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03/11/2011 | FRANCE | N°10-87502

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 novembre 2011, 10-87502


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Daouda X...,
contre l'arrêt de cour d'appel de PARIS, chambre 8-2, en date du 29 septembre 2010, qui, pour infractions à la législation sur les stupéfiants, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement dont dix mois avec sursis et mise à l'épreuve ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 octobre 2011 où étaient présents : M. Louvel président, Mme Moreau conseiller rapporteur, MM. Dulin, Rognon, Couaillier, Bayet, Mme Canivet-Beuzit,

M. Bloch, Mme Mirguet conseillers de la chambre, Mme Labrousse conseiller réfé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Daouda X...,
contre l'arrêt de cour d'appel de PARIS, chambre 8-2, en date du 29 septembre 2010, qui, pour infractions à la législation sur les stupéfiants, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement dont dix mois avec sursis et mise à l'épreuve ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 octobre 2011 où étaient présents : M. Louvel président, Mme Moreau conseiller rapporteur, MM. Dulin, Rognon, Couaillier, Bayet, Mme Canivet-Beuzit, M. Bloch, Mme Mirguet conseillers de la chambre, Mme Labrousse conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Salvat ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire MOREAU, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général SALVAT ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 706-106, 706-73, 706-88, 706-101 du code de procédure pénale, 222-32 à 222-40 du code pénal, du principe du contradictoire et des droits de la défense, violation de l'article préliminaire du code de procédure pénale, de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la procédure, déjà soulevée in limine litis en première instance ;
"aux motifs que les prévenus reprennent in extenso les conclusions régulièrement déposées in limine litis en première instance soutenant que les dispositions de l'article 706-106 du code de procédure pénale ont été violées et demandent en conséquence d'annuler les procès-verbaux de comparution immédiate les concernant et de déclarer la saisine du tribunal irrégulière ; mais que c'est par de justes motifs que la cour adopte que les premiers juges ont fait valoir que les dispositions prévues à l'article 706-106 du code de procédure pénale, relatives à la présence de l'avocat devant M. le procureur de la République, ne sont pas applicables dès lors que les dispositions dérogatoires prévues aux articles 706-80 à 706-95 du code de procédure pénale n'ont pas été mises en oeuvre après avoir encore observé que le délai de la garde à vue n'avait pas excédé 48 heures ; que le rejet de l'exception de nullité sera donc confirmée ;
"1) alors que, lorsqu'il est fait application des dispositions des articles 706-80 à 706-95 du code de procédure pénale, la personne qui est déférée devant le procureur de la République a droit à la désignation d'un avocat ; que M. X... qui a été placé en garde à vue, puis a comparu devant le procureur de la République, sous le régime dérogatoire issu de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 (article 706-73 et suivants du code de procédure pénale), applicable notamment au trafic de stupéfiants, n'ayant pas eu la possibilité de voir un avocat pendant sa garde à vue et n'ayant pas été avisé, au moment de son défèrement devant le procureur de la République, de son droit à être assisté d'un avocat, a été privé des droits et garanties spécifiques institués par cette procédure d'exception, peu important qu'aucune prolongation exceptionnelle de sa garde à vue n'ait eu lieu, dans la mesure où c'était bien le régime dérogatoire au droit commun qui était appliqué, comme en témoigne le visa de l'article 706-88 du code de procédure pénale dans le procès-verbal de notification de mise en garde à vue du 17 septembre 2009 ; que la nullité du procès-verbal de comparution immédiate et de la procédure subséquente est donc encourue ; que c'est à tort et en violation des textes et principes susvisés que l'arrêt attaqué a décidé le contraire ;
"2) alors que M. X... n'ayant pas comparu assisté d'un avocat devant le procureur de la République a, non seulement, été privé de l'exercice plein et entier des droits de la défense, mais encore n'a pas eu la possibilité de demander l'ouverture d'une information, qui est toujours envisageable après que le procureur de la République a entendu les observations du mis en cause et les observations de son avocat, en application des dispositions de l'article 706-106 du code de procédure pénale ; qu'ainsi, M. X... a donc été privé irrégulièrement de la possibilité de demander par la voie d'un avocat l'ouverture d'une information, en violation des textes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., à l'issue d'une garde à vue n'ayant pas excédé quarante-huit heures, a été poursuivi pour infractions à la législation sur les stupéfiants ; qu'il a soulevé, devant la juridiction correctionnelle, l'exception de nullité du procès-verbal de comparution immédiate motif pris de ce qu'il n'avait pas été assisté par un avocat lors de sa présentation devant le procureur de la République, en méconnaissance de l'article 706-106 du code de procédure pénale ;

