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28/04/2011 | FRANCE | N°10-13776

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 avril 2011, 10-13776


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X..., ayant subi en 1980 une transfusion sanguine au cours d'une intervention chirurgicale, a été déclaré contaminé par le virus d'immunodéficience humaine (VIH) courant 1986 ; qu'il a accepté le 4 mars 1999 du Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles (FITH) une offre d'indemnisation de 39 034 francs au titre du préjudice économique subi du 30 juin 1986 au 31 octobre 1997 ; qu'il a sollicité de l'Office national d'indemnisation des

accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections noso...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X..., ayant subi en 1980 une transfusion sanguine au cours d'une intervention chirurgicale, a été déclaré contaminé par le virus d'immunodéficience humaine (VIH) courant 1986 ; qu'il a accepté le 4 mars 1999 du Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles (FITH) une offre d'indemnisation de 39 034 francs au titre du préjudice économique subi du 30 juin 1986 au 31 octobre 1997 ; qu'il a sollicité de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'office) venu aux droits du FITH, l'indemnisation du préjudice économique de perte de retraite ; que l'office ayant refusé le 27 mars 2008 d'accueillir cette demande, au motif que la retraite à laquelle il aurait pu prétendre en l'absence de contamination ne dépassait pas le minimum contributif qu'il percevait effectivement compte tenu du complément versé par la Caisse nationale d'assurance vieillesse, de sorte qu'il ne justifiait d'aucun préjudice, M. X... a formé un recours devant la cour d'appel de Paris ;
Sur le premier moyen, le troisième moyen, et la seconde branche du deuxième moyen du pourvoi, réunis, tels que reproduits en annexe :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt, "confirmant l'offre non acceptée du 11 février 2008 par l'office", de le déclarer irrecevable en sa demande en paiement de la somme de 516 148,58 euros en compensation du manque à gagner pour la période ayant couru de sa contamination à sa mise à la retraite ;
Mais attendu que c'est à la suite d'une simple erreur matérielle, que la Cour de cassation est en mesure de rectifier au vu des autres énonciations de l'arrêt et des pièces de la procédure régulièrement produites, que l'arrêt attaqué a retenu comme date de la décision de rejet de l'office le 15 février 2008 alors qu'il s'agissait du 27 mars 2008 ;
Et attendu que sous le couvert des griefs non fondés de violation des articles 455 du code de procédure civile, L. 3122-3, alinéa 2, du code de la santé publique et 6 § 1de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel, qui, répondant aux conclusions prétendument délaissées, et relevant que, sur sa nouvelle demande tendant à son indemnisation pour la période 1997-2007, l'office avait adressé le 21 janvier 2009 à M. X... une nouvelle offre sur le fondement de laquelle il n'avait formé aucun recours, a pu statuer comme elle l'a fait sur l'objet du recours dont elle était saisie sans méconnaître les exigences du procès équitable posées par le troisième des textes précités ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt, alors selon le moyen, que lorsque la demande d'indemnisation de la victime contaminée par le virus d'immunodéficience humaine a été rejetée par l'office, qu'aucune offre ne lui a été présentée dans le délai mentionné à l'article L. 3122-5 du code de la santé publique ou que l'offre formulée n'a pas été acceptée, la victime ou ses ayants droit sont recevables à saisir la cour d'appel de Paris de toute demande d'indemnisation d'un chef de préjudice trouvant sa source dans la contamination ; qu'en affirmant néanmoins, pour considérer que la demande de M. X... tendant à l'indemnisation de son manque à gagner pour la période comprise entre sa contamination et sa mise à la retraite était irrecevable, que sa saisine était strictement limitée à la demande d'indemnisation rejetée par l'office, la cour d'appel a violé l'article L. 3122-3, alinéa 2, du code de la santé publique ;
Mais attendu, selon les articles L. 3122-3 du code de la santé publique, 1er, 5, 6 et 7 du décret n° 92-183 du 26 février 1992, 1er à 5 du décret n° 92-759 du 31 juillet 1992 dans leur rédaction alors applicable, que la demande d'indemnisation présentée à l'office doit comporter les éléments justificatifs de l'atteinte par le VIH et des transfusions sanguines ou des injections de produits dérivés du sang ainsi que la justification des préjudices ; que si les justifications de la contamination sont admises par l'office, celui-ci est tenu de présenter à la victime, dans un délai de trois mois à compter du jour où il a reçu la justification complète des préjudices, une offre d'indemnisation qui indique l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985 et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice ; que les décisions de l'office rejetant totalement ou partiellement la demande d'indemnisation doivent être motivées ; que la victime ne dispose du droit d'agir en justice contre l'office devant la cour d'appel de Paris que si sa demande d'indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans le délai prescrit ou si elle n'accepte pas l'offre faite ; que le délai pour agir en justice est de deux mois et court à compter de la notification de l'offre d'indemnisation ou du rejet de la demande, et, en cas d'absence d'offre ou de rejet de la demande, à l'expiration d'un délai de trois mois courant du jour où l'office a reçu la justification complète des préjudices ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel de Paris ne peut statuer, dans le cadre de l'instance contentieuse introduite devant elle, que sur les préjudices sur lesquels l'office a été préalablement mis en mesure de notifier une décision à la victime ;
Et attendu que l'arrêt retient à bon droit que la saisine de la cour d'appel de Paris est strictement limitée, en vertu de l'article L. 3122-3, alinéa 2, du code de la santé publique, à la demande d'indemnisation rejetée et qui porte en l'espèce sur un préjudice de retraite, et en déduit exactement qu'il convient en conséquence de déclarer irrecevable la demande de M. X... en paiement de la somme de 516 148,58 euros en réparation du manque à gagner pour la période de sa contamination à sa mise à la retraite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
