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31/05/2011 | FRANCE | N°08-44856

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 mai 2011, 08-44856


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à MM. Aymeric X..., Sébastien Y... et Thierry Z... de leur désistement du pourvoi dirigé à l'encontre de la société Aquitaine route ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. A... et plusieurs autres salariés de la société Aquitaine route, laquelle ayant pour activité le transport routier de marchandises en citerne, a donné son fonds de commerce en location-gérance le 1er janvier 2005 à la société Transports Rodière, entraînant en application de l'article L. 122-12 devenu L. 1224-1 du code

du travail le transfert à cette société des contrats de travail des salariés...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à MM. Aymeric X..., Sébastien Y... et Thierry Z... de leur désistement du pourvoi dirigé à l'encontre de la société Aquitaine route ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. A... et plusieurs autres salariés de la société Aquitaine route, laquelle ayant pour activité le transport routier de marchandises en citerne, a donné son fonds de commerce en location-gérance le 1er janvier 2005 à la société Transports Rodière, entraînant en application de l'article L. 122-12 devenu L. 1224-1 du code du travail le transfert à cette société des contrats de travail des salariés, ont saisi la juridiction prud'homale pour faire condamner la société Aquitaine route à leur payer un rappel de salaire au titre d'une prime d'ancienneté due en application d'un protocole d'accord départemental de fin de grève signé le 12 février 1972 ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 2262-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter les salariés de leur demande tendant à ce que les sociétés Aquitaine route et Transports Rodière soient condamnées à leur verser des sommes à titre de majoration d'ancienneté en application de l'accord collectif départemental du 12 février 1972, l'arrêt se borne à énoncer que le protocole de 1972 est un accord collectif de fin de grève, que les salariés ne rapportent pas la preuve que la société Aquitaine route était signataire de cet accord ni qu'elle était membre d'une organisation patronale signataire de ce texte, qu'aucun élément n'étant produit sur une éventuelle extension de cet accord, ce dernier ne peut être analysé comme étant un accord collectif opposable en tant que tel à la société Aquitaine route ;
Qu'en statuant ainsi, sans vérifier si la société Aquitaine route était affiliée à l'une des organisations signataires du protocole de 1972, lequel était susceptible d'être applicable aux salariés de l'entreprise eu égard à son champ professionnel et géographique, alors que cette affiliation était contestée par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Aquitaine route aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Aquitaine route à payer à l'ensemble des salariés, à l'exception de MM. X..., Y... et Z..., la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de l'ensemble des demandeurs à l'exception de MM. X..., Y... et Z...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevables les demandes des salariés dirigées à l'encontre de la société RODIERE (employeur) ;
AUX MOTIFS QUE, par jugement du 27 septembre 2007, le Conseil de prud'hommes a jugé que l'accord départemental du 12 février 1972 prévoyant des majorations d'ancienneté était applicable et a condamné la société AQUITAINE ROUTE au paiement de majorations d'ancienneté ; que la société AQUITAINE ROUTE a régulièrement relevé appel de cette décision ; que, par conclusions déposées le 2 juillet 2008, soutenues à la barre, auxquelles il convient de se référer, l'appelante sollicite de la Cour qu'elle réforme le jugement, qu'elle déclare irrecevables les demandes actualisées des salariés pour la partie se rapportant à la période postérieure au 31 décembre 2004, et qu'elle juge que les demandes ne sont pas fondées pour la période antérieure ; que dans leurs écritures du 26 juin 2008, les salariés ont demandé la confirmation du jugement et à titre reconventionnel, ont demandé à la cour de condamner la société RODIERE au paiement de rappel de majorations d'ancienneté ; que sur interpellation de la cour à l'audience, le délégué syndical représentant les salariés a indiqué qu'il dirigeait ses demandes uniquement à l'encontre de la société AQUITAINE ROUTE ;
ET QUE la société AQUITAINE ROUTE a pour activité le transport routier de marchandises en citerne ; que le 1er janvier 2005, elle a donné son fonds en location-gérance à la société TRANSPORTS RODIERE ; qu'en application de l'article L.122-12 devenu l'article L.1224-1 du Code du travail, les contrats de travail des salariés ont été transférés à cette dernière ; que la Cour relève que, du fait de la location-gérance, les contrats de travail des salariés de la société AQUITAINE ROUTE ont été transférés à compter du 1er janvier 2005 à la société TRANSPORTS RODIERE ; que force est de constater que celle-ci n'a pas été appelée à la cause ; que les demandes des salariés à l'encontre de celle-ci ne sont pas recevables ; que de même les demandes mettant en cause la société AQUITAINE ROUTE ne sont pas recevables à partir du 31 décembre 2004 ;
