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18/05/2011 | FRANCE | N°10-17445

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 mai 2011, 10-17445


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X... et M. Y... se sont mariés le 12 juillet 1997, sans contrat préalable ; que leur divorce a été prononcé sur le fondement de l'article 233 du code civil par jugement du 20 septembre 2007 ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches, ci-après annexé :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les frais de trajet occasionnés par l'exercice du droit de visite et d'hébergement du père seront partagés par moitié entre les parties ;
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X... et M. Y... se sont mariés le 12 juillet 1997, sans contrat préalable ; que leur divorce a été prononcé sur le fondement de l'article 233 du code civil par jugement du 20 septembre 2007 ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches, ci-après annexé :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les frais de trajet occasionnés par l'exercice du droit de visite et d'hébergement du père seront partagés par moitié entre les parties ;

Attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel, par décision motivée, a décidé que les frais de trajet liés au droit de visite et d'hébergement du père seront partagés par moitié entre les parties ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 262-1 du code civil ;

Attendu qu'il résulte du premier alinéa de ce texte qu'à défaut d'accord des époux, le jugement de divorce prend effet dans leurs rapports patrimoniaux à la date de l'ordonnance de non-conciliation ; que, dès lors, si, selon l'alinéa deux du même texte, le juge peut, à la demande de l'un d'eux, fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer, cette date ne peut qu'être antérieure à celle de l'ordonnance de non-conciliation ;

Attendu que, pour fixer la date des effets du divorce quant aux biens des époux au 31 octobre 2005, l'ordonnance de non-conciliation ayant été rendue le 17 juin 2005, l'arrêt énonce que l'article 262-1 du code civil dispose qu'à la demande de l'un des époux, le juge peut fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer ;

En quoi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles 270 et 271 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande de prestation compensatoire de Mme X..., l'arrêt énonce que, s'il existe entre les époux une différence sensible de revenus, il ressort néanmoins que celle-ci préexistait au mariage et qu'en aucune façon elle ne résulte des choix opérés en commun par les conjoints ;

Qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel qui, d'une part, s'est fondée sur des circonstances antérieures au prononcé du divorce pour apprécier l'existence du droit de l'un des époux à bénéficier d'une prestation compensatoire et, d'autre part, a ajouté une condition non prévue par la loi, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du premier moyen et sur la troisième branche du troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la fixation de la date des effets du divorce et la prestation compensatoire, l'arrêt rendu le 25 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils pour Mme Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait fixé la date des effets du divorce au 31 octobre 2005 ;

AUX MOTIFS QUE «sur la date d'effets du divorce dans les rapports entre époux, formant appel incident, l'intimée demande à la Cour de réformer de ce chef et de fixer cette date au 17 juin 2005, c'est-à-dire au jour de l'ordonnance de non-conciliation ; l'article 262-1 dernier alinéa du Code civil dispose qu'à la demande de l'un des époux, le Juge peut fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer ; si l'ordonnance de non-conciliation a été rendue le 17 juin 2005, il est constant et non contesté que les époux ont cohabité jusqu'au 31 octobre 2005 ; c'est par conséquent à bon droit que le Juge de première instance a fixé à cette date les effets du divorce dans les rapports entre époux ; la confirmation s'impose donc sur ce point»;

ALORS D'UNE PART QUE si l'article 262-1 alinéa 4 du Code civil permet aux juges du fond de faire remonter les effets du divorce dans les rapports entre les époux à la date à laquelle ceux-ci ont cessé de cohabiter et de collaborer, c'est seulement dans le cas où cette date est antérieure à la date de l'ordonnance de non-conciliation normalement applicable ; qu'en l'espèce l'ordonnance de non-conciliation a été rendue le 17 juin 2005 ; qu'en fixant néanmoins la date des effets du divorce à la date du 31 octobre 2005 soit postérieurement à la date de l'ordonnance de non-conciliation, la Cour d'appel a violé l'article 262-1 du Code civil ;

