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19/05/2010 | FRANCE | N°09-42115

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 mai 2010, 09-42115


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 12 février 2009), que M. X..., engagé en qualité de maître d'équipage le 31 juillet 1980 par la société Armement Delhemmes, a été licencié le 29 juin 2006 pour inaptitude consécutive à un accident du travail survenu le 24 août 2003 et impossibilité de reclassement ; qu'il a saisi le tribunal d'instance d'une demande de complément d'indemnité de licenciement, sur le fondement des articles L. 1226-14 et R. 1234-2 du code du travail ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 12 février 2009), que M. X..., engagé en qualité de maître d'équipage le 31 juillet 1980 par la société Armement Delhemmes, a été licencié le 29 juin 2006 pour inaptitude consécutive à un accident du travail survenu le 24 août 2003 et impossibilité de reclassement ; qu'il a saisi le tribunal d'instance d'une demande de complément d'indemnité de licenciement, sur le fondement des articles L. 1226-14 et R. 1234-2 du code du travail ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen, que l'article 102-3 du code du travail maritime prévoyait, dans sa version applicable aux faits de l'espèce, que " le marin qui est licencié alors qu'il compte deux ans d'ancienneté ininterrompue au service du même armateur a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité minimum de licenciement dont le taux et les modalités de calcul sont fixés par voie réglementaire", et l'article 23 du décret n° 78-389 du 17 mars 1978, pris en application de ce texte, fixe à "un dixième du salaire de référence par année effectuée au service du même armateur " ; que si l'article L. 742-9 du code du travail, applicable aux faits de l'espèce, prévoyait l'application aux entreprises d'armement maritime des articles L. 122-32-1 à L. 122-32-11 (devenus L. 1226-7 à L. 1226-17) du code du travail relatifs au licenciement pour inaptitude des salariés victimes d'un accident du travail, le décret n° 99-456 du 1er juin 1999, pris en application de ce texte, qui confirme cette application, renvoie également expressément au décret n° 78-389 du 17 mars 1978 ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes que les modalités de calcul de l'indemnité de licenciement du marin licencié pour inaptitude consécutive à un accident du travail demeurent celles prévues par les règles spécifiques du code du travail maritime à l'exclusion de celles prévues par l'article L. 122-32-6 (devenu L. 1226-14) du code du travail ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 102-3 du code du travail maritime et 23 du décret n° 78-389 du 17 mars 1978 par refus d'application et les articles L. 742-9 du code du travail et 1er du décret n° 99-456 du 1er juin 1999 par fausse application ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu exactement que le décret du 1er juin 1999 a rendu applicable aux marins l'ensemble des articles L. 122-32-1 à L. 122-32-11, devenus L. 1226-7 à L. 1226-17, du code de travail, sans exclure aucun texte, et n'a apporté aucune restriction quant à l'application de ces dispositions, auxquelles le décret du 17 mars 1978, qui se borne en son article 23 à prévoir une indemnité minimum de licenciement, ne saurait faire échec, notamment en ce qui concerne le calcul ou l'assiette de calcul de l'indemnité spéciale de licenciement ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Armement Dhellemmes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Armement Dhellemmes à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Armement Dhellemmes.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné La SA ARMEMENT DHELLEMMES à payer à M. F. X... la somme de 11481,67 euros au titre du solde de l'indemnité spéciale de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2006, ainsi que 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Considérant qu'aux termes du Décret du 1er Juin 1999 pris pour l'application de l'article L 742-9 du Code du Travail et relatif aux règles particulières aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle "les articles L 122-32-1 à L 122-32.11 du Code du travail relatifs aux règles particulières aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle sont applicables aux marins dans les conditions ci-après :
- les attributions conférées au médecin du travail en application de l'article L 122-32-5 du Code de travail sont exercées par le médecin des gens de mer.
- les attributions conférées aux délégués du personnel en application de l'article L 122.32.5 du Code de travail sont exercées par les délégués de bord".
Considérant qu'il s'ensuit que sous réserve des deux conditions mentionnés ci-dessus l'ensemble des articles L 122-32-1 à L 122-32-11 du Code de travail sont applicables aux marins victimes d'un accident du travail y compris les dispositions de l'article L 122-32-6 du code de travail.
Considérant que cet article L 122-32-6 du Code de travail prévoit que "la rupture du contrat de travail "dans les cas prévus au 4ème alinéa de l'article L 122-32-5" (impossibilité de reclassement en cas d'inaptitude ou refus par le salarié du poste proposé) ouvre droit, pour le salarié à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité prévue à l'article L 122-8 (indemnité de délai-congé) ", ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de, l'indemnité prévue par l'article L 122-9 ou par l'article 5 de l'accord national interprofessionnel du 10 décembre 1997 annexé à la loi n° 78-49 du 10 janvier 1978 relative à la mensualisation et à la procédure conventionnelle s'il remplit les conditions fixées pour bénéficier de cet accord..."Considérant que selon l'article L 122-9 du Code de Travail, "le salarié lié par un contrat de travail à durée indéterminée et qui est licencié alors qu'il compte deux ans d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité minimum de licenciement. Le taux de cette indemnité diffère suivant le motif du licenciement est le motif prévu à l'article L 321-l ou un motif inhérent à la personne du salarié et ses modalités de calcul, en fonction de la rémunération brute dont il bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail sont fixés par voie réglementaire".

