La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/01/2010 | FRANCE | N°09-11450

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 janvier 2010, 09-11450


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 11 décembre 2008), que la caisse régionale d'assurance maladie du Nord-Est (la caisse) lui ayant notifié, au titre des années 2005 et 2008, un taux de cotisation pour son site de Macey, la société ESI France (la société) a saisi d'un recours la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale ;
Attendu que la caisse fait grief à l'arrê

t de dire qu'il ne lui appartenait pas de fixer les taux de cotisation de l'...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 11 décembre 2008), que la caisse régionale d'assurance maladie du Nord-Est (la caisse) lui ayant notifié, au titre des années 2005 et 2008, un taux de cotisation pour son site de Macey, la société ESI France (la société) a saisi d'un recours la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale ;
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de dire qu'il ne lui appartenait pas de fixer les taux de cotisation de l'entité locale de la société sise à Macey et d'annuler en conséquence ses décisions, alors, selon le moyen :
1°/ que constitue un établissement distinct toute entité géographiquement indépendante et ayant une activité et un personnel propres, quand bien même elle ne serait qu'une émanation locale de l'entreprise, dépourvue de toute délégation de pouvoir sur le plan logistique ou administratif; qu'en l'espèce, la Cour nationale, après avoir indiqué qu'il n'était pas contesté que l'entité locale était géographiquement distincte du siège social, a relevé que ‘"'activité exercée à Macey est répertoriée comme suit: commerce de gros et micro-ordinateurs consommables, commerce de logiciels et accessoires informatiques, service après vente et installations des matériels vendus'" et que ‘"l'effectif se compose de deux commerciales, deux secrétaires commerciales, un technicien SAV" ; qu'il résulte de ces constatations que le bureau de Macey était géographiquement distinct du siège social, qu'il employait un personnel propre et exerçait une activité propre, ce dont il s'évinçait qu'il s'agissait d'un établissement distinct ; qu'en jugeant néanmoins que le bureau de Macey ne constituait pas un établissement distinct, aux motifs inopérants que l'activité de cette entité ne serait pas "caractérisée'" par rapport à celle du siège social et qu'elle ne serait qu'une représentation locale de la société, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a violé l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que, subsidiairement, les circulaires ministérielles lorsqu'elles ne sont qu'interprétatives ne sont pas opposables aux administrés ; que la circulaire ministérielle n° 85 SS du 9 juin 1952 était destinée à éclairer les problèmes posés par les articles 4, 20 et 21 du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale et n'était donc qu'interprétative ; que dès lors, la cour nationale ne pouvait, pour faire droit au recours de la société ESI France, se référer aux dispositions de cette circulaire, notamment en ce qu'elle indique que "par établissement, il convient d'entendre en matière de sécurité sociale un groupe d'individus exerçant sous une même autorité en un certain lieu, une activité caractérisée'" ; qu'en réglant le litige au regard de cette circulaire, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a violé l'article D. 242-6 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que constitue un établissement distinct susceptible d'être assujetti à une tarification particulière en ce qui concerne les cotisations d'accidents du travail, toute entité présentant une implantation distincte et une activité propre, même si elle est rattachée pour sa gestion à une entreprise englobant d'autres activités ;
Et attendu qu'ayant relevé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que l'activité des agents de la société affectés sur le site de Macey ne pouvait être caractérisée par rapport à celle du siège social, la cour nationale, qui ne s'est référée à la circulaire ministérielle du 9 juin 1952 qu'à titre d'élément d'appréciation, a pu en déduire que le site litigieux ne constituait pas un établissement susceptible de faire l'objet d'une tarification distincte ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la CRAM du Nord-Est aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la CRAM du Nord-Est ; la condamne payer à la société ESI France la somme de 1 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale d'assurance maladie du Nord Est
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fait droit à la requête et dit qu'il n'appartenait pas à la CRAM du Nord Est de fixer les taux de cotisation de l'entité locale de la société ESI sise à Macey et, en conséquence, d'AVOIR annulé les décisions de la CRAM du Nord Est en date des 12 septembre 2005 et 2 janvier 2008 ayant fixé des taux de cotisation à l'encontre de l'entité de Macey ;