ALORS D'AUTRE PART QUE par ordonnance contradictoire du 17 juin 2005, le Juge aux Affaires Familiales a constaté l'accord des époux Y... sur le principe de la rupture du mariage, attribué à Madame Y... la jouissance du domicile conjugal et organisé le droit de visite et d'hébergement du père; qu'il en résulte qu'à la date de cette ordonnance toute volonté d'association des époux et en conséquence toute collaboration et cohabitation des époux au sens de l'article 262-1 alinéa 4 du Code civil avaient nécessairement cessé ; qu'en l'espèce, Monsieur Y... ne contestait ni la réalité de l'accord des époux sur le principe de la rupture du mariage à la date de l'ordonnance de non-conciliation, soit le 17 juin 2005, ni le bien fondé des mesures prises par le juge pour organiser la vie séparée des époux à compter de cette date (attribution à l'exposante de la jouissance du domicile conjugal, fixation de la résidence des enfants chez la mère …) ; qu'il avait demandé aux juges du fond de fixer la date des effets du divorce à la date postérieure du 31 octobre 2005 dans le seul but de mettre à la charge de Madame Y... une partie des dettes contractées par lui seul depuis la date de l'ordonnance non-conciliation au prétexte que l'exposante avait accepté de l'héberger jusqu'au 31 octobre 2005 ; que le simple fait de la part de Madame Y... d'héberger le père de ses enfants pendant quelques semaines après l'ordonnance constatant l'accord des époux sur le principe du divorce pour lui permettre de trouver un logement ne saurait pourtant justifier la fixation de la date des effets du divorce entre le époux à une date postérieure à celle de cette ordonnance ; qu'en faisant néanmoins droit à la demande de Monsieur Y... et en fixant en conséquence la date des effets du divorce au 31 octobre 2005, la Cour d'appel a violé l'article 262-1 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir dit que les frais de trajet occasionnés par l'exercice du droit de visite et d'hébergement du père seront partagés par moitié entre les parties ;

AUX MOTIFS QUE «sur les frais de trajet occasionnés par le droit de visite et d'hébergement du père, que l'intimée a quitté la région lyonnaise à l'été 2006 afin d'aller s'installer à Bordeaux ; même si elle met en avant un climat plus propice à la santé de l'un des enfants, il est manifeste que ce choix correspond avant tout à des convenances personnelles ; dès lors, compte tenu de l'éloignement ainsi créé entre les enfants et leur père, celuici ne saurait en subir entièrement les conséquences financières ; il échet de réformer de ce chef et de dire que les frais de trajet liés au droit de visite et d'hébergement du père seront partagés par moitié entre les parties ; … il existe entre les époux une différence sensible de revenus»;

ALORS D'UNE PART QUE la possibilité pour l'enfant de maintenir des liens avec ses deux parents est essentielle pour son développement et son équilibre ; qu'en conséquence les frais occasionnés par l'exercice du droit de visite et d'hébergement par un parent doivent suivre le régime d'ensemble applicable aux frais d'entretien et d'éducation de l'enfant ; qu'il en résulte que pour répartir les frais de trajet entre les père et mère, le juge du fond doit avant tout tenir compte de la situation matérielle respective des époux ; qu'après le divorce, il relève par ailleurs de la liberté d'aller et de venir de chaque parent de choisir librement l'endroit où il souhaite vivre ; qu'il n'appartient en conséquence aucunement aux juges du fond de sanctionner le parent qui a décidé de déménager ; qu'en l'espèce, en mettant à la charge de l'exposante la moitié des frais de trajet occasionnés par l'exercice du droit de visite et d'hébergement de Monsieur Y... au seul motif que le choix de Madame Y... de s'installer à Bordeaux «correspond avant tout à des convenances personnelles» et en statuant ainsi par un motif inopérant sans tenir compte des ressources respectives des parents, la Cour d'appel a violé l'article 373-2 du Code civil.

ALORS D'AUTRE PART QUE les juges du fond ont expressément constaté la « différence sensible de revenus » de Monsieur et Madame Y... (Arrêt page 5 § 5) ; qu'en décidant néanmoins que les frais de trajet seront partagés par moitié entre les parties, la Cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations de fait, en violation de l'article 373-2 du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté l'exposante de sa demande de prestation compensatoire ;

AUX MOTIFS QUE «sur la prestation compensatoire, le mariage a duré quelque douze ans dont huit ans de vie commune ; deux enfants encore mineurs en sont issus ; les époux sont respectivement âgés de quarante-et un ans pour le père et de trente-huit ans pour la femme ; en 2004 Caroline X... a déclaré des revenus pour 14.854 € soit 1237 € par mois en moyenne ; en 2006, elle a déclaré des revenus salariaux ou assimilés pour 16.277 € soit une moyenne mensuelle de 1.356 € ; elle indique tirer à présent de son emploi d'aide-comptable un revenu mensuel d'environ 1.200 € par mois ; si l'on observe donc une légère diminution de ses revenus, celle-ci résulte de son choix de refus de reclassement à la suite du licenciement pour cause économique dont elle a fait l'objet ainsi que de sa décision de partir à Bordeaux ; l'intimé doit régler pour son logement un loyer mensuel de 690 € provision pour charges incluses ; l'appelant a perçu des rémunérations pour un total net imposable de 31.418 € en 2007, soit une moyenne mensuelle de 2.618 € ; la question du règlement des charges communes postérieurement à la séparation des conjoints devra trouver sa solution dans le cadre des opérations de liquidation de la communauté ; ces comptes n'ont pas à être pris en considération pour la détermination du droit à prestation compensatoire ; s'il existe entre les époux une différence sensible de revenus, il ressort néanmoins que celle-ci préexistait au mariage et qu'en aucune façon elle ne résulte des choix opérées en commun par les conjoints ; certes, au cours de la vie commune, la femme a travaillé à temps partiel pendant deux ans et s'est placée en position de congé parental pendant trois ans ; il n'est pas démontré que ce ralentissement puis cette suspension de son activité professionnelle aient, d'une manière quelconque ralenti l'évolution de sa carrière ; par ailleurs l'appelant fait justement observer qu'il n'est pas non plus établi que ces choix auront une incidence sur les droits à pension de retraite de l'intimée dès lors qu'elle est encore jeune et qu'elle a la possibilité de travailler pendant vingt-sept ans ; dans ces conditions la preuve d'une disparité dans les situations respectives des époux créée par le divorce n'est pas rapportée ; il convient de réformer de ce chef également et de débouter Caroline X... de sa demande de prestation compensatoire»;

