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11/09/2012 | FRANCE | N°11-26045

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 septembre 2012, 11-26045


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 septembre 2011), statuant sur contredit, que M. X... a été engagé par la société Alma Consulting Group le 1er décembre 2004 en qualité de conseiller aux affaires financières; que son contrat de travail a été transféré à la société Almanacc, appartenant au même groupe, en date du 1er janvier 2006 ; que, par lettre du 27 mars 2007, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 24

avril 2007 aux fins de faire juger que la prise d'acte s'analyse en un lice...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 septembre 2011), statuant sur contredit, que M. X... a été engagé par la société Alma Consulting Group le 1er décembre 2004 en qualité de conseiller aux affaires financières; que son contrat de travail a été transféré à la société Almanacc, appartenant au même groupe, en date du 1er janvier 2006 ; que, par lettre du 27 mars 2007, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 24 avril 2007 aux fins de faire juger que la prise d'acte s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses sommes notamment de dommages-intérêts pour violation de l'égalité de traitement, le salarié soutenant avoir été privé de tout accès au capital du groupe Alma CG à la différence d'autres cadres ;
Attendu que les sociétés Alma Consulting Group et Almanacc font grief à l'arrêt de dire la juridiction prud'homale compétente pour statuer sur la demande du salarié au titre de cette dernière demande, alors, selon le moyen :
1°/ que la demande d'un salarié tendant à obtenir une participation au capital de la société employeur ou des sociétés du groupe auquel appartient son employeur ne relève pas de la compétence du conseil de prud'hommes, sauf à établir l'existence d'un lien entre sa prétention à participer au capital de ces sociétés et son contrat de travail ; que, pour établir un tel tien, le salarié ne peut se borner à faire valoir le principe d'égalité de traitement et le fait que d'autres salariés de la société employeur ont des parts dans le capital des sociétés du groupe ; qu'il doit également établir que la participation de ces salariés au capital des sociétés du groupe est accessoire à leur contrat de travail, comme résultant d'une décision de leur employeur de leur attribuer gratuitement des parts sociales ou des options de souscription ou d'achat des parts sociales ; qu'en l'espèce, pour retenir que la demande de M. X... relative à la participation au capital des sociétés du groupe Alma relevait de la compétence du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a affirmé que les statuts de la société Almanageriens, le pacte d'actionnaires du 20 décembre 2005, le pacte d'actionnaires dirigeants d'Almater du 12 février 2004 et le rapport Ernst et Young du 30 septembre 2005 établissent une politique de distribution d'actions réservée aux salariés dans le cadre des dispositions de l'article L. 225-197-1 du code de commerce ; qu'en statuant de la sorte, cependant qu'il ne résulterait d'aucun de ces documents que les salariés qui détiennent des parts dans le capital des sociétés du groupe les auraient acquises à l'occasion d'une attribution gratuite d'actions par leur employeur ou dans le cadre d'un mode de souscription d'options d'actions ou d'achat d'actions réservé aux salariés, la cour d'appel a dénaturé ces documents, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments qui lui sont soumis ;
2°/ que dans le courrier électronique adressé aux salariés du groupe le 8 mars 2007, M. A... faisait part d'un projet en cours d'étude, intitulé "Horizons 2010", répondant aux nombreuses demandes de salariés de devenir actionnaires du groupe Alma ; qu'il y exposait clairement qu'il était projeté d'offrir une possibilité d'actionnariat au plus grand nombre possible de salariés, mais qu'"aucune décision n'a été prise aujourd'hui" ; qu'il expliquait également que "l'objectif pour chaque salarié est en investissant 100, de récupérer au minimum 400 en 2010" et que "le bénéfice escompté reviendra aux salariés en raison du risque qu'ils auront accepté de prendre (...)" en achetant des actions du groupe ; qu'il en résultait qu'en mars 2007, à la date de la rupture du contrat de travail de M. X..., ce projet n'était qu'à l'étude et ne consistait pas en l'attribution gratuite d'actions aux salariés ; qu'en se fondant encore sur ce courrier électronique pour dire que des distributions d'actions aux salariés ou à certaines catégories d'entre eux relevant de l'article L. 225-197-1 du code de commerce ont eu lieu au sein du groupe, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet e-mail, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments qui lui sont soumis ;
