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16/06/2009 | FRANCE | N°08-15753

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 juin 2009, 08-15753


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 19 février 2008) et les productions, que le 21 avril 2006, la société Alsace véhicules industriels (la société AVI) a vendu à la société Etablissements Rocher (la société Rocher) un véhicule porteur, destiné, après transformation, à être livré comme véhicule dévidoir hors route, au service départemental d'incendie et de secours du Bas-Rhin (le SDIS), moyennant le prix de 75 989,06 euros, cette vente étant assortie d'une clause de

réserve de propriété ; que le prix de ce véhicule, livré le 2 novembre 2006 à la...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 19 février 2008) et les productions, que le 21 avril 2006, la société Alsace véhicules industriels (la société AVI) a vendu à la société Etablissements Rocher (la société Rocher) un véhicule porteur, destiné, après transformation, à être livré comme véhicule dévidoir hors route, au service départemental d'incendie et de secours du Bas-Rhin (le SDIS), moyennant le prix de 75 989,06 euros, cette vente étant assortie d'une clause de réserve de propriété ; que le prix de ce véhicule, livré le 2 novembre 2006 à la société Rocher puis cédé au SDIS, n'a pas été réglé par la société Rocher ; que cette société a établi deux factures à l'ordre du SDIS, l'une, datée du 17 octobre 2006, d'un montant de 75 989, 06 euros, correspondant au prix du véhicule porteur, l'autre, datée du 21 décembre 2006, d'un montant de 85 539,12 euros, représentant le coût de la transformation du véhicule ; que la société Rocher, qui a cédé ses créances à la société d'affacturage GE Facto France (l'affactureur), ayant été mise en redressement judiciaire par jugement du 6 février 2007, la société AVI a revendiqué le prix du véhicule ; que M. X..., désigné administrateur judiciaire, n'ayant pas acquiescé à cette demande, la société AVI a saisi le juge-commissaire lequel a rejeté la requête en revendication ; qu'après avoir annulé le jugement ayant infirmé l'ordonnance du juge-commissaire, la cour d'appel a rejeté la demande en revendication du prix ;
Attendu que la société AVI fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1°/ que peut être revendiqué le prix ou la partie du prix des biens vendus sous clause de réserve de propriété qui n'a pas été payé à la date du jugement ouvrant la procédure ; qu'après avoir constaté que si, pour l'achat du véhicule Mercedes, le SDIS avait versé un acompte de 75 989,06 euros à la société GE FactoFrance avant l'ouverture de la procédure collective de la société Rocher, le solde du prix d'un montant de 85 539,12 euros n'avait été payé par lui que le 14 février 2007 soit postérieurement au jugement d'ouverture, la cour d'appel, en refusant à la société AVI le bénéfice de la revendication à due concurrence, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en violation de l'article L. 624-18 du code de commerce ;
2°/ que le vendeur initial peut, dans la limite du prix stipulé dans l'acte de vente d'origine, exercer son action en revendication sur l'ensemble des sommes encore dues par le sous-acquéreur ; qu'en excluant que la société AVI puisse exercer son action en revendication sur la partie des sommes encore dues par le SDIS censées représenter la marge bénéficiaire de la société Rocher, la cour d'appel a violé l'article L. 624-18 du code de commerce ;
Mais attendu qu'après avoir constaté qu'avant le jugement d'ouverture de la procédure collective, le prix du véhicule affecté de la clause de réserve de propriété avait été réglé par le sous-acquéreur entre les mains de l'affactureur, l'arrêt retient, sans évoquer les notions d'acompte et de marge bénéficiaire figurant au moyen, qu'il est indifférent qu'une somme de 85 539,12 euros, sans rapport avec la convention conclue avec l'acquéreur originaire, ait été versée postérieurement au jugement d'ouverture par le SDIS entre les mains de l'affactureur, faisant ainsi ressortir que la somme restant due par le sous-acquéreur correspondait à une créance distincte de celle du prix de revente du bien affecté de la clause de réserve de propriété ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Alsace véhicules industriels aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Etablissements Rocher et à M. X..., ès qualités, la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Alsace véhicules industriels
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société AVI de sa demande en revendication du prix du véhicule Mercedes ;
AUX MOTIFS QUE la clause de réserve de propriété n'implique pas l'interdiction pour le débiteur de revendre la marchandise, objet de la clause. Ainsi qu'il a été rappelé, la société Etablissements Rocher a revendu le véhicule Mercedes au SDIS du Bas-Rhin. L'article L. 624-18 du code de commerce énonce que : «peut être revendiqué le prix ou la partie du prix des biens visés à l'article L 624-16 qui n'a été ni payé, ni réglé en valeur, ni compensé en compte courant entre le débiteur et l'acheteur à la date du jugement ouvrant la procédure». L'article 115 du décret n°2005-1677 du 28 décembre 2005, devenu l'article R 624-16 du code de commerce, prévoit qu' «en cas de revendication du prix des biens en application de l'article L 624-18, les sommes correspondantes payées par le sous-acquéreur postérieurement à l'ouverture de la procédure doivent être versées par le débiteur entre les mains du mandataire judiciaire. Celui-ci les remet au créancier revendiquant à concurrence de sa créance». Revendiquant, entre les mains du débiteur, le prix du véhicule vendu, la société venderesse AVI doit prouver que le prix a été payé par le sous-acquéreur au débiteur après le jugement d'ouverture de la procédure collective. Elle ne peut exercer sa revendication que sur le prix fixé lors de la convention conclue avec l'acquéreur originaire soit 75.989,06 euros ttc. En l'occurrence, il est établi que le prix du bien livré (75.989,06 euros ttc) a été payé par le sous-acquéreur, le SDIS du Bas-Rhin, le 12 décembre 2006, pour un montant de 75.989,06 euros à la société GE FactoFrance à laquelle la société Etablissements Rocher avait cédé sa créance (cf pièces 10 et 29 des appelants). Ultérieurement et plus précisément le 14 février 2007, le SDIS du Bas-Rhin a réglé le solde de 85.539 euros à la société GE FactoFrance. Ainsi, avant le jugement d'ouverture de la procédure collective de la société Etablissements Rocher, le prix du véhicule Mercedes, tel qu'il résulte de la convention conclue avec l'acquéreur originaire, a été réglé par le sousacquéreur le SDIS du Bas-Rhin, entre les mains de la société d'affacturage GE FactoFrance. Le prix ayant été payé par le sous-acquéreur avant la date du jugement d'ouverture de la procédure collective de la société Etablissement Rocher, il ne peut être utilement revendiqué par la société AVI entre ses mains, étant indifférent à cet égard que le solde de 85.539,12 euros, sans rapport avec la convention conclue avec l'acquéreur originaire, ait été versé postérieurement au jugement d'ouverture. En conséquence, la société AVI sera déboutée de sa demande en revendication ;
1) ALORS QUE peut être revendiqué le prix ou la partie du prix des biens vendus sous clause de réserve de propriété qui n'a pas été payé à la date du jugement ouvrant la procédure ; qu'après avoir constaté que si, pour l'achat du véhicule Mercedes, le SDIS du Bas-Rhin avait versé un acompte de 75.989,06 euros à la société GE FactoFrance avant l'ouverture de la procédure collective de la société Etablissements Rocher, le solde du prix d'un montant de 85.539,12 euros n'avait été payé par elle que le 14 février 2007 soit postérieurement au jugement d'ouverture, la cour d'appel, en refusant à la société AVI le bénéfice de la revendication à due concurrence, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en violation de l'article L.624-18 du code de commerce ;
2) ALORS QUE le vendeur initial peut, dans la limite du prix stipulé dans l'acte de vente d'origine, exercer son action en revendication sur l'ensemble des sommes encore dues par le sous-acquéreur ; qu'en excluant que la société AVI puisse exercer son action en revendication sur la partie des sommes encore dues par le SDIS du Bas-Rhin censées représenter la marge bénéficiaire de la société Etablissements Rocher, la cour d'appel a violé l'article L.624-18 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-15753
Date de la décision : 16/06/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Sauvegarde - Détermination du patrimoine - Revendications - Marchandise livrée au débiteur - Revente par celui-ci - Revendication du prix - Assiette - Créance distincte (non)

