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25/06/2009 | FRANCE | N°08-17912

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 25 juin 2009, 08-17912


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 5 octobre 2000, un tribunal correctionnel a déclaré M. X... coupable de violences volontaires commises le 31 octobre 2008 sur la personne de M. Y... ayant entraîné pour ce dernier une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ; qu'à la suite d'une première saisine de la commission d'indemnisation des victimes d'infraction (la CIVI) ayant conduit à l'organisation de deux expertises médicales remises en 2003 et en 2004 et à l'allocation d

e provisions, M. Y... a à nouveau saisi la CIVI le 24 janvier 2007 en...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 5 octobre 2000, un tribunal correctionnel a déclaré M. X... coupable de violences volontaires commises le 31 octobre 2008 sur la personne de M. Y... ayant entraîné pour ce dernier une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ; qu'à la suite d'une première saisine de la commission d'indemnisation des victimes d'infraction (la CIVI) ayant conduit à l'organisation de deux expertises médicales remises en 2003 et en 2004 et à l'allocation de provisions, M. Y... a à nouveau saisi la CIVI le 24 janvier 2007 en liquidation de ses préjudices ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de fixer à la somme de 75 131,48 euros, déduction faite des provisions, l'indemnisation de ses préjudices alors, selon le moyen, que l'évaluation du préjudice professionnel temporaire se calcule au regard de la perte de revenus professionnels imputable à l'accident, entre le jour de celui-ci et le jour de la consolidation ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel a calculé le préjudice professionnel temporaire de M. Y... sur la base de 325 jours, correspondant aux périodes d' incapacité totale de travail de celui-ci jusqu'à la date de la consolidation ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée par M. Y... s'il n'avait pas été dans l'incapacité de reprendre une activité professionnelle, en raison de son accident, entre le jour de celui-ci et la date de la consolidation du dommage, soit pendant une période de 1996 jours, ainsi qu'en attestait la notification des débours de la caisse, en date du 28 janvier 2005, faisant état du versement de 1996 jours d'indemnités journalières, et ce dont il résultait qu'il avait subi une perte de revenus professionnels pendant la totalité de cette période, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 du code civil et 706-3 du code de procédure pénale, ensemble au regard du principe de la réparation intégrale ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'apprécier la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel a retenu que le seul poste d'indemnisation du préjudice patrimonial temporaire portait sur la perte de gains pendant la période d'incapacité de travail ; que les deux périodes d'incapacité de travail retenues par les deux experts représentaient au total 325 jours ; que M. Y... n'était pas fondé à solliciter une réparation sur la base de 1996 jours comme il le prétendait en incluant toutes ses périodes d'arrêt de travail, du 31 octobre 1998 au 17 avril 2004 ; qu'il y avait lieu de s'en tenir aux périodes d'incapacité de travail fixées par les experts qui n'avaient pas été critiquées ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 706-9 du code de procédure pénale, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
Attendu que pour fixer à la somme de 75 131,48 euros l'indemnisation des préjudices subis par M. Y..., l'arrêt retient que le seul poste d'indemnisation des préjudices patrimoniaux porte sur la perte de gains pendant la période d'incapacité totale de travail ; que les parties s'accordent sur le salaire net mensuel de référence qui était de 1 016 euros par mois ; que la période à indemniser étant de 325 jours, la perte de salaires de M. Y... s'élève à 11 007 euros de laquelle il y a lieu de déduire les indemnités journalières perçues de la caisse dont le montant journalier est de 21,07 euros au vu du décompte du 28 janvier 2005 ; que M. Y... a donc perçu une indemnisation à hauteur de 6 847,75 euros, qu'il convient de déduire de