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18/11/2009 | FRANCE | N°08-19355

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 18 novembre 2009, 08-19355


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Colmar, 31 janvier 2008) que la société Bilfinger, Berger, Freiburg Gmbh (société Bilfinger) chargée en sous traitance de la réalisation de certains travaux de gros oeuvre d'un hôpital, a confié à la société Remax structures(Remax), selon bon de commande du 3 juin 2003 et avenant du 23 octobre suivant, la préfabrication de divers éléments ; qu'invoquant le non respect des dispositions de l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous traitance, la sociétÃ

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Colmar, 31 janvier 2008) que la société Bilfinger, Berger, Freiburg Gmbh (société Bilfinger) chargée en sous traitance de la réalisation de certains travaux de gros oeuvre d'un hôpital, a confié à la société Remax structures(Remax), selon bon de commande du 3 juin 2003 et avenant du 23 octobre suivant, la préfabrication de divers éléments ; qu'invoquant le non respect des dispositions de l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous traitance, la société Remax a fait assigner la société Bilfinger en nullité du contrat et de son avenant et en paiement du coût des travaux réalisés ; que la société Bilfinger a contesté l'existence d'un lien de sous-traitance et demandé le paiement de diverses sommes au titre de malfaçons affectant les ouvrages et de préjudice commercial ;

Sur le premier moyen :
Attendu que la société Bilfinger fait grief à l'arrêt de constater la nullité du contrat de sous traitance et de son avenant, alors, selon le moyen :
1°/ que dans ses conclusions d'appel la société Bilfinger se prévalait expressément d'un arrêt de la cour de cassation du 11 mai 2005 ayant censuré l'arrêt d'une cour d'appel qui avait déduit l'existence d'un contrat d'entreprise, en l'occurrence un contrat de sous-traitance, du seul fait qu'une société avait fourni, à la demande de son cocontractant, un travail conforme aux exigences du marché et soutenait qu'il ne suffisait pas de constater que les éléments préfabriqués fournis par la société Remax structures étaient spécifiques au chantier du nouvel hôpital civil de Strasbourg pour revendiquer l'existence d'un contrat d'entreprise, plusieurs éléments du dossier excluant au contraire cette qualification ; qu'en affirmant dés lors qu' "il n'est pas discuté par les parties que c'est la fourniture d'un travail spécifique qui permet d'établir l'existence d'un contrat de sous traitance", la cour d'appel a dénaturé ces conclusions et violé l'article 4 du code de procédure civile;
2°/ que le seul fait pour une société de fournir à une autre société, et à sa demande, un travail spécifique conforme aux exigences du marché de travaux conclu par elle, ne suffit pas à caractériser l'existence d'un contrat d'entreprise ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, la société Bilfinger se référait expressément à cette jurisprudence et soutenait qu'il ne suffisait pas de constater que les éléments préfabriqués fournis par la société Remax structures étaient spécifiques au chantier du nouvel hôpital civil de Strasbourg pour caractériser l'existence d'un contrat d'entreprise, les éléments du dossier excluant au contraire cette qualification ; qu'elle faisait ainsi valoir qu'il résultait des documents contractuels qu'au moment de la négociation et de la signature des contrats litigieux des 3 juin et 23 octobre 2003, ayant pour objet la "fabrication et fourniture d'éléments préfabriqués, franco chantier, non déchargés", les parties avaient d'un commun accord entendu conclure entre elles un contrat de vente, sans nulle intervention de la société Remax structures sur le chantier de construction du nouvel hôpital civil de Strasbourg pour le déchargement, l'installation ou le montage des éléments livrés ; qu'elle sollicitait qu'il soit procédé à la comparaison des contrats litigieux à ceux, similaires, concomitamment conclus par la société Remax avec d'autres entrepreneurs et dont celle-ci ne contestait pas la qualification de contrats de fourniture, notamment les contrats conclus le 15 avril 2003 avec la société Cari et le 23 janvier 2002 avec la société Imbau, portant eux aussi sur des pièces préfabriquées