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15/09/2010 | FRANCE | N°09-13442

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 15 septembre 2010, 09-13442


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1985 du code civil, ensemble les articles 1998 et 1999 du même code ;

Attendu que le mandat peut être donné par acte authentique ou par acte sous seing privé, même par lettre ; qu'il peut aussi être donné verbalement ;

Attendu selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 mars 2009), que Mme X..., propriétaire d'un fonds, a entrepris d'y édifier deux villas ; que suivant mandat du 8 juillet 1988, elle a chargé Mme Y... de déposer la demande

de permis de construire des deux villas ; que Mme Y..., condamnée à payer à M. Z..., i...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1985 du code civil, ensemble les articles 1998 et 1999 du même code ;

Attendu que le mandat peut être donné par acte authentique ou par acte sous seing privé, même par lettre ; qu'il peut aussi être donné verbalement ;

Attendu selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 mars 2009), que Mme X..., propriétaire d'un fonds, a entrepris d'y édifier deux villas ; que suivant mandat du 8 juillet 1988, elle a chargé Mme Y... de déposer la demande de permis de construire des deux villas ; que Mme Y..., condamnée à payer à M. Z..., ingénieur conseil béton, ses honoraires, en vertu d'un contrat qu'elle avait signé le 15 décembre 1989, a assigné M. X..., en sa qualité d'ayant-droit de Mme X..., en remboursement de ces honoraires ;

Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que la première des villas, dénommée "Le Mas" devait être occupée par Mme Y... en contrepartie de son travail en qualité de maître d'ouvrage déléguée, ce qui implique qu'elle ait signé en son nom personnel notamment avec M. Z..., ingénieur conseil béton armé, le 15 décembre 1989, une mission d'étude avec plan d'exécution pour la construction des deux villas ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que Mme Y..., maître d'ouvrage déléguée de Mme X..., avait la qualité de mandataire de celle-ci, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à Mme Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Blanc, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme Y... de sa demande formée contre M. X..., en qualité d'héritier de sa mère Mme X..., en remboursement de la somme de 18 505, 23 euros correspondant au solde des honoraires dus à M. Z... en exécution du contrat d'étude béton du 15 février 1989 relatif à la construction de deux villas signé par Mme Y... en qualité de maître d'ouvrage déléguée pour le compte de Mme X... ;

Aux motifs que suivant mandat du 8 juillet 1988, Mme X... avait habilité Mme Y... en vue de déposer la demande de permis de construire des deux villas ; que la première de ces villas, le Mas, devait être occupée par Mme Y... en contrepartie de son travail en qualité de maître d'ouvrage déléguée, ce qui impliquait qu'elle ait signé en son nom personnel notamment avec M. Z..., ingénieur conseil béton armé le 15 décembre 1989, une mission d'étude avec plan d'exécution pour la construction des deux villas ; que pour conforter ses avantages, Mme Y... avait obtenu un bail emphytéotique d'une durée de 40 ans portant sur le lot n° 1 de l'état descriptif de division, défini comme le droit de construire une maison individuelle sur un terrain de 1 270 m² pour une redevance annuelle de 6 000 F, soit 500 F par mois ; que pour terminer la villa qu'elle pensait occuper, Mme Y... avait fait signer à Mme X... un mandat du 2 juillet 1990 par lequel cette dernière donnait pouvoir de signature se rapportant aux documents constituant les différents marchés des entreprises adjudicataires, lesquelles «seront chargées» (sic) de réaliser les ouvrages du projet ; que Mme Y... avait contesté les honoraires de l'ingénieur Z... et avait été condamnée par jugement du 14 juin 1996 confirmé par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 7 février 2002 à payer à M. Z... à la somme de 10 848, 27 euros ; que par suite de l'élaboration d'un nouvel état descriptif de division, Mme X..., alors âgée de 86 ans, avait consenti le 4 juin 1992 un nouveau bail emphytéotique à Mme Y... annulant le précédent, pour une nouvelle durée de 40 ans, portant sur une maison à usage d'habitation en cours d'édification ; qu'en 1993, M. Pierre X... était intervenu plus activement dans les affaires de sa mère et celle-ci avait révoqué le mandat, puis avait décidé de s'installer dans la villa Le mas, ce qui ne l'empêchait pas de régler les situations de chantier de tous les intervenants selon une attestation établie le 30 mai 1996 ; qu'une procédure en nullité des baux emphytéotiques opposait M. X..., héritier de sa mère décédée le 23 octobre 2004 et Mme Y..., devant la Cour de céans sur renvoi après cassation ; que l'arrêt du 27 octobre 2005 n'avait pas d'autorité de la chose jugée à l'égard de M. X... puisque son objet était relatif à des marchés distincts du contrat de M. Z..., signés postérieurement au mandat général du 2 juillet 1992 ; que c'était à juste titre que M. X... soutenait que ce mandat n'avait pu avoir d'effet rétroactif, ce que confirmait le fait que Mme X... n'avait jamais été informée ou impliquée dans la convention ou à l'occasion de la procédure contentieuse Z..., de sorte qu'aucune ratification d'un acte auquel elle était demeurée étrangère ne pouvait être déduite des faits de la cause ;