En présence de la vente d'un véhicule, assortie d'une clause de réserve de propriété, suivie de la revente, après transformation, de ce bien donnant lieu à l'établissement de deux factures, l'une correspondant au prix du véhicule, l'autre au coût de la transformation du véhicule, justifie légalement sa décision de rejeter la demande en revendication du prix, la cour d'appel qui, après avoir constaté qu'avant le jugement d'ouverture de la procédure collective de l'acquéreur originaire, le prix du véhicule affecté de la clause de réserve de propriété avait été réglé par le sous-acquéreur entre les mains de l'affactureur auquel l'acquéreur originaire avait cédé ses créances, retient qu'il est indifférent que la somme, représentant le coût de la transformation du véhicule, sans rapport avec la convention conclue avec l'acquéreur originaire, ait été versée postérieurement au jugement d'ouverture par le sous-acquéreur entre les mains de l'affactureur, faisant ainsi ressortir que la somme restant due par le sous-acquéreur correspondait à une créance distincte de celle du prix de revente du bien affecté de la clause de réserve de propriété


Références :

article L. 624-18 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 19 février 2008

Sur l'assiette de la revendication, à rapprocher :Com., 16 juin 2009, pourvoi n° 08-10241, Bull. 2009, IV, n° 81 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 jui. 2009, pourvoi n°08-15753, Bull. civ. 2009, IV, n° 84
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, IV, n° 84

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Bonnet
Rapporteur ?: M. Delmotte
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.15753
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