devant être adaptées aux exigences spécifiques de chaque marché de travaux et pour l'exécution desquels le mécanisme de production de la société Remax structures était identique ; que dés lors, en se fondant sur la seule spécificité du travail fourni par la société Remax structures pour dire caractérisée l'existence d'un contrat de sous-traitance entre les parties, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des documents contractuels que les parties avaient entendu fonder leurs relations sur un contrat de vente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1710 et 1787 du code civil, 1er, 14 et 15 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ;
Mais attendu que saisie de conclusions de la société Bilfinger ayant soutenu que la question était de déterminer, au sens de la jurisprudence existante en la matière, si la livraison des produits préfabriqués avait pu intervenir dans le cadre d'une production courante ou standardisée ou s'il avait fallu adapter l'appareil de production, et ayant constaté que l'offre et la commande d'éléments préfabriqués prévoyaient la prestation et le coût "Bureau d'études" incluant les plans d'ensemble des diverses façades, coupes et détails nécessaires à la fabrication, les listes des panneaux préfabriqués, les plans de fabrication de chaque type de pièces, les notes de calcul nécessaires à l'établissement des plans, la cour d'appel, qui en a souverainement déduit que la multiplicité des données à prendre en compte pour établir les notes de calcul et les plans de fabrication constituaient un travail spécifique nécessitant une adaptation constante aux exigences des plans de fabrication conçus pour la seule exécution des éléments destinés au chantier et qui, sans dénaturation et sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu retenir que le contrat liant les parties était un contrat de sous-traitance, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Bilfinger fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande reconventionnelle tendant à voir condamner la société Remax structures à lui payer la somme de 100 201,19 euros au titre du préjudice contractuel subi du fait de la rupture unilatérale du contrat, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir, alors selon le moyen :
1°/ que par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir du chef du dispositif constatant la nullité du contrat de sous-traitance passé le 3 juin 2003 et de son avenant du 23 octobre 2003 entre la société Bilfinger Berger et la société Remax structures, entraînera, par voie de conséquence, la cassation des dispositions déboutant la société Bilfinger Berger de sa demande en réparation du préjudice causé par la rupture abusive du contrat imputable à la société Remax structures, qui se trouvent dans sa dépendance nécessaire ;
2°/ que la nullité du contrat de sous-traitance pour manquement aux obligations de garanties édictées par l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975, simple nullité relative, ne faisait pas obstacle à ce que l'entrepreneur principal puisse réclamer au sous-traité l'indemnisation du préjudice causé par l'inexécution du contrat ; que dès lors, en refusant à la société Bilfinger le droit de demander réparation du préjudice subi du fait de la brusque rupture par le sous-traité du contrat en cours d'exécution, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
3°/ que le sous-traitant, qui n'a pas été agréé, ne peut à la fois se prévaloir du contrat de sous-traitance pour obtenir le paiement des travaux qu'il a exécutés et le rejeter pour échapper à ses obligations contractuelles ; qu'en l'espèce, pour débouter la société de sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 100 201,19 euros au titre du préjudice subi du fait de la rupture unilatérale du contrat par le sous-traitant, la cour d'appel a retenu que la nullité du contrat passé entre les parties, qui a un effet rétroactif, faisait obstacle à une telle revendication ; que, cependant, elle a admis le principe d'un droit du sous-traitant à obtenir le paiement des travaux qu'il avait exécutés et désigné un expert afin de vérifier les décomptes de travaux qu'il produisait aux débats ; qu'ainsi, en refusant à la société Bilfinger Berger, en vertu de la nullité du contrat, le droit de se prévaloir des infractions de la société Remax à ses obligations contractuelles, tout en accueillant, en son principe, la demande de cette dernière en paiement des travaux réalisés en exécution du contrat ultérieurement déclaré nul, la cour d'appel a violé l'article 3, alinéa 2, de la loi du 31 décembre 1975, ensemble l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que le premier moyen étant rejeté, le grief invoqué dans la première branche est devenu sans portée ;
