Attendu, selon l'arrêt attaqué, que pour la mise en oeuvre de produits de défiscalisation proposés à des investisseurs, la banque Sofal a consenti à la société en nom collectif Rome (la SNC) dont le terme statutaire était fixé au 31 décembre 2007, un prêt d'un certain montant ; que les investisseurs, associés de la SNC se sont rendus cautions divises du prêt à concurrence de leur participation dans le capital de la société, la banque ayant expressément renoncé au caractère solidaire et indéfini de leurs engagements ; que par acte du 31 janvier 2002, la société Whbl 7, aux droits de la banque Sofal a cédé un portefeuille de créances comprenant le prêt à la société Calyon, aux droits de laquelle vient la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank (la banque) ; que la SNC ayant été défaillante, la banque l'a assignée en remboursement des prêts ainsi que les cautions, qui ont contesté sa qualité à agir faute de communication de l'acte original de cession ; que le jugement condamnant la SNC et les associés à payer différentes sommes à la banque a été frappé d'appel par les associés, suivant déclaration du 6 décembre 2006 ; que par conclusions signifiées le 11 décembre 2009, la SNC a fait appel incident ;
Sur le second moyen, en ce qu'il est dirigé contre les investisseurs :
Attendu que la banque reproche à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes de paiement d'une certaine somme à l'encontre de la SNC et des investisseurs ainsi que de l'avoir condamnée à rembourser les sommes versées en exécution du jugement, alors, selon le moyen :
1°/ que l'obligation de communiquer, qui est une des charges du procès civil, consiste, pour la partie qui y est tenue, à faire connaître à son adversaire les pièces dont elle entend se prévaloir à l'appui de sa prétention ; qu'elle a pour objet de mettre la partie adverse à même d'organiser sa défense ; que ses modalités d'exécution dépendent des circonstances de la cause particulière dans laquelle la communication doit avoir lieu, et, plus spécialement, des impératifs auxquels les parties se trouvent soumises, tel le secret professionnel ; que la banque, liée par le secret professionnel du banquier, offrait de communiquer l'original de l'entier acte de cession du 31 janvier 2002 en le tenant à la disposition de ses adversaires et de leurs conseils pour consultation ; qu'en lui objectant « que le principe du droit au procès équitable posé par l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales impose au juge de ne statuer que sur des pièces loyalement, donc intégralement, communiquées à toutes les parties au procès, de manière à ce qu'elles puissent en débattre à armes égales », sans se demander si les modalités d'exécution de l'obligation de communiquer que la banque proposait n'étaient pas, compte tenu du secret professionnel auquel elle était tenue, propres, d'une part, à faire connaître à ses adversaires le contenu intégral de l'acte de cession du 31 janvier 2002, et, d'autre part, à leur permettre d'organiser leur défense, la cour d'appel a violé les articles 2, 3, 15, 16, 132 et 134 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 511-33 et suivants du code monétaire et financier ;
2°/ que la banque faisait valoir, dans sa signification du 27 janvier 2010, qu'« afin de satisfaire à l'arrêt de la cour en date du 5 février 2009 sans enfreindre les dispositions légales d'ordre public relatives au secret professionnel du banquier, le conseil de la banque a, par lettre officielle du 17 février 2009, rappelé à ses confrères que, la loi lui faisant interdiction de diffuser des copies de l'acte de cession du 31 janvier 2002, l'original était tenu à leur disposition pour consultation », que « le conseil de M. X... refusant par principe de prendre connaissance de l'original de l'acte, un rendez-vous de procédure était sollicité à l'initiative de la banque, afin d'examiner les modalités de communication de l'acte, rendez-vous de procédure qui s'est tenu le 12 mai 2009 en présence de Mme le conseiller David », qu'« en présence des avoués, Mme le conseiller :/. a tout d'abord constaté que la copie de l'acte de cession et partiellement de son annexe certifiée conforme à l'original