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09/12/2009 | FRANCE | N°09-11333

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 09 décembre 2009, 09-11333


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 25 novembre 2008), que les consorts X..., Y..., Z... et A..., propriétaires de tènements fonciers situés sur le territoire de l'association communale de chasse agréée de Petit Bornand Les Glières (l'ACCA), ayant appris que l'association leur déniait la qualité de membres de droit qu'elle leur avait reconnue auparavant, ont assigné celle-ci aux fins d'obtenir restitution de cette qualité et réparation de leur préjudice ;
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 25 novembre 2008), que les consorts X..., Y..., Z... et A..., propriétaires de tènements fonciers situés sur le territoire de l'association communale de chasse agréée de Petit Bornand Les Glières (l'ACCA), ayant appris que l'association leur déniait la qualité de membres de droit qu'elle leur avait reconnue auparavant, ont assigné celle-ci aux fins d'obtenir restitution de cette qualité et réparation de leur préjudice ;

Attendu que les consorts X..., Y..., Z... et A... font grief à l'arrêt de dire que l'action de M. David Y... est sans objet et rejeter les autres demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens, que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international et que le vendeur transmet à l'acquéreur la propriété et les droits qu'il avait sur la chose vendue ; qu'en jugeant que les ayants droit des apporteurs du droit de chasse à l'ACCA, qui sont contraints de subir une atteinte à leur droit de propriété, peuvent être privés par l'ACCA de leur qualité de membre de droit de cette dernière, pourtant prévue par l'article L. 422-21 du code de l'environnement comme la contrepartie de l'atteinte au droit de propriété des apporteurs, la cour d'appel a porté une atteinte disproportionnée audit droit de propriété, violant ainsi les articles 1 du 1er Protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 14 de la même Convention, ensemble l'article 2477 du code civil et l'article L. 422-21 du code de l'environnement ;

