La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/2009 | FRANCE | N°09-82505

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 octobre 2009, 09-82505


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Serge-François,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 4e section, en date du 19 mars 2009, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de défaut de permis de conduire, obtention indue de document administratif et fourniture d'une identité imaginaire, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 septembre 2009 où étaient pr

ésents : M. Pelletier président, M. Beauvais conseiller rapporteur, Mmes Anzani, ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Serge-François,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 4e section, en date du 19 mars 2009, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de défaut de permis de conduire, obtention indue de document administratif et fourniture d'une identité imaginaire, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 septembre 2009 où étaient présents : M. Pelletier président, M. Beauvais conseiller rapporteur, Mmes Anzani, Palisse, Guirimand, MM. Guérin, Straehli, Finidori, Monfort, Castel, Mme Ferrari conseillers de la chambre, Mme Degorce conseiller référendaire ;

Avocat général : Mme Magliano ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
Sur le rapport de M. le conseiller BEAUVAIS, les observations de la société civile professionnelle BARADUC et DUHAMEL, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MAGLIANO ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 9 juin 2009, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 41, 63-3, 174 et 802 du code de procédure pénale, 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motif ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure ;
"aux motifs que, nonobstant l'absence de dispositions légales auxquelles ne peut être assimilée une circulaire, le pouvoir de contrôle du procureur de la République sur le placement en garde à vue implique que soit porté à sa connaissance tout incident survenu dans son déroulement ; que le manquement de l'officier de police judiciaire à ce devoir d'information n'entache de nullité les actes coercitifs effectués sous le régime de la garde à vue qu'autant qu'il est fait grief à la personne retenue ; qu'en l'espèce, le médecin de SOS Médecins requis par les services de police délivrait à 21 heures 50, le 3 octobre 2008, un certificat médical d'incompatibilité avec la garde à vue dans les locaux de la police de l'état de santé du requérant à qui il donnait sur place deux cachets de Di Antalvic (D 15, D 16) ; que cependant les urgences médico-judiciaires de Paris, requises par les services de police le même jour dès 21 heures 55, donnaient un avis contraire après examen le 4 octobre 2008 à 2 heures 25 (D 24) ; que présenté le 4 octobre 2008 aux urgences de l'hôpital Bichat à 13 heures 10, X se disant Serge François X..., qui se plaignait de maux de ventre, n'était pas admis et remis aussitôt aux fonctionnaires de police ; que l'avocat avec qui il s'entretenait le 3 octobre 2008 de 22 heures 35 à 23 heures, soit immédiatement après la délivrance du premier certificat médical, ne présentait aucune observation ; que le procureur de la République de Paris, informé des faits (D 38), ordonnait la prolongation de la garde à vue le 4 octobre 2008 (D 40) ; qu'enfin, entendu le 4 octobre 2008 à 3 heures, après examen aux urgences médico-judiciaires de Paris, puis le 5 octobre suivant à 9 heures 05, le requérant, qui signait les procès-verbaux, ne faisait état d'aucun problème de santé en garde à vue, pas plus que devant le juge d'instruction en première comparution le 6 octobre 2008 ; que le seul procès-verbal d'audition établi le 3 octobre à 22 heures 35, entre l'examen du premier médecin requis et celui des urgences médico-judiciaires, lequel portait exclusivement sur l'état civil, le domicile et les ressources du gardé à vue, qui déclarait souffrir de douleurs chroniques au ventre pour lesquelles il prenait un traitement quotidien pour les amibes (D 20), n'était pas de nature à lui faire grief ; que par conséquent, en l'absence d'atteinte à ses intérêts, il n'y a lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure ; qu'en tout état de cause, la nullité invoquée n'aurait affecté que les actes de nature coercitive intervenus après le 3 octobre 2008 à 21 heures 50 (D 15), soit les trois auditions de l'intéressé par les services de police, à l'exclusion de la consultation du système de traitement des infractions centralisées, du rapport d'identification dactyloscopique des empreintes, nécessairement recueillies à son arrivée au commissariat et faisant apparaître les infractions pour lesquelles il avait été signalé sous de multiples identités (D 27, D 28), la fouille de son véhicule Porsche pour laquelle sa présence n'était pas nécessaire et autres investigations dont la garde à vue n'était pas le support nécessaire, tous actes qui, conjugués avec les circonstances de son interpellation et les constatations faites lors de celle-ci, justifiaient sa mise en examen des chefs de conduite sans permis, obtention indue de documents administratifs, fourniture d'une identité imaginaire ;