AUX MOTIFS QUE les dispositions des articles L.143-1 et L.143-4 du code de la sécurité sociale instituent une organisation du contentieux technique de la sécurité sociale ; cette organisation règle les contestations relatives aux décisions des caisses régionales d'assurance maladie et des caisses de mutualité agricole concernant, en matière d'accident du travail agricole et non agricole, la fixation du taux de cotisation, l'octroi de ristournes, l'imposition de cotisations supplémentaires et, pour les accidents régis par le livre IV du code de la sécurité sociale, la détermination de la contribution prévue à l'article L.437-1 du présent code. Les contestations mentionnées au 4° de l'article L.143-1 sont soumises en premier et dernier ressort à la cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail prévue à l'article L.143-3 ; qu'une circulaire n'a pas force obligatoire. Cela étant, la cour a le pouvoir d'appliquer les circulaires afin de trancher les litiges qui lui sont soumis, à savoir de déterminer si c'est à bon droit qu'une caisse régionale d'assurance maladie, et en l'espèce, celle de Bourgogne et Franche-Comté, a notifié un taux de cotisations à une entité qu'elle a qualifié d'établissement, en l'espèce l'entité sise à Chenôve ; que la circulaire ministérielle n°85 SS du 9 juin 1952, destinée à éclairer les problèmes posés par l'application des articles 4, 20 et 21 de l'ordonnance du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale, prévoit dans son IV - Accidents du travail, que : «A) Tarification : L'article 35 de l'ordonnance du 4 octobre 1945 prévoit que le taux des cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé annuellement par la caisse régionale de sécurité sociale. L'arrêté du 16 février 1948 ayant posé, en outre, le principe de la tarification par établissement, les caisses régionales de sécurité sociale déterminent et notifient le taux de cotisation à chaque établissement situé dans leur circonscription territoriale, quel que soit le lieu du siège social de l'entreprise dont relèvent ces établissements. 1° Cas général : Dans ces conditions, la caisse régionale compétente sera celle dans la circonscription de laquelle se trouve la caisse primaire qui a immatriculé l'établissement» ; que pour déterminer auprès de quelle caisse primaire d'assurance maladie un employeur doit être immatriculé, la cour se réfère au I–Immatriculation des employeurs de la circulaire précitée qui dispose : «(…) Il est de règle que la caisse d'immatriculation de l'employeur soit celle dans la circonscription dans laquelle se trouve l'établissement» ; que la cour rappelle que l'article D.242-6-1 du code de la sécurité sociale dispose que «le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminée par établissement» et qu'au sens de la législation sur la tarification des accidents du travail, un établissement est caractérisé par la disposition des lieux, l'organisation du travail et le nombre des opérations permettant de particulariser les risques encourus par son personnel et qu'une direction indépendante n'est pas exigée ; que la cour de cassation a défini comme «établissement susceptible d'être assujetti à une tarification particulière, tout atelier, usine ou chantier présentant un caractère topographique distinct et une activité propre bien qu'il se rattache pour son administration à une entreprise englobant d'autres activités» ; que cette définition de l'établissement a d'ailleurs été précisée par ladite circulaire en ces termes : «Par contre il convient de préciser les solutions à retenir en cas d'établissements multiples : 1° Entreprise fixe comprenant plusieurs établissements : Lorsqu'une entreprise possède plusieurs établissements, ceux-ci doivent être connus individuellement (tarification AT et versement des cotisations par l'établissement) et par conséquent, recevoir chacun un numéro d'immatriculation propre. Le problème consiste à déterminer s'il y a ou non des établissements géographiquement distincts. Par établissement, il convient d'entendre en matière de sécurité sociale un groupe d'individus exerçant sous une même autorité en un certain lieu, une activité caractérisée. Peu importe qu'administrativement les établissements soient plus ou moins autonomes, chacun d'eux est considéré comme distinct dès l'instant qu'il est situé en un lieu séparé. Cependant le lieu de travail peut parfois apparaître comme une entité trop faible pour déterminer l'établissement. Tel est notamment le cas des agents locaux isolés, des bureaux de faible importance dont la comptabilité est tenue au siège de l'entreprise, des receveurs de paris urbain, des receveurs des services de transport départementaux, des inspecteurs d'assurance à employeur unique etc… Dans ces cas la caisse primaire ou d'allocation familiale compétente pour immatriculer l'employeur est celle dans la circonscription de laquelle se trouve le siège de l'entreprise dont dépend l'agent» ; qu'en l'espèce, aucune des parties ne conteste le fait que l'entité locale sise à Macey est géographiquement distincte du siège social. Le point de litige consiste à déterminer si l'activité déployée à Macey peut être considérée comme une «activité caractérise». Il apparaît au vu de l'enquête effectuée par l'inspecteur de tarification de la caisse régionale d'assurance maladie de Bourgogne et Franche-Comté le 28 juin 2005 sur le site de Macey et dont le rapport