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25/05/2011 | FRANCE | N°10-10905

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 25 mai 2011, 10-10905


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 24 novembre 2009), que, le 4 août 1999, les époux X...- Y..., maîtres de l'ouvrage, ont conclu avec la société Z... construction (société Z...) un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, sous les conditions suspensives de l'obtention d'un prêt, de l'assurance dommages-ouvrage et de la garantie de livraison à prix et délais convenus devant être réalisées dans un délai de douze mois, les travaux d'une durée de huit mois devant com

mencer dans le délai de deux mois de la réalisation de ces conditions...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 24 novembre 2009), que, le 4 août 1999, les époux X...- Y..., maîtres de l'ouvrage, ont conclu avec la société Z... construction (société Z...) un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, sous les conditions suspensives de l'obtention d'un prêt, de l'assurance dommages-ouvrage et de la garantie de livraison à prix et délais convenus devant être réalisées dans un délai de douze mois, les travaux d'une durée de huit mois devant commencer dans le délai de deux mois de la réalisation de ces conditions ; que la société Caisse de crédit mutuel de Revin (la CCM) a, le 30 décembre 1999, émis une offre de prêt complétant un plan d'épargne logement ; que la CCM a débloqué des fonds le 18 janvier 2000 pour le règlement de la facture du 4 janvier 2000, relative à l'ouverture du chantier et le 5 mai 2000 pour le règlement de la prime d'assurance dommages-ouvrage et de la situation de travaux relative à l'achèvement des fondations ; que la garantie de livraison n'a pas été apportée par le constructeur en dépit de la mise en demeure qui lui a été adressée par les maîtres de l'ouvrage dès le mois de mars 2000 ; qu'à la suite de la défaillance de la société Z..., placée en liquidation judiciaire le 11 juillet 2000, ces derniers ont conclu le 29 août 2000 un contrat avec un autre constructeur ; qu'après l'achèvement de leur maison, soutenant que la CCM avait failli à ses obligations légales lors du déblocage des fonds, les époux Z... ont, par acte du 1er juin 2005, assigné celle-ci en paiement de diverses sommes en réparation de leur préjudice matériel et financier ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour retenir la responsabilité de la CCM à hauteur de 50 % seulement, et limiter en conséquence le montant des dommages-intérêts alloués aux époux X...- Y... à la somme de 25 355 euros, l'arrêt retient que si le prêteur aurait dû rappeler au maître de l'ouvrage la nécessité de s'enquérir auprès du constructeur d'une garantie de livraison avant tout déblocage des fonds pour les travaux de construction entre les mains de l'emprunteur et aurait dû exiger la remise des justificatifs de cette garantie avant de libérer les fonds, le maître de l'ouvrage avait un devoir de vigilance sur l'opération en cause et il ne pouvait se décharger sur le banquier de ses propres obligations d'avoir à solliciter du constructeur l'attestation de garantie légalement prévue avant l'ouverture du chantier et à la remettre au préteur préalablement à toute demande de fonds, qu'il ressort donc de ces circonstances que ni les maîtres d'ouvrage ni le prêteur n'ont rempli leurs obligations, d'où une absence de garantie supportée par les maîtres de l'ouvrage confrontés à la défaillance du constructeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le maître de l'ouvrage n'est pas tenu de s'assurer de la délivrance de l'attestation de garantie de livraison pour l'obtention d'un prêt destiné à financer un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la société Caisse de crédit mutuel de Revin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Caisse de crédit mutuel de Revin ; la condamne à payer aux époux X...- Y... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour les époux X...- Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR déclaré la Caisse de Crédit Mutuel de Revin responsable sur le fondement de l'article 1147 du Code civil à hauteur de seulement 50 % des dommages subis par Monsieur et Madame X...
Y... en rapport de cause à effet avec la non-vérification de l'existence d'une garantie de livraison dans le cadre du contrat de construction de maison individuelle passé avec la société Z... CONSTRUCTION et d'avoir en conséquence condamné la Caisse de Crédit Mutuel à payer à Monsieur et Madame X...- Y... la seule somme de 25. 355 € ;
AUX MOTIFS QUE « le prêteur aurait dû rappeler au maître d'ouvrage la nécessité de s'enquérir auprès du constructeur d'une garantie de livraison avant tout déblocage des fonds pour les travaux de construction entre les mains de l'emprunteur et aurait dû exiger la remise des justificatifs de cette garantie avant de libérer les fonds ; que le maître d'ouvrage a un devoir de vigilance sur l'opération en cause et il ne peut se décharger sur le banquier de ses propres obligations d'avoir à solliciter du constructeur l'attestation de garantie légalement prévue avant l'ouverture du chantier et à la remettre au prêteur préalablement à toute demande de fonds ; qu'il ressort des circonstances de la cause que ni les maîtres d'ouvrage ni le prêteur n'ont rempli leurs obligations, d'où une absence de garantie supportée par les maîtres d'ouvrage confrontés à la défaillance du constructeur ; qu'eu égard à la gravité respective des fautes imputables aux parties, il convient de déclarer la Caisse de Crédit Mutuel responsable sur le fondement de l'article 1147 du Code civil à hauteur de 50 % du dommage subi par Monsieur et Madame X...- Y..., l'article L. 231-10 du Code de la construction n'excluant pas l'application des règles de droit commun de la responsabilité civile » (arrêt p. 4 § 7 à 10) ;