par Me Y... (expurgée des noms des débiteurs) était conforme à l'original qui lui était présenté ainsi qu'à l'avocat de M. X... … ;/. a rappelé que la diffusion des noms des débiteurs était prohibée par les dispositions du code monétaire et financier et du code pénal ;/ mais surtout a également constaté que le conseil de M. X... a refusé à plusieurs reprises de prendre connaissance de l'original de l'acte » ; qu'en énonçant que la banque ne s'est pas conformée à son obligation de communiquer l'acte de cession du 31 janvier 2002, sans s'expliquer sur ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la banque a persévéré à ne vouloir présenter à ses contradicteurs l'acte de cession qu'en communication et s'est bornée à produire un document comportant des anomalies évidentes, l'arrêt retient que la banque n'a pas produit un extrait authentique de l'acte de cession, demandé à la suite de la réouverture des débats, par lequel le notaire certifie la provenance du document comme son caractère intégralement probant et précise qu'aucune disposition de l'acte autre que celles figurant à l'extrait n'est susceptible de concerner les parties au litige ; que par ce motif non critiqué, duquel elle a déduit que ce document aurait permis de concilier le droit des parties à obtenir les pièces qu'elles ne détiennent pas et qui sont nécessaires à leur défense et le principe du secret professionnel, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles 1134 et 1844-7 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande de la banque tendant à faire déclarer irrecevable l'appel de la SNC, l'arrêt retient que si dans le principe, une société prend fin à l'expiration du temps pour lequel elle a été constituée, elle n'est effectivement dissoute que si les associés ont été convoqués, au moins un an avant le terme convenu et ont décidé expressément la dissolution ; que dans le cas contraire, la société conserve sa personnalité juridique, ses organes et sa capacité à ester en justice ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de toute prorogation expresse ou tacite de sa durée, la SNC, dissoute par l'arrivée de son terme, aurait dû être représentée par un liquidateur, ce dont il résultait que l'appel de la SNC était irrecevable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevable l'appel formé par la société en nom collectif Rome, l'arrêt rendu le 24 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit irrecevable l'appel incident interjeté par la société en nom collectif Rome ;
Condamne la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer une somme de 2 500 euros à M. X... et rejette sa demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Capron, avocat aux Conseils, pour la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré recevable l'appel que la société Rome formait contre le jugement par lequel le tribunal de grande instance de Paris l'a condamnée à payer à la société Calyon, aux droits de qui vient la société Crédit agricole corporate and investment bank, la somme de 541 050 € 35, augmentée, d'une part, à compter du 15 juin 2002 et à concurrence de 256 022 € 36, d'autre part, à compter du 12 novembre 2002 et à concurrence de 282 027 € 99, des intérêts au taux contractuel majoré de 11, 20 %, ainsi que des intérêts desdits intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
AUX MOTIFS QUE « si, dans le principe, une société prend fin à l'expiration du temps pour lequel elle a été constituée, elle n'est effectivement dissoute que si les associés ont été convoqués, au moins un an avant le terme convenu et ont décidé expressément sa dissolution ; que, dans le cas contraire, la société conserve sa personnalité juridique ; ses organes et sa capacité à ester en justice » (cf. arrêt attaqué, p. 14, 1er considérant) ; « que ni l'extrait k bis de la société en nom collectif Rome, ni aucune autre pièce produite aux débats ne révèlent une décision expresse de dissolution de la société, dont le terme statutaire était le 31 décembre 2007 » (cf. arrêt attaqué, p. 14, 2e considérant) ; « qu'il s'ensuit que le moyen d'irrecevabilité n'est pas fondé » (cf. arrêt attaqué, p. 14, 3e considérant) ;