Considérant qu'il résulte enfin de l'article R 122.2 du Code du travail que l'indemnité de licenciement pour un motif inhérent à la personne du salarié ne peut être inférieure à 1/l0ème de mois de salaire par année d'ancienneté, qu'à partir de 10 ans d'ancienneté cette indemnité minimum est de l/10ème de mois de salaire plus l/15ème de mois par année d'ancienneté au-delà de 10 ans et que le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité est le 12ème de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement ou, selon la formule les plus avantageuses pour le salarié, le tiers des trois derniers mois.
Considérant que force est de constater que l'article L 122-32-6 du Code de travail renvoie très précisément à l'article L 122-9 qui prévoit le versement de l'indemnité de l'indemnité légale de licenciement dont le calcul résulte de l'article R 122-2 lequel fixe comme salaire de référence le salaire réellement perçu par le salarié et que toutes ces dispositions forment un tout indissociable.
Considérant dès lors que le marin victime d'un accident de travail et licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement est fondé à prétendre à l'indemnité spéciale de licenciement telle qu'elle résulte de l'article L 122-32-6 du Code de travail.
Etant observé :
- Que les dispositions de l'article L 742.9 du Code de travail qui prévoient que les conditions d'application aux entreprises d'armement maritime des dispositions de la section V-1, du chapitre II du titre II du Livre 1er du Code de travail (article L. 122-32-1 à L 122-32-11) sont fixées compte tenu des adaptations nécessaires par décret en Conseil d'Etat ne sont pas de nature à faire échec au versement d'une telle indemnité.
- Que le Décret du 1er Juin 1999 a rendu applicable aux marins l'ensemble des articles L 122-32-1 à L 122-32-11 du Code de travail sans exclure aucun texte et n'a apporté aucune restriction quant à l'application de ces dispositions notamment en ce qui concerne le calcul ou l'assiette de calcul de l'indemnité spéciale de licenciement
- Qu'admettre que le marin victime d'un accident de travail et licencié dans les cas prévus au 4ème alinéa de l'article L 122-32-5 ne puisse bénéficier que de 1'indemnité de licenciement prévue par le Code du Travail maritime, qui est nettement moins favorable pour le salarié reviendrait à priver de tout intérêt l'application des dispositions de l'article L 122-32-6 du Code de travail aux marins.
Considérant que c'est en conséquence à juste titre que le premier juge a fait droit à la demande de M. X... dont le chiffrage n'a fait l'objet d'aucune observation »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « En application des dispositions de l'article un du décret 99-456 du 1er juin 1999 "Les articles L. 122-32-1 à L 122-32-11 du code du travail relatifs aux règles particulières aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle sont applicables aux marins dans les conditions citées ci-après :
I. - Les attributions conférées au médecin du travail en application de l'article L. 122-32-5 du code du travail sont exercées par le médecin des gens de mer.
II - Les attributions conférées aux délégués du personnel en application de l'article L. 122-32-5 du code du travail sont exercées par les délégués de bord. "
Ainsi en cas de licenciement pour inaptitude consécutif à un accident du travail, les marins ne sont pas soumis au Code du travail maritime mais au Code du travail.
Dès lors l'article L 742-1 du Code du travail ne fait pas obstacle à ce que pour l'application de l'article L 122-32-6 du Code du travail, le calcul de l'indemnité de licenciement portée au double de ce que prévoit l'article L 122-8 du même code s'effectue par référence à l'article R 122-2 de ce code, lequel a été pris pour l'application de ce dernier article.
Il ressort des débats que la moyenne mensuelle des salaires réels de M. F. X... pour ses trois derniers mois d'activité est égale à 2600 euros.
Il est constant par ailleurs que l'ancienneté de M. F. X... était de 26 ans à la date de la cessation de son activité. L''indemnité spéciale de licenciement prévue par l'article L 122-36-6 du Code du travail doit être calculée sur la base de l'article R 122-2 du Code du travail, lequel dispose que cette indemnité ne peut être inférieure à un dixième de mois de salaire par année d'ancienneté et que à partir de dix ans d'ancienneté, cette indemnité minimum est de un dixième de mois de salaire plus un quinzième de mois par année d'ancienneté au-delà de dix ans.
En considération de ces éléments l'indemnité précitée doit être égale à (2600 X 26/10è) + (2600 X 16/15è) soit 19066 euros.
Enfin les parties sont convenues que l'indemnité compensatrice de préavis était égale à 5200 euros et la SA ARMEMENT DHELLEMMES a versé à M. F. X... la somme de 12784,33 euros à titre d'avance.
La SA ARMEMENT DHELLEMMES reste en conséquence devoir à M. F. X... la somme de (19066 + 5200) -12784,33 11481,67 euros. Il convient en conséquence de condamner La SA ARMEMENT DHELLEMMES à payer à M. F. X... la somme de 11481,67 euros, au titre du solde de l'indemnité spéciale de licenciement, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2006 »
ALORS QUE l'article 102-3 du code du travail maritime prévoyait, dans sa version applicable aux faits de l'espèce, que « le marin qui est licencié alors qu'il compte deux ans d'ancienneté ininterrompue au service du même armateur a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité minimum de licenciement dont le taux et les modalités de calcul sont fixés par voie réglementaire », et l'article 23 du décret n° 78-389 du 17 mars 1978, pris en application de ce texte, fixe à « un dixième du salaire de référence par année effectuée au service du même armateur » ; que si l'article L 742-9 du code du travail, applicable aux faits de l'espèce, prévoyait l'application aux entreprises d'armement maritime des articles L 122-32-1 à L 122-32-11 (devenus L 1226-7 à L 1226-17) du code du travail relatifs au licenciement pour inaptitude des salariés victimes d'un accident du travail, le décret n° 99-456 du 1er juin 1999, pris en application de ce texte, qui confirme cette application, renvoie également expressément au décret n° 78-389 du 17 mars 1978 ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes que les modalités de calcul de l'indemnité de licenciement du marin licencié pour inaptitude consécutive à un accident du travail demeurent celles prévues par les règles spécifiques du code du travail maritime à l'exclusion de celles prévues par l'article L 122-32-6 (devenu L 1226-14) du code du travail ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé ensemble les articles L 102-3 du code du travail maritime et 23 du décret n° 78-389 du 17 mars 1978 par refus d'application et les articles L 742-9 du code du travail et 1er du décret n° 99-456 du 1er juin 1999 par fausse application.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-42115
Date de la décision : 19/05/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Marin - Accident du travail ou maladie professionnelle - Droit commun - Application

