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22/03/2011 | FRANCE | N°10-16993

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 mars 2011, 10-16993


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 mars 2010), rendu sur contredit, que la société RKS, établie en France, a conclu un contrat de fourniture de matières premières avec la société Officine Nicola Galperti et Figlio Spa (la société ONG) et un contrat de sous-traitance avec la société Galperti Tech (la société GT), toutes deux établies en Italie ; que la société RKS, invoquant diverses malfaçons, a assigné la société GT devant le tribunal de commerce d'Auxerre en

résiliation du contrat, en paiement d'indemnités et en garantie des demandes qui ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 mars 2010), rendu sur contredit, que la société RKS, établie en France, a conclu un contrat de fourniture de matières premières avec la société Officine Nicola Galperti et Figlio Spa (la société ONG) et un contrat de sous-traitance avec la société Galperti Tech (la société GT), toutes deux établies en Italie ; que la société RKS, invoquant diverses malfaçons, a assigné la société GT devant le tribunal de commerce d'Auxerre en résiliation du contrat, en paiement d'indemnités et en garantie des demandes qui pourraient être formées par la société ONG, qu'elle a également appelée dans la cause ;
Attendu que les sociétés ONG et GT font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur contredit et retenu la compétence du tribunal de commerce d'Auxerre pour statuer sur les demandes de la société RKS, alors, selon le moyen :
1°/ que les bons produits par les parties étaient des bons de commande, établis par la société RKS ; qu'en jugeant pourtant qu'il s'agissait de «bons de livraison »matérialisant l'accord des parties, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que la mention de l'incoterm "EX WORKS" désigne selon les règles du commerce international une vente au départ, dans laquelle le vendeur n'est pas l'expéditeur et doit seulement mettre à disposition les marchandises vendues dans ses propres usines, à charge pour l'acquéreur d'en assurer ou d'en faire assurer le transport à l'adresse de livraison finale de son choix ; qu'en l'espèce, les bons de commande mentionnaient "EX WORKS" pour définir les "conditions d'expédition" des marchandises vendues par les sociétés ayant leurs usines en Italie et visaient le siège social de l'acquéreur, en France, comme "adresse de livraison" ; qu'il se déduisait de ces mentions que l'obligation de livraison des sociétés venderesses s'exécutait par la mise à disposition des marchandises en Italie d'une part, que le transport à l'adresse du siège de l'acquéreur en France lui incombait d'autre part ; que les sociétés venderesses soutenaient d'ailleurs, sans être contredites, que les marchandises litigieuses avaient bien été mises à disposition de l'acquéreur dans les usines italiennes, celui-ci ayant ensuite envoyé son transporteur pour en prendre possession et les livrer in fine à l'adresse du siège social de l'acquéreur ; que dès lors, en déduisant des mentions des bons de commande une obligation de livraison en France à la charge des venderesses, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que lorsque les parties à un contrat de vente international concluent une vente au départ par la mention "EX WORKS" portée au contrat, mais entendent néanmoins mettre à la charge du vendeur une obligation de livraison distincte de celle consistant à mettre les marchandises à disposition dans ses usines, elles doivent le prévoir par une stipulation claire et précise ; qu'en l'espèce, il était porté sur les bons litigieux, d'une part la mention "conditions d'expédition : EX WORKS", d'autre part une "adresse de livraison" au siège social de l'acquéreur ; qu'en retenant qu'il résultait de ces mentions que les parties auraient entendu déroger à l'obligation de livraison imposant seulement au vendeur, dans le cadre d'une vente au départ "EX WORKS", de mettre les marchandises à disposition dans ses usines, en l'espèce en Italie, et auraient ainsi convenu que le vendeur assumait la charge de les livrer jusqu'au siège social de l'acquéreur, en l'espèce en France, quand la seule mention d'une "adresse de livraison" ne constituait pas une clause dérogatoire claire et précise à la mention "conditions d'expédition : EX WORKS" également portée au contrat, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, ensemble les règles du commerce international ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé les termes de l'article 5.1 b) du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, l'arrêt retient que le lieu de livraison des marchandises au sens de ce texte ressort en l'espèce d'une disposition spéciale du contrat de vente matérialisant l'accord des parties, fixant ce lieu à Avallon ; que la cour d'appel en a déduit à bon droit que le tribunal de commerce d'Auxerre était compétent ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa première branche, laquelle critique une erreur de plume sans portée, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Galperti Tech et la société Officine Nicola Galperti et Figlio Spa aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société RKS la somme globale de 2 500 euros et rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Galperti Tech et la société Officine Nicola Galperti et Figlio Spa
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté le contredit formé par les sociétés GALPERTI TECH et OFFICINE NICOLA GALPERTI ET FIGLIO SPA et retenu par conséquent la compétence du Tribunal de commerce d'AUXERRE pour statuer sur les demandes de la société RKS ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article 5.1 b) du règlement (CE) du Conseil n°44/2001 du 22 décembre 2000 : "Une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre : 1° a) en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée, b) aux fins de l'application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande est : pour la vente de marchandise, le lieu d'un Etat membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées" ; que les stipulations de la Convention sur les contrats de vente internationale de marchandises faite à Vienne le 11 avril 1980 et les prévisions de l'Incoterm "Ex works", auquel se réfèrent les bons livraison, ne déterminent le lieu de livraison qu'à défaut de stipulation expresse sur ce point ; qu'en l'espèce, les bons de livraison, qui matérialisent l'accord des parties, fixent à Avallon le lieu de livraison des marchandises ; que c'est donc à bon droit que le tribunal de commerce d'Auxerre s'est déclaré territorialement compétent ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE la société RKS a conclu un contrat visant la fourniture de roulement avec la par la SARL GALPERTI TECH ; que ce contrat résulte de l'acceptation sans réserve par cette dernière des bons de commande émis par la demanderesse ; que ces bons de commandes distinguent expressément le lieu de livraison des marchandises situé au siège social à AVALLON et les conditions d'expéditions de la marchandise ; que les conclusions des parties permettent au Tribunal de déterminer que le Tribunal territorialement compétent est celui dans le ressort duquel les marchandises ont ou auraient dû être livrées en vertu du contrat, que dès lors la Convention de Vienne du 11 avril 1980 ne peut trouver application, qu'il échet donc de se déclarer compétent ;
1- ALORS QUE les bons produits par les parties étaient des bons de commande, établis par la société RKS ; qu'en jugeant pourtant qu'il s'agissait de «bons de livraison» matérialisant l'accord des parties, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
2- ALORS QUE la mention de l'Incoterm "EX WORKS" désigne selon les règles du commerce international une vente au départ, dans laquelle le vendeur n'est pas l'expéditeur et doit seulement mettre à disposition les marchandises vendues dans ses propres usines, à charge pour l'acquéreur d'en assurer ou d'en faire assurer le transport à l'adresse de livraison finale de son choix ; qu'en l'espèce, les bons de commande mentionnaient "EX WORKS" pour définir les "conditions d'expédition" des marchandises vendues par les sociétés ayant leurs usines en Italie et visaient le siège social de l'acquéreur, en France, comme "adresse de livraison" ; qu'il se déduisait de ces mentions que l'obligation de livraison des sociétés venderesses s'exécutait par la mise à disposition des marchandises en Italie d'une part, que le transport à l'adresse du siège de l'acquéreur en France lui incombait d'autre part ; que les sociétés venderesses soutenaient d'ailleurs, sans être contredites, que les marchandises litigieuses avaient bien été mises à disposition de l'acquéreur dans les usines italiennes, celui-ci ayant ensuite envoyé son transporteur pour en prendre possession et les livrer in fine à l'adresse du siège social de l'acquéreur (conclusions d'appel récapitulatives, p.4) ; que dès lors, en déduisant des mentions des bons de commande une obligation de livraison en France à la charge des venderesses, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.
3- ALORS en tout état de cause QUE lorsque les parties à un contrat de vente international concluent une vente au départ par la mention "EX WORKS" portée au contrat, mais entendent néanmoins mettre à la charge du vendeur une obligation de livraison distincte de celle consistant à mettre les marchandises à disposition dans ses usines, elles doivent le prévoir par une stipulation claire et précise; qu'en l'espèce, il était porté sur les bons litigieux, d'une part la mention "conditions d'expédition : EX WORKS", d'autre part une "adresse de livraison" au siège social de l'acquéreur ; qu'en retenant qu'il résultait de ces mentions que les parties auraient entendu déroger à l'obligation de livraison imposant seulement au vendeur, dans le cadre d'une vente au départ "EX WORKS", de mettre les marchandises à disposition dans ses usines, en l'espèce en Italie, et auraient ainsi convenu que le vendeur assumait la charge de les livrer jusqu'au siège social de l'acquéreur, en l'espèce en France, quand la seule mention d'une "adresse de livraison" ne constituait pas une clause dérogatoire claire et précise à la mention "conditions d'expédition : EX WORKS" également portée au contrat, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble les règles du commerce international.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-16993
Date de la décision : 22/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