3°/ qu'en affirmant qu'il n'était pas contesté que des distributions d'actions aux cadres ont eu lieu, quand les sociétés expliquaient que les différentes cessions de titres des sociétés du groupe à certains cadres du groupe sont intervenues en dehors de tout mode de souscription ou d'attribution gratuite d'actions réservé aux salariés, la cour d'appel a dénaturé les conclusions des sociétés, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la demande en paiement de dommages-intérêts d'un salarié en réparation du préjudice causé par l'inégalité de traitement alléguée dans l'octroi d'actions de la société à certains de ses salariés constitue un différend né à l'occasion du contrat de travail ; qu'ayant constaté, hors toute dénaturation, que les documents produits établissaient que des distributions d'actions réservées aux salariés avaient eu lieu et que la politique du groupe était de transférer des actions aux salariés ou à certaines catégories d'entre eux à travers différentes sociétés holding, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant concernant les dispositions de l'article L. 225-197-1 du code de commerce, n'encourt pas les griefs du moyen ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Alma Consulting Group et Almacc aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Alma consulting groupe, la société Almanacc
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement du Conseil de prud'hommes de NANTERRE en date du 19 juillet 2010 en ce qu'il s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de NANTERRE s'agissant de la demande de Monsieur X... en paiement d'une somme de 5,12 millions d'euros correspondant à 1 % de la valeur des sociétés du groupe, d'AVOIR dit que cette demande est de la compétence du conseil de prud'hommes de NANTERRE et d'AVOIR condamné les sociétés ALMANACC et ALMA CONSULTING GROUP à payer à Monsieur X... la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « la société ALMA CONSULTING GROUP soutient que la prise de participation au capital du groupe Aima doit être détachée de la qualité de salarié, que la société ALMA CONSULTING GROUP n'a pris aucun engagement à son égard, qu'il ne démontre aucun usage ; que son contrat de travail ne comporte aucune disposition sur ce point, que Monsieur X... n'est pas un "cadre-clé" de la société et n'a jamais joué de rôle clé, qu'il n'appartient pas au juge de créer des droits en faveur du salarié ; qu'il convient de distinguer le droit de Monsieur X... aux participations au capital de sociétés du groupe qu'il revendique et la compétence du conseil de prud'hommes pour en décider; que Monsieur X..., salarié de la société ALMANACC depuis janvier 2006, et précédemment salarié de la société ALMA CONSULTING GROUP, invoque l'inégalité de traitement avec d'autres salariés du groupe ; qu'il produit une courriel du président du groupe du 8 mars 2007, les statuts de la société Almanageriens, le pacte d'actionnaires daté du 20 décembre 2005, le pacte d'actionnaires dirigeants d'ALMATER du 12 février 204, qui établissent que des distributions d'actions réservées aux salariés ont eu lieu, et constituent un objectif pour le président et une demande des salariés ; qu'il est précisé dans le rapport Ernst et Young du 30 septembre 2005, que la politique du groupe est de transférer des actions aux salariés ou à certaines catégories de salariés, à travers différentes sociétés holding ; que ces opérations sont faites dans le cadre des dispositions de l'article L225-197-1 du code de commerce, qui prévoit la distribution d'actions aux salariés ou certaines catégories d'entre eux; qu'il n'est pas démontré que les actions distribuées étaient détenues par le président, monsieur A..., qui en aurait eu la libre disposition à titre personnel, ni qu'elles étaient réservées aux associés ou aux mandataires sociaux ; qu'il n'est pas contesté que des distributions d'actions aux cadres ont eu lieu, ni que Monsieur X... n'en a pas bénéficié ; qu'il est ainsi suffisamment démontré au sein du groupe une politique de distributions d'actions destinée à intéresser les salariés au développement de celui-ci ; que Monsieur X... a été tenu à l'écart de cette politique pour des matifs que ses deux employeurs successifs ne démontrent pas ; que le code du travail pose le principe de l'égalité entre les salariés ; que le conseil de prud'hommes est compétent pour tout litige individuel né ou survenu à l'occasion de l'exécution du contrat de travail; qu'il s'en déduit que toute action fondée sur l'inégalité de traitement entre les salariés dans le cadre de l'exécution du contrat de travail est de la compétence du conseil de prud'hommes ; que la demande de Monsieur X... au titre des distributions d'action est de la compétence du conseil de prud'hommes » ;