"alors qu'une personne gardée à vue dont l'état de santé, constaté par un médecin, est incompatible avec la poursuite d'une telle mesure doit être immédiatement libérée et le procureur de la République aussitôt prévenu ; qu'à défaut, la poursuite de cette mesure privative de liberté, quelle que soit l'évolution de l'état de santé de l'intéressé, entraîne la nullité de l'ensemble des actes effectués au cours de la garde à vue après qu'a été constatée l'incompatibilité en cause, et des actes de la procédure subséquente dont la garde à vue est le support nécessaire ; qu'ainsi, en l'espèce, la constatation par le médecin de SOS Médecins requis par les policiers selon laquelle, le 3 octobre 2008 à 21 heures 45, l'état de santé de Serge-François X... était incompatible avec la garde à vue et un traitement anti-amibien devait lui être administré le soir même (D 16), devait entraîner immédiatement la fin de cette mesure ; que la nullité résultant du maintien en garde à vue, de surcroît sans avertir immédiatement le procureur, a affecté non seulement les actes ultérieurs qui ne pouvaient être effectués à un moment où Serge-François X... aurait dû être en liberté, notamment la saisie du véhicule et des documents qui s'y trouvaient ainsi que les mises sous scellés (D 54 et D 55), mais encore tous les actes effectués après l'avis négatif du médecin (D 17 et suivants), la procédure étant alors irrégulière" ;
Vu l'article 63-3 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que la poursuite de la garde à vue d'une personne dans des conditions qui sont, selon le constat médical, incompatibles avec son état de santé, porte nécessairement atteinte à ses intérêts ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Serge-François X... a été placé en garde à vue, le 3 octobre 2008 à 19h40 ; que le médecin, qui l'a examiné à 21h45, a constaté que son état de santé n'était pas compatible avec la garde à vue dans les locaux de police ; que Serge-François X... a été maintenu en garde à vue et qu'un second examen médical, pratiqué le lendemain à 2h25, a constaté la compatibilité entre son état de santé et la mesure dont il faisait l'objet ;
Attendu que, le demandeur a saisi la chambre de l'instruction d'une requête en annulation de l'ensemble des actes de procédure intervenus après qu'a été constatée, par le premier médecin, l'incompatibilité entre son état de santé et la poursuite de la garde à vue ;
Attendu que, pour rejeter cette requête, l'arrêt énonce que l'avocat avec lequel Serge-François X... s'est entretenu immédiatement après l'établissement du premier certificat médical, n'a formulé aucune observation et que le procureur de la République, "informé des faits" le 4 octobre 2008 à 19h20, a ordonné la prolongation de la garde à vue de l'intéressé ; que les juges relèvent que, ni devant les enquêteurs de police au cours de sa garde à vue, ni devant le juge d'instruction lors de son interrogatoire de première comparution, Serge-François X... ne s'est plaint de son état de santé ; qu'ils ajoutent que son audition intervenue entre les deux examens médicaux n'était pas de nature à lui faire grief, dès lors qu'elle ne concernait pas le fond de l'affaire ; qu'ils en déduisent qu'aucune atteinte n'a été portée aux intérêts de Serge-François X... ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 19 mars 2009, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept octobre deux mille neuf ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-82505
Date de la décision : 27/10/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Examen médical - Examen concluant à l'incompatibilité de la mesure avec l'état de santé du gardé à vue - Portée

DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Atteinte - Poursuite de la mesure dans des conditions incompatibles avec l'état de santé de la personne gardée à vue

Il résulte de l'article 63-3 du code de procédure pénale que la poursuite de la garde à vue d'une personne dans des conditions qui sont, selon le constat médical, incompatibles avec son état de santé, porte nécessairement atteinte à ses intérêts


Références :

article 63-3 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 19 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 oct. 2009, pourvoi n°09-82505, Bull. crim. criminel 2009, n° 176
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2009, n° 176

Composition du Tribunal
Président : M. Pelletier
Avocat général : Mme Magliano
Rapporteur ?: M. Beauvais
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:09.82505
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award