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23/06/2010 | FRANCE | N°09-15939

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 23 juin 2010, 09-15939


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 mars 2009), que, par acte du 23 décembre 2003, Mme X... a vendu un terrain à bâtir aux consorts Y..., sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt d'un montant maximum de 300 000 euros sur douze ans au taux nominal maximum de 5 % l'an, l'acte comportant une clause stipulant que " La réception de cette offre devra intervenir au plus tard le 10 mars 2004. L'obtention ou la non-obtention du prêt devra être notifiée par l'acquéreur au vendeur par l

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 mars 2009), que, par acte du 23 décembre 2003, Mme X... a vendu un terrain à bâtir aux consorts Y..., sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt d'un montant maximum de 300 000 euros sur douze ans au taux nominal maximum de 5 % l'an, l'acte comportant une clause stipulant que " La réception de cette offre devra intervenir au plus tard le 10 mars 2004. L'obtention ou la non-obtention du prêt devra être notifiée par l'acquéreur au vendeur par lettre recommandée avec avis de réception adressée dans les trois jours suivants l'expiration du délai ci-dessus. A défaut de réception de cette lettre dans le délai fixé, le vendeur aura la faculté de mettre l'acquéreur en demeure de lui justifier sous huitaine la réalisation ou la défaillance de la condition. Cette demande devra être faite par lettre recommandée avec avis de réception au domicile ci-après élu. Passé ce délai de huit jours sans que l'acquéreur n'ait apporté les justificatifs, la condition sera censée défaillie et les présentes seront caduques de plein droit, sans autre formalité, et ainsi le vendeur retrouvera son entière liberté mais l'acquéreur ne pourra recouvrer le dépôt de garantie qu'il aura, le cas échéant, versé qu'après justification qu'il a accompli les démarches nécessaires pour l'obtention du prêt, et que la condition n'est pas défaillie de son fait ; à défaut, le dépôt de garantie restera acquis au vendeur " ; que, le 2 février 2004, les consorts Y... ont déposé la somme de 25 300 euros entre les mains de M. Z..., notaire, au titre de la garantie stipulée à l'acte de vente ; que, se prévalant de problème relatifs aux limites du terrain, les consorts Y... ont résilié la vente et sollicité la restitution du dépôt de garantie ; que Mme X... ayant refusé, les consorts Y... l'ont assignée en restitution de cette somme ;
Sur le moyen unique :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la dire non fondée à se prévaloir de la défaillance des consorts Y... dans la réalisation de la condition suspensive relative au prêt et, en conséquence, de la condamner à restituer le dépôt de garantie de 25 000 euros, alors, selon le moyen :
1° / que la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement et qu'il appartient aux acquéreurs de démontrer que la demande de prêt était conforme aux caractéristiques prévues dans la promesse de vente ; qu'en affirmant que les consorts Y... justifiaient avoir déposé une demande de prêt auprès de la BNP dans le délai imparti, sans constater que cette demande était conforme aux caractéristiques prévues dans la promesse quand l'accomplissement des diligences pesant sur les acquéreurs était expressément contesté par la venderesse, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1178 et 1315 du code civil ;
2° / que la stipulation d'une procédure de constatation de la défaillance du débiteur à la discrétion du créancier ne lui interdit pas de faire constater dans les conditions du droit commun la défaillance de l'acquéreur obligé sous condition d'octroi d'un prêt, tenu à ce titre de justifier des diligences effectuées, et de faire sanctionner l'inexécution constatée ; d'où il suit qu'en décidant qu'à défaut d'envoi d'une mise en demeure contractuellement prévue pour faire constater la défaillance du débiteur, la venderesse ne pouvait se prévaloir du manque de diligence des acquéreurs dans la réalisation de la condition suspensive, après avoir constaté que l'envoi de la mise en demeure n'était qu'une simple faculté, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant souverainement relevé que