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02/03/2011 | FRANCE | N°10-17603

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 mars 2011, 10-17603


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 2122-3 du code du travail ;
Attendu selon ce texte, que lorsqu'une liste commune a été établie par des organisations syndicales, la répartition entre elles des suffrages exprimés se fait sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de leur liste, et à défaut, à parts égales ; qu'il en résulte que la répartition des suffrages, lorsque les syndicats formant une liste commune ont choisi qu'elle ne soit pas à parts égales, doit ê

tre portée tant à la connaissance de l'employeur qu'à celle des électeurs de l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 2122-3 du code du travail ;
Attendu selon ce texte, que lorsqu'une liste commune a été établie par des organisations syndicales, la répartition entre elles des suffrages exprimés se fait sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de leur liste, et à défaut, à parts égales ; qu'il en résulte que la répartition des suffrages, lorsque les syndicats formant une liste commune ont choisi qu'elle ne soit pas à parts égales, doit être portée tant à la connaissance de l'employeur qu'à celle des électeurs de l'entreprise ou de l'établissement concerné avant le déroulement des élections ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que les syndicats FO et Sud santé sociaux ont présenté une liste commune lors des élections professionnelles qui se sont déroulées au sein de l'Association départementale du Doubs de sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ADDSEA) le 18 mars 2010 ; qu'ils ont informé l'employeur d'une répartition des suffrages à hauteur de 75 % pour le syndicat Sud et de 25 % pour le syndicat FO ; qu'en application de cette répartition, qui n'avait, avant le scrutin, été portée à la connaissance ni des autres organisations syndicales ni des électeurs, 37,77 % des suffrages ont été attribués au syndicat Sud et 12,59 % au syndicat FO ; que le syndicat CFDT santé sociaux du Doubs (le syndicat CFDT) a saisi le tribunal d'instance d'une demande tendant à ce que la répartition des suffrages entre les syndicats de la liste commune soit effectuée à parts égales ;
Attendu que pour débouter le syndicat CFDT de sa demande, le tribunal énonce d'une part que, lorsqu'il constate l'existence d'une irrégularité et estime qu'elle est de nature à influencer le résultat du scrutin, le juge ne peut pas prendre d'autre décision que l'annulation du vote et d'autre part que les syndicats de la liste commune ayant, lors du dépôt de la liste, informé l'employeur d'une répartition des suffrages inégalitaire pour le calcul de la représentativité, il incombait à celui-ci de procéder à l'information, voire aux intéressés, électeurs et autres syndicats, de rechercher auprès de l'employeur si des particularités avaient été éventuellement décidées par les organisations syndicales, lesquelles n'ont pas l'obligation d'informer les autres syndicats et les électeurs de leur accord ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il avait constaté que les électeurs n'avaient pas été informés d'une répartition des suffrages particulière entre les organisations syndicales de la liste commune et qu'étant saisi d'une contestation de la mesure de la représentativité, il lui appartenait de rétablir les résultats en opérant la répartition des suffrages à parts égales, le tribunal a violé le texte susvisé ;
Et attendu que la cassation sur le premier moyen entraîne par voie de conséquence la cassation sur le second ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 7 mai 2010, entre les parties, par le tribunal d'instance de Besançon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que la répartition des suffrages recueillis par la liste commune présentée par les syndicats FO et Sud santé sociaux lors des élections professionnelles du 18 mars 2010 au sein de l'ADDSEA s'opère à parts égales entre ces deux syndicats ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le syndicat CFDT santé sociaux du Doubs à payer aux syndicats Sud santé sociaux et FO chacun la somme de 500 euros ; rejette la demande de la société ADDSEA formée à ce titre ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour le syndicat CFDT santé sociaux du Doubs.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande présentée par le syndicat CFDT Santé sociaux du Doubs visant à la modification de la répartition des suffrages des élections des membres du comité d'entreprise de l'ADDSEA, qui se sont déroulées le 18 mars 2010 et dit n'y avoir lieu de prononcer l'annulation des élections professionnelles en cause ;
AUX MOTIFS QU'il est de principe que toute irrégularité dans le processus électoral est susceptible d'entraîner l'annulation du scrutin à la condition d'avoir eu une incidence sur les résultats de ce dernier ; de ce fait, le tribunal d'instance, lorsqu'il constate l'existence d'une irrégularité et estime qu'elle est de nature à influencer le résultat du scrutin ne peut pas prendre une autre décision que l'annulation du vote ; aussi, au cas particulier, bien que le syndicat CFDT Santé sociaux du Doubs n'ait demandé que la modification de la répartition des suffrages exprimés entre les syndicats SUD et FO - ce que le tribunal ne peut pas faire -, le tribunal s'il constate l'existence d'une irrégularité affectant le résultat du scrutin ne pourra que prononcer l'annulation des élections considérées ;