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Indemnités - Accident du travail ou maladie professionnelle - Licenciement à l'issue de la période de suspension - Inaptitude au travail - Impossibilité de reclassement - Indemnité spéciale de licenciement - Calcul - Modalités - Règles de droit commun - Domaine d'application - Marins

Le décret n° 99-456 du 1er juin 1999 a rendu applicable aux marins l'ensemble des articles L. 122-32-1 à L. 122-32-11, devenus L. 1226-10 à L. 1226-17, du code du travail, sans exclure aucun texte, et n'a apporté aucune restriction quant à l'application de ces dispositions, auxquelles le décret n° 78-389 du 17 mars 1978 ne saurait faire échec, notamment en ce qui concerne le calcul ou l'assiette de calcul de l'indemnité spéciale de licenciement


Références :

articles L. 122-32-1 à L. 122-32-11, devenus L. 1226-10 à L. 1226-17 du code de travail

décret n° 99-456 du 1er juin 1999

article 23 du décret n° 78-389 du 17 mars 1978

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 12 février 2009

Sur l'application du droit commun du travail aux marins en matière d'accident du travail ou de maladie professionnelle, dans le même sens que :Ass. Plén., 7 mars 1997, pourvoi n° 95-40169, Bull.1997, Ass. plén, n° 2 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 mai. 2010, pourvoi n°09-42115, Bull. civ. 2010, V, n° 109
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, V, n° 109

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Cavarroc
Rapporteur ?: M. Linden
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.42115
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