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13/04/2012 | FRANCE | N°12-40009

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 avril 2012, 12-40009


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que les questions transmises sont ainsi rédigées :
1°) "le dispositif des articles L. 312-4, L. 312-5, L. 312-6 du code monétaire et financier porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ?" ;
2°) "l'alinéa 2 de l'article L. 312-6 du code monétaire et financier porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ?" ;
3°) "l'article L. 631-1 III du code monétaire et financier porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitut

ion ?" ;
Sur la recevabilité des moyens additionnels :
Attendu que la Cour ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que les questions transmises sont ainsi rédigées :
1°) "le dispositif des articles L. 312-4, L. 312-5, L. 312-6 du code monétaire et financier porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ?" ;
2°) "l'alinéa 2 de l'article L. 312-6 du code monétaire et financier porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ?" ;
3°) "l'article L. 631-1 III du code monétaire et financier porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ?" ;
Sur la recevabilité des moyens additionnels :
Attendu que la Cour de cassation se prononce sur le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité telle qu'elle a été soulevée dans les mémoires distincts produits devant la juridiction qui les lui a transmises ; que par suite sont irrecevables les moyens relatifs à l'incompétence négative du législateur, à l'atteinte par les trois premières dispositions visées (articles L. 312-4, L. 312-5, L. 312-6 du code monétaire et financier) à l'article 66 de la Constitution et, pour ce qui concerne l'alinéa 2 de l'article L. 312-6 du code monétaire et financier, aux articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui sont soulevés pour la première fois devant la Cour de cassation; qu'est également irrecevable le moyen tiré de l'application dans le temps des dispositions de l'article L. 312-6, alinéa 2, du code monétaire et financier, qui a été expressément écarté devant la juridiction qui a transmis cette question ;