. ALORS QUE la société est dissoute de plein droit par l'échéance de son terme ; qu'en subordonnant la dissolution de la société Rome, dont elle constate qu'elle est parvenue à l'échéance de son terme, à la condition que ses associés aient pris la décision de la dissoudre, la cour d'appel a violé l'article 1844-7, alinéa 1er, du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR :
. débouté la société Cayon, aux droits de qui vient la société Crédit agricole corporate and investment bank, de l'action qu'elle formait pour voir condamner la société Rome à lui payer la somme de 541 050 € 35, augmentée, à compter du 15 juin 2002 et à concurrence de 256 022 € 36 et à compter du 12 novembre 2002 et à concurrence de 282 027 € 99, des intérêts au taux contractuel majoré de 11, 20 %, ainsi que des intérêts desdits intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
. débouté la société Cayon, aux droits de qui vient la société Crédit agricole corporate and investment bank, de l'action qu'elle formait pour voir condamner, à défaut de la société Rome, M. Laurent Z... à lui payer la comme de 12 221 € 64, M. et Mme Patrick A..., la somme de 6 110 € 84, Mme Jacqueline B..., la somme de 12 221 € 64, M. François C..., la somme de 59 720 € 98, M. et Mme Bruno D..., la somme de 16 295 € 52, M. et Mme Pierre E..., la somme de 4 073 € 88, M. et Mme Dominique F... la somme de 5 092 € 36, M. Jean-Bernard G..., la somme de 18 332 € 47, M. Pascal H..., la somme de 13 240 € 12, M. Jean-Paul I..., la somme de 6 110 € 84, M. et Mme Jacques J..., la somme de 11 712 € 42, M. et Mme André K..., ainsi que la société Sains, la somme de 20 369 € 43, M. Dominique L..., la somme de 4 073 € 88, M. Laurent M..., ainsi que la société Ljh investissements, la somme de 30 554 € 22, M. Bruno N..., ainsi que la société Barlaf, la somme de 4 684 € 97, M. et Mme Daniel P..., la somme de 12 221 € 64, M. Hubert P..., la somme de 18 332 € 47, M. et Mme Jean-Pierre Q..., ainsi que la société Jpg investissements, la somme de 5 092 € 36, M. Bruno R..., ainsi que la société Bg investissements, la somme de 24 443 € 31, M. Christian S..., la somme de 7 740 € 37, M. Patrick T..., la somme de 6 110 € 84, M. Jean-Pierre U..., la somme de 18 332 € 47, M. et Mme Patrick V..., la somme de 13 240 € 12, M. Frédéric W..., la somme de 20 369 € 43, M. Philippe XX..., la somme de 5 092 € 36, M. et Mme Philippe YY..., ainsi que la société Agur, la somme de 5 499 € 75, M. Alexandre ZZ..., la somme de 18 332 € 47, M. et Mme Yves AA..., la somme de 16295 € 52, M. et Mme Éric BB..., la somme de 6 925 € 58, M. et Mme Philippe CC..., la somme de 2 851 € 70, M. Éric DD..., ainsi que la société Lj participations, la somme de 7 129 € 28, M. Christian EE..., la somme de 10 693 € 94, M. et Mme Olivier FF..., ainsi que la société Aurore investissements, la somme de 14 258 € 60, M. et Mme Xavier GG..., la somme de 10 184 € 72, M. Patrick HH..., la somme de 4 073 € 88, M. et Mme Jihad O..., la somme de 29 535 € 67, M. et Mme Jacques II..., ainsi que la société Jt investissements, la somme de 4 073 € 88, M. Serge JJ..., la somme de 20 369 € 43, et M. Michel X..., la somme de 28 517 € 19 ;
. condamné la société Calyon, aux droits de qui vient la société Crédit agricole corporate and investement bank, à restituer, aux parties qui les ont payées, les sommes qu'elle a perçues en exécution jugement entrepris ;
AUX MOTIFS QUE « la cour constate que la société Calyon produit, sous la cote 15 de son dossier, la copie authentique intégrale de l'acte de dépôt de pièces dressé par Me Y..., notaire à Paris, en date du 31 janvier 2002 » (cf. arrêt attaqué, p. 15, 4e considérant) ; « qu'il est établi que ce document, qui ne correspond pas a un numéro de bordereau de communication de pièces de la société Calyon, n'a pas été produit aux autres parties auxquelles n'a été communiquée qu'une photocopie très partielle comportant cinq pages » (cf. arrêt attaqué, p. 15, 5e considérant) ; « que le principe du droit au procès équitable posé par l'article 6, § 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales impose au juge de ne statuer que sur des pièces loyalement, donc intégralement, communiquées à toutes les parties au procès, de manière à