LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Longjumeau, 3 décembre 2009), que M. X..., employé par la société MFE, et l'Union départementale CFE-CGC de Paris ont demandé qu'il soit procédé à des élections professionnelles au sein d'une unité économique et sociale qui aurait été reconnue par un accord de groupe du 27 juin 2007 instaurant un intéressement entre les sociétés MFE, EAB et BTB ELEC ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que M. X... et l'Union départementale CFE-CGC de Paris font grief au jugement de rejeter leurs demandes tendant d'une part, à voir constater l'existence conventionnelle, à compter du 27 juin 2007, de l'unité économique et sociale du groupe MFE entre les sociétés MFE, EAB et BTB ELEC et ce conformément à l'accord conventionnel d'intéressement signé entre les parties, et d'autre part, à dire en conséquence bien fondée la demande d'organisation d'élections représentatives du personnel au sein de l'unité économique et sociale du groupe MFE, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsqu'une unité économique et sociale regroupant cinquante salariés ou plus est reconnue par convention ou par décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes, la mise en place d'un comité d'entreprise commun est obligatoire ; que la reconnaissance conventionnelle peut résulter d'un accord collectif emportant reconnaissance d'une unité économique et sociale entre plusieurs sociétés, notamment de la conclusion d'un accord mettant en place la participation ou d'intéressement, entre ces entreprises, quand bien même l'expression «unité économique et sociale » n'y figurerait pas ; qu'en l'espèce, une unité économique et sociale a été, de facto, conventionnellement reconnue entre les sociétés MFE, EAB et BTB ELEC par la signature d'un accord d'intéressement conclu le 27 juin 2007 ; qu'en considérant que cet accord ne pouvait valoir reconnaissance d'une unité économique et sociale entre les trois sociétés au prétexte « que cet accord ne fait référence qu'à la mise en place de l'intéressement au sein des sociétés précitées et que le terme même d'unité économique et sociale n'y est pas mentionné », le tribunal d'instance a violé les articles L. 2322-4, L. 3322-2, R. 3322-2 et L. 3344-1 du code du travail ;
2°/ que l'unité économique et sociale se caractérise par la concentration des pouvoirs, la complémentarité des activités et la communauté de travail ; que, dans leurs écritures, M. X... et le syndicat CFE-CGC faisaient longuement valoir que l'accord conclu le 27 juin 2007 répondait aux critères cumulatifs retenus par la jurisprudence pour caractériser l'unité économique et sociale ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si l'accord conclu le 27 juin 2007 répondait aux critères cumulatifs caractérisant l'unité économique et sociale, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2322-4, L. 3322-2, R. 3322-2 et L. 3344-1 du code du travail ;
3°/ que le juge doit répondre à l'ensemble des moyens qui lui sont soumis par les parties ; sue, dans leurs écritures, M. X... et le syndicat CFE-CGC faisaient longuement valoir que l'accord conclu le 27 juin 2007 répondait aux critères cumulatifs retenus par la jurisprudence pour caractériser l'unité économique et sociale ; qu'en ne répondant pas à ces moyens, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que selon l'article L. 3344-1 du code du travail, l'intéressement, la participation ou un plan d'épargne d'entreprise pouvant être mis en place au sein d'un groupe constitué par des entreprises juridiquement indépendantes, mais ayant établi entre elles des liens financiers et économiques, la conclusion d'un tel accord ne postule pas l'existence d'une unité économique et sociale ; qu'ayant constaté que l'accord du 27 juin 2007 avait pour seul objet l'intéressement et ne comportait aucune référence à une unité économique et sociale, c'est sans encourir les griefs du moyen que le tribunal, qui n'était pas saisi d'une demande de reconnaissance judiciaire d'une unité économique et sociale, a débouté le salarié et le syndicat de leurs demandes tendant à constater la reconnaissance conventionnelle d'une telle unité par l'accord du 27 juin 2007 ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le pourvoi incident éventuel des sociétés ;
Attendu que le rejet du pourvoi principal rend sans objet le pourvoi éventuel ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par Me Carbonnier, avocat aux conseils pour M. X... et le syndicat CFE-CGC
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de Monsieur Frédéric X... et du Syndicat CFE-CGC tendant d'une part, à voir constater l'existence conventionnelle, à compter du 27 juin 2007, de l'Unité Economique et Sociale du Groupe MFE entre les sociétés MFE, EAB et BTB ELEC et ce conformément à l'accord conventionnel d'intéressement signé entre les parties, et d'autre part, à dire en conséquence bien fondée la demande d'organisation d'élections représentatives du personnel au sein de l'Unité Economique et Sociale du Groupe MFE,
