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02/05/2012 | FRANCE | N°11-85120

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 mai 2012, 11-85120


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Mme Marie-Paule X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 16 mai 2011, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef de constitution de partie civile abusive ou dilatoire, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 91, 485, 512, 591 à 593 du code de procédure pénale, 1382 et 13

83 du code civil, dénaturation des pièces du dossier, défaut de motifs, manque de base lé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Mme Marie-Paule X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 16 mai 2011, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef de constitution de partie civile abusive ou dilatoire, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 91, 485, 512, 591 à 593 du code de procédure pénale, 1382 et 1383 du code civil, dénaturation des pièces du dossier, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action en dommages-intérêts formée par M. Y... à l'encontre de Mme X... en application de l'article 91 du code de procédure pénale et a condamné Mme X... à payer à M. Y... des sommes en réparation de son préjudice matériel et de son préjudice moral et a autorisé M. Y... à faire publier aux frais de Mme X..., pour un coût limité à 1 500 euros, le dispositif de l'arrêt dans l'édition des Hautes-Alpes du journal le Dauphiné libéré ;

"aux motifs que l'article 91 du code de procédure pénale prévoit dans ses dispositions finales que lorsque le juge d'instruction a déclaré la constitution de partie civile abusive ou dilatoire cette décision s'impose au tribunal correctionnel saisi d'une demande d'indemnisation par la personne visée dans une plainte avec constitution de partie civile ; qu'en l'espèce, la motivation de l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction suffit à confirmer le jugement déféré : « il résulte des investigations menées et des explications fournies par M. Y... que celui-ci, s'il n'a pas communiqué sur sa double qualité d'agent immobilier et vendeur du bien litigieux, a suffisamment établi l'avoir effectivement occupé et cette information figurait de manière non contestable dans l'acte authentique de vente ; que cet acte notarié comportait toutes les informations précises aujourd'hui contestées par Mme X... qui a admis avoir signé sans lire ; qu'elle ne saurait se prévaloir de ses propres manquements pour reprocher aux agent immobilier et notaire un défaut d'information ; que cette information a au contraire été large et complète, y compris la situation du bien vis-à-vis de la société SDP : que par ailleurs, Mme X... n'établit pas avoir été personnellement mise en cause par la société SDP, avec la conséquence d'une perte de jouissance de son bien ; qu'elle-même a évalué son bien à une somme supérieure à celle de son acquisition dans le cadre d'une offre de vente, ce qui tend à établir qu'elle estime que le contentieux avec SDP n'est pas de nature à amoindrir la valeur du bien ; qu'au surplus, il apparaît que la présente procédure s'insère dans un contexte de chantage mis en oeuvre par le compagnon de la partie civile aux fins d'obtenir des avantages financiers de la part du témoin assisté (M. Y...) Mme X... ne saurait exciper d'une qualité de néophyte quand elle-même déclare vivre de ses placements immobiliers et son compagnon se réclame d'une activité passée d'agent immobilier » ; que quand bien même le dernier alinéa de cette motivation est plus particulièrement contesté par Mme X..., qui soutient être séparée de longue date de son compagnon et avoir tout ignoré des agissements de celui-ci, ancien agent immobilier et si sa profession de médecin n'en fait pas une spécialiste de la gestion immobilière, elle a eu, avant la réitération de la vente tous éléments d'informations complets sur la situation d'urbanisme de l'immeuble et elle admet aussi avoir sollicité des conseils de tiers avant de signer définitivement ; que de même, elle a, quoi qu'elle en dise, été informée des revendications de la société SDP dans le projet d'acte définitif que le notaire lui a adressé avant la vente ;

"et aux motifs adoptés que le caractère abusif ou dilatoire de la plainte déposée par Mme X... ne peut être remis en cause par le tribunal saisi de la présente procédure ; qu'il est constitutif d'une faute engageant la responsabilité de Mme X... sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;

