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23/09/2009 | FRANCE | N°07-40844

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2009, 07-40844


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 mars 2006), que Mmes Marguerite et Marie Thérèse X... ont engagé en 1991 M. Z... en qualité de "gardien non-appointé"; qu'en contrepartie d'avantages en nature dont principalement l'occupation d'un logement dans un pavillon et le versement d'une indemnité de chauffage, M. Z... était chargé de l'entretien du jardin et du potager ; que la Fondation des orphelins apprentis d'Auteuil ayant été instituée légataire universelle après le décès de

Marguerite X..., est devenue propriétaire notamment du pavillon en avril ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 mars 2006), que Mmes Marguerite et Marie Thérèse X... ont engagé en 1991 M. Z... en qualité de "gardien non-appointé"; qu'en contrepartie d'avantages en nature dont principalement l'occupation d'un logement dans un pavillon et le versement d'une indemnité de chauffage, M. Z... était chargé de l'entretien du jardin et du potager ; que la Fondation des orphelins apprentis d'Auteuil ayant été instituée légataire universelle après le décès de Marguerite X..., est devenue propriétaire notamment du pavillon en avril 2000 ; qu'elle a cédé le 22 mars 2002 l'ensemble immobilier dont faisait partie le pavillon à la société immobilière MB ; que cette dernière société l'ayant licencié pour motif économique le 1er juillet 2002, M. Z... a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à ce que son licenciement soit jugé sans cause réelle et sérieuse et à ce que lui soient allouées diverses sommes ;
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes tendant à la condamnation de la société immobilière MB à lui payer un rappel de salaire du 10 février 1998 au 1er juillet 2002 ainsi que diverses indemnités et dommages et intérêts ensuite de son licenciement, alors, selon le moyen :
1°/ que le décès de l'employeur n'emporte pas de plein droit rupture du contrat de travail, que la convention collective ne saurait exonérer les héritiers de l'employeur de procéder au licenciement du salarié ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9 et L. 122-14-5 du code du travail ;
2°/ que son contrat de travail n'ayant pas pris fin de plein droit au jour du décès de son employeur initial, il incombait à la cour d'appel de rechercher, comme l'y invitaient ses écritures d'appel, si son contrat de travail ne s'était pas trouvé transféré du fait de la cession de l'immeuble à l'entretien duquel il était employé, à la société immobilière MB, dès lors que celle-ci n'avait procédé à cette acquisition que dans le cadre de son activité de marchand de biens ; qu'à défaut d'avoir procédé à cette recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-12 du code du travail ;
3°/ subsidiairement, que la cour d'appel ne pouvait réfuter l'existence d'une relation de travail entre lui-même d'une part, la société immobilière MB d'autre part, sans s'expliquer sur le double aveu fait de cette relation par la société immobilière MB qui avait revendiqué auprès de l'intéressé sa qualité pour procéder à son licenciement dès lors qu'elle se trouvait subrogée dans les droits et obligations à son égard de la Fondation des orphelins apprentis d'Auteuil et avait procédé à son licenciement ; que faute de s'expliquer sur ces éléments, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code du travail ;
4°/ que si l'acte de vente du 22 mars 2002, fait peser sur le vendeur, la Fondation des orphelins apprentis d'Auteuil, le soin de mettre fin à son contrat de travail et ne subroge donc pas la société immobilière MB dans les droits et obligations nés de ce contrat de travail, il n'en demeure pas moins que cette société s'est prévalue de cette subrogation à l'égard de l'intéressé pour revendiquer la qualité de mettre fin à son contrat de travail ; que la cour d'appel, à laquelle il incombait dès lors de rechercher si cette revendication n'emportait pas engagement de la société immobilière MB d'assumer à son égard les conséquences pécuniaires de la rupture de son contrat de travail, a, en le déboutant de l'ensemble des demandes dirigées contre cette société, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu , d'abord, que l'article L. 122-12, alinéa 2, devenu L. 1224-1 du code du travail, n'est pas applicable en cas de seul transfert de la propriété d'un bien immobilier ;
Attendu, ensuite, que si la disposition de l'article 12 f de la convention collective des jardiniers et jardiniers gardiens de propriété stipulant que le contrat de travail prend fin du fait du décès de l'employeur n'exonère pas ses héritiers de l'obligation de notifier le licenciement du fait du décès, l'arrêt est légalement justifié dès lors que M. Z... n'a pas dirigé sa demande contre la fondation, légataire universelle de Marguerite X..., son dernier employeur ;
Attendu, enfin, d'une part, que la déclaration d'une partie ne peut être retenue contre elle comme constituant un aveu que si elle porte sur des points de fait et non sur des points de droit, et, d'autre part, que la cour d'appel a constaté qu'il n'était pas justifié qu'une relation de travail avait lié M. Z... à la société MB, après qu'elle eut acquis l'immeuble ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
Dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause la fondation des orphelins apprentis d'Auteuil ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991 : rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils, pour M. Z...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Z... de ses demandes tendant à la condamnation de la société Immobilière MB à lui payer un rappel de salaire du 10 février 1998 au 1er juillet 2002 ainsi que diverses indemnités et dommages et intérêts ensuite de son licenciement ;
