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25/02/2010 | FRANCE | N°09-12961

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 février 2010, 09-12961


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Attendu que M. X... a cité M. Y... à comparaître devant le tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye le 21 octobre 2008 pour voir constater que ce dernier avait proféré le 31 octobre 2007 des injures à son égard en utilisant les termes " C'est pourquoi ton autobiographie est excellente : un débile qui enfoncerait des portes ouvertes " ;

Attendu que pour déclarer recevable l'action de M. X... en réparation d

u préjudice causé par l'infraction d'injure non publique, le tribunal a énoncé que ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Attendu que M. X... a cité M. Y... à comparaître devant le tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye le 21 octobre 2008 pour voir constater que ce dernier avait proféré le 31 octobre 2007 des injures à son égard en utilisant les termes " C'est pourquoi ton autobiographie est excellente : un débile qui enfoncerait des portes ouvertes " ;

Attendu que pour déclarer recevable l'action de M. X... en réparation du préjudice causé par l'infraction d'injure non publique, le tribunal a énoncé que par déclaration au greffe du 25 janvier 2008, M. X... avait formulé une demande aux fins de conciliation ; que la tentative de conciliation avait eu lieu le 16 septembre 2008 et que, par exploit du 21 octobre 2008, M. X... avait fait assigner M. Y... ; qu'en application de l'article 835 du code de procédure civile, la demande aux fins de tentative préalable de conciliation n'interrompait la prescription que si l'assignation était délivrée dans les deux mois à compter du jour de la tentative de conciliation menée par le juge ;

Qu'en statuant ainsi, alors que si la demande aux fins de tentative préalable de conciliation interrompt la prescription au sens de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, celle-ci recommence immédiatement à courir de sorte que faute d'avoir accompli un nouvel acte interruptif avant l'expiration du délai de trois mois, l'action était prescrite à la date du 21 octobre 2008 à laquelle M. X... a assigné M. Y... ;

Et attendu que la cassation n'implique pas qu'il soit à nouveau statué au fond ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 23 décembre 2008, entre les parties, par le tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare l'action prescrite ;

Condamne M. X... aux dépens exposés devant le tribunal d'instance ainsi qu'à ceux afférents à la présente instance ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché au jugement attaqué d'AVOIR déclaré recevable l'actionde M. X... en réparation d'un préjudice causé par une infraction prétendue d'injure non publique ;

AUX MOTIFS QUE, par déclaration au greffe du 25 janvier 2008, M. X... avait formulé une demande aux fins de conciliation ; que la tentative de conciliation avait eu lieu le 16 septembre 2008 et que, par exploit du 21 octobre 2008, M. X... avait fait assigner M. Y... ; qu'en application de l'article 835 du Code de Procédure Civile, la demande aux fins de tentative préalable de conciliation n'interrompait la prescription que si l'assignation était délivrée dans les deux mois à compter du jour de la tentative de conciliation menée par le juge ;

ALORS 1°) QUE, selon l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, seul applicable aux instances civiles en réparation des infractions prévues par ladite loi, l'action civile résultant d'une infraction se prescrit par trois mois révolus à compter du jour où l'infraction a été commise ou, éventuellement, du jour du dernier acte de procédure, lequel ne suspend pas mais interrompt le cours du délai de prescription ; qu'en l'espèce, il résulte des énonciations du jugement attaqué qu'aucun acte interruptif de prescription n'a été accompli entre la demande aux fins de conciliation formulée au greffe par M. X... le 25 janvier 2008 et la date de conciliation du 16 septembre 2008 ; qu'il s'ensuit qu'à la date du 21 octobre 2008 à laquelle M. X... a fait assigner M. Y... devant le Tribunal d'Instance de SAINT-GERMAIN-EN-LAYE, son action était prescrite et que c'est à tort que le jugement l'a déclarée recevable ;

ALORS 2°) QUE, dans toutes les actions résultant de la loi du 29 juillet 1881, seules sont applicables à la prescription les dispositions de ce texte, à l'exclusion des dispositions du Code de Procédure Civile ; qu'il s'ensuit que la référence aux dispositions de l'article 835 du Code de Procédure Civile est inopérante pour justifier la recevabilité de l'action de M. X....

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché au jugement attaqué d'AVOIR dit que M. Jean-Jacques Y... avait commis une faute d'injure au préjudice de M. Guy X... et de l'avoir condamné à lui payer la somme de 2000 € ;

AUX MOTIFS QUE à un courriel de M. X..., M. Y... lui avait répondu : « c'est pourquoi ton autobiographie est excellente » « un débile qui enfoncerait des portes ouvertes » ; que le terme « débile », d'après le Littré et le Robert, désignait la personne faible qui manque de force, pris dans son sens péjoratif, était la personne complètement « idiote, tarée, imbécile etc.. » et présentait de toute évidence un caractère injurieux ; que, de surcroît, ce qualificatif portait atteinte à l'image de M. X... tant dans son milieu associatif ou politique que professionnel, d'autant que M. Y... était adhérent du parti des Verts n'était pas sans ignorer (sic) la profession de M. X... « avocat » ;

ALORS 1°) QUE, dans ses conclusions M. Y... faisait valoir que l'auteur réel, l'inventeur de l'injure « débile qui enfonçait des portes ouvertes » émanait de M. X... lui-même qui avait utilisé cette expression pour lui-même dans son mail du 31 octobre 2007 (à 8 h 09) et qu'en reprenant les termes employés par son créateur, il n'avait commis aucune faute à l'encontre de M. X... ; que le jugement attaqué est muet sur ce moyen de défense qui était de nature à priver les faits reprochés de leur caractère fautif ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen des conclusions, le Tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'articleR. 621-1 du Code Pénal.

ALORS 2°) QUE ce défaut de réponse à conclusions caractérise une méconnaissance des dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché au jugement attaqué d'AVOIR dit que M. Jean-Jacques Y... avait commis une faute d'injure au préjudice de M. X... et de l'avoir condamné à lui payer la somme de 2000 € ;

ALORS QUE, dans ses écritures ignorées par le Tribunal, M. X... avait fait valoir qu'à tout le moins la prétendue injure était justifiée par une excuse de provocation imputable à M. X... ; qu'il avait indiqué que, dans son courriel du 31 octobre 2007, celui-ci avait accusé les membres du secrétariat régional des verts, dont M. Y... faisait partie, de dissimulation, de malhonnêteté et d'incapacité faisant suivre ces imputations de la phrase litigieuse « tu fais semblant de ne pas comprendre ce que j'écris … pour tenter de me faire passer pour un débile qui enfoncerait des portes ouvertes … » ; qu'en ne s'expliquant pas non plus sur ce moyen des conclusions qui était de nature à excuser le propos, le Tribunal a méconnu les dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 09-12961
Date de la décision : 25/02/2010
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

PRESSE - Procédure - Prescription - Interruption - Cas - Demande aux fins de tentative préalable de conciliation - Portée

Si la demande aux fins de tentative préalable de conciliation interrompt la prescription au sens de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, celle-ci recommence immédiatement à courir de sorte que l'action est prescrite à défaut d'accomplissement d'un nouvel acte interruptif avant l'expiration du délai de trois mois prévu par l'article 65 de cette loi


Références :

articles 53 et 65 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye, 23 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 fév. 2010, pourvoi n°09-12961, Bull. civ. 2010, I, n° 48
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, I, n° 48

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: Mme Crédeville
Avocat(s) : SCP Lesourd

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.12961
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