a été versé aux débats et transmis à la demanderesse dans le cadre du contradictoire : - que l'activité exercée à Macey est répertoriée comme suit : commerce de gros et micro-ordinateurs consommables, commerce de logiciels et accessoires informatiques, SAV technique et installation des matériels vendus ; - que l'effectif se compose comme suit : 2 commerciales, 2 secrétaires commerciales, 1 technicien SAV ; que la société a versé aux débats de multiples pièces dont l'attestation du commissaire aux comptes MULLER indiquant que «(…) les différentes agences ne possèdent aucune délégation de quelque manière que ce soit. Leurs activités sont exclusivement commerciales, la logistique de cette fonction étant assurée par le siège» ; que la Cour appréciant souverainement ces éléments de fait, constate que l'activité des agents de Macey ne peut être qualifiée de «caractérisée» par rapport à celle du siège de la société ESI et que la faiblesse de cette entité qui n'est qu'une représentation locale de la société à Macey s'oppose à la qualification de celle-ci d'établissement au sens de la tarification ; que c'est donc en méconnaissance des textes susvisés que la caisse régionale d'assurance maladie du Nord Est a considéré la représentation locale de la société ESI à Macey comme un établissement ; que les recours de la société ESI seront dès lors admis ;
1. - ALORS QUE constitue un établissement distinct toute entité géographiquement indépendante et ayant une activité et un personnel propres, quand bien même elle ne serait qu'une émanation locale de l'entreprise, dépourvue de toute délégation de pouvoir sur le plan logistique ou administratif ; qu'en l'espèce, la CNITAAT, après avoir indiqué qu'il n'était pas contesté que l'entité locale était géographiquement distincte du siège social, a relevé que «l'activité exercée à Macey est répertoriée comme suit : commerce de gros et micro-ordinateurs consommables, commerce de logiciels et accessoires informatiques, SAV technique et installation des matériels vendus» et que «l'effectif se compose de 2 commerciales, 2 secrétaires commerciales, 1 technicien SAV» ; qu'il résulte de ces constatations que le bureau de Macey était géographiquement distinct du siège social, qu'il employait un personnel propre et exerçait une activité propre, ce dont il s'évinçait qu'il s'agissait d'un établissement distinct ; qu'en jugeant néanmoins que le bureau de Macey ne constituait pas un établissement distinct, aux motifs inopérants que l'activité de cette entité ne serait pas «caractérisée» par rapport à celle du siège social et qu'elle ne serait qu'une représentation locale de la société, la CNITAAT a violé l'article D.242-6-1 du code de la sécurité sociale ;
2. – ALORS subsidiairement QUE les circulaires ministérielles lorsqu'elles ne sont qu'interprétatives ne sont pas opposables aux administrés ; que la circulaire ministérielle n° 85 SS du 9 juin 1952 était destinée à éclairer les problèmes posés par les articles 4, 20 et 21 de l'ordonnance du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale et n'était donc qu'interprétative ; que dès lors, la CNITAAT ne pouvait, pour faire droit au recours de la société ESI France, se référer aux dispositions de cette circulaire, notamment en ce qu'elle indique que «par établissement, il convient d'entendre en matière de sécurité sociale un groupe d'individus exerçant sous une même autorité en un certain lieu, une activité caractérisée» ; qu'en réglant le litige au regard de cette circulaire, la CNITAAT a violé l'article D.242-6-1 du code de la sécurité sociale ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-11450
Date de la décision : 14/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Cotisations - Taux - Fixation - Etablissement distinct - Définition - Entité présentant une implantation distincte et une activité propre

Constitue un établissement distinct susceptible d'être assujetti à une tarification particulière en ce qui concerne les cotisations d'accidents du travail, toute entité présentant une implantation distincte et une activité propre, même si elle est rattachée pour sa gestion à une entreprise englobant d'autres activités


Références :

article D. 242-6 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour nationale de l'incapacité et de la tarification, de l'assurance des accidents du travail, 11 décembre 2008

Sur la définition de l'établissement distinct susceptible d'être assujetti à une tarification particulière concernant les cotisations d'accidents du travail, à rapprocher :Soc., 11 janvier 1962, pourvoi n° 60-12345, Bull. 1962, IV, n° 55 (rejet) ;Soc., 24 octobre 1963, pourvoi n° 62-10798, Bull. 1963, IV, n° 726 (cassation) ;Soc., 9 décembre 1971, pourvoi n° 70-13169, Bull. 1971, V, n° 728 (rejet) ;

Soc., 26 mars 1992, pourvoi n° 89-13174, Bull. 1992, V, n° 217 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 jan. 2010, pourvoi n°09-11450, Bull. civ. 2010, II, n° 8
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 8

Composition du Tribunal
Président : M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: M. Prétot
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.11450
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award