UNION EUROPEENNE - Coopération judiciaire en matière civile - Compétence judiciaire, reconnaissance et exécution des décisions - Règlement (CE) n° 44/2001 - Article 5 § 1 - Compétence spéciale en matière contractuelle - Lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande - Définition - Applications diverses - Lieu de livraison ressortant d'une disposition spéciale du contrat de vente de marchandises

CONFLIT DE JURIDICTIONS - Compétence internationale - Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 - Article 5 § 1 - Compétence spéciale en matière contractuelle - Lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande - Définition - Applications diverses - Lieu de livraison ressortant d'une disposition spéciale du contrat de vente de marchandises

Aux termes de l'article 5 § 1 a du Règlement (CE) du Conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000 une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre, en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée. En vertu du § 1 b de ce même article, aux fins de l'application de cette disposition, et sauf convention contraire, le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande est pour la vente de marchandise, le lieu d'un Etat membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées. Le lieu de livraison des marchandises au sens de l'article 5 § 1 b du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 peut ressortir d'une disposition spéciale du contrat de vente matérialisant l'accord des parties


Références :

article 5 § 1 b du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 mar. 2011, pourvoi n°10-16993, Bull. civ. 2011, IV, n° 51
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, IV, n° 51

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Mollard
Rapporteur ?: Mme Tréard
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.16993
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