2°/ qu'en jugeant par motifs éventuellement adoptés que la demande de M. David Y... serait sans objet, celui-ci étant domicilié dans la commune de Petit Bornand les Glières, sans répondre aux conclusions de M. David Y... qui exposait qu'ayant déménagé de la commune de Petit Bornand Les Glières, il avait de nouveau intérêt à agir pour contester la décision de l'ACCA, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que l'indivision n'a pas la personnalité morale et que chaque indivisaire est propriétaire, à proportion de sa quote-part, de la parcelle indivise, et a donc la qualité de propriétaire au sens de l'article L. 422-21 du code de l'environnement ; qu'en jugeant par motifs éventuellement adoptés, pour débouter les consorts Z... de leurs demandes, que ceux-ci tenaient leur droit d'une indivision et que le droit de chasse aurait bénéficié à l'indivision et non à chacun de ses membres, la cour d'appel a violé l'article L. 422-21 du code de l'environnement, ensemble les articles 815 et suivants du code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté, par motifs adoptés, que M. David Y... était membre de l'ACCA depuis le 25 septembre 2005 dès lors qu'il était domicilié sur la commune de Petit Bornand Les Glières, la cour d'appel, qui n'a pas dénié à ce dernier son intérêt à agir et n'était pas tenue de répondre à un simple argument, en a exactement déduit que sa demande tendant à être réintégré dans l'association était sans objet puisqu'il en faisait partie ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant, par motifs propres, retenu, à bon droit, que l'article L. 422-21-I du code de l'environnement énumère de façon limitative la liste des personnes pouvant obtenir la carte de membre d'une association communale de chasse agréée, que l'acquéreur de parcelles dont le précédent propriétaire, titulaire d'un droit de chasse, en a fait l'apport à l'association, n'entre pas dans cette énumération et que la loi, qui, à la suite d'une décision de la Cour européenne des droits de l'homme a instauré un droit d'objection à la chasse, n'est pas contraire à la Convention européenne des droits de l'homme, dès lors que les atteintes au droit de propriété sont justifiées par des considérations d'intérêt public tenant à l'entretien et à la mise en valeur des espaces réservés à la chasse, ces règles visant à prévenir une pratique désordonnée de la chasse et à favoriser une gestion rationnelle du patrimoine cynégétique, la cour d'appel, qui a, par motifs adoptés, relevé que les consorts X..., A... et Bernard et Christophe Y... étaient des acquéreurs de parcelles dont le droit de chasse avait été apporté à l'ACCA par un ancien propriétaire et que les consorts Z... tenaient leurs droits d'une propriétaire, bénéficiaire d'une cession de parcelles, dont le droit de chasse avait été apporté à l'association avant la cession par les précédents propriétaires, en a, abstraction faite d'un motif surabondant et appliquant la règle selon laquelle le vendeur ne transmet à l'acquéreur que la propriété et les droits qu'il a lui-même conservés sur la chose vendue, exactement déduit qu'à l'exception de M. David Y... aucun des demandeurs ne pouvait prétendre à la qualité de membre de droit de l'ACCA ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X..., les consorts Y..., les consorts Z... et M. A... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X..., les consorts Y..., les consorts Z... et M. A... , ensemble, à payer à l'ACCA de Petit Bornand Les Glières la somme de 2 500 euros et rejette leur demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X..., les consorts Y..., les consorts Z... et M. A...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a constaté que l'action de Monsieur David Y..., consistant à se voir restaurer en sa qualité de membre de droit de l'ACCA est sans objet, dès lors que cette qualité lui a été reconnue pour la saison 2005/2006, en ce qu'il a débouté Monsieur Marcel B..., Monsieur Yves X..., Monsieur Christian A..., Messieurs Bruno et Jean-Michel Z..., Messieurs Bernard Christophe Y... de leurs demandes tendant à se voir restaurer en leur qualité de membres de droit de l'ACCA, et en ce qu'il a débouté Monsieur Marcel B..., Monsieur Yves X..., Monsieur Christian A..., Messieurs Bruno et Jean-Michel Z..., Messieurs Bernard, David et Christophe Y... de leurs demandes de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « l'article L. 422-21 du code de l'environnement énumère de façon limitative la liste des personnes pouvant obtenir la carte de membre d'une association communale de chasse agréée (ACCA) prévue à l'article L. 422-21 du Code de l'environnement ; que l'acquéreur de parcelles dont le précédent propriétaire, titulaire d'un droit de chasse et qui en avait fait l'apport à l'association, n'entre pas dans cette énumération ; que d'autre part les appelants ne sauraient invoquer la circonstance que l'ACCA leur avait délivré une carte de membre jusqu'en 2004, puisque l'erreur ne saurait être créatrice de droit ; que le refus de la carte de membre, fondé sur une meilleure appréciation des règles de droit, ne saurait être assimilé à une sanction disciplinaire ; que le droit interne n'est contraire ni aux principes fondamentaux résultant de la déclaration des droits de l'homme et de la constitution ni à la Convention européenne des droits de l'homme, dès lors que les atteintes au droit de propriété causés par le fonctionnement des ACCA sont justifiées par des considérations d'intérêt public tenant à l'entretien et à la mise en valeur des espaces réservés à la chasse ; que, par ailleurs, à la suite de l'arrêt CHASSAGNOU de la Cour européenne des droits de l'Homme, l'article L. 422-10 du code de l'environnement a été modifié pour instaurer un droit d'objection à la chasse ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « concernant Messieurs Bruno et Jean-Michel Z..., ceux-ci s'estiment attributaires de l'universalité des droits immobiliers des époux C..., apporteurs à l'ACCA de PETIT BORNAND LES GLIERES de leurs droits de chasse, et donc au bénéfice de ce droit en application des dispositions de l'article L. 422-21 I 2° du code de l'environnement ; que toutefois, les parcelles dont ils sont aujourd'hui propriétaires, ont été acquises en 2001, d'une indivision Jean-Michel et Bruno Z... consécutive à une donation de Madame D... qui a elle-même été bénéficiaire de la cession des parcelles des époux C... ; que Messieurs Bruno et Jean-Michel Z... sont ayants droits de Madame D..., qui n'a jamais été au bénéfice du droit de chasse puisqu'il est constant que celui-ci avait été apporté à l'ACCA par les époux C... ; qu'ils ne peuvent donc prétendre tenir un quelconque droit de chasse de celle-ci ; que par ailleurs, à supposer même que Madame D... ait pu être encore au bénéfice des droits de chasse, il convient de constater que la donation des parcelles de Madame D... s'est faite à une indivision, ce droit ne pouvant bénéficier qu'à une seule personne ; qu'il y a donc lieu pour le Tribunal de dire que Messieurs Bruno et Jean-Michel Z... ne peuvent être assimilés à des propriétaires ou détenteurs de droit de chasse ayant fait apport de leur droit puisque celui-ci n'a jamais été en leur possession ; (…) que sur la demande de Monsieur David Y..., à titre principal l'Association Communale de Chasse Agréée de PETIT BORNAND LES GLIERES soulève l'irrecevabilité de la demande de Monsieur David Y..., dès lors qu'il est au bénéfice de la carte de membre de l'ACCA depuis le 25 septembre 2005 et n'a donc, selon elle, plus d'intérêt à agir ; qu'il est constant qu'il est effectivement membre de l'Association Communale de Chasse Agréée de PETIT BORNAND LES GLIERES depuis le 25 septembre 2005, dès lors qu'il a justifié, à cette époque, qu'il est domicilié sur ladite commune et remplit les conditions du 1° du I de l'article L. 422-21 du code de l'environnement ; que dans ces conditions sa demande tendant à être réintégré dans l'Association Communale de Chasse Agréée de PETIT BORNAND LES GLIERES est sans objet, puisqu'il en fait partie » ;

