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14/12/2010 | FRANCE | N°10-17235

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 décembre 2010, 10-17235


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 4, 31 du code de procédure civile, L. 661-5, et R. 621-21 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ainsi que les principes régissant l'excès de pouvoir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ardennes Machining industries AMI (la société) a fait une offre de reprise du bien immobilier, appartenant à la société APM Clermont, en liquidation judiciaire et dans le

quel elle exploitait son activité ; que par une ordonnance du 1er septembr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 4, 31 du code de procédure civile, L. 661-5, et R. 621-21 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ainsi que les principes régissant l'excès de pouvoir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ardennes Machining industries AMI (la société) a fait une offre de reprise du bien immobilier, appartenant à la société APM Clermont, en liquidation judiciaire et dans lequel elle exploitait son activité ; que par une ordonnance du 1er septembre 2009, le juge-commissaire a rejeté l'offre de la société et ordonné la vente du bien par adjudication judiciaire ; que la société, ayant formé un recours contre cette ordonnance, le tribunal l'a déclaré irrecevable ;
Attendu que pour déclarer recevable l'appel-nullité formé par la société, l'arrêt retient que cette dernière, occupante sans droit ni titre du bien immobilier, a un intérêt légitime juridiquement protégé à former un appel-nullité pour contester l'ordonnance du juge-commissaire ordonnant la vente, par adjudication judiciaire, de l'immeuble ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'auteur d'une offre d'acquisition de gré à gré d'un bien immobilier d'un débiteur en liquidation judiciaire n'ayant aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du code de procédure civile, fût-il occupant sans droit ni titre, n'est pas recevable à interjeter appel-nullité du jugement ayant statué sur le recours formé contre l'ordonnance du juge-commissaire rejetant son offre et ordonnant la vente par adjudication judiciaire de ce bien, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable l'appel-nullité formé par la société Ardennes Machining industries AMI contre le jugement rendu le 24 novembre 2009 par le tribunal de commerce de Nanterre ;
Condamne la société Ardennes Machining industries aux dépens ;
Met en outre à sa charge ceux afférents aux instances devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. Y..., ès qualités, la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. Y..., ès qualités.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt, D'AVOIR déclaré recevable l'appel-nullité formé par la société AMI, en raison de l'excès de pouvoir affectant le jugement rendu le 24 novembre 2009 par le Tribunal de commerce de NANTERRE et en raison de l'excès de pouvoir affectant l'ordonnance rendue le 1er septembre 2009, D'AVOIR en conséquence annulé le jugement et l'ordonnance et D'AVOIR statué au fond en ordonnant la vente aux enchères publiques du bien immobilier sur la mise à prix de 400.000 € avec faculté de baisse du prix par moitié ;
AUX MOTIFS QUE « La SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES a acquis l'entreprise du précédent exploitant en liquidation judiciaire, après y avoir été autorisée par jugement rendu le 22 novembre 2007 par le Tribunal de commerce de Nanterre ; que la SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES est entrée dans les lieux en exécution de la disposition de ce jugement prévoyant qu'il lui serait accordé un contrat de bail d'une durée de 18 mois, sans attribution d'un droit de préférence en cas de vente du bien loué ; que la SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES se trouve désormais occupante sans droit ni titre par suite de l'expiration de ce bail au mois de mai 2009 ; que l'ordonnance rendue le 1er septembre 2009 par le juge-commissaire ordonne la vente de l'immeuble "libre de toute occupation", et suggère ainsi que la SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES a l'obligation de libérer les lieux ; qu'en sa qualité d'occupante des lieux par suite d'un bail venu à expiration, la SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES est une