Vu l'article 462 du code de procédure civile,
Rectifie l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 29 janvier 2009 page 2, en ce sens que la date de notification du rejet de la demande par l'ONIAM est le 27 mars 2008 et non le 15 février 2008 ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé « l'offre non acceptée le 11 février 2008 par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux » ;
ALORS QU'il résulte des conclusions de l'ONIAM que M. X... avait contesté, devant la cour d'appel de Paris, la décision de l'office du 27 mars 2008 rejetant sa demande d'indemnisation du préjudice de retraite résultant de sa contamination par le VIH (concl. du 25 novembre 2008, p. 3, n° 6 et 7) et que l'ONIAM sollicitait la confirmation de la décision du 27 mars 2008 (concl., p. 8, §3) ; que M. X... avait précisé, dans ses premières conclusions, qu'il avait reçu le 29 mars 2008 la notification du rejet de sa demande et qu'il contestait cette décision de l'ONIAM (concl. du 28 mai 2008, p. 1, § 3 et 5) ; qu'en confirmant « l'offre non acceptée le 11 février 2008 par l'(ONIAM) », tandis qu'elle était saisie d'un recours contre la décision de rejet du 27 mars 2008, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré M. X... irrecevable en sa demande en paiement de la somme de 516.148,58 € en compensation du manque à gagner pour la période de sa contamination à sa mise à la retraite ;
AUX MOTIFS QUE la saisine de la Cour est strictement limitée en vertu de l'article L. 3122-3, alinéa 2 du code de la santé publique à la demande d'indemnisation rejetée et qui porte en l'espèce sur un préjudice de retraite ; qu'il convient en conséquence de déclarer irrecevable la demande de M. Marcel X... en paiement de la somme de 516.148,58 € en compensation du manque à gagner pour la période de sa contamination à sa mise à la retraite ;
1°) ALORS QUE lorsque la demande d'indemnisation de la victime contaminée par le virus d'immunodéficience humaine a été rejetée par l'ONIAM, qu'aucune offre ne lui a été présentée dans le délai mentionné à l'article L. 3122-5 du code de la santé publique ou que l'offre formulée n'a pas été acceptée, la victime ou ses ayants droit sont recevables à saisir la cour d'appel de Paris de toute demande d'indemnisation d'un chef de préjudice trouvant sa source dans la contamination ; qu'en affirmant néanmoins, pour considérer que la demande de M. X... tendant à l'indemnisation de son manque à gagner pour la période comprise entre sa contamination et sa mise à la retraite était irrecevable, que sa saisine était strictement limitée à la demande d'indemnisation rejetée par l'ONIAM, la cour d'appel a violé l'article L. 3122-3, alinéa 2 du code de la santé publique ;
2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE le droit au procès équitable dans un délai raisonnable garanti par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, impose que la juridiction fasse preuve de diligences exceptionnelles lorsque le demandeur est atteint d'un mal incurable, qu'il dispose d'une espérance de vie réduite et que tout retard risque de priver d'objet utile la question à trancher par le juge ; qu'en l'espèce, M. X... avait, en cours de délibéré, saisi la cour d'appel d'une demande tendant à ce que sa demande d'indemnisation de son préjudice professionnel jusqu'à sa mise en retraite, qui avait fait l'objet d'une décision du fonds postérieure à la date des débats, soit examinée en même temps que sa demande tendant à l'indemnisation de son préjudice de retraite rejetée par l'office le 27 mars 2008 ; qu'il avait indiqué que, compte tenu de son état de santé critique, son « espérance d'aboutir à l'issue des procédures supplémentaires (était) plus qu'incertaine » ; qu'en s'abstenant d'examiner cette demande et de prononcer une réouverture des débats, la cour d'appel a violé l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé la décision critiquée et d'avoir rejeté la demande de M. X... tendant à la condamnation de l'ONIAM à lui payer une somme de 889,26 € en complément de sa retraite et retraite complémentaire en cas de maintien sur le territoire français et 1.073,75 € en cas de départ et de retour dans son pays natal ;
AUX MOTIFS QU'il n'est justifié de la perception d'une rémunération au-dessus du SMIC que sur une seule période d'activité salariée du 1er janvier au 11 mars 1980 soit pendant 2 mois et demi, précédant d'un mois et demi l'opération chirurgicale ayant causé la contamination et de six ans la découverte de la séropositivité de M. Marcel X... ; que cette rémunération à 1,86 (en réalité 1,83) du SMIC, ponctuelle et temporaire au titre d'un emploi manifestement précaire ayant cessé avant la contamination, ne peut servir de référence pour l'appréciation de la perte de retraite alléguée ; qu'il convient en conséquence de confirmer la décision de l'ONIAM et de débouter M. Marcel X... de ses demandes ;
ALORS QU'il résulte des constatations de la cour d'appel que M. X..., dans ses écritures développées à l'audience, avait invoqué une fatigue excessive et une incapacité progressive dès 1981 et demandé de prendre en compte comme référence et base de calcul de son préjudice économique le salaire de son dernier emploi avant sa contamination (arrêt, p. 2, in fine) ; qu'en se fondant, pour considérer que la rémunération supérieure au SMIC perçue par M. X... avant sa contamination ne pouvait servir de référence pour le calcul de son préjudice de retraite, sur la circonstance que cette rémunération égale à 1,83 SMIC précédait de six ans la découverte de sa séropositivité, sans répondre aux conclusions de ce dernier relatives au lien entre sa séropositivité et la diminution de ses revenus après la contamination, peu important que le diagnostic de celle-ci n'ait été posé que six ans plus tard, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-13776
Date de la décision : 28/04/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SANTE PUBLIQUE - Transfusion sanguine - Virus d'immunodéficience humaine - Contamination - Indemnisation - Saisine du Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles contaminés par le VIH - Requête - Demande de réparation des préjudices - Nécessité

