la société MCM intérim.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que l'accident survenu au salarié d'une entreprise (la société MCM INTERIM, l'exposante) devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle ;
AUX MOTIFS QUE la société MCM INTERIM avait effectué une déclaration d'accident du travail avec réserves le 2 septembre 2008 concernant M. X..., avec les précisions suivantes : « date : 7 août 2008- lieu de l'accident : chantier Lamberet à Saint Cyr sur Menthon circonstances détaillées de l'accident : l'employé a eu de plus en plus de mal à assurer sa fonction, il pouvait difficilement se servir de son bras pour serrer une vis, se servir d'une perceuse et a été obligé de s'arrêter, état constaté par son collègue de travail-siège des lésions bras droit-nature des lésions douleurs – victime transportée à médecin – accident connu le 7 août 2008 par ses préposés-conséquences avec arrêt de travail » et mention d'un témoin, M. Y...; que sur le certificat médical initial daté du 11 août 2008, il était mentionné : « épicondilyte du coude droit » ; que M. X..., répondant au questionnaire adressé par la caisse, avait indiqué que le fait accidentel était survenu le 7 août dans l'après-midi, lors de « l'entretien de différentes machines », qu'il avait « avisé Monsieur Charles Y...qu'une douleur terrible venait de survenir », et que la société intérimaire en avait été avisée le soir du 7 août 2008 par M. Y...; que la société intérimaire, répondant au questionnaire de la caisse, avait confirmé l'existence d'un témoin en la personne de M. Y...et indiqué avoir été avisée de l'accident par la victime elle-même le 7 août après-midi par téléphone ; que M. Y...avait, par attestation régulièrement versée aux débats, confirmé l'accident survenu le 7 août 2008, précisant qu'il était « arrivé en perçant un capot de protection. La perceuse s'(était) bloquée et a (vait) failli vriller, le bras de Monsieur X...... (qui) avait eu du mal à finir le chantier » et l'information donnée par ses soins concernant l'accident le soir même à « l'agent BTI » ; que ce témoignage était en parfaite concordance avec les déclarations de M. X...; que le fait que ce dernier eût employé le terme " avisé " dans le questionnaire adressé à la caisse ne pouvait suffire à exclure que M. Y...eût été témoin, quand M. X...l'avait désigné expressément en tant que tel dans ce même document, un peu plus loin, et enlever toute crédibilité à son témoignage ; que M. X...versait aux débats également des certificats médicaux du docteur Z...précisant l'avoir reçu le 11 août 2008 qui « présentait (sic) un accident du travail datant du 7 août 2008 avec épicondilyte coude droit en utilisant une perceuse d'après ses dires » et des docteurs A...et B... se référant à une épicondilyte droite chronique depuis le 7 août 2008 déclenchée par « l'utilisation d'une perceuse (blocage) » et aux « suites d'un traumatisme du coude droit survenu en août 2008 » ; qu'il résultait de l'ensemble de ces éléments que M. X...avait été victime d'un accident survenu au temps et sur le lieu du travail, à l'occasion d'un facteur traumatisant lié au travail (blocage d'une perceuse) ; que ni l'absence d'identification de l'heure exacte de survenue de l'accident, ni l'établissement d'un certificat initial quatre jours après les faits, le salarié ayant voulu continuer à travailler, ne pouvaient suffire à modifier cette analyse (arrêt attaqué, p. 3, 2ème attendu, et p. 4) ;
ALORS QUE la présomption d'imputabilité au travail d'un accident n'a d'effet que si la victime rapporte la preuve de la réalité de cet accident au temps et au lieu du travail, ce qui n'est pas le cas lorsque le premier certificat médical fourni par le salarié a été établi plusieurs jours après les faits allégués, qu'existe une incertitude sur leur horaire et que le salarié a poursuivi son travail postérieurement auxdits faits ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a relevé que le salarié et son témoin prétendu étaient dans l'incapacité d'identifier l'heure à laquelle serait survenu l'accident, que le salarié avait ensuite poursuivi son travail et n'avait fait établir un certificat médical initial que quatre jours après les faits allégués ; qu'en déduisant cependant de telles énonciations qu'était survenu un accident au temps et sur le lieu du travail, devant par conséquent être pris en charge au titre de la législation professionnelle, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ;