Et AUX MOTIFS QUE l'article L. 2122-3 du code du travail, issu de la loi du 20 août 2008, dispose que : « Lorsqu'une liste commune a été établie par des organisations syndicales, la répartition entre elles des suffrages exprimés se fait sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de leur liste. A défaut d'indication, la répartition des suffrages se fait à part égale entre les organisations concernées » ; la loi ne prévoit pas de publicité particulière des listes de candidats ; la seule obligation découlant de la loi, en cas de liste commune entre syndicats, est l'indication de la répartition des suffrages lors du dépôt de la liste commune ; le dépôt de la liste des candidats se fait auprès de l'employeur ; au cas d'espèce il n'est pas discuté que le document sur lequel figurent les listes communes des candidats présentés par les syndicats SUD et FO, que ces derniers ont remis au directeur de l'ADDSEA le 5 mars 2010 (les élections étant fixées au 18 mars 2010), comporte la mention suivante : « Pour le calcul de la représentativité le rapport sera le suivant : SUD 75 % / FO 25 % » ; dans la mesure où les syndicats SUD et FO ont respecté cette obligation et où la loi ne détermine pas d'obligation spécifique à la charge des syndicats présentant une liste commune en vue de diffuser une information à l'adresse des autres syndicats et des électeurs, il ne peut être relevé d'irrégularité susceptible d'entraîner l'annulation du scrutin ; il incombait dans ces conditions à l'employeur de procéder à l'information, voire aux intéressés - électeurs et plus particulièrement syndicats non participants à la liste commune - de rechercher auprès de l'employeur, qui a reçu le dépôt des listes de candidats, si des particularités ont été éventuellement décidées par les organisations syndicales en vue des élections professionnelles prévues ; dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande, telle que présentée par le syndicat CFDT Santé sociaux du Doubs, visant à la modification de la répartition des suffrages ni même de prononcer l'annulation des élections au comité d'entreprise de l'ADDSEA organisées le 18 mars 2010 ;
ALORS QUE le juge d'instance, juge de la régularité des opérations électorales, est compétent pour tirer les conséquences des irrégularités constatées, peu important qu'elles n'aient pas d'effet direct sur le résultat électoral ; que lorsque ces irrégularités sont de nature à influer sur la représentativité des syndicats dans l'entreprise, il lui appartient d'en tirer les conséquences ; qu'en se disant incompétent pour prendre aucune autre décision que l'annulation du scrutin, le tribunal a méconnu sa compétence au regard des articles L. 2122-1 et L. 2122-3 du Code du travail
ET ALORS QUE la répartition des suffrages, lorsque les syndicats formant une liste commune ont choisi qu'elle ne soit pas à parts égales, doit être portée tant à la connaissance de l'employeur qu'à celle des électeurs avant le déroulement des ; qu'à défaut, la répartition s'opère à parts égales ; que le Tribunal a considéré qu'aucune irrégularité n'avait été commise aux motifs que les syndicats SUD et FO avaient informé l'employeur de la répartition des suffrages et que la loi ne déterminait « pas d'obligation spécifique à la charge des syndicats présentant une liste commune en vue de diffuser une information à l'adresse des autres syndicats et des électeurs » ; qu'en statuant comme il l'a fait alors que l'information portant sur la répartition des suffrages n'avait pas été portée à la connaissance des salariés avant le déroulement des élections, le Tribunal a violé l'article L. 2122-3 du code du travail ;
Et ALORS QUE l'irrégularité est caractérisée dès lors que seul l'employeur a eu connaissance, avant le déroulement des élections, de l'information portant sur la répartition des suffrages, sans que les électeurs aient reçu cette information aux fins de pouvoir émettre leur vote en toute connaissance de cause; qu'il importe peu que le défaut d'information ne soit pas imputable aux syndicats ayant présenté une liste commune ; que le Tribunal a considéré qu'aucune irrégularité n'avait été commise aux motifs que les syndicats SUD et FO avaient informé l'employeur de la répartition des suffrages et que la loi ne déterminait « pas d'obligation spécifique à la charge des syndicats présentant une liste commune en vue de diffuser une information à l'adresse des autres syndicats et des électeurs » ; qu'en excluant l'existence d'une irrégularité par des motifs inopérants, le Tribunal a violé l'article 455 du Code de Procédure Civile ;
Et ALORS en outre QUE la répartition des suffrages doit être portée à la connaissance des électeurs lesquels ne sont pas tenus de procéder eux-mêmes à la recherche de l'information ; que le Tribunal, tout en considérant qu'il incombait à l'employeur, qui a reçu le dépôt des listes de candidats, de procéder à l'information, a ajouté qu'il incombait « voire aux intéressés - électeurs et plus particulièrement syndicats non participants à la liste commune - de rechercher auprès de l'employeur si des particularités ont été éventuellement décidées par les organisations syndicales en vue des élections professionnelles prévues » ; qu'en mettant à la charge des électeurs et des autres organisations syndicales l'obligation de procéder eux-mêmes à la recherche des informations qui doivent être portées à leur connaissance avant le déroulement des élections, le Tribunal a violé l'article L. 2122-3 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR condamné le syndicat CFDT Santé sociaux du Doubs aux dépens de l'instance ;
AUX MOTIFS QUE le syndicat CFDT Santé sociaux du Doubs, partie perdante, sera condamné aux dépens de l'instance ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera cassation par voie de conséquence du jugement en ce qu'il a condamné le syndicat CFDT aux dépens et ce, en application de l'article 624 du Code de Procédure Civile ;
Et ALORS en tout état de cause QUE le tribunal d'instance, compétent pour statuer sur les contestations relatives à l'élection des membres du comité d'entreprise, statue sans frais ; qu'en condamnant le syndicat CFDT Santé sociaux du Doubs aux dépens, le Tribunal a violé l'article R 2324-25 du Code du Travail (anciennement R. 433-4).


