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12/05/2010 | FRANCE | N°10-82746

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 mai 2010, 10-82746


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Marijana,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 8 avril 2010, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires allemandes, en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé le 9 avril 2010 :
Attendu que la demanderesse, ayant épuisé, par l'exercice qu'elle en avait fait le 8 avril 2010, par l'intermédiaire

de son avoué, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se po...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Marijana,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 8 avril 2010, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires allemandes, en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé le 9 avril 2010 :
Attendu que la demanderesse, ayant épuisé, par l'exercice qu'elle en avait fait le 8 avril 2010, par l'intermédiaire de son avoué, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé le 8 avril 2010 ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'un mandat d'arrêt européen a été délivré le 27 octobre 2005 par le procureur de Dortmund aux fins d'exécution de la peine de sept mois d'emprisonnement prononcée le 9 janvier 2004 par le tribunal de Castrop-Rauxel, pour le vol d'un porte-monnaie contenant quarante euros ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 63-4, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
en ce que l'arrêt attaqué a rejeté les moyens de nullité de la procédure invoqués par Marijana X... et a constaté que la procédure diligentée sur la base du mandat d'arrêt européen du 27 octobre 2005 avait été régulière ;
"aux motifs que les droits que Marijana X... tient des articles 63-1 à 63-4 du code de procédure pénale lui ont été notifiés dès son interpellation ; qu'elle a indiqué souhaiter faire prévenir Me Astié, son avocat ; que l'officier de police judiciaire a alors, dès cette demande, pris contact avec le cabinet de l'avocat choisi ; qu'il lui a été répondu que ce dernier était en vacances ; que l'officier de police judiciaire a aussitôt téléphoné à la permanence des avocats de Bordeaux ; que son interlocuteur l'a informé de ce que Me Jalain, l'avocat commis d'office, se présenterait à la cour d'appel le même jour à 15 heures dans les bureaux de l'avocat général pour assister Marijana X... ; qu'il est ainsi établi que l'avocat commis d'office, qui a été avisé sans délai, avait parfaitement la possibilité de communiquer avec Marijana X... dès le début de la privation de liberté ; qu'il ne peut être invoqué le non-respect des prescriptions de l'article 63-4 du code de procédure pénale puisque l'avocat a fait le choix d'assister la personne recherchée lors de sa présentation au parquet général à 15 h 30 plutôt que de se rendre immédiatement à l'hôtel de police, où il aurait pu s'entretenir immédiatement Marijana X... ;
"alors qu''il n'appartient pas à l'officier de police judiciaire de s'immiscer dans le choix, par la personne privée de liberté, de son avocat ; que, dès lors, informé que l'avocat que Marijana X... avait initialement choisi ne pourrait pas l'assister, l'officier de police judiciaire devait revenir vers celle-ci pour lui en faire part et l'inviter, soit à désigner un autre avocat, soit à demander qu'il lui en soit commis un d'office ; qu'il ne pouvait pas, en revanche, prendre de lui-même l'initiative de contacter la permanence des avocats en vue d'une commission d'office" ;
Attendu que le grief pris de l'inobservation des prescriptions de l'article 63-4 du code de procédure pénale, qui n'a pas été allégué devant la chambre de l'instruction, ne saurait être invoqué pour la première fois devant la Cour de cassation ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;

Sur le second moyen de cassation, pris des articles 4 de la Décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 13 juin 2002, 5 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire, 591, 593, 695-27 et 695-29 du code de procédure pénale ;

en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de Marijana X... aux autorités judiciaires allemandes pour les faits visés dans le mandat d'arrêt européen du 27 octobre 2005 ;
"aux motifs que la République française ne s'est pas engagée à exécuter la peine prononcée à l'encontre de Marijana X... par une juridiction allemande ; qu'au surplus, la demande tendant à l'exécution de la peine conformément au droit interne est irrecevable, Marijana X... n'étant pas française ; que les restrictions aux droits de la vie familiale à raison d'une détention régulière ne sont pas contraires aux dispositions de l'article 8 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"alors qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle était invitée à le faire, si l'exécution du mandat d'arrêt européen ne portait pas une atteinte injustifiée à la protection de la vie privée et familiale, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter des motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que Marijana X... a fait valoir dans son mémoire déposé devant la chambre de l'instruction que, vivant en France depuis plusieurs années, étant mère de cinq enfants scolarisés qu'elle élève, et titulaire d'un titre de séjour, elle disposait d'une vie privée et familiale qui faisait obstacle à sa remise aux autorités judiciaires allemandes ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation, la chambre de l'instruction prononce par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi sans vérifier, comme l'y invitait le mémoire, si la remise de la personne recherchée ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 8 avril 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Agen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Pometan conseiller rapporteur, Mme Chanet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-82746
Date de la décision : 12/05/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

MANDAT D'ARRET EUROPEEN - Exécution - Conditions d'exécution - Absence d'atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale

Ne justifie pas sa décision la chambre de l'instruction qui autorise la remise d'une personne, en exécution d'un mandat d'arrêt européen, pour l'exécution d'une peine de sept mois d'emprisonnement prononcée pour le vol d'un porte-monnaie contenant une somme de 40 euros, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la remise de l'intéressée, mère de cinq enfants scolarisés qu'elle élevait, ne portait pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale


Références :

article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, 08 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 mai. 2010, pourvoi n°10-82746, Bull. crim. criminel 2010, n° 86
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2010, n° 86

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Robert
Rapporteur ?: M. Pometan
Avocat(s) : Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:10.82746
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