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14/10/2009 | FRANCE | N°08-14849

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 octobre 2009, 08-14849


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses deux branches :
Attendu que par arrêt du 12 février 2004, la cour d'appel de Salerne (Italie) a condamné la société française France éditions, à verser à la société italienne Arti Grafiche Boccia une certaine somme pour des travaux défectueux ; que par ordonnance du 20 mai 2005, le greffier en chef du tribunal de grande instance de Paris a déclaré exécutoire en France, l'arrêt de la cour d'appel de Salerne ;
Attendu que la société France éditions fait grie

f à l'arrêt attaqué (Paris, 28 février 2008) d'avoir rejeté son recours contre c...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses deux branches :
Attendu que par arrêt du 12 février 2004, la cour d'appel de Salerne (Italie) a condamné la société française France éditions, à verser à la société italienne Arti Grafiche Boccia une certaine somme pour des travaux défectueux ; que par ordonnance du 20 mai 2005, le greffier en chef du tribunal de grande instance de Paris a déclaré exécutoire en France, l'arrêt de la cour d'appel de Salerne ;
Attendu que la société France éditions fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 28 février 2008) d'avoir rejeté son recours contre cette ordonnance, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsqu'un jugement doit être notifié à une partie qui ne demeure pas dans l'Etat membre dans lequel il a été rendu, seules sont applicables les dispositions du règlement CE n° 1348/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale ; que, lorsqu'un jugement n'a pas été notifié conformément à ces dispositions, sa reconnaissance est manifestement contraire à l'ordre public dans l'Etat membre dans lequel elle est requise ; que dès lors, en jugeant que la reconnaissance d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Salerne (Italie) à l'encontre de la société de droit français France éditions, et qui n'avait été notifié qu'en Italie selon les règles du droit interne, n'était pas manifestement contraire à l'ordre public français, la cour d'appel a violé les articles 1 du règlement CE 1348/2000 du 29 mai 2000 et 34 du règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;
2°/ qu'en tout état de cause, l'ordre public français suppose que les décisions de justice soient notifiées aux parties elles mêmes avec indication des voies de recours ; que dès lors la reconnaissance d'un arrêt notifié au seul domicile élu chez un avocat étranger, sans indication des voies de recours, n'est pas conforme à l'ordre public français ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 677 678 et 680 du code de procédure civile et 34 du règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;
Mais attendu que l'ordre public procédural français dont le juge de l'exequatur doit assurer le respect n'exige pas, au cas où le défendeur a eu connaissance de l'instance étrangère, que la signification soit faite à partie et comporte l'indication des voies de recours ; qu'ayant constaté que la notification de la décision avait été faite selon le droit italien au domicile de l'avocat de la partie française, que cette notification faite au conseil de la partie qui la représente en justice ouvrait le délai de recours, la cour d'appel en a justement déduit qu'une telle notification n'était pas de nature à rendre la reconnaissance de la décision manifestement contraire à l'ordre public de l'Etat requis, en application tant de l'article 7 1 du règlement (CE) n° 1348/2000 du 29 mai 2000 que de l'article 34 1 du règlement (CE) du 22 décembre 2000 (Bruxelles I) ;
Que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société France éditions aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société France éditions et la condamne à payer à la société Arti Grafiche Boccia la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société France éditions.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par la société France Editions contre l'ordonnance ayant déclaré exécutoire en France l'arrêt rendu le 12 février 2004 par la cour d'appel de Salerne ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article 34 1) du règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 applicable en l'espèce une décision n'est pas reconnue si "la reconnaissance est manifestement contraire à l'ordre public de l'Etat membre requis' ; QUE France Editions soutient que ce serait le cas dès lors que l'arrêt de la cour d'appel de Salerne ne lui a pas été notifié de telle sorte qu'elle n'a pas été informée des recours possibles et des délais de ces recours ; Mais QU'il n'est pas contesté que la procédure italienne prévoit la notification de la décision au domicile élu de l'avocat de la partie adverse, sans indication des voies et délais de recours et que cette notification faite au conseil de la partie qui la représente en justice ouvre le délai de recours ; QU'en l'espèce cette notification a bien été faite le 28 octobre 2004 à domicile élu du conseil de la société France Editions ; QUE France Editions soutient vainement que cette notification serait nulle pour ne pas comporter le cachet de l'huissier de justice alors que ce cachet, certes mal lisible, existe bien avec la date et la signature de l'huissier de justice qui au surplus a attesté le 29 mars 2006 de la réalité de cette signification ; QUE la circonstance que la signification de l'arrêt n'ait pas été faite selon les modalités mêmes de la procédure française qui néanmoins prévoit la signification à avocat n'est pas de nature à rendre la reconnaissance de la décision manifestement contraire à l'ordre public français ; QUE France Editons n'identifie pas non plus en quoi cela serait contraire à l'article 6-1 de la CEDH dès lors qu'elle était représentée par un avocat et qu'il est constant que la signification de la décision a bien été faite au domicile élu de ce conseil ; QUE les autres conditions requises par le Règlement susvisé pour la reconnaissance des décisions italiennes en France étant réunies, notamment la production du certificat prévu par les articles 54 et 58, ce qui n'est pas contesté, il convient de rejeter le recours ;
1)ALORS QUE lorsqu'un jugement doit être notifié à une partie qui ne demeure pas dans l'Etat membre dans lequel il a été rendu, seules sont applicables les dispositions du règlement CE n° 1348/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale ; que, lorsqu'un jugement n'a pas été notifié conformément à ces dispositions, sa reconnaissance est manifestement contraire à l'ordre public dans l'Etat membre dans lequel elle est requise ; que dès lors, en jugeant que la reconnaissance d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Salerne (Italie) à l'encontre de la société de droit français France Editions, et qui n'avait été notifié qu'en Italie selon les règles du droit interne, n'était pas manifestement contraire à l'ordre public français, la cour d'appel a violé les articles 1 du règlement CE 1348/2000 du 29 mai 2000 et 34 du règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;
2) ALORS QU'en tout état de cause, l'ordre public français suppose que les décisions de justice soient notifiées aux parties elles mêmes avec indication des voies de recours ; que dès lors la reconnaissance d'un arrêt notifié au seul domicile élu chez un avocat étranger, sans indication des voies de recours, n'est pas conforme à l'ordre public français ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 677 678 et 680 du code de procédure civile et 34 du règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-14849
Date de la décision : 14/10/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONFLIT DE JURIDICTIONS - Effets internationaux des jugements - Reconnaissance ou exequatur - Conditions - Absence de contrariété à l'ordre public procédural français - Caractérisation - Cas