personne intéressée, recevable à former le recours de l'article R. 621-21 alinéa 4 du Code de commerce devant le Tribunal de commerce ; que c'est donc en méconnaissance de ses pouvoirs que le Tribunal de commerce de Nanterre, dans le jugement déféré en date du 24 novembre 2009 a déclaré ce recours irrecevable ; que le juge-commissaire ne dispose pas du pouvoir juridictionnel d'ordonner à un occupant de libérer les lieux ; que dans son ordonnance du 1er septembre 2009, le juge-commissaire a donc commis un excès de pouvoir en ordonnant que l'immeuble soit vendu libre de toute occupation ; que dans son jugement du 24 novembre 2009 le Tribunal de commerce de Nanterre a également commis un excès de pouvoir, d'une part pour avoir refusé de statuer sur le recours formé contre l'ordonnance en déclarant ce recours irrecevable, et d'autre part, pour ce faisant, avoir consacré l'excès de pouvoir du juge-commissaire ; qu'en raison de l'excès de pouvoir commis par le Tribunal de commerce de Nanterre, l'appel-nullité formé par la SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES est recevable ; que Maître LEGRAS DE GRANDCOURT, es qualités, soutient toutefois que cet appel-nullité est irrecevable car la SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES ne dispose pas d'un intérêt légitime, juridiquement protégé, car son objectif réel, est de tenter, contrairement à la décision judiciaire qui lui a refusé tout droit de préférence en cas de cession de l'immeuble, de tirer parti de son entrée dans les lieux pour acquérir l'immeuble à vil prix ; mais considérant que la SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES occupe les lieux en vertu d'un bail de 18 mois venu à expiration ; qu'elle possède un intérêt légitime juridiquement protégé à former un appel-nullité pour contester l'ordonnance du juge-commissaire ; qu'il résulte de ce qui précède que les moyens d'irrecevabilité soulevés par Maître LEGRAS DE GRANDCOURT, ès qualités, et par l'URSSAF ne sont pas fondés et qu'en conséquence l'appel-nullité formé par la SAS ARDENNES MACHINING INDUSTRIES est recevable » ;
ET QUE : la Cour est saisie du fond par l'effet dévolutif de l'appel-nullité ; que les circonstances litigieuses entourant la cession de l'immeuble rend préférable une vente aux enchères publiques ; qu'il apparaît également préférable d'ouvrir les enchères pour un prix limité à 400 K€, avec une possibilité de baisse de prix de moitié » ;
ALORS D'UNE PART QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, lesquelles, en appel, sont formulées dans les conclusions ; que dans ses écritures signifiées le 25 janvier 2010 la société AMI a prétendu justifier la recevabilité de son opposition-nullité et de son appel-nullité en arguant exclusivement de ses qualités de « repreneur de l'activité de la société APM VOUZIERS » et de « tiers, candidat évincé à la reprise d'un bien cédé dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société APM CLERMONT » ; qu'en se fondant sur la qualité d'occupante des lieux par suite d'un bail précaire venu à expiration depuis le mois de mai 2009 pour déclarer la société AMI recevable à exercer un recours contre l'ordonnance du juge-commissaire en date du 1er septembre 2009 ayant autorisé la vente aux enchères publiques du bien immobilier appartenant à la société APM CLERMONT, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile, ainsi que les principes régissant l'excès de pouvoir ;
ALORS D'AUTRE PART QUE le cessionnaire des actifs d'une société, autorisé par le tribunal ayant ordonné la cession à conclure un bail précaire avec une société propriétaire d'un immeuble, elle-même en liquidation judiciaire, et dont le bail a cessé de plein droit, antérieurement à la décision du juge-commissaire ordonnant la vente aux enchères publiques du bien immobilier « libre de toute occupation » n'a aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du Code de procédure civile et n'est pas recevable à exercer un recours contre une telle décision ; que n'ayant pas la qualité de partie, il ne peut non plus relever appel de la décision du Tribunal ayant déclaré son recours irrecevable ; qu'en énonçant que la société AMI, pourtant occupante sans droit ni titre depuis mai 2009 des lieux précédemment loués, est une personne intéressée, recevable à former un recours devant le tribunal de commerce et qu'elle possède un intérêt légitimement protégé à former un appel-nullité pour contester l'ordonnance du juge-commissaire du 1er septembre 2009 ordonnant la vente de l'immeuble « libre de toute occupation », la Cour d'appel a violé les articles 4 et 31 du Code de procédure civile, les articles L. 661-5, L. 642-18 et L. 642-19 et R. 621-21 du Code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, applicable en la cause, ainsi que les principes régissant l'excès de pouvoir ;