Attendu, d'autre part, que le sous-traitant étant fondé à refuser de poursuivre l'exécution d'un contrat nul, la cour d'appel a exactement retenu que la nullité rétroactive du sous-traité interdisait à l'entrepreneur principal de revendiquer un préjudice du fait de la rupture unilatérale du contrat et qu'en conséquence de cette nullité, le sous-traitant était en droit de solliciter le paiement de la contre valeur des travaux qu'il avait réalisés ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bilfinger Berger Freiburg Gmbh aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Bilfinger Berger Freiburg Gmbh à payer à la société Remax structures la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Bilfinger Berger Freiburg Gmbh ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseil pour la société Bilfinger Berger Freiburg Gmbh.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir constaté la nullité du contrat de sous-traitance passé le 3 juin 2003 et de son avenant du 23 octobre 2003 entre la Société BILFINGER BERGER et la Société REMAX STRUCTURES ;
AUX MOTIFS QUE, sur la qualification du contrat, les relations contractuelles entre les parties sont définies par la commande de la Société BILFINGER BERGER datée du 3 juin 2003 basée sur l'offre de prix n° 03.039.4/04/2003 du 16 avril 2003 de la Société REMAX STRUCTURES dans sa version négociée le 23 avril 2003 jointe en annexe à la commande, ainsi que par un avenant n° 1 à cette commande, daté du 23 octobre 2003, basé sur la commande initiale et l'offre de prix de la Société REMAX du 3 septembre 2003 et par la lettre du 3 octobre 2003 de celle-ci rappelant les conditions de fabrications des matériaux commandés (allèges béton) ; que la commande initiale comme son avenant indiquent comme objet : « fabrication et fourniture d'éléments préfabriqués, franco chantier, non déchargés », cette indication formelle n'étant toutefois pas suffisante pour affirmer que les parties sont liées par un contrat de vente, et non par un contrat de sous traitance comme le soutient la Société REMAX ; qu'il n'est pas discuté par les parties que c'est la fourniture d'un travail spécifique qui permet d'établir l'existence d'un contrat de sous-traitance ; que cette spécificité peut s'attacher à la fabrication des matériaux fournis pour un chantier déterminé, comme à la mise en oeuvre sur ce chantier de matériaux non spécifiques ; qu'en l'espèce, la Société REMAX n'étant pas intervenue sur le chantier du nouvel Hôpital Civil pour installer ou participer à l'installation des éléments qu'elle a fabriqués et fournis sur la commande de la Société BILFINGER BERGER, il convient de vérifier si la fabrication de ces éléments répond – ou non - au critère de spécificité dégagé par la jurisprudence ; qu'il ressort des documents contractuels sus-rappelés que l'offre et la commande d'éléments préfabriqués (panneaux et armatures) incluaient la prestation et le coût « bureau d'études », incluant dans l'offre de la Société REMAX, outre les données à fournir par le donneur d'ordre BILFINGER BERGER, les travaux à la charge de la demanderesse ainsi définis : « Le BET de REMAX STRUCTURES établira : - les plans d'ensemble (élévations) des diverses façades, - coupes et détails nécessaires à la fabrication, - les listes des panneaux préfabriqués, - les plans de fabrication (coffrage et ferraillage) de chaque type de pièces préfabriquées, - les notes de calcul nécessaires à l'établissement des plans précités » ; que la commande de la Société BILFINGER BERGER retenait sous le poste « Bureau d'études » : « Les plans de fabrication du Bâtiment T1, de coffrage et ferraillage de chaque type de pièces préfabriquées seront fournies par REMAX à partir des documents et informations listés dans la télécopie REMAX STRUCTURES du 17 mai 2003 fournis par le donneur d'ordre. Bâtiment T2 : Fourniture des plans de coffrage et de ferraillage… à partir des mêmes données que pour