ALORS QUE doit réparer l'intégralité du préjudice subi par l'emprunteur, le prêteur qui débloque les fonds pour la construction d'une maison individuelle avec fourniture de plan sans avoir communication de l'attestation de garantie ; que nul devoir de vigilance ne pèse sur le maître d'ouvrage quant à la délivrance de l'attestation de garantie de livraison pour l'obtention d'un prêt destiné à financer un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan ; que pour déclarer la Caisse de Crédit Mutuel responsable à hauteur de seulement 50 %, la Cour d'appel, qui a constaté que la Caisse de Crédit Mutuel avait débloqué les fonds sans avoir communication de l'attestation de garantie de livraison, a retenu que le maître d'ouvrage avait un devoir de vigilance sur l'opération et ne pouvait se décharger sur le banquier de ses propres obligations ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé ensemble l'article 1147 du Code civil et l'article L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR condamné la Caisse de Crédit Mutuel de Revin à payer à Monsieur et Madame X...
Y... la somme de 25. 355 € seulement à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « par ailleurs, rien ne permet d'affirmer qu'il aurait été possible de trouver un assureur acceptant de couvrir le risque dont s'agit, le constructeur, soit la société Z..., s'étant révélé défaillant dans les démarches pour obtenir la garantie de livraison auprès de son assureur, puisqu'il n'a jamais complété le dossier comme le lui réclamait le groupe RCB courtier d'assurances ; qu'en conséquence, le préjudice des maîtres d'ouvrage consiste en une perte de chance d'obtenir d'un assureur qu'il substitue sa garantie à celle que la société Z... CONSTRUCTION était censée fournir ; que la garantie de livraison couvre le coût des dépassements du prix initialement convenu dès lors que ces derniers sont nécessaires à l'achèvement de la construction ; que la garantie peut être assortie d'une franchise de 5 % ; qu'il ne s'agit donc pas d'une obligation ; que les modifications quant à la piscine, au local technique de celle-ci, au talutage, aux enrochements n'ont pu imputer le coût du marché puisque ces lots n'étaient pas compris dans le lot Z... ; qu'il n'en est pas de même de la transformation des deux fenêtres en façade NORD, de l'accès latéral à la piscine remplaçant l'escalier prévu l'origine ; qu'il convient de fixer le surcoût par rapport au marché initial à 52. 000 € ; qu'en conséquence, il y a lieu de condamner le prêteur responsable à hauteur de 50 % à payer à titre d'indemnité devant réparer le préjudice correspondant à la perte de chance de pouvoir bénéficier d'une garantie de livraison à la somme 16. 000 € ;
ALORS QUE, pour que le préjudice causé par une faute ne soit indemnisé qu'au titre d'une perte de chance, il doit être établi que le préjudice aurait pu se produire même en l'absence de faute ; que le préjudice subi par le maître de l'ouvrage par la faute du prêteur qui a débloqué les fonds destinés à financer la construction d'une maison individuelle sans avoir vérifier l'existence d'une attestation de garantie de livraison constitué par le surcoût engendré par les travaux réalisés par le nouveau constructeur est dans son intégralité directement causé par la faute du prêteur dès lors qu'en l'absence de faute, ce préjudice ne se serait pas réalisé, puisque soit une garantie de livraison aurait été fournie, soit la construction et donc son surcoût, n'aurait pas eu lieu ; qu'après avoir évalué à 52. 000 € le surcoût de la construction, la Cour d'appel a condamné le prêteur à hauteur de 50 % à payer à l'emprunteur non la somme de 26. 000 € mais celle de 16. 000 € en réparation du préjudice correspondant à « la perte de chance de pouvoir bénéficier d'une garantie de livraison » ; qu'en statuant la Cour d'appel a violé ensemble l'article 1147 du Code civil et L231-10 du Code la construction et de l'habitation.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-10905
Date de la décision : 25/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONSTRUCTION IMMOBILIERE - Maison individuelle - Contrat de construction - Construction avec fourniture de plan - Prêteur - Obligations - Etendue - Détermination

BANQUE - Responsabilité - Faute - Violation de l'obligation de vérification - Contrat de construction de maison individuelle - Portée

Le maître de l'ouvrage n'est pas tenu de s'assurer de la délivrance de l'attestation de garantie de livraison pour l'obtention d'un prêt destiné à financer un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan


Références :

article 1147 du code civil

article L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 24 novembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 25 mai. 2011, pourvoi n°10-10905, Bull. civ. 2011, III, n° 82
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, III, n° 82

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Bailly
Rapporteur ?: Mme Lardet
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.10905
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