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04/06/2009 | FRANCE | N°08-12126

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 04 juin 2009, 08-12126


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2007), que la société Klepierre, titulaire d'un droit d'occupation sur un terrain appartenant au port autonome de Strasbourg, a acquis, en 1988, en l'état futur d'achèvement, un bâtiment à usage d'entrepôt qu'elle a donné en location à partir du 24 décembre 1997 à la société Heppner ; que celle-ci l'a sous-loué, par contrat du 2 mars 2004, à la société Transports internationaux Woehl et compagnie ; que le 23 août 2004, la préfecture du Ba

s-Rhin a notifié à cette dernière le défaut d'autorisation pour l'exploitatio...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2007), que la société Klepierre, titulaire d'un droit d'occupation sur un terrain appartenant au port autonome de Strasbourg, a acquis, en 1988, en l'état futur d'achèvement, un bâtiment à usage d'entrepôt qu'elle a donné en location à partir du 24 décembre 1997 à la société Heppner ; que celle-ci l'a sous-loué, par contrat du 2 mars 2004, à la société Transports internationaux Woehl et compagnie ; que le 23 août 2004, la préfecture du Bas-Rhin a notifié à cette dernière le défaut d'autorisation pour l'exploitation de l'installation dont l'activité relevait de la rubrique 1510 de la nomenclature des installations classées et l'a mise en demeure de régulariser la situation ; que la mise en conformité s'avérant impossible en raison des exigences de l'article 4 de l'arrêté ministériel du 5 août 2002 relatif à l'implantation des entrepôts, la société Heppner a résilié le bail le 25 juillet 2005 avec effet au 1er mars 2006 ; qu'assignée en paiement de dommages-intérêts pour manquement à ses obligations de bailleur, la société Klepierre, qui a vendu l'immeuble le 28 février 2007, a formé une demande reconventionnelle en indemnisation de son préjudice résultant de la moins value de l'immeuble et de la perte de loyers de mars 2006 à décembre 2007, estimant que l'obtention des autorisations administratives et la réalisation des travaux de conformité nécessaires à l'exercice de leur activité incombaient aux sociétés locataire et sous-locataire ;

Sur le moyen unique :

Attendu que la société Klepierre fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que l'obligation d'obtenir une autorisation administrative pour l'exploitation d'une installation classée au sens des articles L. 511-1 à L. 517-2 du code de l'environnement incombe à l'exploitant de l'activité soumise à autorisation et non au propriétaire des lieux dans lesquels l'activité est exercée ; qu'en cas de bail, cette obligation pèse donc sur le preneur et non sur le bailleur ; qu'en l'espèce, en retenant, pour rejeter la demande de la société Klepierre visant à obtenir l'indemnisation par les sociétés Heppner et Woehl et cie du préjudice résultant de la perte des loyers et de la moins value réalisée sur la vente de l'immeuble non conforme à la réglementation, que le bailleur avait commis une faute en ne sollicitant pas l'autorisation requise, la cour d'appel a violé les articles L. 511-1 et suivants du code de l'environnement ;

2°/ qu'en tout état de cause, la clause du bail par laquelle le preneur accepte formellement de prendre en charge l'obtention de toutes les autorisations administratives éventuellement nécessaires à l'exploitation de son activité dans les locaux objet du bail et de se conformer, pendant toute la durée du bail, à toutes les exigences administratives a nécessairement pour effet de mettre à la charge du preneur l'obligation d'indemniser le bailleur du préjudice résultant du manquement à ces obligations contractuelles ; qu'en l'espèce en considérant, pour exonérer le preneur de toute responsabilité, que la stipulation avait pour seul objet d'exonérer la société Klepierre de toute responsabilité à l'égard de son locataire et d'obliger celui-ci à exploiter son commerce en se conformant aux prescriptions administratives pour que son bailleur ne soit pas inquiété du fait de son activité et qu'elle n'avait pas pour but de transférer au preneur les obligations que le propriétaire des murs supporterait en raison de l'activité commandée par la configuration des lieux, la cour d'appel a méconnu la loi des parties, dénaturé la clause précitée et a ainsi violé l'article 1134, alinéa 1er, du code civil ;

