LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 12 novembre 2008), que M. X..., hémophile, a subi de nombreuses transfusions sanguines; qu'à compter du 1er janvier 1982, les produits sanguins ont été fournis par le centre régional de transfusion sanguine (CRTS) de Bordeaux, aux droits duquel se trouve l'Etablissement français du sang (EFS), et qui était assuré jusqu'au 31 décembre 1986 auprès de la Mutuelle d'assurance du corps de santé français (MACSF) ; qu'il s'est trouvé atteint du virus du sida en 1985, puis, en 1988, de celui de l'hépatite C ; que M. X..., ses parents et ses frère et soeur ont fait assigner l'EFS et la MACSF devant un tribunal de grande instance en responsabilité et indemnisation de leurs préjudices ;
Attendu que l'EFS fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de garantie dirigée contre la MACSF, alors, selon le moyen, que la présomption d'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C à une transfusion sanguine prévue par l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 est opposable à toute partie tenue à la réparation du dommage causé par cette contamination et, notamment, à l'assureur de responsabilité civile du centre de transfusion sanguine ; qu'il s'ensuit qu'en présence de transfusions multiples qui, toutes, peuvent être à l'origine de la contamination, sans que le geste contaminant puisse être identifié, l'assureur est tenu à indemnisation dès lors que l'une ou moins des injections a eu lieu au cours d'une période garantie ; qu'ayant constaté, d'une part, que M. X... n'avait jamais cessé de recevoir des transfusions de facteurs coagulants depuis 1972 et, d'autre part, que la MACSF devait sa garantie pour les sinistres survenus entre le 1er janvier et le 31 juillet 1982 et au cours de l'année 1986, la cour d'appel, qui a retenu, pour rejeter la demande de garantie de l'EFS contre son assureur, qu'il ne rapportait pas la preuve certaine de ce que la contamination de M. X... avait eu lieu au cours d'une période garantie, a violé l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 par refus d'application ;
Mais attendu que la présomption simple d'imputabilité est édictée par l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 au seul bénéfice des victimes ;
Et attendu que l'arrêt retient que, selon le rapport d'expertise, les transfusions ont eu lieu du 10 avril 1972 au 7 janvier 2001 sans que puisse être déterminée la date à laquelle la contamination a eu lieu, et que l'hépatite C a été mise en évidence en janvier 1988 ; que la contamination s'est donc produite entre 1972 et janvier 1988 ; que la fin de la garantie se situant le 31 décembre 1986, il existe une période comprise entre janvier 1987 et janvier 1988 non couverte par la garantie au cours de laquelle la contamination a pu intervenir ; que le fait que de nombreuses transfusions aient pu, comme le soutient l'EFS, avoir lieu entre le 10 avril 1972 et le 1er août 1982 n'implique pas qu'elle n'ait pu avoir lieu par la suite ; que, par ailleurs, le plafond de garantie a été atteint pour les années 1983 à 1985, ce qui exclut toute prise en charge ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a justement déduit qu'en l'absence de preuve que la contamination s'était produite pendant la période de validité du contrat, l'assureur ne pouvait être tenu à garantie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Etablissement français du sang aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour l'Etablissement français du sang.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté l'E.F.S. de sa demande de garantie dirigée contre la M.A.C.S.F.,
AUX MOTIFS QU' il incombe à l'E.F.S. et aux consorts X... de rapporter la preuve de ce que la contamination est intervenue pendant la période durant laquelle la garantie était due, c'est-à-dire avant le 1er janvier 1987, date à laquelle le contrat a été résilié, ainsi que le précise la M.A.C.S.F. ; que cette dernière n'est par ailleurs tenue au versement d'aucune somme pour la période du 1er août 1982 au 31 décembre 1985 pour laquelle le plafond contractuel a été atteint ; que le rapport d'expertise permet de retenir que les transfusions ont eu lieu du 10 avril 1972 au 7 janvier 2001 sans que puisse être déterminée la date à laquelle la contamination a eu lieu, et que l'hépatite C a été mise en évidence en janvier 1988 ; que la contamination s'est donc produite entre 1972 et janvier 1988 ; que la fin de la garantie se situant le 31 décembre 1986, il existe une période comprise entre janvier 1987 et janvier 1988 non couverte par la garantie au cours de laquelle la contamination a pu intervenir ; que le fait que de nombreuses transfusions aient pu, comme le soutient l'E.F.S., avoir lieu entre le 10 avril 1972 et le 1er août 1982 n'implique pas qu'elle n' ait pu avoir lieu par la suite ; que, par ailleurs, le plafond de garantie a été atteint pour les années 1983 à 1985, ce qui exclut toute prise en charge ; que la proposition de garantie partielle formulée à titre subsidiaire par la compagnie d'assurance ne peut enfin être considérée comme une reconnaissance implicite de contamination, même pour les années visées par la M.A.C.S.F., laquelle à titre principal dénie sa garantie ; que le jugement attaqué sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté l'E.F.S. et les consorts X... de leurs demandes à l'égard de la M.A.C.S.F. ;
ALORS QUE la présomption d'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C à une transfusion sanguine prévue par l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 est opposable à toute partie tenue à la réparation du dommage causé par cette contamination et, notamment, à l'assureur de responsabilité civile du centre de transfusion sanguine ; qu'il s'ensuit qu'en présence de transfusions multiples qui, toutes, peuvent être à l'origine de la contamination, sans que le geste contaminant puisse être identifié, l'assureur est tenu à indemnisation dès lors que l'une ou moins des injections a eu lieu au cours d'une période garantie ; qu'ayant constaté, d'une part, que M. X... n'avait jamais cessé de recevoir des transfusions de facteurs coagulants depuis 1972 et, d'autre part, que la M.A.C.S.F. devait sa garantie pour les sinistres survenus entre le 1er janvier et le 31 juillet 1982 et au cours de l'année 1986, la cour d'appel, qui a retenu, pour rejeter la demande de garantie de l'E.F.S. contre son assureur, qu'il ne rapportait pas la preuve certaine de ce que la contamination de M. X... avait eu lieu au cours d'une période garantie, a violé l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 par refus d'application.