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10/05/2012 | FRANCE | N°12-81197

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 mai 2012, 12-81197


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Paris,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 7e section, en date du 30 janvier 2012, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction près le tribunal aux armées de Paris, ayant dit y avoir lieu d'informer du chef d'homicides involontaires sur la plainte déposée par Mmes Sylvie X..., Aurore Y..., Chantal Y..., M. Jean-François Y..., Mmes Sandrine Y..., Aurélie A..., Mariette B...et M. Joë

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La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Paris,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 7e section, en date du 30 janvier 2012, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction près le tribunal aux armées de Paris, ayant dit y avoir lieu d'informer du chef d'homicides involontaires sur la plainte déposée par Mmes Sylvie X..., Aurore Y..., Chantal Y..., M. Jean-François Y..., Mmes Sandrine Y..., Aurélie A..., Mariette B...et M. Joël C...;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 avril 2012 où étaient présents : M. Louvel président, Mme Caron conseiller rapporteur, MM. Pometan, Foulquié, Moignard, Castel, Raybaud conseillers de la chambre, Mmes Leprieur, Lazerges, M. Laurent, Mme Carbonaro conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Gauthier ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller CARON et les conclusions de M. l'avocat général GAUTHIER ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 16 février 2012, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'une plainte avec constitution de partie civile a été déposée auprès du juge d'instruction près le tribunal aux armées de Paris, contre personne non dénommée, des chefs de mise en danger d'autrui et non-empêchement d'un crime, par les parents de militaires français, appartenant à la Force d'intervention, d'assistance et de sécurité, mandatée par le Conseil de sécurité de l'ONU, qui avaient été tués en 2008 en Afghanistan au cours d'une offensive ennemie alors qu'ils effectuaient une mission de reconnaissance ; que, saisi de réquisitions du ministère public aux fins de refus d'informer, le magistrat instructeur a dit y avoir lieu à informer du chef d'homicides involontaires ; que, statuant sur l'appel du procureur de la République près le tribunal aux armées, la chambre de l'instruction a confirmé l'ordonnance déférée ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation ou de la fausse application des articles 113-8 du code pénal, 689, 698-1 à 698-9 du code de procédure pénale, L. 211-1 du code de justice militaire, défaut ou insuffisance de motifs et manque de base légale ; Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation ou de la fausse application de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut ou insuffisance de motifs et manque de base légale ;

Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour dire que l'information a été régulièrement mise en mouvement par la seule plainte avec constitution de partie civile déposée par les ayants droit des militaires tués en Afghanistan et visant des délits de mise en danger d'autrui et de non-empêchement de crimes, l'arrêt attaqué retient que l'application de l'article 113-8 du code pénal reviendrait à vider de sa substance le second alinéa de l'article 698-2 du code de procédure pénale prévoyant que l'action publique peut être mise en mouvement par la partie lésée et que le refus du ministère public d'engager les poursuites priverait les plaignants du droit de faire décider d'une contestation sur leurs droits à caractère civil ;
Attendu qu'en décidant que l'action publique avait été mise en mouvement par la plainte avec constitution de partie civile, l'arrêt attaqué, n'encourt pas les griefs invoqués aux moyens, dès lors que, d'une part, en vertu des dispositions des articles L. 121-1 et L. 121-7 du code de justice militaire, le tribunal aux armées de Paris, devenu juridiction spécialisée de Paris depuis l'entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2011, a compétence, sans aucune restriction, pour connaître des infractions commises hors du territoire de la République par des militaires des forces armées françaises ou à leur encontre ; que, d'autre part, aucune fin de non-recevoir ne peut être opposée à la mise en mouvement de l'action publique par la partie lésée, autre que celles prévues par les articles 85 et suivants du code de procédure pénale, seuls textes auxquels renvoient les dispositions de l'article 698-2 du code précité, et qu'enfin il a été satisfait, comme en l'espèce, aux exigences prévues par l'article 698-1 dudit code ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation ou de la fausse application de l'article 86, alinéa 3, du code de procédure pénale, défaut ou insuffisance de motifs, manque de base légale ;
Attendu que, pour répondre aux réquisitions de non informer du ministère public invoquant l'impossibilité de qualifier pénalement les circonstances de la mort de soldats, tués au combat au cours d'une offensive ennemie, l'absence de relation de causalité entre l'organisation de la mission et ces décès, mise en évidence, sans qu'il soit nécessaire de procéder à de plus amples investigations, par l'analyse circonstanciée faite par l'état-major du cadre, de la conception et des conditions d'exécution de l'opération militaire en cause, l'arrêt attaqué énonce " qu'à supposer les faits démontrés, il peut y avoir eu une maladresse, une imprudence, une inattention, une négligence ou un manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ayant causé directement ou indirectement la mort de militaires français, alors qu'il n'existe aucune exonération de principe pour les actes involontaires réalisés par des militaires pendant des opérations en temps de paix, l'article L. 4111-1 du code de la défense ne pouvant être compris en ce sens " ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs qui établissent que, contrairement aux réquisitions du ministère public, le juge d'instruction avait l'obligation d'instruire en l'absence de cause affectant l'action publique elle-même d'où il aurait résulté que les faits démontrés ne pouvaient comporter une poursuite ou, si, à les supposer démontrés, ils ne pouvaient admettre aucune qualification pénale, la chambre de l'instruction a justifié sa décision au regard des dispositions légales dont la violation est alléguée ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix mai deux mille douze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-81197
Date de la décision : 10/05/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSTRUCTION - Partie civile - Plainte avec constitution - Obligation pour le juge d'informer - Condition

Le juge d'instruction a l'obligation d'instruire en l'absence de cause affectant l'action publique elle-même d'où il résulterait que les faits démontrés ne peuvent comporter une poursuite ou si, à les supposer démontrés, ils ne peuvent admettre aucune qualification pénale


Références :

Sur le numéro 1 : articles L. 121-1, L. 121-7 et L. 211-1 du code de justice militaire

articles 85 et suivants, 698-1 à 698-9 du code de procédure pénale
Sur le numéro 2 : article 86, alinéa 3, du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 30 janvier 2012

Sur le n° 1 : Sur la compétence du tribunal aux armées de Paris, à rapprocher :Crim., 22 janvier 1992, pourvoi n° 91-82776, Bull. crim. 1992, n° 22 (rejet). Sur le n° 2 : Sur l'obligation d'informer et le refus d'informer, à rapprocher :Crim., 18 juillet 1973, pourvoi n° 72-93523, Bull. crim. 1973, n° 334 (cassation) ;

Crim., 20 juin 2006, pourvoi n° 05-86611, Bull. crim. 2006, n° 185 (cassation), et les arrêts cités ;Crim., 6 octobre 2009, pourvoi n° 09-80720, Bull. crim. 2009, n° 164 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 mai. 2012, pourvoi n°12-81197, Bull. crim. criminel 2012, n° 115
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2012, n° 115

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Gauthier
Rapporteur ?: Mme Caron

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:12.81197
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