ALORS QUE, D'UNE PART, une contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en relevant dans les motifs que les demandes des salariés dirigées à l'encontre de la société TRANSPORTS RODIERE n'étaient pas recevables, et en ne les déclarant pas irrecevables dans le dispositif, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif de l'arrêt équivalant à un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que la société AQUITAINE ROUTE n'avait demandé, ni dans ses conclusions d'appel, ni oralement lors de l'audience, que soient déclarées irrecevables les demandes de rappels de majorations d'ancienneté ; qu'en relevant que cette société avait dans ses conclusions d'appel demandé que soient déclarées irrecevables les demandes des salariés pour la période postérieure au 31 décembre 2004, puis en accueillant cette fin de non recevoir en déclarant irrecevables les demandes des salariés au titre de cette période, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 5 du Code de procédure civile ;
ET ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE le juge doit respecter et faire respecter le principe de la contradiction des débats ; qu'en relevant d'office l'irrecevabilité des demandes des salariés dirigées à l'encontre de la société TRANSPORTS RODIERE sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 16 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevables les demandes des salariés exposants dirigées, selon l'arrêt, à l'encontre de la société AQUITAINE ROUTE (employeur), pour la période allant jusqu'au 31 décembre 2004 ;
AUX MOTIFS QUE, par jugement du 27 septembre 2007, le Conseil de prud'hommes a jugé que l'accord départemental du 12 février 1972 prévoyant des majorations d'ancienneté était applicable et a condamné la société AQUITAINE ROUTE au paiement de majorations d'ancienneté ; que la société AQUITAINE ROUTE a régulièrement relevé appel de cette décision ; que par conclusions déposées le 2 juillet 2008, soutenues à la barre, auxquelles il convient de se référer, l'appelant sollicite de la Cour qu'elle réforme le jugement, qu'elle déclare irrecevables les demandes actualisées des salariés pour la partie se rapportant à la période postérieure au 31 décembre 2004, et qu'elle juge que les demandes ne sont pas fondées pour la période antérieure ; que dans leurs écritures du 26 juin 2008, les salariés ont demandé la confirmation du jugement et à titre reconventionnel, ont demandé à la cour de condamner la société TRANSPORTS RODIERE au paiement de rappel de majorations d'ancienneté ; que sur interpellation de la cour à l'audience, le délégué syndical représentant les salariés a indiqué qu'il dirigeait ses demandes uniquement à l'encontre de la société AQUITAINE ROUTE ;
ET QUE la société AQUITAINE ROUTE a pour activité le transport routier de marchandises en citerne ; que le 1er janvier 2005, elle a donné son fonds en location-gérance à la société TRANSPORTS RODIERE ; qu'en application de l'article L.122-12, devenu l'article L.1224-1 du Code du travail, les contrats de travail des salariés ont été transférés à cette dernière ; que la Cour relève que, du fait de la location-gérance, les contrats de travail des salariés de la société AQUITAINE ROUTE ont été transférés à compter du 1er janvier 2005 à la société TRANSPORTS RODIERE ; que force est de constater que celle-ci n'a pas été appelée à la cause ; que les demandes des salariés à l'encontre de celle-ci ne sont pas recevables ; que de même les demandes mettant en cause la société AQUITAINE ROUTE ne sont pas recevables à partir du 31 décembre 2004 ;
ALORS QUE le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que la société AQUITAINE ROUTE n'avait demandé, ni dans ses conclusions d'appel, ni oralement lors de l'audience, que soient déclarées irrecevables les demandes de rappels de majorations d'ancienneté ; qu'en relevant que cette société avait dans ses conclusions d'appel demandé que soient déclarées irrecevables les demandes des salariés pour la période postérieure au 31 décembre 2004, puis en accueillant cette fin de non recevoir en déclarant irrecevables les demandes des salariés au titre de cette période, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 5 du Code de procédure civile ;
ET ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE le juge doit respecter et faire respecter le principe de la contradiction des débats ; qu'en relevant d'office l'irrecevabilité des demandes dirigées à l'encontre de la société AQUITAINE ROUTE pour la période postérieure au 31 décembre 2004 sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 16 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté les salariés exposants de leur demande tendant à ce que les sociétés AQUITAINE ROUTE et TRANSPORT RODIERE (employeurs) soient condamnées à leur verser des sommes à titre de majoration d'ancienneté en application de l'accord collectif départemental du 12 février 1972 ;
