La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/01/2010 | FRANCE | N°08-21536

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 06 janvier 2010, 08-21536


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 411-37 du code rural, ensemble l'article L. 621-40 du code de commerce dans sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu que le preneur associé d'une société à objet principalement agricole peut mettre à la disposition de celle-ci, pour une durée qui ne peut excéder celle pendant laquelle il reste titulaire du bail, tout ou partie des biens dont il est locataire, sans que cette opération puisse donner lieu à l'attribution de parts ; que le preneur qui reste

seul titulaire du bail doit, à peine de résiliation, continuer à se co...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 411-37 du code rural, ensemble l'article L. 621-40 du code de commerce dans sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu que le preneur associé d'une société à objet principalement agricole peut mettre à la disposition de celle-ci, pour une durée qui ne peut excéder celle pendant laquelle il reste titulaire du bail, tout ou partie des biens dont il est locataire, sans que cette opération puisse donner lieu à l'attribution de parts ; que le preneur qui reste seul titulaire du bail doit, à peine de résiliation, continuer à se consacrer à l'exploitation du bien loué mis à disposition, en participant sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation ; que les droits du bailleur ne sont pas modifiés ; que les coassociés du preneur, ainsi que la société si elle est dotée de la personnalité morale, sont tenus indéfiniment et solidairement avec le preneur de l'exécution des clauses du bail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 21 mai 2008), que le 20 décembre 1982, Mme Aimée X... a donné à bail à métayage aux époux Y... une propriété viticole ; que par acte notarié du 28 février 1996, le bail a été converti en bail à ferme à long terme ; que les preneurs ont mis les biens donnés à bail à disposition de l'exploitation agricole à responsabilité limitée des Grands Vierres (EARL), qu'ils ont constituée le 24 juin 1998 ; que par jugement du 15 novembre 2005, l'EARL a été placée en redressement judiciaire ; que par jugement du 14 novembre 2006, elle a bénéficié d'un plan de continuation ; que le 19 février 2007, Mme Jocelyne X..., venant aux droits de Mme Aimée X..., décédée, soutenant que les fermages étaient restés impayés malgré deux mises en demeure, a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que l'application de l'article L. 411-37 du code rural ne saurait faire échec à la règle de l'arrêt des poursuites individuelles posée à l'article L. 621-40 du code de commerce, que l'action en résiliation du bail pour défaut de paiement des fermages formée à l'encontre des époux Y..., même si les preneurs ne sont pas à titre personnel soumis au régime de la procédure collective, a nécessairement pour effet d'écarter l'application de cette règle et la poursuite du plan de continuation de l'EARL des Grands Vierres, dès lors que l'exploitation des biens loués constitue la seule activité de l'EARL ;
Qu'en statuant ainsi, alors que lorsqu'un fermier met ses terres à disposition d'une EARL, il reste seul titulaire du bail et que la procédure collective suivie contre l'EARL, même si elle débouche sur un plan de continuation, ne fait pas obstacle à l'action en résiliation du bailleur dont les droits n'ont pas été modifiés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation du bail à ferme liant Mme Jocelyne X... aux époux Y..., l'arrêt rendu le 21 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer à Mme Jocelyne X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Hémery, avocat aux conseils pour Mme Jocelyne X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Jocelyne X..., bailleur, de sa demande de résiliation du bail à ferme la liant aux époux Y... ;
AUX MOTIFS QUE Madame Jocelyne X... tient de l'article L 411-37 du Code Rural le droit d'agir en paiement des fermages antérieurs à l'ouverture de la procédure collective tant à l'encontre de l'EARL des Grands Vierres, en déclarant sa créance au passif du redressement judiciaire, qu'à l'encontre des époux Y... devant le tribunal paritaire des baux ruraux ; il importe peu que la bailleresse ait choisi de déclarer sa créance au redressement judiciaire avant de saisir le tribunal ; en revanche, l'application de l'article L 411-37 du Code Rural ne saurait faire échec à la règle de l'arrêt des poursuites individuelles posée à l'article L 621-40 du Code de Commerce ; l'action en résiliation du bail pour défaut de paiement des fermages formée à l'encontre des époux Y..., même si les preneurs ne sont pas à titre personnel au régime de la procédure collective, a nécessairement pour effet d'écarter l'application de cette règle et la poursuite du plan de continuation de l'EARL des Grands Vierres, dès lors que l'exploitation des biens loués constitue la seule activité de l'EARL ; en conséquence, l'action au fins de résiliation du bail et d'expulsion diligentée par Madame Jocelyne X... à l'encontre de époux Y... doit être jugée irrecevable ;
ALORS QUE, lorsqu'un fermier met ses terres à disposition d'une EARL, il reste seul titulaire du bail ; que la procédure collective suivie contre l'EARL, même si elle débouche sur un plan de continuation, ne fait pas obstacle à l'action en résiliation du bailleur dont les droits n'ont pas été modifiés ; qu'en estimant cette action irrecevable, la Cour d'Appel a violé les articles L 411-37 du Code Rural et L 621-40 du Code de Commerce, dans sa rédaction, alors applicable, antérieure à la loi du 26 juillet 2005.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-21536
Date de la décision : 06/01/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL RURAL - Bail à ferme - Mise à disposition - Société d'exploitation agricole - Exploitation agricole à responsabilité limitée - Redressement judiciaire - Plan de continuation - Obstacle à l'action en résiliation du bailleur (non)

AGRICULTURE - Exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) - Membre - Preneur d'un bien rural - Exploitation du bien loué par l'EARL - Redressement judiciaire - Plan de continuation - Obstacle à l'action en résiliation du bailleur (non)

Lorsqu'un fermier met ses terres à disposition d'une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL), il reste seul titulaire du bail. La procédure collective suivie contre l'EARL, même si elle débouche sur un plan de continuation, ne fait donc pas obstacle à une action en résiliation du bailleur dont les droits n'ont pas été modifiés


Références :

article L. 411-37 du code rural

article L. 621-40 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 85-98 du 24 janvier 1985

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 21 mai 2008

Dans le même sens que :3e Civ., 8 octobre 1997, pourvoi n° 95-21199, Bull. 1997, III, n° 187 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 06 jan. 2010, pourvoi n°08-21536, Bull. civ. 2010, III, n° 3
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, III, n° 3

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Badie
Rapporteur ?: M. Philippot
Avocat(s) : Me Hémery

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.21536
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award