Sur la question, en ce qu'elle porte sur les articles L. 312-4, L. 312-5, L. 312-6, alinéa 1, du code monétaire et financier :
Attendu que la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité est subordonnée à la condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure ou constitue le fondement des poursuites ; que tel n'est pas le cas de l'article L. 312-4 du code monétaire et financier qui se borne à délimiter le champ d'intervention du Fonds de garantie ; que l'article L. 312-5-I portant sur l'intervention du Fonds de garantie à titre curatif est également sans incidence sur la solution du litige; que les dispositions de l'article L. 312-5, III, relatives aux mesures que le Fonds de garantie peut prendre et les recours contre ses décisions ne concernent pas non plus le litige ; que celles de l'article L. 312-5, II, sont encore étrangères à l'instance, qui porte seulement sur l'action en responsabilité engagée par le Fonds de garantie contre les dirigeants de droit ou de fait de l'établissement de crédit auprès duquel il est intervenu ; qu'enfin l'article L. 312-6, alinéa 1, relatif à l'action subrogatoire du Fonds de garantie n'est pas en cause ; qu'il s'ensuit que les dispositions critiquées n'étant pas applicables au litige, la question prioritaire de constitutionnalité en ce qu'elle porte sur ces dernières est irrecevable ;
Sur la question, en ce qu'elle porte sur l'article L. 312-6, alinéa 2, du code monétaire et financier :
Attendu que la disposition contestée est applicable au litige, dès lors qu'est en cause l'action exercée par le Fonds de garantie des dépôts contre les dirigeants de droit ou de fait de l'établissement auprès duquel il est intervenu;
Attendu qu'elle n'a pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;
Et attendu, d'autre part, que l'article L. 312-6, alinéa 2, en ce qu'il permet au Fonds de garantie d'engager une telle action, a pour but d'aménager les conditions dans lesquelles la responsabilité des dirigeants de droit ou de fait concernés peut être engagée pour des fautes par eux commises, ayant entraîné son intervention préventive, laquelle est effectuée sur proposition de la Commission bancaire, devenue l'Autorité de contrôle prudentiel, dans des conditions légalement prévues; qu'elle porte sur l'exercice par le Fonds de garantie d'une action en responsabilité de droit commun existante, laquelle doit répondre aux triples critères d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; que, limitée aux sommes versées au titre de son intervention préventive en vue de combler l'insuffisance d'actif résultant des fautes commises par les dirigeants, cette action est exercée par le Fonds de garantie dans le cadre de sa mission de protection des déposants et de la stabilité du système financier ; que répondant ainsi à la mission d'intérêt général que lui a confié le législateur, cette action, qui ne porte atteinte ni au principe de liberté individuelle énoncé à l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ni à la sécurité juridique, ni au principe de confiance légitime, ne présente pas de caractère disproportionné, dès lors que les dirigeants en cause bénéficient des garanties de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; qu'il s'ensuit que la question posée ne présente pas de caractère sérieux au regard des exigences qui s'attachent aux principes de valeur constitutionnelle invoqués ;
Sur la question, en ce qu'elle est relative à l'article L. 631-1-III du code monétaire et financier :
Attendu que la question est recevable, en ce que les dispositions critiquées ont un objet plus large que celui de l'article 54 de la Directive 2004/39/CE, de sorte que le Conseil constitutionnel a compétence pour en contrôler la conformité aux droits et libertés constitutionnellement garantis ;
Attendu que la disposition contestée est applicable au litige, en ce qu'elle concerne les documents produits par le Fonds de garantie dans l'exercice de son action ;
Attendu qu'elle n'a pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;
Et attendu, d'autre part, que le principe invoqué de respect du secret professionnel en cours de procès n'est pas un principe ou un droit garanti par la Constitution ; que sauf à priver de toute portée effective l'échange de renseignements prévu par la disposition contestée, entre la Commission bancaire, devenue l'Autorité de contrôle prudentiel, et le Fonds institué pour garantir la protection des déposants, le caractère confidentiel des renseignements échangés ne peut faire obstacle à leur utilisation devant les juridictions par le Fonds de garantie, dans l'exercice des missions d'intérêt général qui lui sont imparties ; que cette disposition relative à l'administration de la preuve s'applique aux instances en cours et ne méconnaît ni l'égalité des armes ni les règles du procès équitable ; que, dès lors que ces renseignements sont versés régulièrement aux débats et soumis à la libre discussion des parties, cette disposition n'a pas pour effet de faire obstacle au droit à une procédure juste et équitable, à l'équilibre des droits des parties, aux droits de la défense et à un recours juridictionnel effectif ; que la question posée ne présente donc pas un caractère sérieux au regard des exigences qui s'attachent aux principes de valeur constitutionnelle invoqués ;
D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE la première question prioritaire de constitutionnalité, en ce qu'elle porte sur les articles L. 312-4, L. 312-5 et L. 312-6, alinéa 1, du code monétaire et financier, ainsi que la deuxième question en ce qu'elle porte sur l'application dans le temps et la conformité aux dispositions de l'article 66 de la Constitution des dispositions de l'article L. 312-6, alinéa 2, du code monétaire et financier ;
DIT N'Y AVOIR LIEU A RENVOYER au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité, en ce qu'elles portent sur les articles L. 312-6, alinéa 2, et L. 631-1, III, du code monétaire et financier .
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille douze.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-40009
Date de la décision : 13/04/2012
Sens de l'arrêt : Qpc - non-lieu à renvoi au conseil constitutionnel
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Code monétaire et financier - Article L. 631-1 III - Respect du secret professionnel - Droit à une procédure juste et équitable, à l'équilibre des droits des parties - Droits de la défense - Droit à un recours juridictionnel effectif - Non-lieu à renvoi devant le Conseil constitutionnel - Caractère sérieux - Défaut


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 janvier 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 avr. 2012, pourvoi n°12-40009, Bull. civ. 2012, IV, n° 83
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, IV, n° 83

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Batut
Rapporteur ?: Mme Riffault-Silk
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Piwnica et Molinié, SCP Vincent et Ohl, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:12.40009
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