LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. François X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 28 juin 2011, qui a ordonné le retrait d'une mesure de suspension de peine ;
Vu le mémoire et le mémoire rectificatif produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 132-44 et 132-45 du code pénal, 720-1-1 et 593 du code de procédure pénale, 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de base légale, défaut de motifs :
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a dit n'y avoir lieu d'ordonner une expertise médicale et a retiré la suspension de peine accordée à M. X... le 12 mai 2005 ;
"aux motifs que le tribunal de l'application des peines de Créteil le 16 mars 2005, puis la cour d'appel de Paris le 12 mai 2005, ont accordé à M. X... le bénéfice de la suspension de peine eu égard à son état de santé, lié à une pathologie qui engage le pronostic vital incompatible avec la détention ; qu'il a été soumis aux obligations suivantes :- établir sa résidence au : ...,- tenir le juge de l'application des peines informé de son lieu de résidence ou d'hospitalisation et l'informer de toute modification,- se soumettre à toute expertise médicale,- recevoir les visites du travailleur social du service pénitentiaire d'Insertion et de probation et lui communiquer les renseignements ou documents de nature à permettre le contrôle de l'exécution de ses obligations - répondre aux convocations du juge de l'application des peines ;qu'il résulte suffisamment des éléments de la procédure que M. X..., s'il s'est rendu régulièrement à Pessac, ville dans laquelle il a effectivement conservé un domicile, pour y rencontrer les travailleurs sociaux et le juge de l'application des peines, a néanmoins beaucoup voyagé (Paris et Espagne) et a eu une résidence secondaire et manifeste à Marseille ; que par ailleurs sa présence est établie dans le département des Bouches du Rhône à Marseille le 3 février 2009, le 2 juin 2009 à Bouc Bel air, le 19 février 2009, le 20 février 2009, le 19 juin 2009, le 25 juin 2009 à Fréjus dans le département du Var le 25 août 2009, le tout en infraction à une interdiction de séjour qui s'imposait à lui ; que M. X... ne peut qu'admettre n'avoir pas sollicité d'autorisation, ni même informé le juge de l'application des peines de ses déplacements et des modifications apportées à sa résidence, et n'avoir pas permis aux travailleurs sociaux d'exercer leur contrôle, puisque sa volonté était à l'évidence de dissimuler sa présence en des lieux interdits ; que l'obligation de résidence ne peut s'entendre que de l'obligation d'habiter effectivement et concrètement les lieux désignés et non pas d'y séjourner seulement ponctuellement ; que de même, l'obligation de contrôle à laquelle M. X... était soumis lui imposait de communiquer au travailleur social tous les renseignements matériels, sur ses déplacements, sauf à vider le contrôle de tout sens et de toute réalité ; qu'en ne le faisant pas, il a commis des manquements délibérés qui sont des violations multiples et répétées à ses obligations ; qu'indépendamment et sans lien avec les éventuelles infractions commises pour lesquelles il a été ou sera, le cas échéant condamné, ce sont les manquements relevés qui caractérisent son comportement global de non-respect des obligations particulières imposées par la décision qui lui a accordé la suspension de peine pour raison médicale, qui doivent être sanctionnés ; que les dispositions de l'alinéa 6 de l'article 720-1-1 du code de procédure pénale envisagent la fin de la suspension de peine, que celle-ci est prévue lors du rétablissement du condamné, en présence d'un risque grave de renouvellement de l'infraction ou si le condamné ne respecte pas les obligations qui lui ont été imposées ; qu'ainsi, le non-respect des obligations doit s'apprécier indépendamment de toute problématique médicale, que les conditions de retrait de la suspension de peine de M. X... étant dûment établies et réunies, il n'est pas besoin de réexaminer sa situation médicale, et le tribunal de l'application des peines a écarté à juste titre sa demande d'expertise médicale par un collège d'experts ; qu'il sera surabondamment observé, qu'en liberté, il a pu mener une vie parfaitement normale, avec une activité sportive intense, sans crainte d'un brutal accident cardiaque, et que détenu depuis août 2009, au centre des Baumettes, il n'a encore jamais été admis à l'Unité Hospitalière Sécurisée Inter régionale, structure médicale appropriée aux contraintes d'une détention médicalisée ;
"1) alors que le retrait de la mesure de suspension de peine pour non-respect des obligations imposées au condamné, ne peut être prononcé que s'agissant d'obligations ou interdictions qui lui ont été spécialement et précisément imposées en accompagnement de la suspension de peine ; qu'en l'espèce l'obligation de résidence n'était assortie d'aucune interdiction de se déplacer ou de séjourner en d'autres lieux, les déplacements eux-mêmes n'étant soumis à aucune autorisation préalable ; que dès lors ni les déplacements et séjours de M. X... en d'autres lieux que sa résidence, ni l'absence d'autorisation ou d'information données concernant ces déplacements ne pouvaient légalement justifier le retrait de la suspension de peine ;
"2) alors que l'arrêt attaqué qui constate que M. X... a établi son domicile à Pessac, que sa présence a été observée dans d'autres départements trois jours de février 2009, trois jours de juin 2009, une journée d'août 2009, relève sans autre précision « qu'il a beaucoup voyagé » et a eu une résidence secondaire « manifeste » à Marseille, ne pouvait déduire de ces seules constatations qu'il n'aurait séjourné que « ponctuellement » à Pessac pour en déduire qu'il aurait manqué à son obligation d'y résider ; que l'arrêt attaqué est ainsi dépourvu de toute base légale ;
"3) alors que le juge qui décide de retirer une mesure de suspension de peine prononcée en raison de la pathologie du condamné engageant son pronostic vital, ne peut refuser de prendre en compte l'état de santé de celui-ci dans la motivation de sa décision ; qu'en l'espèce, la suspension de peine ayant été accordée exclusivement pour motif médical, les juges du fond, pour ordonner le retrait de cette mesure, ne pouvaient refuser d'apprécier la compatibilité actuelle de la détention avec l'état de santé de l'intéressé ; que l'arrêt attaqué a ainsi violé les textes visés au moyen" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., condamné par arrêt de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône du 30 juin 1988 à la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité d'assassinat, a obtenu, par arrêt du 12 mai 2005 devenu définitif, une suspension de peine médicale sur le fondement de l'article 720-1-1 du code de procédure pénale ; qu'il a été placé en détention provisoire le 28 août 2009 dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs ;
Attendu que, pour ordonner la fin de la mesure de suspension de la peine, l'arrêt confirmatif attaqué relève, par motifs propres et adoptés, que le condamné, soumis par la décision de suspension de peine à l'obligation d'établir sa résidence à Pessac (Gironde), a en réalité établi sa résidence avec son épouse à Marseille (Bouches-du-Rhône) ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'application des peines a justifié sa décision, qui ne préjuge pas des modalités de la détention en fonction de l'état de santé réel de l'intéréssé ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Leprieur conseiller rapporteur, M. Pometan conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;