Alors que, 1°) le maître d'ouvrage délégué est par définition mandataire du maitre d'ouvrage ; qu'en en énonçant que l'une des villas de Mme Ducis devait être occupée Mme Anne-Marie Y... «en contrepartie de son travail de maître d'ouvrage déléguée, ce qui implique qu'elle ait signé en son nom personnel notamment avec M. Z... … une mission d'étude… pour la construction des deux villas», la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que Mme Y..., en qualité de maître d'ouvrage déléguée, avait nécessairement signé au nom et pour le compte de Mme X... le contrat d'étude avec M. Z... (violation de l'article 1985 du code civil) ;

Alors que, 2°) un mandat peut être tacite et résulter des circonstances de l'espèce ; que Mme Y... avait rappelé qu'elle avait remis à Mme X... son mandat en juin 1993, en suite de quoi cette dernière lui avait remis une lettre selon laquelle elle acceptait cette demande, l'informait que son fils allait reprendre le chantier, et la remerciait d'avoir oeuvré au mieux de ses intérêts depuis cinq ans, ce dont il résultait que Mme Y... était titulaire d'un mandat général pour tout ce qui concernait la construction des deux villas à compter de 1988, ce mandat fût-il formalisé en 1990 seulement ; qu'en se bornant à déduire de cette lettre que Mme X... avait révoqué le mandat en 1993, sans rechercher s'il n'en résultait pas que Mme Y... était bien mandataire dès 1988, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1985 du code civil ;

Alors que, 3°) un mandat peut être tacite et résulter de toutes circonstances de l'espèce, et non uniquement d'une ratification a posteriori par le mandant des actes passés par le mandataire ; qu'en se limitant, pour rechercher l'existence d'un mandat tacite ayant présidé la signature du contrat du 15 février 1989, à rechercher une ratification de ce contrat par la mandante, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1985 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-13442
Date de la décision : 15/09/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Maître d'ouvrage délégué - Opération de construction - Coût - Charge - Détermination

MANDAT - Mandataire - Qualité - Maître d'ouvrage délégué - Opération de construction - Coût - Charge - Détermination

Le maître d'ouvrage délégué ayant la qualité de mandataire du maître de l'ouvrage, viole l'article 1985 du code civil, ensemble les articles 1998 et 1999 du même code, la cour d'appel qui, pour rejeter la demande en remboursement des honoraires d'un ingénieur chargé d'une mission d'étude pour la construction de deux villas, formée par le maître d'ouvrage délégué à l'encontre de l'ayant droit du maître de l'ouvrage, retient que la circonstance que l'une de ces villas devait être occupée par le demandeur en contrepartie de son travail en qualité de maître d'ouvrage délégué impliquait que ce dernier avait signé le contrat d'étude en son nom personnel


Références :

articles 1985, 1998 et 1999 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 mars 2009

Sur le principe selon lequel les commandes de travaux et prestations faites par le maître d'ouvrage délégué obligent le maître de l'ouvrage, pour le compte duquel ces commandes ont été passées, à en payer le coût, à rapprocher : 3e Civ., 2 octobre 2002, pourvoi n° 01-01783, Bull. 2002, III, n° 201 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 15 sep. 2010, pourvoi n°09-13442, Bull. civ. 2010, III, n° 161
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, III, n° 161

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Cuinat
Rapporteur ?: Mme Monge
Avocat(s) : Me Blanc, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.13442
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