le bâtiment T1 » ; que la prestation de bureau d'études réalisée par la Société REMAX STRUCTURES était ainsi, non pas « limitée » comme l'indiquent les premiers juges, mais étendue à l'élaboration des plans de coffrage et de ferraillage nécessaires à la fabrication de chaque élément commandé et ce, en fonction précisément de multiples données spécifiques au chantier du nouvel Hôpital Civil de STRASBOURG fournies par « l'impressionnante liste de documents réclamés par REMAX à BILFINGER BERGER par sa télécopie du 17 mai 2003 », ainsi que relevé par le jugement entrepris qui énumère exactement les pièces réclamées par la demanderesse ; que la multiplicité des données à prendre en compte pour permettre à la Société REMAX d'établir les notes de calcul et les plans de fabrication de chaque type de pièces, constitue ainsi un élément en faveur de la spécificité du travail fourni par la demanderesse, et non pour démontrer que celle-ci était étrangère à l'ensemble des travaux d'études préalable à la fabrication ; que l'importance des calculs et plans de fabrication élaborés par le bureau d'études de REMAX était en effet déterminante en ce qu'elle portait, notamment en fonction des plans d'ensemble fournis par l'entreprise BILFINGER BERGER, sur les dimensions, l'épaisseur, la géométrie, les formes, des éléments que la demanderesse devait fabriquer, toute modification apportée aux plans d'ensemble conduisant à une modification des plans de fabrication ainsi qu'il ressort des pièces annexes produites aux débats par l'appelante ; que c'est donc à tort que les premiers juges ont considéré que les pièces à fournir par la Société REMAX « ne sortaient pas du cadre ordinaire au standard de sa fabrication », pour en déduire que le travail fourni était dépourvu d'une « vraie spécificité » ; qu'à cet égard, le coût de la prestation « bureau d'études » par rapport au prix de l'ensemble du marché est sans emport sur l'appréciation de la spécificité du travail fourni, compte tenu de l'incidence de cette prestation sur l'ensemble de la fabrication des éléments destinés au chantier du nouvel Hôpital Civil, de même qu'est sans incidence sur cette appréciation la capacité de la Société REMAX, relevée par le tribunal, « de fournir les pièces commandées en faisant appel à ses moyens de production actuels », alors que cette capacité impliquait non une production en série mais une adaptation constante de l'outil de travail aux exigences précises et souvent modifiées définies par les plans de fabrication qui ont été conçus par REMAX pour la seule exécution des éléments préfabriqués destinés au chantier susvisé ; qu'il résulte de ce qui précède que le contrat liant les parties ne peut être qualifié de contrat de vente, mais présente bien les caractères d'un contrat d'entreprise et, partant, d'un contrat de sous-traitance auquel les dispositions de la loi du 31 décembre 1975 relatives à la sous-traitance sont applicables ; Sur la nullité du contrat de sous-traitance : qu'il résulte des dispositions combinées des articles 6 dernier alinéa, 14 et 15 de la loi du 31 décembre 1975, que le sous-traité est nul en l'absence de cautionnement obtenu lors de la conclusion du contrat par le sous traitant qui confie à un autre sous-traitant l'exécution d'une partie du marché dont il est chargé ; que la Société BILFINGER BERGER, qui conteste la qualification de contrat de sous-traitance données aux rapports contractuels qui la lient à la Société REMAX, ne discute pas les conséquences attachées par la loi du 31 décembre 1975, qui est d'ordre public, à cette qualification et notamment, en l'absence des garanties principales prévues par l'article 14 susvisé, la nullité dans le cas d'espèce du contrat passé avec la Société REMAX ; que, dès lors, il y a lieu de constater la nullité du contrat de sous-traitance passé le 3 juin 2003 et de son avenant du 23 octobre 2003 ; qu'en conséquence de cette nullité, la Société REMAX réclame, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et de l'enrichissement sans cause, la contre-valeur des travaux qu'elle a exécutés et soumet à la Cour, comme devant les premiers juges, des décomptes qu'elle a établis, s'élevant à 797.731,85 euros TTC pour le bâtiment T1 et à 152.361,91 euros TTC pour le bâtiment T2 ; que la Société BILFINGER BERGER conteste ces décomptes fixés unilatéralement par la demanderesse, observant qu'ils sont sans rapport avec les prix fixés du contrat annulé ; que, de fait, les décomptes produits par la Société REMAX ne permettent pas de vérifier à quelles prestations effectivement réalisées ils correspondent, ni si les prestations réalisées sont facturées à un juste coût ; que la demande d'expertise de la Société BILFINGER BERGER, à laquelle la Société REMAX ne s'oppose pas, est donc justifiée ;
