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08/03/2011 | FRANCE | N°10-88762

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 mars 2011, 10-88762


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Mohamed X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 8 décembre 2010, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du gouvernement de la République arabe d'Egypte, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, sur une fiche de recherc

he émanant des autorités de la République arabe d'Egypte diffusée par Interpol, et a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Mohamed X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 8 décembre 2010, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du gouvernement de la République arabe d'Egypte, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, sur une fiche de recherche émanant des autorités de la République arabe d'Egypte diffusée par Interpol, et après la demande d'arrestation provisoire en vue d'une extradition formulée par les autorités égyptiennes, M. X... a été interpellé le 11 novembre 2010 à 9h25 à l'aéroport de Roissy ; que, le 12 novembre 2010, M. X... a comparu devant un magistrat du parquet général près la cour d'appel de Paris, qui l'a placé sous écrou extraditionnel ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 § 1 et § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 137, 138, 696-10, 696-11, 696-19, 696-23 du code de procédure pénale, 593 du même code, violation des principes généraux relatifs à la privation de liberté, violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté formée par M. X..., placé successivement, à la suite de son arrestation, en rétention judiciaire, du 11 novembre 2010 à 9h40 au 12 novembre 2010 à 13h50, puis sous écrou extraditionnel jusqu'à sa comparution devant la chambre de l'instruction le 8 décembre 2010, dans le cadre de sa demande de mise en liberté ;
" aux motifs que, si c'est effectivement en application de l'article 695-23 que le procureur général peut ordonner le placement sous écrou extraditionnel d'une personne réclamée aux fins d'extradition, comme en l'espèce, cette faculté signifie qu'il existe une alternative à la détention provisoire, que l'intéressé peut bénéficier d'une mesure de contrôle judiciaire ou de remise en liberté (…) ; que cette possibilité offerte au ministère public est assortie d'un contrôle de la chambre de l'instruction, contrôle qui peut être immédiat, et ce en conformité avec les dispositions de la Cour européenne des droits de l'homme, puisque la personne placée sous écrou extraditionnel peut immédiatement saisir cette juridiction d'une demande de mise en liberté ;
" 1) alors qu'aux termes de l'article 5 § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne arrêtée ou détenue doit être traduite devant un juge « aussitôt », c'est-à-dire dans un très bref délai ; que le ministère public ne constitue pas une autorité judiciaire au sens de ce texte ; que la comparution devant un juge doit être systématique et ne peut être subordonnée à l'existence d'une demande de mise en liberté et encore moins à une date de fixation de l'affaire déterminée par le parquet ; que le bref délai exigé par l'article 5 § 3 tel qu'interprété par la Cour européenne est incompatible avec un délai de comparution en l'espèce de près d'un mois (28 jours) ; qu'à défaut de comparution dans un bref délai, le titre de détention a perdu toute légitimité ; que la chambre de l'instruction, en refusant de mettre en liberté l'intéressé, a violé les textes susvisés ; que la cassation devra intervenir sans renvoi et avec mise en liberté immédiate ;
" 2) alors que, lorsque l'intéressé est appréhendé, comme en l'espèce, dans le cadre d'une demande d'arrestation provisoire et de l'article 696-23 du code de procédure pénale, dans l'attente d'une demande d'extradition, le principe même d'une telle arrestation, qui n'est prononcée que par le procureur général, et à laquelle il n'est en principe mis fin qu'après un délai de trente jours si l'Etat requérant n'a pas confirmé sa demande d'extradition, est contraire aux dispositions de l'article 5 de la Convention européenne, puisque la procédure reste pendant ce délai entre les mains du ministère public sans comparution devant un juge sauf demande de mise en liberté ; que la procédure initiée sur ce fondement est donc nulle, et que l'arrêt a violé les textes et principes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme que la présentation immédiate de toute personne arrêtée ou détenue devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi, qui est exigée par le paragraphe 3 de ce texte, ne s'applique qu'aux personnes visées par le paragraphe 1, c) et non à celles contre lesquelles une procédure d'extradition est en cours, qui sont visées par le paragraphe 1, f) ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 § 1 et § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 137, 138, 696-10, 696-11, 696-19, 696-23 du code de procédure pénale et 593 du même code, violation des principes généraux relatifs à la privation de liberté, violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté formée par M. X..., placé successivement, à la suite de son arrestation, en rétention judiciaire, du 11 novembre 2010 à 9h40 au 12 novembre 2010 à 13h50, puis sous écrou extraditionnel jusqu'à sa comparution devant la chambre de l'instruction le 8 décembre 2010, dans le cadre de sa demande de mise en liberté ;
