LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, ensemble l'article L. 123-12 du code rural ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 31 mars 2009), que M. X..., propriétaire d'une parcelle cadastrée n° 653, a assigné en bornage la commune de Feuilla, propriétaire de la parcelle contiguë cadastrée n° 654 ; qu'une expertise a été ordonnée ; qu'un procès-verbal de réorganisation foncière, en date du 13 mars 2007, a été notifié à M. X... lui attribuant un lot d'une superficie de 1 a 65 ca ; que l'expert judiciaire a rendu son rapport, le 27 avril 2007, proposant une contenance différente pour ce même lot ;
Attendu que pour rejeter les demandes de sursis à statuer et de complément d'expertise et fixer la propriété de M. X... selon le périmètre du plan annexé au rapport d'expertise, la cour d'appel retient que seul, le bornage judiciaire est de nature à déterminer très exactement les limites de propriété, que la procédure de réorganisation foncière n'est pas de nature à remettre en cause l'analyse de l'expert et qu'il appartiendra à la commission compétente de modifier l'aménagement foncier au vu du jugement qui constitue un élément nouveau dont elle n'avait pas connaissance lorsqu'elle a été réunie ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'une juridiction de l'ordre judiciaire ne peut remettre en cause les limites définies dans le cadre d'un aménagement foncier agricole et forestier dont les opérations ont été clôturées et que la clôture de ces opérations emporte transfert des droits de propriété de la parcelle comprise dans le périmètre de l'aménagement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne la commune de Feuilla aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la commune de Feuilla à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la commune de Feuilla ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de sursis à statuer sur le bornage des propriétés de M. Robert X... et de la commune de FEUILLA et d'avoir homologué le rapport de l'expert fixant la propriété de M. Robert X... au périmètre 1. 2. 3. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12 du plan annexé à son rapport d'expertise, dont la superficie s'élève à 148 m2 ;
AUX MOTIFS QU'il convient de retenir les motifs pertinents par lesquels le premier juge a retenu les limites de propriété proposées par l'expert judiciaire Y... dans la solution n° 1 de son rapport et rejeté 1es demandes de sursis à statuer et d'expertise présentées par Robert X... au vu du procès verbal de réorganisation foncière du 13 mars 2007 ; qu'en effet, seul le bornage judiciaire est de nature à déterminer très exactement les limites de propriété et la procédure de réorganisation foncière n'est pas de nature à remettre en cause l'analyse de l'expert ; qu'ainsi que le tribunal le rappelle opportunément, l'aménagement foncier n'est qu'un mode de redistribution des terres mis en oeuvre par la commission compétente en fonction des superficies et limites reconnues aux propriétaires concernés, c'est-à-dire des droits réels dont ils sont titulaires, et il lui appartiendra de modifier cet aménagement au vu du jugement qui constitue un élément nouveau dont elle n'avait pas connaissance lorsqu'elle s'est réunie ; qu'en cause d'appel, Monsieur X... n'apporte aucun document technique émanant d'un géomètre à l'appui de sa critique du rapport de l'expert judiciaire ; que les attestations A... et B... ne sont pas davantage de nature à contredire son rapport dès lors qu'elles ne fournissent aucun renseignement sur la délimitation des propriétés des parties et se bornent à faire référence à la présence de troupeaux dans la zone concernée, sans que cela puisse permettre d'établir l'existence d'actes de possession susceptible de fonder une prescription acquisitive ; que le jugement sera en conséquence en tous points confirmé, sans qu'il soit toutefois démontré que l'appelant a agi dans l'intention de nuire, de mauvaise foi ou avec une légèreté assimilable au dol, seuls éléments de nature à caractériser un abus dans l'exercice de la procédure (arrêt attaqué p. 3 al. 2 à 5) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'à partir des documents produits deux solutions peuvent être proposées, l'une s'appuyant sur l'interprétation des titres et de l'état des lieux et l'autre sur le plan cadastral ; qu'ainsi l'expert retranscrit deux propositions de limite de la propriété de M. Robert X... : une selon le périmètre 1. 