1) ALORS, D'UNE PART, QUE, dans ses conclusions d'appel, la Société BILFINGER BERGER se prévalait expressément d'un arrêt de la Cour de cassation du 11 mai 2005 (Cass. 3ème Civ. B. n° 102, p. 95), ayant censuré l'arrêt d'une Cour d'appel qui avait déduit l'existence d'un contrat d'entreprise, en l'occurrence d'un contrat de sous-traitance, du seul fait qu'une société avait fourni, à la demande de son cocontractant, un travail spécifique conforme aux exigences du marché et soutenait qu'il ne suffisait pas de constater que les éléments préfabriqués fournis par la Société REMAX STRUCTURES étaient spécifiques au chantier du nouvel hôpital civil de STRASBOURG pour revendiquer l'existence d'un contrat d'entreprise, plusieurs éléments du dossier excluant au contraire cette qualification ; qu'en affirmant dès lors qu'« il n'est pas discuté par les parties que c'est la fourniture d'un travail spécifique qui permet d'établir l'existence d'un contrat de sous traitance », la Cour d'appel a dénaturé ces conclusions et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2) ALORS, D'AUTRE PART, QUE le seul fait pour une société de fournir à une autre société, et à sa demande, un travail spécifique conforme aux exigences du marché de travaux conclu par elle, ne suffit pas à caractériser l'existence d'un contrat d'entreprise ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, la Société BILFINGER BERGER se référait expressément à cette jurisprudence et soutenait qu'il ne suffisait pas de constater que les éléments préfabriqués fournis par la Société REMAX STRUCTURES étaient spécifiques au chantier du nouvel hôpital civil de STRASBOURG pour caractériser l'existence d'un contrat d'entreprise, les éléments du dossier excluant au contraire cette qualification ; qu'elle faisait ainsi valoir qu'il résultait des documents contractuels qu'au moment de la négociation et de la signature des contrats litigieux des 3 juin et 23 octobre 2003, ayant pour objet la « fabrication et fourniture d'éléments préfabriqués, franco chantier, non déchargés », les parties avaient d'un commun accord entendu conclure entre elles un contrat de vente, sans nulle intervention de la Société REMAX STRUCTURES sur le chantier de construction du nouvel hôpital civil de STRASBOURG pour le déchargement, l'installation ou le montage des éléments livrés ; qu'elle sollicitait qu'il soit procéder à la comparaison des contrats litigieux à ceux, similaires, concomitamment conclus par la Société REMAX avec d'autres entrepreneurs et dont celle-ci ne contestait pas la qualification de contrats de fourniture, notamment les contrats conclus le 15 avril 2003 avec la Société CARI et le 23 janvier 2002 avec la Société IMBAU, portant eux aussi sur des pièces préfabriquées devant être adaptées aux exigences spécifiques de chaque marché de travaux et pour l'exécution desquels le mécanisme de production de la Société REMAX STRUCTURES était identique ; que dès lors, en se fondant sur la seule spécificité du travail fourni par la Société REMAX STRUCTURES pour dire caractérisée l'existence d'un contrat de sous-traitance entre les parties, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des documents contractuels que les parties avaient entendu fonder leurs relations sur un contrat de vente, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1710 et 1787 du Code civil, 1er, 14 et 15 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous traitance.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif sur ce point, d'avoir débouté la Société BILFINGER BERGER de sa demande reconventionnelle tendant à voir condamner la Société REMAX STRUCTURES à lui payer la somme de 100.201,19 au titre du préjudice contractuel subi du fait de la rupture unilatérale du contrat, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;