sa perte de salaire, de sorte qu'il lui revient la somme de 4 159,25 euros de ce chef ; qu'est vainement discuté le montant de l'indemnité journalière versée par la caisse ; que c'est le montant de l'indemnité journalière brute incluant les deux contributions RDS et CSG qui doit servir de base de calcul à ce poste de préjudice ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le montant des indemnités journalières servies par la caisse, qui inclut la cotisation sociale généralisée et la cotisation pour le remboursement de la dette sociale, devait être imputé non sur le montant net du salaire mais sur un montant comprenant celui de ces deux prélèvements, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions à payer à M. Y... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour M. Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué de n'AVOIR fixé qu'à 75.131, 48 euros la somme que le Fonds de garantie des victimes d'infractions est tenu de verser à Monsieur Paul Y..., après déduction des provisions déjà perçues ;
AUX MOTIFS QUE « du fait de l'agression du 31 octobre 1998, Monsieur Y... a souffert d'une fracture avec arrachement de la tubérosité tibiale antérieure gauche avec désinsertion du ligament rotulien ; qu'aux termes de son rapport d'expertise, le docteur Z... conclut que la victime a subi : - une ITT du 31 octobre 1998 au 23 juin 1999, - la consolidation des blessures au 23 juin 1999, - une IPP de 12 %, - un prétium doloris de 3, 5 / 7, - un préjudice esthétique de 1/7, - une inaptitude à reprendre son activité antérieure de chauffeur-livreur ; qu'il résulte du rapport complémentaire déposé par le docteur A..., - une ITT du 18 mars 2003 au 16 juin 2003, - la consolidation des blessures au 17 avril 2004, - une IPP de 12 %, - un prétium doloris de 4/7, - un préjudice esthétique de 2/7, - la confirmation de l'inaptitude à la reprise de son ancienne activité ; que sur la base des rapports d'expertise et des dispositions de la loi du 21 décembre 2006, relatif aux recours des organismes payeurs, il convient de fixer le préjudice subi par Monsieur Y... de la façon suivante :SUR LES POSTES DE PREJUDICES PATRIMONIAUX : A) Temporaires : que le seul poste d'indemnisation porte sur la perte de gains pendant la période d'ITT ; que les parties s'accordent sur le salaire mensuel de référence qui était de 1 016 euros par mois ; que les deux périodes d'ITT retenues par les deux experts est bien, au total, de 325 jours de sorte que la perte de salaires de Monsieur Y... s'élève à 11 007 euros de laquelle il y a lieu de déduire les indemnités journalières qu'il a perçues de la CPAM de la Guadeloupe dont le montant journalier est de 21, 07 euros au vu du dernier document émanant dudit organisme en date du 28 janvier 2005 qu'il y a lieu de retenir ; que Monsieur Y... a donc perçu une indemnisation à hauteur de 6 847, 75 euros, qu'il convient de déduire de sa perte de salaire, de sorte qu'il lui revient un montant de 4 159, 25 euros, de ce chef ; que Monsieur Y... n'est pas fondé à solliciter une réparation sur la base de 1996 jours comme il le prétend en incluant toutes ses périodes d'arrêt de travail, soit du 31 octobre 1998 au 17 avril 2004 ; qu'il y a lieu de s'en tenir aux périodes d'ITT fixées par les experts qui n'ont pas été critiquées ; que de même, il discute vainement le montant de l'indemnité journalière versée par la CPAM ; que c'est bien le montant de l'indemnité journalière brute incluant les deux contributions RDS et CSG qui doit servir de base de calcul à ce poste de préjudice ; B) Permanents : que Monsieur Y... doit être indemnisé de l'incidence de l'agression sur sa vie professionnelle ayant été déclaré inapte par les experts à reprendre son activité de chauffeur-livreur, exercée avant les faits ; que compte tenu de son salaire de référence, de son départ à la retraite à l'âge de 65 ans, soit le 23 avril 2008 et de la capitalisation par la valeur du point de rente à l'âge de Monsieur Y... au jour de la consolidation, soit 58 ans, d'après le barème TD 88/90 à 4, 20 %, il y a lieu de fixer à 12 192 euros (salaire annuel de référence) x 5, 7374 soit 69.950, 38 euros, le montant auquel il peut prétendre ; que suivant le dernier état produit par la CPAM, il est réclamé la somme de 23 347, 17 euros qui