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18/09/2012 | FRANCE | N°12-80662

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 septembre 2012, 12-80662


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Badre X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de COLMAR, en date du 10 novembre 2011, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'escroqueries, complicité d'escroqueries, complicité de vols, offre ou vente de matériel de captation frauduleuse de programmes télédiffusés cryptés, a prononcé sur le maintien de la saisie de sommes inscrites au crédit d'un compte bancaire ;

Vu l'ordonnance du président de la cham

bre criminelle, en date du 21 juin 2012, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Badre X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de COLMAR, en date du 10 novembre 2011, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'escroqueries, complicité d'escroqueries, complicité de vols, offre ou vente de matériel de captation frauduleuse de programmes télédiffusés cryptés, a prononcé sur le maintien de la saisie de sommes inscrites au crédit d'un compte bancaire ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 21 juin 2012, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires ampliatif et complémentaire produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 131-21, alinéa 6, 311-14, 4°, et 313-7 4°, du code pénal, 79 et 79-5 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, 706-154, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a prononcé le maintien d'une saisie pénale du montant du solde créditeur du compte bancaire n° 701 90652401 ouvert auprès de la Banque populaire d'Alsace au nom des époux X... ;
"aux motifs qu'en l'état des investigations entreprises, il apparaît qu'une partie des revenus de M. X... provenait de l'activité frauduleuse pour laquelle il a été mis en examen et que les autres revenus dont il se prévaut (dividendes, partage d'une succession) n'expliquent pas en totalité le train de vie du couple X... et notamment le fait que pour l'année 2010, les nombreux dépôts en espèces ou chèques opérés sur les comptes bancaires du couple se sont élevés au total à 61 229,38 euros, soit plus du double de leurs revenus déclarés ; que les investigations effectuées ont établi que plusieurs « clients » de M. X... le réglaient au moyen de chèques déposés sur ses comptes, pour payer les cartes de décryptage piratées ; que, selon la note de Tracfin précitée, les apports en numéraire représentaient une moyenne mensuelle de 3 000 euros, disproportionnée au regard des ressources officielles du couple ; que, selon l'article 99, alinéa 4, du code de procédure pénale, la restitution des biens saisis peut être refusée lorsque la confiscation est prévue par la loi ; qu'en cas de condamnation pour les délits de vol ou d'escroquerie, les articles 311-14, 4°, et 313-7, 4°, du code pénal prévoient la peine complémentaire de confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit ; qu'au stade de l'instruction, selon l'article 706-154, alinéa 3, du code de procédure pénale, lorsque la saisie porte sur une somme d'argent versée sur un compte ouvert auprès d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôts, elle s'applique indifféremment à l'ensemble des sommes inscrites au crédit de ce compte au moment de la saisie et à concurrence, le cas échéant, du montant indiqué dans la décision de saisie ; qu'en toute hypothèse, l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal n'exige pas que les biens saisis aient servi à commettre l'infraction ou aient été destinés à la commettre ou soient le produit direct ou indirect de l'infraction pour être placés sous main de justice ; qu'il s'ensuit que, dès lors que les conditions légales étaient réunies et que les formalités ont été respectées, le juge d'instruction a, à bon droit, maintenu la saisie des avoirs du mis en examen ;
"1°) alors que, lorsque, en vertu de l'article 706-154 du code de procédure pénale, la saisie porte sur une somme d'argent versée sur un compte ouvert auprès d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôts, celle-ci ne peut pas dépasser les gains engendrés par les faits reprochés ; que M. X... avait fait valoir dans ses écritures que la globalité des sommes portées au crédit du compte bancaire n° 70190652401 ouvert auprès de la Banque populaire d'Alsace provenaient des revenus du couple ainsi que d'un héritage ; qu'il a ajouté qu'à supposer que les délits qui lui étaient reprochés soient effectivement caractérisés, ils lui avaient rapporté bien moins que la saisie finalement opérée sur ce compte ; qu'en validant néanmoins la saisie du solde créditeur de ce compte, sans vérifier s'il n'était pas supérieur aux gains engendrés par les faits qui étaient reprochés à M. X..., la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale ;
"2°) alors qu'en vertu de l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal, lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit le prévoit, la confiscation peut aussi porter sur tout ou partie des biens appartenant au condamné, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis ; qu'en se fondant sur ce texte pour justifier la saisie du solde créditeur du compte bancaire n° 701906 52401 ouvert auprès de la Banque populaire d'Alsace au nom des époux X..., bien que la peine complémentaire de confiscation générale prévue par l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal ne soit pas prévue pour les infractions pour lesquelles M. X... est mis en examen (escroqueries, vols, captation frauduleuse de programmes télévisés cryptés), la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés et excédé ses pouvoirs" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 131-21, alinéa 6, 311-14, 4°, et 313-7 4° du code pénal, 706-144, 706-148, 706-153, 706-154 du code pénal ;