Attendu que, pour confirmer le jugement ayant écarté cette exception, l'arrêt, après avoir relevé que le délai de garde à vue n'avait pas excédé quarante-huit heures, retient que l'article précité n'est pas applicable dès lors que les dispositions dérogatoires prévues aux articles 706-80 à 706-95 du code de procédure pénale n'ont pas été mises en oeuvre ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-24 du code pénal dans sa rédaction résultant de la loi du 24 novembre 2009, 221-9-1 du même code, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a prononcé une peine d'emprisonnement pour partie sans sursis ;
"aux motifs que les peines prononcées à l'encontre des deux mis en cause ont été explicitement motivées par la décision déférée qui a tenu compte non seulement de la gravité relative des faits inhérents à la faible quantité des produits saisis, mais également à la personnalité respective des auteurs, à leurs antécédents judiciaires et au besoin que ces deux jeunes de bénéficier d'un encadrement, afin de tenter de les amener à trouver une insertion professionnelle qui constituera la meilleure prévention d'une éventuelle récidive ;
"et aux motifs, à les supposer adoptés, que la gravité des faits, s'agissant de la vente organisée et à titre habituel d'un produit extrêmement nocif en terme de santé publique, de surcroît dans un quartier dont les riverains souffrent quotidiennement des nombreuses nuisances liées au trafic de stupéfiants qui s'y est développé, justifie le prononcé d'une peine d'emprisonnement au quantum significatif, plus particulièrement pour M. X... qui apparaît dans la procédure comme le principal protagoniste des faits, et qui est en outre celui qui cumule le plus d'antécédents judiciaires ; qu'il est tout aussi indispensable d'organiser un encadrement de ces très jeunes délinquants, afin de tenter de les amener à trouver une insertion professionnelle qui constituera la meilleure prévention d'une éventuelle récidive, en assortissant pour moitié ces sanctions d'un sursis avec mise à l'épreuve ; qu'en conséquence, MM. Y... et Z... seront condamnés à douze mois d'emprisonnement, dont six avec sursis et mise à l'épreuve pendant deux ans, et M. X... à dix-huit mois d'emprisonnement, dont dix avec sursis et mise à l'épreuve pendant deux ans ;
"alors qu'il résulte de l'article 132-24 du code pénal, issue de la loi du 24 novembre 2009, qu'en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive prononcées en application de l'article 132-19-1 du code pénal, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28 du même code ; qu'après avoir déclaré M. X... coupable de l'infraction reprochée, pour le condamner à une peine d'emprisonnement en partie ferme, l'arrêt attaqué se borne à se référer à la gravité relative des faits et aux antécédents judiciaires du prévenu, sans envisager la possibilité de mettre en oeuvre une mesure d'aménagement et sans caractériser l'absolue nécessité de la peine d'emprisonnement ferme, dans la mesure où la circonstance de récidive n'avait pas été retenue ; qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés" ;
Vu l'article 132-24 du code pénal ;
Attendu qu'il résulte de ce texte, qu'en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive prononcées en application de l'article 132-19-1 du code pénal, lorsque la peine d'emprisonnement sans sursis prononcée n'est pas supérieure à deux ans, cette peine doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28 dudit code ;
Attendu que, pour condamner M. X... à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement dont dix mois assortis du sursis avec mise à l'épreuve, l'arrêt prononce par les motifs propres et adoptés repris au moyen ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la personnalité et la situation du condamné permettaient d'aménager la peine d'emprisonnement sans sursis ni justifier d'une impossibilité matérielle empêchant cet aménagement, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle sera limitée à la peine, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 29 septembre 2010, mais en ses seules dispositions relatives à la peine d'emprisonnement, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trois novembre deux mille onze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-87502
Date de la décision : 03/11/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PEINES - Peines contraventionnelles - Peine d'emprisonnement sans sursis prononcée par la juridiction correctionnelle - Article 132-24 du code pénal issu de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 - Application - Portée

PEINES - Peines correctionnelles - Peine d'emprisonnement sans sursis prononcée par la juridiction correctionnelle - Conditions - Impossibilité d'ordonner une mesure d'aménagement - Caractérisation

Ne répond pas aux exigences de la motivation spéciale imposée par l'article 132-24, alinéa 3, du code pénal et encourt, dès lors, la cassation, l'arrêt qui prononce une peine d'emprisonnement, pour partie sans sursis, sans rechercher si la personnalité et la situation du condamné permettaient d'aménager cette peine ni justifier d'une impossibilité matérielle empêchant cet aménagement


Références :

Sur le numéro 1 : articles 706-80 à 706-95 et 706-106 du code de procédure pénale
Sur le numéro 2 : article 132-24, alinéa 3, du code pénal

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 septembre 2010

Sur le n° 2 : Sur l'exigence de motivation spéciale imposée par l'article 132-24, alinéa 3, du code pénal, à rapprocher :Crim., 12 octobre 2010, pourvoi n° 10-81044, Bull. crim. 2010, n° 156 (cassation partielle) ;Crim., 10 novembre 2010, pourvoi n° 10-80265, Bull. crim. 2010, n° 179 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 nov. 2011, pourvoi n°10-87502, Bull. crim. criminel 2011, n° 226
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2011, n° 226

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Salvat
Rapporteur ?: Mme Moreau
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.87502
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