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06/07/2011 | FRANCE | N°10-21134

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 juillet 2011, 10-21134


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que le 18 février 1983, René et Geneviève X... ont consenti une donation-partage portant sur des immeubles à leurs trois enfants, Mme Y..., MM. Francis et Pascal X..., avec réserve d'usufruit jusqu'à leur décès ; qu'il était stipulé que, lors du règlement de la succession du dernier donateur, Mme Y... verserait à chacun de ses frères une soulte, qui subirait une variation égale à celle de l'indice du coût de la construction et serait diminuée de 3 % par an pour teni

r compte de la vétusté des immeubles ; que M. Francis X... a contesté la...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que le 18 février 1983, René et Geneviève X... ont consenti une donation-partage portant sur des immeubles à leurs trois enfants, Mme Y..., MM. Francis et Pascal X..., avec réserve d'usufruit jusqu'à leur décès ; qu'il était stipulé que, lors du règlement de la succession du dernier donateur, Mme Y... verserait à chacun de ses frères une soulte, qui subirait une variation égale à celle de l'indice du coût de la construction et serait diminuée de 3 % par an pour tenir compte de la vétusté des immeubles ; que M. Francis X... a contesté la validité de cette clause ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 12 mai 2010) d'avoir dit que la clause intitulée " Paiement de la soulte ", insérée dans l'acte de donation-partage du 18 février 1983, était non écrite alors, selon le moyen, que dans leur rédaction applicable à la cause, antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° du 23 juin 2006, les dispositions des articles 1075-2 et 833-1 du code civil permettaient qu'il soit convenu que les soultes mises à la charge d'un donataire qui a obtenu des délais de paiement ne varient pas ; qu'elles permettaient donc également qu'il soit convenu qu'elles varient selon des modalités autres que celles prévues au premier alinéa du texte, qui prévoit une variation selon les circonstances économiques ; que dès lors, en jugeant non écrite la clause qui, en l'espèce, stipulait que la soulte mise à la charge de Mme X... varierait selon l'indice des prix à la construction moins un pourcentage permettant de prendre en considération la vétusté de l'immeuble, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la variation conventionnelle retenue pouvait conduire à une diminution de la soulte tandis que la variabilité légale pouvait aboutir à une augmentation de celle-ci, la cour d'appel en a exactement déduit que la clause conventionnelle de variation de la soulte, en ce qu'elle permettait d'exclure la variabilité légale d'ordre public, devait être déclarée non écrite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... et la condamne à payer à M. Francis X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour Mme Y... ;
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la clause intitulée " Paiement de la soulte ", insérée dans l'acte de donation partage du 18 février 1983, était non écrite ;
AUX MOTIFS QUE s'agissant en l'espèce d'une donation-partage, il y a lieu d'appliquer d'abord les dispositions de l'article 1075-2 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006 ; QUE ce texte énonce que " les dispositions de l'article 833-1, premier alinéa, sont applicables aux soultes mises à la charge des donataires, nonobstant toute convention contraire ", tandis que l'article 833-1 dispose que, " lorsque le débiteur d'une soulte a obtenu des délais de paiement, et que, par suite des circonstances économiques, la valeur des biens mis dans son lot a augmenté ou diminué de plus du quart depuis le partage, les sommes restant dues augmentent ou diminuent dans la même proportion " (alinéa I ") et que " les parties peuvent toutefois convenir que le montant de la soulte ne variera pas " (alinéa 2) ; QUE, dès lors que l'article 1075-2 fait expressément et directement référence à l'article 833-1, il y a lieu d'appliquer les dispositions combinées de ces deux textes ; QU'au demeurant, il convient d'observer que les nouveaux articles 1075-4 et 828 sont quasiment identiques aux anciens articles 1075-2 et 833-1 ; QU'en deuxième lieu, si la variabilité de la soulte est supplétive dans un partage ordinaire, elle est d'ordre public dans une donation-partage, l'article 1075-2 interdisant qu'une clause d'un partage d'ascendant déroge aux dispositions de l'article 833-1 ;. QUE, dès lors, l'action fondée sur une nullité d'ordre public étant soumise, non à la prescription quinquennale, mais à la prescription trentenaire, l'action diligentée par M. X..., qui, introduite avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, est régie par la loi ancienne (article 26 III de la loi), n'est pas atteinte par la prescription ; QU'en troisième lieu, la variation conventionnelle de la soulte, basée sur une variation de l'indice du coût de la construction et sur une réduction de 3 % l'an au titre de la vétusté de l'immeuble, conduit à une augmentation ou à une diminution de la soulte selon que l'indice est supérieur ou inférieur à 3 % l'an ; QUE la variabilité légale aboutit à une augmentation ou à une diminution de la soulte selon que la valeur du bien attribué a varié de plus du quart depuis le partage par suite des circonstances économiques ; que la variation conventionnelle peut ainsi conduire à une diminution de la soulte (telle que la cour l'a d'ailleurs constatée dans son arrêt du 6 janvier 2006), tandis que la variabilité légale peut aboutir à une augmentation de celle-ci ; QU'ainsi, en ce qu'elle exclut la variabilité légale d'ordre public, la clause conventionnelle de variation de la soulte doit être déclarée non écrite, peu important qu'elle puisse être conforme aux dispositions du code monétaire et financier ; QUE, dès lors qu'elle tend à assurer l'exécution d'une clause portant atteinte à l'ordre public, la clause pénale insérée dans l'acte de donation-partage doit être également déclarée non écrite en application de l'article 900 du code civil ; QU'en quatrième lieu, au vu des pièces produites, M. X... qui n'a pas accès au bien, est fondé à obtenir une mesure d'expertise à l'effet de déterminer si la valeur de l'immeuble attribué à Mme Y... par la donation-partage du 18 février 1983 a augmenté de plus du quart depuis cette date ; QU'il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
ALORS QUE dans leur rédaction applicable à la cause, antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° du 23 juin 2006, les dispositions des articles 1075-2 et 833-1 du code civil permettaient qu'il soit convenu que les soultes mises à la charge d'un donataire qui a obtenu des délais de paiement ne varient pas ; qu'elles permettaient donc également qu'il soit convenu qu'elles varient selon des modalités autres que celles prévues au premier aliéna du texte, qui prévoit une variation selon les circonstances économiques ; que dès lors, en jugeant non écrite la clause qui, en l'espèce, stipulait que la soulte mise à la charge de Mme X... varierait selon l'indice des prix à la construction moins un pourcentage permettant de prendre en considération la vétusté de l'immeuble, la cour d'appel a violé les textes susvisés.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-21134
Date de la décision : 06/07/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

DONATION-PARTAGE - Soulte - Révision - Clause conventionnelle de variation - Validité - Conditions - Variabilité légale d'ordre public - Portée

Un des bénéficiaires d'une donation-partage portant sur des immeubles et consentie avec réserve d'usufruit jusqu'au décès du dernier donateur, a contesté la validité de la clause stipulant que la soulte subirait une variation égale à celle de l'indice de la construction et serait diminuée d'un pourcentage annuel pour tenir compte de la vétusté des immeubles. Une cour d'appel, qui a relevé que la variation conventionnelle retenue pouvait conduire à une diminution de la soulte tandis que la variation légale pouvait aboutir à une augmentation de celle-ci, en déduit exactement que la clause conventionnelle de variation de la soulte, en ce qu'elle excluait la variabilité légale d'ordre public, devait être déclarée non écrite


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 jui. 2011, pourvoi n°10-21134, Bull. civ. 2011, I, n° 140
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, I, n° 140

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Domingo
Rapporteur ?: M. Chaillou
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.21134
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