"1) alors que la décision de condamnation par le juge d'instruction de la partie civile à une amende civile sur le fondement de l'article 177-2 du code de procédure pénale pour constitution abusive ou dilatoire, qui ne bénéficie pas de l'autorité de la chose jugée, ne s'impose au tribunal correctionnel saisi sur le fondement de l'article 91 du même code, que sous la forme d'une présomption simple de faute, dont la preuve contraire peut être rapportée ; qu'il appartient dès lors au juge du fond d'apprécier par lui-même, au vu des circonstances de l'espèce, si la partie civile rapporte la preuve contraire ; qu'en décidant au contraire que le caractère abusif ou dilatoire constaté par le juge d'instruction ne pouvait être remis en cause par le juge correctionnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"2) alors que la partie civile peut apporter la preuve devant le juge correctionnel saisi sur le fondement de l'article 91 du code de procédure pénale que son action n'était pas fautive ; qu'en l'espèce, Mme X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que sa plainte concernait exclusivement le fait que le vendeur lui avait, en toutes connaissances de cause, caché que le bien était grevé d'un bail commercial ; qu'en écartant ce moyen au motif que Mme X... aurait été avertie de l'existence d'un bail dans le projet d'acte définitif que le notaire lui a adressé avant la vente, la cour d'appel a dénaturé ce document dans lequel ne figure aucune mention relative au bail, et qui indique au contraire à la page 4 que « l'immeuble étant libre de toute location et occupation ainsi que le vendeur le déclare »" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que par une ordonnance du 5 mai 2009, devenue définitive, le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre sur la plainte avec constitution de partie civile du chef d'escroquerie déposée par Mme X... qui visait nommément M. Y... ; que ce magistrat a, en outre, condamné Mme X... à une amende civile pour plainte abusive ou dilatoire ;

Attendu que M. Y... a introduit contre Mme X..., en vertu de l'article 91 du code de procédure pénale, une action en indemnisation des préjudices ayant pu lui être causés par cette plainte ; que le tribunal correctionnel a accueilli ses demandes et lui a alloué diverses sommes à titre de dommages-intérêts ;

Attendu que, pour confirmer ce jugement dans son principe, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que le caractère abusif ou dilatoire de la plainte ne peut être remis en cause ; qu'il est constitutif d'une faute engageant la responsabilité de Mme X... sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application du dernier alinéa de l'article 91 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 15 juin 2000, selon lequel la décision définitive rendue en application de l'article 177-2 du même code ayant déclaré la constitution de partie civile abusive ou dilatoire s'impose à la juridiction correctionnelle ;

D'où il suit que le moyen, qui, en sa seconde branche, critique des motifs surabondants de l'arrêt attaqué, ne peut être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que Mme Marie-Paule X... devra verser à M. Sylvain Y... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Roth conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-85120
Date de la décision : 02/05/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

DENONCIATION TEMERAIRE OU ABUSIVE - Action en dommages-intérêts (article 91 du code de procédure pénale) - Caractère abusif ou dilatoire de la plainte - Appréciation - Décision du juge d'instruction déclarant la constitution abusive ou dilatoire - Portée

INSTRUCTION - Partie civile - Plainte avec constitution - Constitution abusive ou dilatoire - Action en dommages-intérêts - Remise en cause du caractère abusif ou dilatoire de la plainte - Possibilité (non) ACTION CIVILE - Partie civile - Constitution - Constitution à l'instruction - Constitution abusive ou dilatoire - Action en dommages-intérêts - Remise en cause du caractère abusif ou dilatoire de la plainte - Possibilité (non)

Il résulte de l'article 91 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 15 juin 2000, que la décision définitive, rendue par la juridiction d'instruction en application de l'article 177-2 de ce code, ayant déclaré la constitution de partie civile abusive ou dilatoire, s'impose à la juridiction correctionnelle. Fait l'exacte application de ce texte la cour d'appel qui retient que le caractère abusif ou dilatoire de la plainte ne peut être remis en cause devant elle à l'occasion d'une action en indemnisation des préjudices causés par une telle plainte


Références :

articles 91 et 177-2 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 16 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 mai. 2012, pourvoi n°11-85120, Bull. crim. criminel 2012, n° 103
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2012, n° 103

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Finielz
Rapporteur ?: M. Roth
Avocat(s) : Me Balat, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.85120
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