L'ordre public procédural français, dont le juge de l'exequatur doit assurer le respect, n'exige pas, au cas où le défendeur a eu connaissance de l'instance étrangère, que la signification de la décision rendue à l'étranger soit faite à partie et comporte l'indication des voies de recours. Dès lors, une cour d'appel qui constate que la notification d'une décision rendue par une cour d'appel italienne avait été faite selon le droit italien au domicile de l'avocat de la partie française et que cette notification faite au conseil de la partie, qui la représente en justice ouvre le délai de recours, en a justement déduit qu'une telle notification n'était pas de nature à rendre la reconnaissance de la décision manifestement contraire à l'ordre public de l'Etat requis, en application tant de l'article 7-1 du Règlement (CE) n° 1348/2000 du 29 mai 2000 que de l'article 34 -1 du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 (Bruxelles I)


Références :

Cour d'appel de Paris, 28 février 2008, 06/9296
article 34 -1 du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 relatif à la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (Bruxelles I)
article 7-1 du Règlement (CE) n° 1348/2000 du 29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 février 2008

A rapprocher :1re Civ., 29 novembre 1994, pourvoi n° 92-19648, Bull. 1994, I, n° 347 (rejet) ;1re Civ., 24 octobre 2000, pourvoi n° 98-20650, Bull. 2000, I, n° 261 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 oct. 2009, pourvoi n°08-14849, Bull. civ. 2009, I, n° 208
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, I, n° 208

Composition du Tribunal
Président : M. Bargue
Avocat général : M. Mellottée (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Monéger
Avocat(s) : SCP Bachellier et Potier de la Varde, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.14849
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