doit être déduite des sommes lui revenant à ce titre ; qu'il lui sera donc alloué une somme de 46.603, 21 euros ; SUR LES POSTES DE PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX : A) Temporaires : - Déficit fonctionnel temporaire, 325 jours à 20 euros par jour :6500 euros ; - Souffrances endurées, 4/7 : 9000 euros ; - Préjudice esthétique, 2/7 : 3500 euros ; B) Permanents : - Déficit fonctionnel permanent, IPP 12 % soit : 16 800 euros ; - Préjudice d'agrément : 4500 euros ; que la somme revenant à Monsieur Y... en réparation de son préjudice s'élève à 91 062, 46 euros, de laquelle il convient de déduire les sommes provisionnelles déjà perçues, soit 15 930, 98 euros ; que le FONDS DE GARANTIE devra régler à Monsieur Y... une somme de 75 131,48 euros » ;
1°) ALORS QUE l'évaluation du préjudice professionnel temporaire se calcule au regard de la perte de revenus professionnels imputable à l'accident, entre le jour de celui-ci et le jour de la consolidation ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel a calculé le préjudice professionnel temporaire de Monsieur Y... sur la base de 325 jours, correspondant aux périodes d'ITT de celui-ci jusqu'à la date de la consolidation ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée par l'exposant (conclusions d'appel de Monsieur Y..., p. 4) s'il n'avait pas été dans l'incapacité de reprendre une activité professionnelle, en raison de son accident, entre le jour de celui-ci et la date de la consolidation du dommage, soit pendant une période de 1.996 jours, ainsi qu'en attestait la notification des débours de la CPAM, en date du 28 janvier 2005, faisant état du versement de 1.996 jours d'indemnités journalières, et ce dont il résultait qu'il avait subi une perte de revenus professionnels pendant la totalité de cette période, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 du code civil et 706-3 du code de procédure pénale, ensemble au regard du principe de la réparation intégrale ;
2°) ALORS QUE le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour la victime ; que par suite, le préjudice professionnel subi correspond au montant des sommes que la victime aurait dû percevoir, si elle n'avait pas cessé son activité ; qu'en l'espèce, pour évaluer l'indemnité réparant le préjudice professionnel temporaire subi par Monsieur Y..., la cour d'appel a déduit du salaire net qu'il aurait dû percevoir s'il n'avait pas cessé son activité professionnelle, les indemnités journalières brutes servies par la caisse de sécurité sociale ; qu'en statuant de la sorte, quand les indemnités journalières brutes comprennent des contributions sociales (CSG et CRDS), qui ont été perçues non pas par Monsieur Y... mais par l'URSSAF, de sorte qu'en les déduisant du montant du salaire net, la cour d'appel a violé le principe de réparation intégrale du préjudice, ensemble l'article 1382 du code civil et les articles 706-3 et 706-9 du code de procédure pénale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-17912
Date de la décision : 25/06/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

INDEMNISATION DES VICTIMES D'INFRACTION - Indemnité - Montant - Fixation - Montant des indemnités journalières - Imputation - Assiette - Détermination

SECURITE SOCIALE - Assurances sociales - Tiers responsable - Recours des tiers payeurs - Montant - Indemnités journalières - Imputation - Assiette

En application de l'article 706-9 du code de procédure pénale et du principe de la réparation intégrale, le montant des indemnités journalières servies par l'organisme social, qui inclut la cotisation sociale généralisée et la cotisation pour le remboursement de la dette sociale, doit être imputé non sur le montant net du salaire mais sur un montant comprenant celui de ces deux prélèvements


Références :

article 706-9 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 19 mars 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 25 jui. 2009, pourvoi n°08-17912, Bull. civ. 2009, II, n° 172
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, II, n° 172

Composition du Tribunal
Président : M. Gillet
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: M. Adida-Canac
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.17912
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