LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 126 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X... ont assigné devant un tribunal de grande instance M. et Mme Y..., la SCI Fide et la société Fime en réitération d'un compromis de vente conclu le 17 mai 2005 ; que les défendeurs ont soulevé l'irrecevabilité de la demande pour défaut de mise en oeuvre de la procédure de conciliation prévue à l'acte, préalable à la saisine du tribunal ;
Attendu que pour accueillir cette fin de non-recevoir, la cour d'appel retient que la clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à toute instance judiciaire constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent ; que la clause de conciliation préalable prévue au compromis de vente signé par M. et Mme X... et intitulée "conciliation-médiation" ne constitue pas une simple formalité mais la loi des parties, susceptible de favoriser le règlement amiable de leur litige et excluant par sa nature même toute possibilité de régularisation après l'introduction de l'instance ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le défaut de mise en oeuvre d'une clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge constitue une fin de non-recevoir qui peut être régularisée en cours d'instance, et qu'à la date à laquelle le juge a statué, M. et Mme X... avaient mis en oeuvre dans les formes requises par le compromis de vente la procédure de conciliation, puis, après constatation de son échec par le notaire désigné, réitéré leurs demandes dans les dernières conclusions qui saisissaient le juge, de sorte que la cause d'irrecevabilité avait disparu, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. et Mme Y..., la SCI Fide et la société Fime aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme Y..., de la SCI Fide et de la société Fime, les condamne in solidum à payer à M. et Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes de Monsieur et Madame X... et de les avoir condamnés in solidum à payer à Monsieur et Madame Y..., à la SCI Fide et à la SA Fime, ensemble, la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Aux motifs qu'il est prévu en page 16 de la promesse de vente en date du 17 mai 2005 une clause intitulée conciliation-médiation qui stipule : « En cas de litige, les parties conviennent, préalablement à toute instance judiciaire, de soumettre leur différend à un conciliateur désigné qui sera missionné par le Président de la Chambre des notaires » ; que par cette stipulation, les parties signataires de cette convention se sont obligées à soumettre le litige à un conciliateur préalablement à toute action en justice dans le but de tenter de mettre fin au litige par un règlement amiable, et à ne saisir la juridiction compétente qu'à défaut d'y être parvenues ; que cette clause constitue la loi des parties au sens de l'article 1134 du Code civil et leur commune intention a manifestement été de conférer à cette obligation un caractère impératif, sans quoi elle serait en effet privée de toute efficacité et vidée de toute portée pratique ; qu'il résulte des articles 122 et 124 du Code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées ; qu'est licite la clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, et que celle-ci constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent et peut être invoquée en tout état de la procédure ; que par conséquence, le non-respect de la clause de conciliation préalable vicie la saisine de la juridiction et justifie la fin de non-recevoir prévue par les articles 122 et 123 du nouveau Code de procédure civile ; que s'il est exact qu'aux termes de l'article 126 du Code de procédure civile « l'irrecevabilité doit être écartée si la cause a disparu au moment où le juge statue », encore faut-il que « la situation donnant lieu à fin de non-recevoir soit susceptible d'être régularisée » ; qu'en l'espèce s'agissant non d'une simple formalité mais d'un préalable obligatoire à la saisine du juge dans le but de désamorcer le litige et parvenir à un règlement amiable du conflit, la clause de conciliation préalable exclut par sa nature même toute possibilité de régularisation après la date de l'introduction de l'instance qui lui a fait perdre son objet ; qu'à défaut d'avoir respecté les dispositions contractuelles de conciliation préalable à toute action en justice, la demande des époux X... est irrecevable ;
Alors que l'irrecevabilité doit être écartée si la cause a disparu au moment où le juge statue, chaque fois que la situation donnant lieu à fin de non recevoir est susceptible d'être régularisée ; que la Cour d'appel ne pouvait, sans violer par refus d'application de cette disposition, refuser de prendre en considération, pour apprécier la recevabilité de l'action de Monsieur et Madame X..., le fait qu'ils aient mis en oeuvre la procédure de conciliation dans les formes précises requises par l'acte litigieux, fût-ce postérieurement à l'introduction de l'instance, et que l'échec de cette tentative de conciliation avait été constaté avant même que le premier juge soit amené à statuer ;
Et alors, en toute hypothèse, qu'en statuant de la sorte sans rechercher si, lors même qu'il aurait dû être procédé à cette tentative de conciliation avant toute saisine du juge, la clause litigieuse ne se trouvait pas satisfaite dès lors que Monsieur et Madame X... avaient réitéré, après la constatation de l'échec de cette procédure de conciliation, leur volonté de voir le juge statuer sur leurs demandes, par les dernières conclusions dont ils ont saisi les premiers juges, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 126 précité ;