ALORS D'UNE PART QUE la prestation compensatoire a pour but de compenser la disparité résultant de la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives des époux ; que pendant la durée du mariage, toute disparité résultant notamment d'une différence de revenus des époux est neutralisée par l'exercice du devoir de secours ; que la prestation compensatoire a pour but de compenser la disparité créée par la disparition du devoir de secours au moment du divorce ; qu'en conséquence, pour apprécier le bien fondé du droit d'un époux à obtenir le versement d'une prestation compensatoire, les juges du fond n'ont aucunement à prendre en compte les différences de revenus existant antérieurement au prononcé du divorce qui était compensées par le devoir de secours mais uniquement la situation des époux au moment du divorce ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté une «différence sensible de revenus» de Monsieur et Madame Y... au moment du divorce, dès lors que Monsieur Y... «a perçu des rémunérations pour un total net imposable de 31.418 € en 2007», soit le double de l'exposante qui disposait à la même époque de «revenus salariés ou assimilées pour 16.277 €» (Arrêt pages 4 et 5) ; que la Cour de LYON a néanmoins débouté l'exposante de sa demande de prestation compensatoire au motif que «la preuve d'une disparité dans les situations respectives des époux créée par le divorce n'est pas rapportée» dès lors que cette «différence sensible de revenus préexistait au mariage» (Arrêt page 5, §§ 5-9) ; qu'en se fondant ainsi sur des circonstances antérieures au prononcé du divorce pour rejeter la demande de prestation compensatoire de l'exposante, la Cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du Code civil ;

ALORS D'AUTRE PART QU'en déboutant Madame Y... de sa demande de prestation compensatoire au motif que la preuve de la disparité dans les situations respectives des époux créée n'est pas rapportée dès lors que la «différence sensible de revenus» des époux au moment du divorce ne résulte pas d'un choix opéré en commun par les conjoints, la Cour d'appel a ajouté une condition que les textes ne prévoient aucunement, violant ainsi les articles 270 et 271 du Code civil.

ALORS ENFIN QUE la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre ; que l'énumération de l'article 271 du Code civil n'est pas limitative et les juges d'appel peuvent tenir compte, dans la détermination des ressources et besoins des époux, d'éléments d'appréciation non prévus par ce texte ; qu'en l'espèce l'exposante demandait aux juges de prendre en compte, pour déterminer le montant de la prestation compensatoire, la différence non seulement des revenus mais également des charges des époux et notamment le fait qu'elle assume seule le règlement de plusieurs crédits et prêts pour un montant mensuel total de 1.200 € avec un salaire mensuel de 1.772,53 € (Conclusions pages 4 et 5) ; que la disparité créée par la rupture du mariage dans les situations respectives résulte alors du fait que l'exposante doit payer une grande partie des charges communes avec un salaire inférieur à celui de son mari ; qu'en rejetant ce moyen au motif que règlement des charges communes postérieurement à la séparation des conjoints devra trouver sa solution dans le cadre des opérations de liquidation de la communauté sans rechercher si le remboursement par Madame Y... d'une grande partie des emprunts contractés pendant la vie commune des ex-époux ne créait pas une disparité dans les conditions respectives, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 271 du Code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-17445
Date de la décision : 18/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Règles spécifiques au divorce - Effets du divorce - Effets à l'égard des époux - Effets quant aux biens - Point de départ - Report à la date de la cessation de la cohabitation et de la collaboration - Fixation - Date antérieure à celle de l'ordonnance de non-conciliation - Nécessité

L'article 262-1 du code civil prévoyant, dans son premier alinéa, qu'à défaut d'accord des époux, le jugement de divorce prend effet dans leurs rapports patrimoniaux à la date de l'ordonnance de non-conciliation, si, selon l'alinéa 2 de ce même texte, le juge peut, à la demande de l'un des époux, fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer, cette date ne peut qu'être antérieure à celle de l'ordonnance de non-conciliation


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 25 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 18 mai. 2011, pourvoi n°10-17445, Bull. civ. 2011, I, n° 91
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, I, n° 91

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: M. Chaillou
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17445
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