Il résulte des articles L. 3122-3 du code de la santé publique, ensemble les articles 1er, 5, 6 et 7 du décret n° 92-183 du 26 février 1992, 1 à 5 du décret n° 92-759 du 31 juillet 1992, dans leur rédaction alors applicable, que la demande d'indemnisation présentée à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) doit comporter les éléments justificatifs de l'atteinte par le VIH et des transfusions sanguines ou des injections de produits dérivés du sang, ainsi que la justification des préjudices. En cas de recours, la cour d'appel de Paris ne peut statuer, dans le cadre de l'instance contentieuse introduite devant elle, que sur les préjudices sur lesquels le Fonds a été préalablement mis en mesure de notifier une décision à la victime. Fait une exacte application de ces textes la cour d'appel de Paris qui déclare irrecevable une demande d'indemnisation du manque à gagner pour la période allant de la contamination à la mise à la retraite en retenant que sa saisine était strictement limitée à la demande d'indemnisation d'un préjudice de retraite que l'ONIAM avait rejetée


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 janvier 2009

A rapprocher, :2e Civ., 9 octobre 2003, pourvoi n° 03-06001, Bull. 2003, II, n° 297 (cassation partielle sans renvoi)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 avr. 2011, pourvoi n°10-13776, Bull. civ. 2011, II, n° 97
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, II, n° 97

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Rapporteur ?: M. Bizot
Avocat(s) : SCP Ortscheidt, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.13776
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