"en ce que l'arrêt attaqué a prononcé le maintien d'une saisie pénale du montant du solde créditeur du compte bancaire n° 70190652401 ouvert auprès de la Banque populaire d'Alsace au nom des époux X... ;
"alors qu'en matière de saisies spéciales du titre 29 du livre 4 du code de procédure pénale, le parquet, si la saisie n'a pas été ordonnée à sa requête, doit à tout le moins donner systématiquement un avis ; que l'ordonnance de maintien de la saisie pénale prise en l'occurrence par le magistrat instructeur le 28 juillet 2011 l'a été en dehors de toute requête du parquet et sans recueillir l'avis de celui-ci ;que cette ordonnance était donc nulle et que la chambre de l'instruction aurait dû le constater ; qu'elle a ainsi violé les textes susvisés ;

"alors qu'en toute hypothèse, la saisie en cause constituait, au sens de l'article 706-148 du code de procédure pénale, une saisie de patrimoine nécessitant l'avis préalable du ministère public, lequel n'avait pas été recueilli ; que l'ordonnance de confirmation de saisie devait donc être annulée" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'au cours d'une information ouverte contre M. X... des chefs susvisés, le juge d'instruction a, le 28 juillet 2011, rendu, au visa des articles 131-21 du code pénal et 706-153 et 706-154 du code de procédure pénale, une ordonnance maintenant la saisie pénale, effectuée le 27 juillet précédent par des officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire, des sommes inscrites au crédit du compte de dépôts ouvert au nom des époux X... auprès de la Banque populaire d'Alsace ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance entreprise, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que, d'une part, la confiscation des biens ayant servi à commettre l'infraction ou qui en sont le produit direct ou indirect est encourue en vertu des articles 311-14, 4° et 313-7, 4° du code pénal et 79-5 de la loi du 30 septembre 1986 prévoyant des peines complémentaires en répression des délits pour lesquels M. X... a été mis en examen, que, d'autre part, selon l'article 706-154 du code de procédure pénale seul texte applicable en l'espèce, la saisie de sommes d'argent versées sur un compte bancaire s'applique indifféremment à l'ensemble des sommes inscrites au crédit de ce compte au moment de la saisie, et qu'enfin, la saisie effectuée en application de ce dernier texte ne constituait pas, en l'espèce, au sens de l'article 706-148 du code de procédure pénale, une saisie de patrimoine nécessitant l'avis préalable du ministère public, la chambre de l'instruction, abstraction faite du motif inopérant de l'arrêt faisant référence à l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Beauvais conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-80662
Date de la décision : 18/09/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSTRUCTION - Mesures conservatoires - Saisies portant sur certains biens ou droits mobiliers incorporels - Saisie d'une somme d'argent versée sur un compte bancaire - Conditions - Détermination - Portée

INSTRUCTION - Mesures conservatoires - Saisies portant sur certains biens ou droits mobiliers incorporels - Saisie d'une somme d'argent versée sur un compte bancaire - Avis préalable du ministère public - Nécessité (non)

Justifie sa décision la chambre de l'instruction qui, pour confirmer l'ordonnance du juge d'instruction prescrivant le maintien de la saisie de sommes inscrites au crédit du compte bancaire d'une personne mise en examen des chefs, notamment, d'escroqueries et captation frauduleuse de programmes télédiffusés cryptés, retient que, d'une part, la confiscation des biens ayant servi à commettre ces infractions ou qui en sont le produit direct ou indirect est encourue à titre de peine complémentaire, et que, d'autre part, selon l'article 706-154 du code de procédure pénale, seul applicable en l'espèce, la saisie s'applique indifféremment à l'ensemble des sommes inscrites au crédit du compte au moment de la saisie et ne nécessite pas l'avis préalable du ministère public, dès lors qu'elle ne constitue pas une saisie de patrimoine au sens de l'article 706-148 du code de procédure pénale


Références :

articles 706-148, 706-153 et 706-154 du code de procédure pénale

articles 131-21, 311-14 4° et 313-7 4° du code pénal

article 79-5 de la loi du 30 septembre 1986

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Colmar, 10 novembre 2011

Sur la nécessité de l'avis préalable du ministère public, s'agissant d'une saisie de patrimoine, à rapprocher :Crim., 11 juillet 2012, pourvoi n° 12-82050, Bull. crim. 2012, n° 168 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 sep. 2012, pourvoi n°12-80662, Bull. crim. criminel 2012, n° 193
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2012, n° 193

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Cordier
Rapporteur ?: M. Beauvais
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 30/08/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:12.80662
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