ce qu'elles puissent en débattre à armes égales ; que l'article 16, alinéa 1er, du code de procédure civile rappelle que le juge doit, en toute circonstance, respecter et faire respecter le principe de la contradiction » (cf. arrêt attaqué, p. 15, 6e considérant) ; « que la société Calyon prétend que la communication intégrale de la pièce sollicitée par ses contradicteurs constituerait une violation du secret professionnel et se refuse à la produire normalement à ses contradicteurs au mépris d'une décision de justice, mais la remet au juge, hors de toute production conforme aux règles légales et déontologiques, lui demandant ipso facto de se rendre complice d'une violation du secret professionnel invoqué tout en violant le principe du contradictoire » (cf. arrêt attaqué, p. 15, 17e considérant) ; « qu'il échet de rejeter cette pièce des débats » (cf. arrêt attaqué, p. 15, 18e considérant) ;
1. ALORS QUE l'obligation de communiquer, qui est une des charges du procès civil, consiste, pour la partie qui y est tenue, à faire connaître à son adversaire les pièces dont elle entend se prévaloir à l'appui de sa prétention ; qu'elle a pour objet de mettre la partie adverse à même d'organiser sa défense ; que ses modalités d'exécution dépendent des circonstances de la cause particulière dans laquelle la communication doit avoir lieu, et, plus spécialement, des impératifs auxquels les parties se trouvent soumises, tel le secret professionnel ; que la société Calyon, liée par le secret professionnel du banquier, offrait de communiquer l'original de l'entier acte de cession du 31 janvier 2002 en le tenant à la disposition de ses adversaires et de leurs conseils pour consultation ; qu'en lui objectant « que le principe du droit au procès équitable posé par l'article 6, § 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales impose au juge de ne statuer que sur des pièces loyalement, donc intégralement, communiquées à toutes les parties au procès, de manière à ce qu'elles puissent en débattre à armes égales », sans se demander si les modalités d'exécution de l'obligation de communiquer que la société Calyon proposait n'étaient pas, compte tenu du secret professionnel auquel elle était tenue, propres, d'une part, à faire connaître à ses adversaires le contenu intégral de l'acte de cession du 31 janvier 2002, et, d'autre part, à leur permettre d'organiser leur défense, la cour d'appel a violé les articles 2, 3, 15, 16, 132 et 134 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 511-33 et suivants du code monétaire et financier ;
2. ALORS QUE la société Calyon faisait valoir, dans sa signification du 27 janvier 2010, pp. 8 et 9, qu'« afin de satisfaire à l'arrêt de la cour en date du 5 février 2009 sans enfreindre les dispositions légales d'ordre public relatives au secret professionnel du banquier, le conseil de Calyon a, par lettre officielle du 17 février 2009, rappelé à ses confrères que, la loi lui faisant interdiction de diffuser des copies de l'acte de cession du 31 janvier 2002, l'original était tenu à leur disposition pour consultation », que « le conseil de M. X... refusant par principe de prendre connaissance de l'original de l'acte, un rendez-vous de procédure était sollicité à l'initiative de Calyon, afin d'examiner les modalités de communication de l'acte, rendez-vous de procédure qui s'est tenu le 12 mai 2009 en présence de Mme le conseiller David », qu'« en présence des avoués, Mme le conseiller :/. a tout d'abord constaté que la copie de l'acte de cession et partiellement de son annexe certifiée conforme à l'original par Me Y... (expurgée des noms des débiteurs) était conforme à l'original qui lui était présenté ainsi qu'à l'avocat de M. X... … ;/. a rappelé que la diffusion des noms des débiteurs était prohibée par les dispositions du code monétaire et financier et du code pénal ;/ mais surtout a également constaté que le conseil de M. X... a refusé à plusieurs reprises de prendre connaissance de l'original de l'acte » ; qu'en énonçant que la société Calyon ne s'est pas conformée à son obligation de communiquer l'acte de cession du 31 janvier 2002, sans s'expliquer sur ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.