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-17603
Date de la décision : 02/03/2011
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité d'entreprise et délégué du personnel - Candidat - Liste de candidatures - Liste commune établie par des organisations syndicales - Répartition des suffrages exprimés - Répartition non égalitaire - Information de l'employeur et des électeurs - Information préalable au déroulement des élections - Défaut - Portée

Aux termes de l'article L. 2122-3 du code du travail, lorsqu'une liste commune a été établie par des organisations syndicales, la répartition entre elles des suffrages exprimés se fait sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de leur liste, et à défaut, à parts égales. Il en résulte que, lorsque les syndicats formant une liste commune ont choisi qu'elle ne soit pas à parts égales, la répartition des suffrages doit être portée tant à la connaissance de l'employeur qu'à celle des électeurs de l'entreprise ou de l'établissement concerné avant le déroulement des élections. Dès lors, il appartient au juge, saisi d'une contestation de la mesure de la représentativité d'un syndicat et de la répartition convenue entre les organisations syndicales de la liste commune, s'il constate que les électeurs n'ont pas été informés avant les élections, de rétablir les résultats en opérant la répartition des suffrages à parts égales


Références :

article L. 2122-3 du code du travail

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Besançon, 07 mai 2010

Sur la portée de l'absence d'information préalable de l'existence d'une répartition inégalitaire des suffrages, dans le même sens que :Soc., 13 janvier 2010, pourvoi n° 09-60208, Bull. 2010, V, n° 6 (cassation partielle sans renvoi)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 mar. 2011, pourvoi n°10-17603, Bull. civ. 2011, V, n° 59
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, V, n° 59

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Lalande
Rapporteur ?: Mme Lambremon
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17603
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