Aux motifs qu'aux termes de l'article 12f de la Convention collective des jardiniers et jardiniers-gardiens de propriété privée, le décès de l'employeur met fin ipso facto au contrat de travail qui ne se poursuit pas automatiquement avec les héritiers ; qu'au sens de l'article L. 121-1 du Code du travail, le contrat de travail est celui par lequel une personne accepte de fournir une prestation de travail au profit d'une autre, en se plaçant dans un état de subordination juridique vis-à-vis de cette dernière, moyennant une rémunération ; qu'il appartient à celui qui s'en prévaut, en l'absence d'écrit, de rapporter la preuve de l'existence d'un tel contrat par tous moyens ; qu'il est constant qu'en 1991 Philippe Z... a été embauché en qualité de gardien par les consorts X... ; qu'aux termes du contrat manuscrit versé aux débats celui-ci était rémunéré sous la forme d'avantages en nature consistant en l'occupation d'un pavillon indépendant et l'attribution d'une indemnité de chauffage ; que l'employeur devait en outre prendre à sa charge une assurance à la Mutuelle agricole ainsi qu'une assurance contre les dommages occasionnés par l'incendie du pavillon ; qu'en contrepartie l'intimé devait procéder à l'entretien du jardin et du potager, la moitié de la récolte lui revenant ; que l'un des deux employeurs, Marie-Thérèse X... est décédée le 10 avril 1995 ; que sa succession a été recueillie par sa soeur Marguerite Marie X..., l'autre employeur elle-même décédée le 10 février 1998 ; qu'ainsi le contrat de travail a pris fin à cette date ; qu'aucun contrat écrit n'a été ultérieurement établi ; que si le nouveau propriétaire, la Fondation des orphelins apprentis d'Auteuil instituée légataire universelle par testament et envoyée en possession le 20 mai 2000, a consenti au maintien momentané de l'intimé dans les lieux, elle n'a jamais entendu conclure un nouveau contrat de travail avec celui-ci à la suite du décès de Marie X... ; qu'elle lui a fait savoir par courrier en date du 3 avril 2001 qu'elle ne l'avait jamais considéré comme un salarié et ne lui avait jamais donné de consignes relativement à l'entretien de la propriété ; qu'il résulte des énonciations de l'acte notarié en date du 22 mars 2002 établi à l'occasion de la cession de la propriété que la Fondation des orphelins apprentis d'Auteuil ne se reconnaissait pas l'employeur de l'intimé ; qu'il résulte enfin d'un courrier adressé par l'intimé dès le 25 mai 1999 au notaire chargé de la succession que celui-ci considérait bien qu'aucun contrat de travail n'avait été conclu postérieurement au décès de Marie X... ;
Alors, de première part, que le décès de l'employeur n'emporte pas de plein droit rupture du contrat de travail, que la convention collective ne saurait exonérer les héritiers de l'employeur de procéder au licenciement du salarié ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L 122-6, L 122-8, L 122-9 et L 122-14-5 du Code du travail ;
Alors, de deuxième part, que le contrat de travail de Monsieur Z... n'ayant pas pris fin de plein droit au jour du décès de son employeur initial, il incombait à la Cour d'appel de rechercher, comme l'y invitaient ses écritures d'appel, si son contrat de travail ne s'était pas trouvé transféré du fait de la cession de l'immeuble à l'entretien duquel il était employé, à la société Immobilière MB, dès lors que celle-ci n'avait procédé à cette acquisition que dans le cadre de son activité de marchand de biens ; qu'à défaut d'avoir procédé à cette recherche, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 122-12 du Code du travail ;
Alors, de troisième part, subsidiairement, que la Cour d'appel ne pouvait réfuter l'existence d'une relation de travail entre Monsieur Z... d'une part, la société Immobilière MB d'autre part, sans s'expliquer sur le double aveu fait de cette relation par la société Immobilière MB qui avait revendiqué auprès de Monsieur Z... sa qualité pour procéder à son licenciement dès lors qu'elle se trouvait subrogée dans les droits et obligations à son égard de la Fondation des orphelins apprentis d'Auteuil et avait procédé à son licenciement ; que faute de s'expliquer sur ces éléments, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L 121-1 du Code du travail ;
Alors, de quatrième part, que si l'acte de vente du 22 mars 2002, fait peser sur le vendeur, la Fondation des orphelins apprentis d'Auteuil, le soin de mettre fin au contrat de travail de Monsieur Z... et ne subroge donc pas la société Immobilière MB dans les droits et obligations nés de ce contrat de travail, il n'en demeure pas moins que cette société s'est prévalue de cette subrogation à l'égard de Monsieur Z... pour revendiquer la qualité de mettre fin à son contrat de travail ; que la Cour d'appel, à laquelle il incombait dès lors de rechercher si cette revendication n'emportait pas engagement de la société Immobilière MB d'assumer à l'égard de Monsieur Z... les conséquences pécuniaires de la rupture de son contrat de travail, a, en déboutant Monsieur Z... de l'ensemble des demandes dirigées contre cette société, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-40844
Date de la décision : 23/09/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Modification dans la situation juridique de l'employeur - Continuation du contrat de travail - Conditions - Transfert d'une entité économique autonome - Définition - Exclusion - Cas - Transfert de la propriété d'un bien immobilier