de la lecture complète de la clause litigieuse, il ressortait que si l'envoi d'une lettre recommandée par le vendeur ne constituait qu'une faculté, ce courrier était néanmoins indispensable et nécessaire pour faire partir le délai dans lequel l'acquéreur devait justifier des diligences effectuées, et que ce n'était qu'au cas où il n'en justifiait pas que le vendeur pouvait conserver le dépôt de garantie, la cour d'appel, qui en a exactement déduit qu'à défaut d'envoi de cette mise en demeure Mme X... ne pouvait légitimement se prévaloir du manque de diligence des consorts Y... dans la réalisation de la condition suspensive relative au prêt pour conserver le dépôt de garantie, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer aux consorts Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boutet, avocat aux Conseils pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que Mademoiselle Muriel X... est mal fondée à se prévaloir de la défaillance des consorts Y... dans la réalisation de la condition suspensive relative au prêt et, en conséquence, de l'avoir condamnée à restituer à Christian Y..., Nicole A... épouse Y... et Christophe B...-Y... le dépôt de garantie d'un montant de 25. 000 euros ;
AUX MOTIFS QUE, suivant acte sous seing privé en date du 23 décembre 2003, Muriel X... a vendu à Christian Y..., Nicole A... épouse Y... et Christophe B...-Y... qui ont accepté, un terrain à bâtir d'une superficie arpentée de 12. 553 m2 sur lequel la venderesse avait obtenu deux permis de construire, pour un prix de 563. 500 euros, sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt par les acquéreurs d'un montant maximum de 300. 000 euros sur 12 ans et au taux nominal de 5 % l'an ; qu'il était prévu que ceux-ci devaient déposer la demande de prêt dans un délai de 20 jours à compter de cet acte et que la réception de l'offre devait intervenir au plus tard le 10 mars 2004, la réitération de la vente par acte authentique devant avoir lieu au plus tard le 20 avril 2004, une prorogation au 20 mai 2004 étant néanmoins possible pour la réception des pièces administratives ; que les consorts Y... justifient avoir déposé une demande de prêt auprès de la BNP PARIBAS agence d'OLLIOULES dans le délai imparti ; que par ailleurs, ils ont déposé le 2 février 2004 la somme de 25. 300 euros entre les mains de Maître Z..., notaire, à titre de garantie tel que stipulé dans l'acte ; que par un courrier en date du 5 juin 2004, la BNP PARIBAS agence d'OLLIOULES a fait connaître aux consorts Y... « qu'étant donné les délais écoulés, l'acceptation de la compagnie d'assurance est à ce jour caduque. Nous sommes donc contraints de classer ce dossier sans suite » ; que par courrier du 15 juillet 2004, les consorts Y... ont alors informé Muriel X... de ce qu'en l'état de problèmes relatifs à l'actualisation des limites du terrain, ils entendaient résilier la vente et souhaitaient obtenir la restitution du dépôt de garantie ; que du fait du refus de celle-ci, ils l'ont faite assigner suivant acte du 10 août 2005 afin qu'elle soit condamnée à leur restituer la somme versée à ce titre ; que le premier juge les a déboutés de leur demande estimant que la condition suspensive d'obtention d'un prêt ne s'était pas réalisée de leur fait, ceux-ci ne justifiant pas des démarches effectuées à cette fin et en a déduit qu'en application de l'acte signé par les parties, l'acompte devait demeurer acquis de plein droit à la venderesse ; que les appelants soutiennent que Muriel X... est mal fondée à se prévaloir de leur défaillance dans la réalisation de la condition suspensive dans la mesure où elle a omis de leur adresser la lettre recommandée devant les mettre en demeure de justifier de la réalisation ou de la défaillance de la condition telle que prévue à l'acte du 23 décembre 2004 ; que Muriel X... objecte que l'envoi de cette lettre ne constituait qu'une simple faculté ; que l'acte signé par les parties est ainsi rédigé (cf. page 7 II-Réalisation de la condition suspensive) : « La réception de cette offre devra intervenir au plus tard le 10 mars 2004 ; l'obtention ou la non-obtention du prêt devra être notifiée par l'acquéreur au vendeur par lettre recommandée avec avis de réception adressée dans les trois jours suivants l'expiration du délai ci-dessus ; à défaut de