2. 3. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12 du plan annexé au rapport d'expertise dont la superficie s'élève à 148 m2 sur la base de la description faite dans les titres du bien, des dires de M. Robert X... et de l'état des lieux,- une selon le périmètre 1. 2. 3. 4 du plan annexé au rapport d'expertise dont la superficie s'élève à 54 m2 correspondant à la parcelle A 595 qui est devenue A 653 par une opération interne des Services du Cadastre ; que selon l'avis de l'expert, la 1ère solution semble devoir être retenue ; que la commune de FEUILLA est d'accord pour que la première solution, plus favorable à M. Robert X... et que ce dernier n'a donc aucun intérêt à contester, soit homologuée ; que M. Robert X... fait valoir que l'analyse de M. Y... serait contredite par la notification d'un procès verbal, en date du 13 mars 2007, de réorganisation foncière qui lui attribue, cette fois, un lot redésigné cadastralement Section WD n035 d'un superficie de 1 a 65 ca : que le plan édité par M. Z... géomètre expert dans le cadre de cette opération ne permet pas de positionner correctement ladite parcelle puisque les services du cadastre n'ont pas encore édité le plan cadastral ; que M. Robert X... sollicite la désignation d'un expert géomètre pour que soit effectuée une contre expertise ; qu'il demande au tribunal de surseoir à statuer sur le bornage ; que l'aménagement foncier est un mode de redistribution des terres permettant de mettre en oeuvre une mise en valeur des terres incultes et de réorganiser plus rationnellement les propriétés pour en éviter le morcellement ; que cette réorganisation prévoit que chaque propriétaire recevra des attributions en échange de parcelles abandonnées ; que le courrier reçu, en date du 13 mars 2007, par M. Robert X... du Président de la Commission Communale d'Aménagement Foncier fait état de parcelles abandonnées, dont celle sur le lieudit Las Portes n° 653 et de l'attribution de la parcelle n° 35, qui, sur le plan définitif produit par l'expert M. Z..., se limite à la bergerie ; que le présent jugement est en principe de nature à modifier le projet de réaménagement foncier en fonction des superficies reconnues à Mr X... puisqu'il constitue un élément nouveau qui n'était pas connu aux dates auxquelles la commission s'est réunie ; qu'il n'y donc pas lieu d'ordonner une contre expertise et de surseoir à statuer sur le bornage dont l'expert M. Y... rapporte des éléments permettant de déterminer les limites de la propriété ; qu'il sera fait application de la solution établissant que la propriété de M. Robert X... dispose du périmètre 1. 2. 3. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12 du plan annexé au rapport d'expertise dont la superficie s'élève à 148 m ² ; qu'il y a lieu de faire procéder à une rectification du plan cadastral par document d'arpentage dressé par un géomètre expert (jugement entrepris p. 4, 5) ;
ALORS QUE le juge judiciaire ne peut remettre en cause les limites de propriétés résultant d'un remembrement ou d'une réorganisation foncière dont les opérations ont été clôturées ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué qu'un procès verbal de réorganisation foncière a été notifié à Monsieur X... le 13 mars 2007, peu après le dépôt du rapport d'expertise, avec attribution au lieu dit Las Portes d'un lot désigné section WD n° 35 d'une superficie de 1 a 65 ca ; que pour rejeter la demande de Monsieur X... de surseoir à statuer et d'ordonner une contre expertise pour tenir compte de cet élément nouveau modifiant le droit de propriété des parties sur les parcelles en cause, la Cour d'appel a affirmé qu'il appartiendrait à la Commission de réorganisation foncière de modifier cette réorganisation au vu du jugement ; qu'en statuant de la sorte la Cour d'appel a entaché son arrêt d'une violation de l'article 13 de la loi du 16-24 août 1790 et des articles l 122-8 et l 123-12 du Code rural.