ALORS QUE, en outre, dans le questionnaire adressé à la caisse, à la question « témoin direct, sinon première personne avisée », le salarié avait seulement indiqué « Monsieur Y...Charles, MACON », et, à la question « veuillez préciser s'il s'agit d'un témoin ou d'une première personne avisée », avait répondu : « j'ai avisé Monsieur Charles Y...qu'une douleur terrible venait de survenir au cours de notre intervention », le salarié n'ayant ainsi jamais précisé que M. Y...aurait été " témoin " ; qu'en énonçant que, dans ledit questionnaire, le salarié avait désigné expressément en tant que témoin M. Y..., dont le témoignage corroborait les déclarations du salarié, la cour d'appel a dénaturé le contenu dudit questionnaire en violation de l'article 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un employeur (la société MCM INTERIM, l'exposante) de sa demande tendant à se voir déclarer inopposable la prise en charge d'un accident au titre de la législation professionnelle ;
AUX MOTIFS QUE si la société intérimaire demandait que cette décision de prise en charge lui fût déclarée inopposable pour manquement de la caisse à ses obligations d'information, telles que résultant de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, la caisse était fondée à obtenir le bénéfice des dispositions de l'article L. 471-1 de ce même code, s'agissant d'une disposition d'ordre public, qui conduisait à sanctionner, par le remboursement de la totalité des prestations réglées par la caisse au titre de cet accident, cet employeur qui s'était affranchi de respecter les dispositions des articles L. 441-2 et R 441-3 du code de la sécurité sociale, ayant souscrit tardivement une déclaration d'accident du travail le 2 septembre 2008 pour un accident survenu le 7 août 2008 et dont il avait connaissance le jour même, la sanction prononcée ayant pour effet de rendre opposables les conséquences financières de la prise en charge au titre de la législation professionnelle (arrêt attaqué, p. 5, 1er attendu) ;
ALORS QUE, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, une caisse primaire d'assurance maladie doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à compter de laquelle elle prévoit de prendre sa décision, peu en important le sens, la méconnaissance de cette obligation d'information entraînant l'inopposabilité de ladite décision à l'employeur, la date à laquelle il a souscrit la déclaration d'accident étant sans incidence à cet égard ; qu'en l'espèce, en déclarant opposable à l'exposante la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle, en dépit de la méconnaissance par la caisse de son obligation d'information, prétexte pris d'une prétendue tardiveté de la déclaration d'accident, la cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-18544
Date de la décision : 11/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Procédure - Procédure préliminaire - Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie - Respect du principe de la contradiction - Domaine d'application - Exclusion - Cas - Décision de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle résultant d'une décision juridictionnelle opposable à l'employeur

Un employeur n'est pas recevable, en application des dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, à invoquer l'irrégularité de la procédure administrative d'instruction d'une demande de prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle menée par une caisse, lorsque la prise en charge résulte d'une décision juridictionnelle rendue dans une instance engagée par le salarié qui conteste le refus opposé par la caisse, procédure dans laquelle l'employeur, qui y a été appelé, a pu faire valoir ses moyens de défense


Références :

article R. 441-11 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 29 mars 2011

Sur la portée de l'opposabilité à l'employeur d'une décision juridictionnelle de prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle, dans le même sens que :2e Civ., 1er décembre 2011, pourvoi n° 10-25507, Bull. 2011, II, n° 220 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 11 oct. 2012, pourvoi n°11-18544, Bull. civ. 2012, II, n° 167
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, II, n° 167

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : Mme de Beaupuis
Rapporteur ?: M. Feydeau
Avocat(s) : Me Georges, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.18544
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