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Jardinerie - Convention nationale des jardiniers et jardiniers-gardiens de propriétés privées - Article 12 f - Décès de l'employeur - Fin du contrat de travail - Notification du licenciement par les héritiers - Nécessité PREUVE - Règles générales - Moyen de preuve - Aveu - Aveu extrajudiciaire - Définition - Exclusion - Aveu portant sur une question de droit - Portée CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Applications diverses - Décès de l'employeur d'un jardinier ou jardinier-gardien de propriétés privées - Portée

L'article L. 122-12, alinéa 2, devenu L. 1224-1 du code du travail, n'est pas applicable en cas de seul transfert de propriété d'un bien immobilier. Les dispositions de l'article 12 f de la convention collective nationale des jardiniers et jardiniers-gardiens de propriété privées stipulant que le contrat de travail prend fin du fait du décès de l'employeur n'exonèrent pas ses héritiers de l'obligation de notifier le licenciement du fait du décès. La déclaration d'une partie ne peut être retenue contre elle comme constituant un aveu que si elle porte sur des points de fait et non des points de droit. Il en résulte qu'est légalement justifiée la décision de la cour d'appel qui, bien qu'ayant relevé que le salarié jardinier-gardien, dont l'employeur était décédé, n'avait pas été licencié par le légataire universel héritier de son employeur décédé, a rejeté sa demande en paiement de sommes au titre d'un rappel de salaires, d'indemnités et de dommages-intérêts suite à son licenciement dès lors que cette demande n'était pas dirigé contre le légataire universel de l'employeur mais seulement contre l'acquéreur du bien immobilier avec lequel aucune relation de travail n'avait existé et que la circonstance que cet acquéreur ait diligenté une procédure de licenciement ne pouvait valoir aveu de l'existence d'un contrat de travail


Références :

convention collective nationale de travail concernant les jardiniers et jardiniers-gardiens de propriétés privées du 30 janvier 1986

Etendue par arrêté du 27 mai 1986 JORF 8 juin 1986

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 mars 2006

Sur l'aveu extrajudiciaire portant sur une question de droit comme ne pouvant pas être retenu contre son auteur, à rapprocher : 3e Civ., 7 avril 1994, pourvoi n° 92-17039, Bull. 1994, III, n° 82 (cassation partielle)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 sep. 2009, pourvoi n°07-40844, Bull. civ. 2009, V, n° 188
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 188

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Aldigé
Rapporteur ?: M. Ludet
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Roger et Sevaux, SCP Tiffreau

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.40844
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