AUX MOTIFS QUE la société AQUITAINE ROUTE a pour activité le transport routier de marchandises en citerne ; que le 1er janvier 2005, elle a donné son fonds en location gérance à la société TRANSPORTS RODIERE ; qu'en application de l'article L.122-12 devenu l'article L.1224-1 du Code du travail, les contrats de travail des salariés ont été transférés à cette dernière ; que la validité du protocole du 12 février 1972 est acquise dès lors que, d'une part, l'exemplaire de l'accord versé aux débats porte la signature des parties signataires dont l'authenticité n'a pas été contestée par une procédure de faux en écriture, que, d'autre part, cet accord a été appliqué à d'autres salariés, et enfin, qu'il est mentionné sur la photocopie du document que l'exemplaire versé aux débats a été remis par l'inspecteur du travail le 9 octobre 2003 ; que, sur l'opposabilité de ce protocole du 12 février 1972, celui-ci est un accord collectif de fin de grève ; que les salariés ne rapportent pas la preuve que la société AQUITAINE ROUTE était signataire de cet accord ni qu'elle était membre d'une organisation patronale signataire de ce texte ; qu'aucun élément n'étant produit sur une éventuelle extension de cet accord, ce dernier ne peut être analysé comme étant un accord collectif opposable en tant que tel à la société AQUITAINE ROUTE ; qu'en ce qui concerne l'argument tiré de l'application volontaire de cet accord par l'employeur à titre d'usage, la société AQUITAINE ROUTE a conclu un accord du 15 octobre 1996 déterminant le versement d'une prime d'ancienneté par référence à la convention collective nationale de transports ; que cet accord a été conclu postérieurement à l'usage ; qu'ayant le même l'objet que l'usage, il s'est substitué à celui-ci, peu important que l'usage soit plus favorable aux salariés ; que le versement de la prime d'ancienneté est régi par l'accord du 15 octobre 1996 ;
ALORS QUE, sans préjudice des effets attachés à l'extension ou à l'élargissement, l'application des conventions et accords est obligatoire pour tous les signataires ou membres des organisations ou groupements signataires ; qu'en déclarant inapplicable l'accord collectif du 12 février 1972 au seul motif que les salariés ne démontraient pas que l'employeur était signataire de cet accord et qu'il était membre d'une organisation patronale signataire de cet accord, sans vérifier elle-même si l'employeur était signataire de cet accord ou était membre d'une organisation signataire de cet accord, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.2262-1 (anciennement L.135-1 alinéa 1) du Code du travail ;
ET ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE celui qui se prétend libéré de son obligation, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; que l'employeur doit prouver le fait qui produit l'extinction de son obligation d'exécuter un accord collectif non étendu en démontrant la réalité de son allégation selon laquelle il n'était pas signataire de l'accord et n'était pas davantage membre de l'organisation signataire de l'accord ; qu'en reprochant aux salariés de ne pas démontrer que l'employeur était ou avait été membre de l'une des organisations signataires de l'accord du 12 février 1972, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 alinéa 2 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44856
Date de la décision : 31/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Application - Obligation - Conditions - Signature - Membre d'une organisation signataire - Preuve - Office du juge - Détermination - Portée

En cas de contestation par l'employeur de son adhésion à l'une des organisations signataires d'un accord départemental de fin de grève ayant valeur d'accord collectif et susceptible d'être applicable aux salariés de l'entreprise en raison de son champ professionnel et géographique, il appartient au juge du fond de vérifier si l'employeur était affilié à l'une de ces organisations. En conséquence doit être cassé l'arrêt par lequel la cour déboute les salariés de leur demande au motif qu'ils ne rapporteraient pas la preuve de l'affiliation de leur employeur à l'une des organisations patronales signataires


Références :

article L. 2262-1 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 04 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 mai. 2011, pourvoi n°08-44856, Bull. civ. 2011, V, n° 133
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, V, n° 133

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Weissmann
Rapporteur ?: M. Struillou
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:08.44856
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