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12/10/2010 | FRANCE | N°10-80157

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 octobre 2010, 10-80157


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- Mme Marie-Christine X...,
- M. Martial Y... partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 18 septembre 2009, qui, dans la procédure suivie contre la première et contre M. Jean-Marie Z..., du chef de dénonciation calomnieuse, a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu'i

l résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme X... a porté plainte du chef de vi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- Mme Marie-Christine X...,
- M. Martial Y... partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 18 septembre 2009, qui, dans la procédure suivie contre la première et contre M. Jean-Marie Z..., du chef de dénonciation calomnieuse, a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme X... a porté plainte du chef de violences contre Martial Y... ; que cette plainte a fait l'objet d'un classement sans suite ; qu'à la suite de la plainte assortie de constitution de partie civile déposée par ce dernier, Mme X... et M. Z..., témoins entendus lors de l'enquête, ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel du chef de dénonciation calomnieuse ; que les premiers juges ont déclaré l'action publique prescrite ; que la partie civile a relevé appel de cette décision ;

En cet état :

I) Sur le pourvoi formé par M. Y... :

Sur le deuxième moyen de cassation du mémoire personnel, pris de la violation des articles 226-10 du code pénal, 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que, pour dire que les éléments du délit de dénonciation calomnieuse n'étaient pas réunis à l'encontre de M. Z..., et débouter la partie civile de sa demande à son égard, l'arrêt retient que ce prévenu a été entendu comme témoin dans le cadre de l'enquête policière, et que sa déclaration n'avait pas le caractère d'une dénonciation spontanée ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour, qui n'était pas tenue de procéder à une autre qualification des faits, a, sans insuffisance ni contradiction, justifié sa décision ;

II) Sur le pourvoi formé par Mme X... :

Sur le moyen unique de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 226-10 du code pénal, 226-11 du même code, 1582 du code civil, 2, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a dit que les éléments constitutifs de l'infraction de dénonciation calomnieuse sont réunis à l'encontre de Mme X... ;

"aux motifs que Marie-Christine X... a porté plainte auprès des services de police, le 22 septembre 1999, pour des faits d'agression subis le 17 septembre 1999 à Bordeaux ; que cette plainte a été régulièrement classée sans suite ; (…) qu'en ce qui concerne Marie-Christine X..., elle a toujours soutenu que les faits, soit un violent coup au visage ou gifle, objet de sa plainte, étaient réels, qu'elle avait bien été victime d'une agression dont elle portait des traces, constatées par le certificat médical du médecin légiste ; que la fausseté des faits dénoncés découle de la décision de classement sans suite ; que, toutefois, l'intention délictueuse, en l'espèce la mauvaise foi, doit être appréciée à la date de la dénonciation et implique que le dénonciateur connaisse au jour de sa dénonciation de la fausseté du fait qu'il impute à autrui ; qu'ainsi, il ne saurait y avoir mauvaise foi si le dénonciateur n'avait pas conscience de la fausseté des faits dénoncés ; qu'il résulte du rappel des faits qui précède que Mme X... avait nécessairement conscience de la fausseté des faits dénoncés au jour de la dénonciation ;

"1) alors qu'il résulte de l'article 226-10, alinéa 3, du code pénal, qu'il appartient à la juridiction saisie de poursuites pour dénonciation calomnieuse d'apprécier la pertinence des accusations portées par le dénonciateur lorsque les fautes dénoncées n'ont donné lieu à aucune poursuite pénale ; qu'ainsi, la fausseté des faits dénoncés ne peut résulter nécessairement que d'une décision devenue définitive d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que la réalité du fait n'est pas établie ou que celui-ci n'est pas imputable à la personne dénoncée ; qu'ainsi, la cour d'appel ne pouvait se borner à dire que la poursuite des faits dénoncés découle de la décision de classement sans suite et devait se livrer à une appréciation de la pertinence desdites accusations ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;

"2) alors qu'en tout état de cause, la décision de condamnation qui n'a pas nommément désigné l'autorité qui a reçu la dénonciation et n'a pas précisé la date du classement sans suite, ni l'autorité dont il a émané, n'est pas justifiée" ;

Vu l'article 226-10 du code pénal ;

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'il appartient à la juridiction saisie de poursuites pour dénonciation calomnieuse d'apprécier la pertinence des accusations lorsque les faits dénoncés ont donné lieu à un classement sans suite ;

Attendu que, pour déclarer Mme X... coupable de dénonciation calomnieuse, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu'en se déterminant de la sorte, alors que la fausseté des faits dénoncés ne pouvait se déduire d'un classement sans suite, et que les juges étaient tenus d'apprécier la pertinence des accusations portées par la dénonciatrice, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens proposés par M. Y... :

CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 18 septembre 2009, en ses seules dispositions relatives à l'action civile exercée contre Mme X..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Poitiers, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Villar ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-80157
Date de la décision : 12/10/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

DENONCIATION CALOMNIEUSE - Faits dénoncés - Fausseté - Décision de l'autorité compétente - Classement sans suite - Portée

Il résulte des termes de l'article 226-10 du code pénal qu'il appartient à la juridiction saisie de poursuites pour dénonciation calomnieuse d'apprécier la pertinence des accusations lorsque les faits dénoncés ont donné lieu à un classement sans suite. Encourt la cassation l'arrêt qui déduit la fausseté des faits dénoncés de la décision de classement sans suite dont ces faits ont fait l'objet


Références :

article 226-10 du code pénal

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 18 septembre 2009

Sur la nécessité pour la juridiction saisie de poursuites pour dénonciation calomnieuse d'apprécier la pertinence des accusations lorsque les faits dénoncés donnent lieu à un classement sans suite, à rapprocher :Crim., 13 septembre 2005, pourvoi n° 05-81755, Bull. crim. 2005, n° 222 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 oct. 2010, pourvoi n°10-80157, Bull. crim. criminel 2010, n° 154
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2010, n° 154

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Boccon-Gibod
Rapporteur ?: Mme Koering-Joulin
Avocat(s) : SCP Richard, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:10.80157
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