" 1) aux motifs que, dès le 10 novembre 2010 à 14h23, le procureur général de la cour d'appel de Paris a été avisé par courrier électronique de l'interpellation imminente de « X... », tandis que le bureau Interpol de Paris confirmait la validité de la fiche de recherche et demandait son arrestation ; que, dès lors, il doit être considéré que le procureur général de Paris donnait suite à la demande d'arrestation, émise via la fiche de recherche ;
" alors qu'une information n'est pas une décision, qu'aucune pièce de la procédure ne mentionne que le procureur général aurait donné son assentiment ni à l'interpellation ni au placement en rétention judiciaire ; que l'interpellation, faite de leur propre autorité par les forces de police, et la rétention par le procureur de la République, ont toutes deux été réalisées par une autorité incompétente ; que la chambre de l'instruction devait donc annuler le titre de détention ;
" 2) aux motifs qu'il n'y avait pas d'erreur évidente sur la personne, les discordances quant aux numéros du passeport et à la date de naissance n'étant pas significatives ;
" alors que, faute de s'interroger sur la circonstance, soulignée par l'intéressé, qui n'a pas reconnu être la personne visée par la demande, que l'orthographe de son nom n'est pas celle des documents envoyés par l'Egypte, la chambre de l'instruction a privé sa décision de motif et de tout fondement légal ;
" 3) aux motifs que l'intéressé n'a pas été interpellé en flagrance ; que l'urgence de procéder à son interpellation et à l'arrestation de M. " X... " procédait de la seule émission de la fiche de recherche à l'encontre d'une personne en fuite ;
" alors que, faute de caractériser en quoi M. X..., qui est de nationalité allemande, et qui rentrait en Allemagne, aurait été juridiquement « en fuite », c'est-à-dire se serait volontairement dérobé à une mesure judiciaire qui lui aurait été dûment notifiée, la chambre de l'instruction qui n'a pas justifié le recours à la procédure d'arrestation provisoire, a encore privé sa décision de tout motif " ;
Attendu que le moyen, qui se borne à reprendre l'argumentation que, par une motivation exempte d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel a écartée à bon droit, ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 § 1 et § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 137, 138, 696-10, 696-11, 696-19, 696-23 du code de procédure pénale et 593 du même code, violation des principes généraux relatifs à la privation de liberté, violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté formée par M. X..., placé successivement, à la suite de son arrestation, en rétention judiciaire, du 11 novembre 2010 à 9h40 au 12 novembre 2010 à 13h50, puis sous écrou extraditionnel jusqu'à sa comparution devant la chambre de l'instruction le 8 décembre 2010, dans le cadre de sa demande de mise en liberté ;
" aux motifs que la procédure d'interpellation et d'arrestation étant régulière et une mesure de contrôle judiciaire étant inadaptée, la demande de mise en liberté sera rejetée ;
" alors qu'en vertu de l'article 137 du code de procédure pénale et des principes généraux relatifs à la privation de liberté à titre provisoire et de mesure de sûreté, le maintien en détention ne peut être prononcé que dans la mesure où les obligations de contrôle judiciaire s'avèrent insuffisantes et où l'assignation à résidence avec surveillance électronique ne permet pas d'atteindre les objectifs de la mesure de sûreté en cause ; qu'en limitant son examen au caractère suffisant ou insuffisant des obligations du contrôle judiciaire, et en omettant de rechercher si l'assignation à résidence sous surveillance électronique ne permettait pas de s'assurer de la présence en France de l'intéressé, la chambre de l'instruction a violé les textes et principes susvisés " ;
Attendu que lorsque la chambre de l'instruction statue sur une demande de mise en liberté présentée par un étranger placé sous écrou extraditionnel, elle ne doit se référer qu'aux garanties qui sont offertes par l'intéressé en vue de satisfaire à la demande de l'Etat requérant ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt a été rendu par une chambre de l'instruction compétente et composée conformément à la loi, et que la procédure est régulière ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Roth conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-88762
Date de la décision : 08/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

EXTRADITION - Chambre de l'instruction - Procédure - Article 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme - Exclusion

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 5 § 3 - Exclusion - Cas - Extradition

Il résulte de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme que la présentation immédiate de toute personne arrêtée ou détenue devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi, qui est exigée par le paragraphe 3 de ce texte, ne s'applique qu'aux personnes visées par le paragraphe 1 c, et non à celles contre lesquelles une procédure d'extradition est en cours, qui sont visées par le paragraphe 1 f


Références :

article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 08 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 mar. 2011, pourvoi n°10-88762, Bull. crim. criminel 2011, n° 49
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2011, n° 49

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Raysséguier (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Roth
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 02/12/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.88762
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