AUX MOTIFS QUE la Société BILFINGER BERGER ne peut utilement faire valoir un préjudice contractuel du fait de la rupture unilatérale du contrat qu'elle impute à la Société REMAX, dès lors que la nullité du contrat passé entre les parties, qui a un effet rétroactif, fait obstacle à une telle revendication ; qu'elle ne peut non plus demander, sur le fondement quasi délictuel, réparation du préjudice commercial et moral qu'elle affirme avoir subi au motif que la Société REMAX aurait usé d'un procédé déloyal en décidant de se dissoudre amiablement afin de ne plus pouvoir être en mesure d'honorer son contrat, alors que la fin des relations contractuelles entre les parties et le préjudice commercial et moral invoqué par la défenderesse qui en résulterait, découle de la méconnaissance par la défenderesse de son obligation de cautionnement, laquelle est sanctionnée par la nullité du contrat qui les liait ;
1) ALORS QUE, par application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation à intervenir du chef du dispositif constatant la nullité du contrat de sous-traitance passé le 3 juin 2003 et de son avenant du 23 octobre 2003 entre la Société BILFINGER BERGER et la Société REMAX STRUCTURES, entraînera, par voie de conséquence, la cassation des dispositions déboutant la Société BILFINGER BERGER de sa demande en réparation du préjudice causé par la rupture abusive du contrat imputable à la Société REMAX STRUCTURES, qui se trouvent dans sa dépendance nécessaire ;
2) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la nullité du contrat de sous-traitance pour manquement aux obligations de garanties édictées par l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975, simple nullité relative, ne faisait pas obstacle à ce que l'entrepreneur principal puisse réclamer au sous-traité l'indemnisation du préjudice causé par l'inexécution du contrat ; que dès lors, en refusant à l'exposante le droit de demander réparation du préjudice subi du fait de la brusque rupture par le sous-traité du contrat en cours d'exécution, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;
3) ALORS, EN OUTRE, QUE le sous-traitant, qui n'a pas été agréé, ne peut à la fois se prévaloir du contrat de sous-traitance pour obtenir le paiement des travaux qu'il a exécutés et le rejeter pour échapper à ses obligations contractuelles ; qu'en l'espèce, pour débouter l'exposante de sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 100.201,19 au titre du préjudice subi du fait de la rupture unilatérale du contrat par le sous-traitant, la Cour d'appel a retenu que la nullité du contrat passé entre les parties, qui a un effet rétroactif, faisait obstacle à une telle revendication ; que, cependant, elle a admis le principe d'un droit du sous-traitant à obtenir le paiement des travaux qu'il avait exécutés et désigné un expert afin de vérifier les décomptes de travaux qu'il produisait aux débats ; qu'ainsi, en refusant à la Société BILFINGER BERGER, en vertu de la nullité du contrat, le droit de se prévaloir des infractions de la Société REMAX à ses obligations contractuelles, tout accueillant, en son principe, la demande de cette dernière en paiement des travaux réalisés en exécution du contrat ultérieurement déclaré nul, la Cour d'appel a violé l'article 3, alinéa 2, de la loi du 31 décembre 1975, ensemble l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-19355
Date de la décision : 18/11/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Sous-traitant - Contrat de sous-traitance - Nullité - Effets - Détermination - Portée

CONTRAT D'ENTREPRISE - Sous-traitant - Rapports avec l'entrepreneur principal - Coût des travaux - Paiement - Nullité du contrat - Effets - Détermination

Le sous-traitant étant bien fondé à refuser de poursuivre l'exécution d'un contrat nul pour non-respect des dispositions légales, l'entrepreneur principal ne peut invoquer un préjudice résultant de ce refus et doit payer au sous-traitant le coût des travaux qu'il a réalisés


Références :

articles 3 et 14 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 31 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 18 nov. 2009, pourvoi n°08-19355, Bull. civ. 2009, III, n° 252
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 252

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Badie
Rapporteur ?: M. Mas
Avocat(s) : SCP Delvolvé, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.19355
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