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04/05/2011 | FRANCE | N°10-87447

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 mai 2011, 10-87447


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel d'Orléans,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 9 septembre 2010, qui, dans l'information suivie contre M. Philippe X... du chef d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics, a prononcé sur une requête en nullité des pièces de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 19 novembre 2010, prescri

vant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires en demande, en défense et l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel d'Orléans,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 9 septembre 2010, qui, dans l'information suivie contre M. Philippe X... du chef d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics, a prononcé sur une requête en nullité des pièces de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 19 novembre 2010, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, en deux branches proposé par le procureur général, pris, pour la première de la violation des articles 432-14 du code pénal, 1 de la loi du 3 janvier 1991, 2, 6 et 9 de la loi du 22 janvier 1997, pour violation de la loi pour la seconde, prise de la violation du code des marchés publics, pour violation de la loi ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'en exécution de la loi du 13 novembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, qui a transféré aux régions, à compter du 1er janvier 2002, la compétence d'autorité organisatrice des transports collectifs d'intérêt régional, et d'une convention signée, le 18 avril 2002, entre la région Centre et la société nationale des chemins de fer (SNCF), cet établissement public a lancé, en octobre 2002 une procédure de consultation d'entreprises de transport, en vue de l'attribution, pour une durée de sept ans, du service de transport par route de voyageurs pour les lignes de Tours à Loches et de Loches à Chateauroux ; que la procédure retenue pour ce marché, d'un montant total de 11,2 millions d'euros, pour sept ans, était du type négociée, avec mise en concurrence ; que, le 22 octobre 2003, la SNCF a attribué ce contrat de transport à une de ses sous-filiales, la société Cariane Centre ; que, le 27 mai 2005, la société Cars Coudert, qui s'était portée candidate à ce contrat, a porté plainte et s'est constituée partie civile devant le doyen des juges d'instruction de Tours du chef de favoritisme en exposant que la SNCF avait procuré à la société déclarée attributaire un avantage injustifié, par un acte contraire aux dispositions de la loi du 11 décembre 1992 relative aux procédures de passation de certains contrats dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications et du décret du 3 août 1993 pris pour son application ; que la société plaignante exposait notamment que la SNCF avait fourni des informations privilégiées à sa filiale et avait, en violation des règles de concurrence fixées dans les documents d'appel à la concurrence, prorogé la date de validité des offres, ce qui avait permis à la société Cariane Centre, après avoir reçu communication de ces dernières, de modifier la sienne ; que, le 17 octobre 2008, M. Philippe X..., directeur de la région Centre de la SNCF, a été mis en examen de ce chef ; que, par arrêt en date du 6 février 2009, la chambre de l'instruction a annulé ledit acte ; que, sur réquisitoire supplétif du procureur de la République, en date du 26 novembre 2009, le juge d'instruction, constatant que la chambre de l'instruction n'avait pas analysé dans son arrêt précité l'application aux faits de l'espèce de la loi du 22 janvier 1997, a de nouveau mis en examen M. Philippe X..., du chef de favoritisme, pour avoir, en violation des lois des 3 janvier 1991, 11 décembre 1992, et 22 janvier 1997, ainsi que du décret du 7 mars 2001 portant code des marchés publics procuré à la société Cariane Centre un avantage injustifié, "en commettant de nombreuses irrégularités formelles dans la procédure d'appel d'offres et d'attribution du marché en provoquant une rupture d'égalité entre les candidats Cariane et Coudert par la multiplication des auditions des candidats et par la prolongation non justifiée de la phase de négociation permettant à la société Cariane de formuler une troisième offre à un tarif sensiblement équivalent à celui proposé dès sa première offre par la société Coudert, cette dernière étant d'emblée mieux-disante et enfin en refusant de communiquer au candidat évincé les pièces du marché et particulièrement les éléments financiers permettant de justifier la décision d'attribution" ;
Attendu que, pour annuler cette mise en examen et déclarer M. Philippe X... placé sous le régime de témoin assisté, l'arrêt énonce que la participation de la région Centre à la procédure conduite par la SNCF n'a pas eu pour effet de soumettre l'attribution du marché aux dispositions du code des marchés publics, celle-ci ne résultant que de la seule application du cahier des charges de la SNCF, sans soumission volontaire de cette entreprise audit code ; que les juges ajoutent que la loi du 11 décembre 1992, telle que modifiée par la loi du 22 janvier 1997, ne prévoit pas que les marchés entrant dans son champ d'application soient tenus de respecter les principes fondamentaux de la commande publique ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans rechercher, d'une part, s'il ne résulte pas de la convention d'exploitation conclue entre la région Centre et la SNCF que cet établissement a agi en qualité de mandataire de ladite région, de sorte que le code des marchés publics est applicable à la convention litigieuse, d'autre part, si les faits reprochés au mis en examen, à les supposer établis, ne sont pas constitutifs d'une violation des règles de publicité et de concurrence, prévues par le décret n° 93-930 du 3 août 1993, pris pour l'application de la loi du 11 décembre 1992, notamment de celles relatives aux critères d'attribution et aux conditions de légalité des variantes, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, en date du 9 septembre 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Labrousse conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-87447
Date de la décision : 04/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ATTEINTE A L'AUTORITE DE L'ETAT - Atteinte à l'administration publique commise par des personnes exerçant une fonction publique - Manquement au devoir de probité - Atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public - Eléments constitutifs - Détermination

Est susceptible de caractériser le délit de favoritisme la violation, en connaissance de cause, des règles de publicité et de concurrence, prévues par le décret n° 93-990 du 3 août 1993, pris pour l'application de la loi du 11 décembre 1992, notamment de celles relatives aux critères d'attribution et aux conditions de légalité des variantes


Références :

décret n° 93-990 du 3 août 1993 pris pour l'application de la loi n° 92-1282 du 11 décembre 1992

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, 09 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 mai. 2011, pourvoi n°10-87447, Bull. crim. criminel 2011, n° 91
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2011, n° 91

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Lucazeau
Rapporteur ?: Mme Labrousse
Avocat(s) : Me Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.87447
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