ALORS EN OUTRE QU'en ordonnant comme préalable à la vente aux enchères publiques de l'immeuble appartenant à la société APM CLERMONT que le bien soit vendu libre, le juge-commissaire, dans sa décision du 1er septembre 2009 s'est borné, comme il le lui incombait, à préciser les conditions essentielles de la vente de cet actif et ce, dans l'intérêt des créanciers de la société en liquidation judiciaire ; qu'en énonçant qu'en l'absence de pouvoir juridictionnel l'autorisant à ordonner à un occupant de libérer les lieux et de décision rendue par la juridiction compétente statuant sur l'éventuelle expulsion de la société AMI, le juge-commissaire avait excédé ses pouvoirs en ordonnant la vente de l'immeuble libre de toute occupation pour en conclure que le Tribunal en déclarant le recours contre cette décision irrecevable avait consacré cet excès de pouvoir, ce qui rendait l'appel-nullité recevable, la Cour d'appel qui a analysé l'ordonnance du juge-commissaire comme équivalent à un ordre d'expulsion de la société AMI l'a dénaturée et, partant, a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile, ainsi que les principes régissant l'excès de pouvoir ;
ALORS ENFIN QUE l'excès de pouvoir rendant recevable l'appel-nullité doit être caractérisé au jour ou le juge-commissaire a statué ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que la société AMI occupait les lieux sans droit ni titre depuis mai 2009, que le jugement du 22 novembre 2007 arrêtant la cession des actifs de la société APM VOUZIERS avait expressément précisé que la société AMI ne bénéficierait d'aucun droit de préférence dans l'hypothèse d'une cession de l'immeuble et enfin qu'une procédure d'expulsion de cette société était en cours au 1er septembre 2009, de sorte qu'en ordonnant, à cette date, la vente aux enchères publiques de l'immeuble libre de toute occupation, le juge-commissaire n'a fait que remplir son office en arrêtant les modalités essentielles de la vente en tenant compte de la situation juridique de cet actif au jour ou il statuait ; qu'en estimant néanmoins que l'ordonnance était entachée d'un excès de pouvoir et que le Tribunal en déclarant irrecevable le recours contre cette décision avait lui-même outrepassé ses pouvoirs, ce qui rendait l'appel-nullité recevable, la Cour d'appel a violé les articles L. 661-5, L. 642-18 et L. 642-19 du Code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises applicable en la cause, ainsi que les principes régissant l'excès de pouvoir.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-17235
Date de la décision : 14/12/2010
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Procédure (dispositions générales) - Voies de recours - Décisions susceptibles - Ordonnances du juge-commissaire - Vente d'immeuble du débiteur en liquidation judiciaire - Appel-nullité du jugement - Qualité pour l'exercer - Candidat acheteur évincé (non)

L'auteur d'une offre d'acquisition de gré à gré d'un bien immobilier d'un débiteur en liquidation judiciaire n'a aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du code de procédure civile, fût-il occupant sans droit ni titre de ce bien. Dès lors, il n'est pas recevable à interjeter appel-nullité du jugement ayant statué sur le recours formé contre l'ordonnance du juge-commissaire rejetant son offre et ordonnant la vente par adjudication de l'immeuble


Références :

articles 4 et 31 du code de procédure civile

articles L. 661-5 et R. 621-21 du code de commerce ainsi que les principes régissant l'excès de pouvoir

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 11 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 14 déc. 2010, pourvoi n°10-17235, Bull. civ. 2010, IV, n° 202
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 202

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Carre-Pierrat
Rapporteur ?: M. Espel
Avocat(s) : Me Blondel, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:10.17235
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