réception de cette lettre dans le délai fixé le vendeur aura la faculté de mettre l'acquéreur en demeure de lui justifier sous huitaine de la réalisation ou de la défaillance de la condition ; cette demande devra être faite par lettre recommandée avec avis de réception au domicile ci-après élu ; passé ce délai de huit jours sans que l'acquéreur n'ait apporté les justificatifs, la condition sera censée défaillie et les présentes seront donc caduques de plein droit, sans autre formalité, et ainsi le vendeur retrouvera son entière liberté mais l'acquéreur ne pourra recouvrer le dépôt de garantie qu'il aura, le cas échéant, versé qu'après justification qu'il a accompli les démarches nécessaires pour l'obtention du prêt, et que la condition n'est pas défaillie de son fait ; à défaut, le dépôt de garantie restera acquis au vendeur » ; que, de la lecture complète de cette clause, il ressort de façon particulièrement claire que, si l'envoi d'une lettre recommandée par le vendeur ne constitue qu'une faculté, ce courrier est néanmoins indispensable et nécessaire pour faire partir le délai dans lequel l'acquéreur doit justifier des diligences effectuées, et ce n'est qu'au cas où il n'en justifie pas que le vendeur peut conserver le dépôt de garantie ; que dès lors, à défaut d'envoi de cette mise en demeure par Muriel X..., celle-ci ne peut légitimement se prévaloir du manque de diligence des consorts Y... dans la réalisation de la condition suspensive relative au prêt pour conserver le dépôt de garantie ;
ALORS D'UNE PART QUE la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement et qu'il appartient aux acquéreurs de démontrer que la demande de prêt était conforme aux caractéristiques prévues dans la promesse de vente ; qu'en affirmant que les consorts Y... justifiaient avoir déposé une demande de prêt auprès de la BNP dans le délai imparti (arrêt p. 3), sans constater que cette demande était conforme aux caractéristiques prévues dans la promesse quand l'accomplissement des diligences pesant sur les acquéreurs était expressément contesté par la venderesse (conclusions p. 6 et 7), la Cour d'Appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1178 et 1315 du Code Civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la stipulation d'une procédure de constatation de la défaillance du débiteur à la discrétion du créancier ne lui interdit pas de faire constater dans les conditions du droit commun la défaillance de l'acquéreur obligé sous condition d'octroi d'un prêt, tenu à ce titre de justifier des diligences effectuées, et de faire sanctionner l'inexécution constatée ; d'où il suit qu'en décidant qu'à défaut d'envoi d'une mise en demeure contractuellement prévue pour faire constater la défaillance du débiteur, la venderesse ne pouvait se prévaloir du manque de diligence des acquéreurs dans la réalisation de la condition suspensive, après avoir constaté que l'envoi de la mise en demeure n'était qu'une simple faculté, la Cour d'Appel a violé l'article 1134 du Code Civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-15939
Date de la décision : 23/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

VENTE - Promesse de vente - Immeuble - Modalités - Condition suspensive - Défaillance - Obtention d'un prêt - Demande de prêt conforme à la promesse - Justification - Modalités prévues par les parties - Effets

Ayant souverainement relevé qu'il résultait des termes de la promesse de vente que l'envoi, par le vendeur, d'une lettre recommandée était indispensable pour faire partir le délai dans lequel l'acquéreur devait justifier des diligences accomplies pour l'obtention d'un prêt, la cour d'appel en a exactement déduit qu'à défaut d'envoi de cette mise en demeure, le vendeur, qui n'avait pas usé de cette faculté, ne pouvait se prévaloir de la défaillance de l'acquéreur dans la réalisation de la condition suspensive


Références :

articles 1134 et 1178 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 23 jui. 2010, pourvoi n°09-15939, Bull. civ. 2010, III, n° 132
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, III, n° 132

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Bailly
Rapporteur ?: M. Pronier
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.15939
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