1. ALORS QUE la demande d'un salarié tendant à obtenir une participation au capital de la société employeur ou des sociétés du groupe auquel appartient son employeur ne relève pas de la compétence du conseil de prud'hommes, sauf à établir l'existence d'un lien entre sa prétention à participer au capital de ces sociétés et son contrat de travail ; que, pour établir un tel lien, le salarié ne peut se borner à faire valoir le principe d'égalité de traitement et le fait que d'autres salariés de la société employeur ont des parts dans le capital des sociétés du groupe ; qu'il doit également établir que la participation de ces salariés au capital des sociétés du groupe est accessoire à leur contrat de travail, comme résultant d'une décision de leur employeur de leur attribuer gratuitement des parts sociales ou des options de souscription ou d'achat des parts sociales ; qu'en l'espèce, pour retenir que la demande de Monsieur X... relative à la participation au capital des sociétés du groupe ALMA relevait de la compétence du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a affirmé que les statuts de la société ALMANAGERIENS, le pacte d'actionnaires du 20 décembre 2005, le pacte d'actionnaires dirigeants d'ALMATER du 12 février 2004 et le rapport Ernst et Young du 30 septembre 2005 établissent une politique de distribution d'actions réservée aux salariés dans le cadre des dispositions de l'article L. 225-197-1 du Code de commerce ; qu'en statuant de la sorte, cependant qu'il ne résulte d'aucun de ces documents que les salariés qui détiennent des parts dans le capital des sociétés du groupe les auraient acquises à l'occasion d'une attribution gratuite d'actions par leur employeur ou dans le cadre d'un mode de souscription d'options d'actions ou d'achat d'actions réservé aux salariés, la cour d'appel a dénaturé ces documents, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments qui lui sont soumis ;
2. ALORS QUE dans le courrier électronique adressé aux salariés du groupe le 8 mars 2007, Monsieur A... faisait part d'un projet en cours d'étude, intitulé « Horizons 2010 », répondant aux nombreuses demandes de salariés de devenir actionnaires du groupe ALMA ; qu'il y exposait clairement qu'il était projeté d'offrir une possibilité d'actionnariat au plus grand nombre possible de salariés, mais qu«aucune décision n'a été prise aujourd'hui » ; qu'il expliquait également que « l'objectif pour chaque salarié est en investissant 100, de récupérer au minimum 400 en 2010 » et que « le bénéfice escompté reviendra aux salariés en raison du risque qu'ils auront accepté de prendre (...j » en achetant des actions du groupe ; qu'il en résultait qu'en mars 2007, à la date de la rupture du contrat de travail de Monsieur X..., ce projet n'était qu'a l'étude et ne consistait pas en l'attribution gratuite d'actions aux salariés ; qu'en se fondant encore sur ce courrier électronique pour dire que des distributions d'actions aux salariés ou à certaines catégories d'entre eux relevant de l'article L. 225-197-1 du Code de commerce ont eu lieu au sein du groupe, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet e-mail, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments qui lui sont soumis ;
3. ALORS QU'en affirmant qu'il n'était pas contesté que des distributions d'actions aux cadres ont eu lieu, quand les sociétés exposantes expliquaient que les différentes cessions de titres des sociétés du groupe à certains cadres du groupe sont intervenues en dehors de tout mode de souscription ou d'attribution gratuite d'actions réservé aux salariés, la cour d'appel a dénaturé les conclusions des sociétés exposantes, en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-26045
Date de la décision : 11/09/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

PRUD'HOMMES - Compétence - Compétence matérielle - Litiges nés à l'occasion du contrat de travail - Octroi d'actions de la société à ses salariés

PRUD'HOMMES - Compétence - Compétence matérielle - Litiges nés à l'occasion du contrat de travail - Principes d'égalité de traitement - Violation - Cas - Octroi d'actions de la société réservé à certains salariés

La demande en paiement de dommages-intérêts d'un salarié en réparation du préjudice causé par l'inégalité de traitement alléguée dans l'octroi d'actions de la société à certains de ses salariés constitue un différend né à l'occasion du contrat de travail


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 13 septembre 2011

Sur la compétence de la juridiction prud'homale en cas de litige portant sur les conditions de l'attribution d'actions de la société aux salariés, dans le même sens que :Soc., 16 septembre 2008, pourvoi n° 07-20444, Bull. 2008, V, n° 207 (cassation partiellement sans renvoi)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 sep. 2012, pourvoi n°11-26045, Bull. civ. 2012, V, n° 225
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, V, n° 225

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Lalande
Rapporteur ?: M. Huglo
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.26045
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