AUX MOTIFS QUE "l'article L. 2322-4 du code du travail dispose que lorsqu'une unité économique et sociale regroupant cinquante salariés ou plus est reconnue par convention ou par décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes, la mise en place d'un comité d'entreprise commun est obligatoire ;que Monsieur Frédéric X... et le syndicat CFE-CGC indiquent dans leurs écritures que « s'il est de Jurisprudence constante que le jugement reconnaissant l'existence d'une Unité Economique et Sociale a un caractère déclaratif à la date de la requête introductive d'instance, rien n'empêche en revanche le Tribunal, en cas de refus par l'employeur, de tirer les conséquences juridiques des accords et conventions passées entre lui et ses salariés, de reconnaitre l'Unité Economique et Sociale à la date à laquelle elle a réellement été créée et reconnue conventionnellement » ; que Monsieur Frédéric X... et le syndicat CFE-CGC fondent leur demande de reconnaissance conventionnelle d'Unité Economique et Sociale sur le seul « accord d'intéressement du Groupe MFE » conclu le 27 juin 2007 entre les sociétés MFE, EAB et BTB ELEC et leurs salariés ; que cet accord ne fait référence qu'à la mise en place de l'intéressement au sein des sociétés précitées ; que le terme même d'Unité Economique et Sociale n'y est pas mentionné ; qu'il ne peut donc être interprété comme une reconnaissance conventionnelle d'une Unité Economique et Sociale ente les sociétés concernées, en l'absence de toute volonté expresse des parties ; que les demandes de Monsieur Frédéric X... et du syndicat CFE-CGC seront donc rejetées" (jugement, p. 4 et 5),
ALORS, D'UNE PART, QUE lorsqu'une unité économique et sociale regroupant cinquante salariés ou plus est reconnue par convention ou par décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes, la mise en place d'un comité d'entreprise commun est obligatoire ; que la reconnaissance conventionnelle peut résulter d'un accord collectif emportant reconnaissance d'une unité économique et sociale entre plusieurs sociétés, notamment de la conclusion d'un accord mettant en place la participation ou d'intéressement, entre ces entreprises, quand bien même l'expression «unité économique et sociale» n'y figurerait pas ;
Qu'en l'espèce, une unité économique et sociale a été, de facto, conventionnellement reconnue entre les sociétés MFE, EAB et BTB ELEC par la signature d'un accord d'intéressement conclu le 27 juin 2007 ;
Qu'en considérant que cet accord ne pouvait valoir reconnaissance d'une unité économique et sociale entre des trois sociétés au prétexte « que cet accord ne fait référence qu'à la mise en place de l'intéressement au sein des sociétés précitées et que le terme même d'Unité Economique et Sociale n'y est pas mentionné », le tribunal d'instance a violé les articles L. 2322-4, L. 3322-2, R. 3322-2 et L. 3344-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'unité économique et sociale se caractérise par la concentration des pouvoirs, la complémentarité des activités et la communauté de travail ;
Que, dans leurs écritures, Monsieur Frédéric X... et le Syndicat CFE-CGC faisaient longuement valoir (p. 6 à 10) que l'accord conclu le 27 juin 2007 répondait aux critères cumulatifs retenus par la jurisprudence pour caractériser l'unité économique et sociale ;
Qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si l'accord conclu le 27 juin 2007 répondait aux critères cumulatifs caractérisant l'unité économique et sociale, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2322-4, L. 3322-2, R. 3322-2 et L. 3344-1 du code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE le juge doit répondre à l'ensemble des moyens qui lui sont soumis par les parties ;
Que, dans leurs écritures, Monsieur Frédéric X... et le Syndicat CFE-CGC faisaient longuement valoir (p. 8 à 10) que l'accord conclu le 27 juin 2007 répondait aux critères cumulatifs retenus par la jurisprudence pour caractériser l'unité économique et sociale ;
Qu'en ne répondant pas à ces moyens, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux conseils pour les sociétés MFE, EAB et BTB ELEC,
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevables les actions de Monsieur Frédéric X... et du syndicat CFE-CGC ;
AUX MOTIFS QUE l'article 31 du code de procédure civile dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ; que Monsieur Frédéric X... sollicite la reconnaissance de l'existence d'une unité économique et sociale au 24 mars 2009, date de ses courriers de candidature et de demande d'organisation d'élections professionnelles au sein de cette unité, adressés aux sociétés MFE, EAB et BTB ELEC ; qu'à cette date il était encore salarié de la SARL MFE ; qu'il a donc qualité et intérêt à agir au vu des dispositions précitées ; que l'article 329 du code de procédure civile dispose que l'intervention est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme ; qu'elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention ; que le syndicat CFECGC argue d'un préjudice propre et formule une prétention à ce titre, en l'espèce la condamnation des défenderesses à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ; que sa demande est donc faite à titre principal ; qu'en sa qualité de personne morale, le syndicat CFE-CGC peut réclamer la réparation d'un préjudice qu'il aurait subi ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'intérêt à agir s'apprécie au jour de l'introduction de la demande ; qu'en se fondant, pour dire que M. X... avait intérêt à agir, sur la date à laquelle ce dernier avait demandé à son employeur l'organisation des élections professionnelles, le tribunal a violé l'article 31 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU' ont qualité pour demander la reconnaissance d'une unité économique et sociale, les employeurs, les syndicats représentatifs dans les entreprises appelées à faire partie de l'unité économique et sociale, ainsi que les salariés desdites entreprises ; qu'en décidant que l'action de M. X... était recevable, cependant que ce dernier ne faisait plus partie de l'effectif de l'entreprise au jour de l'introduction de sa demande, le tribunal a violé les articles 31 du code de procédure civile et L. 2322-4 du code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE l'action en intervention d'un groupement invoquant la défense de l'intérêt collectif qu'il représente est nécessairement accessoire ; qu'en décidant que l'intervention du syndicat CFE-CGC était principale cependant que ce dernier invoquait la défense d'un intérêt collectif, le tribunal a violé les articles 328, 329 et 330 du code de procédure civile.