ALORS en premier lieu QUE toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens, que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international et que le vendeur transmet à l'acquéreur la propriété et les droits qu'il avait sur la chose vendue ; qu'en jugeant que les ayants-droits des apporteurs du droit de chasse à l'ACCA, qui sont contraints de subir une atteinte à leur droit de propriété, peuvent être privés par l'ACCA de leur qualité de membre de droit de cette dernière, pourtant prévue par l'article L. 422-21 du Code de l'environnement comme la contrepartie de l'atteinte au droit de propriété des apporteurs, la Cour d'appel a porté une atteinte disproportionnée audit droit de propriété, violant ainsi les articles 1 du 1er protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et 14 de la même Convention, ensemble l'article 2477 du Code civil et l'article L. 422-21 du Code de l'environnement.

ALORS en deuxième lieu QU'en jugeant par motifs éventuellement adoptés que la demande de Monsieur David Y... serait sans objet, celui-ci étant domicilié dans la commune de PETIT BORNAND LES GLIERES, sans répondre aux conclusions de Monsieur David Y... qui exposait, page 21 de ses écritures, qu'ayant déménagé de la commune de PETIT BORNAND LES GLIERES, il avait de nouveau intérêt à agir pour contester la décision de l'ACCA, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en troisième lieu QUE l'indivision n'a pas la personnalité morale et que chaque indivisaire est propriétaire, à proportion de sa quote-part, de la parcelle indivise, et a donc la qualité de propriétaire au sens de l'article L. 422-21 du Code de l'environnement ; qu'en jugeant par motifs éventuellement adoptés, pour débouter les consorts Z... de leurs demandes, que ceux-ci tenaient leur droit d'une indivision et que le droit de chasse aurait bénéficié à l'indivision et non à chacun de ses membres, la Cour d'appel a violé l'article L. 422-21 du Code de l'environnement, ensemble les articles 815 et suivants du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-11333
Date de la décision : 09/12/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

CHASSE - Associations communales et intercommunales de chasse agréées - Membres - Propriétaire de droit de chasse ayant fait apport de ses droits - Ayant cause à titre particulier - Exclusion

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Premier Protocole additionnel - Article 1er - Protection de la propriété - Violation - Défaut - Cas - Refus de la qualité de membre de droit d'une association communale de chasse agréée à l'ayant cause à titre particulier d'un propriétaire, titulaire d'un droit de chasse qui en a fait l'apport à l'association

L'article L. 422-21-I du code de l'environnement énumère de façon limitative la liste des personnes pouvant obtenir la carte de membre d'une association communale de chasse agréée (ACCA) ; l'ayant cause à titre particulier d'un propriétaire, titulaire d'un droit de chasse, qui en a fait l'apport à l'association n'entre pas dans cette énumération et ne peut se voir céder le droit d'en être membre ; l'atteinte au droit de propriété qui en résulte, justifiée par des considérations d'intérêt public, n'est pas contraire à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni à l'article 1 du premier Protocole additionnel de cette Convention. Dès lors ne viole aucun de ces textes, la cour d'appel qui pour rejeter la demande formée par des propriétaires de parcelles tendant à se voir attribuer la qualité de membres de droit d'une ACCA, relève que le droit de chasse, dont étaient titulaires les précédents propriétaires, avait été apporté par ceux-ci à l'association


Références :

article L. 422-21-I du code de l'environnement

article 1 du premier Protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 25 novembre 2008

Sur le caractère limitatif de la liste de l'article L. 422-21-I du code de l'environnement énumérant les personnes pouvant obtenir la carte de membre d'une association communale de chasse agréée, à rapprocher : 3e Civ., 16 février 2000, pourvoi n° 98-14444, Bull. 2000, III, n° 38 (cassation) ;3e Civ., 28 septembre 2005, pourvoi n° 04-17014, Bull. 2005, III, n° 178 (cassation). Sur la conformité à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales des dispositions légales relatives aux associations communales de chasse agréées, cf. : CEDH, 6 décembre 2007, B... c. France, requête n° 25708/03 et V... c. France, requête n° 25719/03 ;CE, 16 juin 2008, n° 296632, publié au Recueil Lebon


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 09 déc. 2009, pourvoi n°09-11333, Bull. civ. 2009, III, n° 274
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 274

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Gariazzo (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Monge
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:09.11333
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