3°/ qu'en constatant que les sociétés Heppner et Woehl ont certainement commis une faute en exploitant pendant plusieurs années un entrepôt sans vérifier si celui-ci respectait la réglementation environnementale tout en considérant que les obligations imposées par cette réglementation pèsent sur le seul propriétaire des murs en raison de l'activité commandée par la configuration et l'usage normal des lieux, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

4°/ que, dans ses conclusions d'appel, la société Klepierre faisait valoir qu'au moment de la conclusion du bail, le bâtiment loué par la société Klepierre à la société Heppner était parfaitement conforme à la réglementation alors en vigueur, la circulaire du 4 février 1987 imposant à l'époque une distance minimale de 10 mètres entre un entrepôt relevant des installations classées et "les immeubles habités ou occupés par des tiers et les établissements recevant du public" ; qu'en effet, selon le rapport réalisé en décembre 2004 par OTE Ingénierie, la distance d'éloignement séparant l'entrepôt des bâtiments voisins était supérieure à 10 mètres, sauf au niveau de la façade sud implantée à 9 mètres d'un parking réservé aux poids lourds ; que néanmoins cette façade n'était pas la propriété de la société Klepierre mais celle de la société Locindus et que ce parking ne rentrait pas dans les catégories visées par la circulaire de sorte qu'en définitive, lors de la conclusion du bail, les locaux loués par la société Klepierre à la société Heppner présentaient toutes les caractéristiques requises afin de permettre au locataire d'obtenir ultérieurement l'autorisation d'exploiter dans l'entrepôt une installation classée relevant de la rubrique 1510 de la nomenclature, selon les règles alors applicables ; qu'en considérant toutefois que les intimés relèvent sans qu'il leur soit répondu que dès avant l'arrêté du 5 août 2002 la distance d'éloignement des limites n'était pas respectée en tous points sur le site puisque la façade sud était implantée à 9 mètres d'un parc de stationnement alors que la réglementation existante exigeait un prospect de 10 mètres, de telle sorte que l'autorisation demandée n'aurait pas été accordée, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de la société Klepierre et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant retenu par motifs propres et adoptés que, si les sociétés Heppner et Woehl, locataire et sous-locataire, avaient commis une faute en exploitant pendant plusieurs années l'entrepôt sans vérifier si celui-ci respectait la réglementation environnementale, la société Klepierre, bailleur, avait acheté en l'état futur d'achèvement cet entrepôt dont la finalité intrinsèque première était le stockage dix ans avant de le louer à la société Heppner sans qu'il ait fait l'objet ni de déclaration, ni de demande d'autorisation d'exploiter tant au moment de la construction que de l'installation du premier locataire, la cour d'appel, qui a constaté que les autorisations qui faisaient défaut n'étaient pas spécifiques à l'activité des sociétés Heppner et Woehl mais procédaient de l'usage normal de l'entrepôt, a pu déduire de ces seuls motifs, sans se contredire ni violer l'article L. 511-1 du code de l'environnement, que la première faute ayant été commise par le bailleur, la société Klepierre ne démontrait pas que les loyers qu'elle avait pu perdre ou la moins-value de l'immeuble lors de sa vente étaient imputables à la faute des sociétés Heppner et Woehl ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Klepierre aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Klepierre à payer à la société Heppner et à la société Transports internationaux Voehl et cie, ensemble, la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Klepierre ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour la société Klepierre.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué :

D'AVOIR rejeté la demande visant à obtenir la condamnation de la Société HEPPNER et de la Société WOEHL et Cie à verser à la Société KLEPIERRE des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société KLEPIERRE louait à la société HEPPNER 10.000 m2 d'entrepôt à STRASBOURG en vertu d'un bail du 2 mars 2004 substitué à un bail du 24 décembre 1997 ; qu'à la date du nouveau bail, la société HEPPNER a sous-loué à la société LES TRANSPORTS INTERNATIONAUX WOEHL et Cie (ci-après WOEHL) la majeure partie de ses locaux ; que le 6 août 2004, la DRIRE a constaté que l'entrepôt était exploité sans que les autorisations administratives d'exploiter aient été demandées ; que le 23 août 2004, la préfecture du BAS-RHIN a notifié à la société WOEHL le défaut d'autorisation pour l'exploitation de l'installation alors que l'activité relevait de la rubrique 1510 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement et l'a mise en demeure de régulariser la situation sur le fondement de l'article L 514-2 du Code de l'environnement ; qu'il est indiqué par le bailleur que la rubrique 1510 concerne la grande majorité des activités de stockage et par les preneurs qu'elle représente 70 % de l'activité d'entrepôts en France tous secteurs confondus ; que les sociétés HEPPNER et WOEHL ont assigné la société KLEPIERRE pour qu'elle soit condamnée à supporter le coût des travaux de mise en conformité des locaux, à payer des dommages-intérêts et à supporter une réduction du montant du loyer jusqu'à la date d'obtention de l'autorisation administrative ; que cette régularisation est cependant impossible au regard des exigences de l'article 4 de l'arrêté du 5 août 2002 compte tenu de la configuration des lieux et du refus de toute mesure dérogatoire ; que la société HEPPNER a donc délivré congé le 25 juillet 2005 pour le 1er mars 2006 ; qu'elle a obtenu ainsi de la société WOEHL l'autorisation d'exploiter ses activités de stockage jusqu'au 1er mars 2006 et qu'un état des lieux contradictoire a été établi le 2 mars 2006 ; que l'immeuble a fait ensuite l'objet d'une promesse de vente à un prix inférieur, d'après la société KLEPIERRE, à celui qui pouvait être espéré si les autorisations administratives avaient été demandées et obtenues avant que le législateur ne renforce ses exigences ; que le bien a finalement été cédé à la société LOCINDUS le 28 février 2007 ; qu'elle indique dans ses écritures que la promesse de vente avait été consentie pour le prix de 920.000 HT alors que l'immeuble était évalué à 4,7 millions d'euros s'il avait été conforme à la réglementation ; que par jugement du 19 septembre 2006, le Tribunal de grande instance de PARIS a débouté les sociétés HEPPNER et WOEHL des fins de leurs demandes en dommages-intérêts et en réduction du montant de leurs loyers et la société KLEPIERRE des fins de sa demande reconventionnelle en payement des travaux de mise en conformité de l'ouvrage ; que la société KLEPIERRE a relevé appel de ce jugement ; qu'elle demande que les sociétés HEPPNER et WOEHL soient condamnées à lui payer in solidum 3.780.000 en réparation du préjudice subi du fait de la perte de valeur de l'immeuble, 658.855 HT en réparation des loyers perdus de mars 2006 à décembre 2007 ainsi que 6.000 en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'elle demande à titre subsidiaire, une expertise avant dire droit sur le montant de son préjudice ; que les sociétés HEPPNER et WOEHL concluent à la confirmation du jugement déféré et sollicitent la condamnation de la société KLEPIERRE à leur payer 50.000 à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi que 5.000 en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que pour exonérer les preneurs de toute responsabilité, les premiers juges ont relevé d'abord que la société KLEPIERRE, qui avait acquis l'immeuble en l'état futur d'achèvement construit en vertu d'une convention d'occupation sur des terrains appartenant au port de STRASBOURG près de dix ans avant de le louer à la société HEPPNER, ne leur avait pas dit que l'immeuble n'avait fait l'objet ni de déclaration ni de demande d'autorisation d'exploiter tant au moment de la construction que de l'installation du premier locataire, les sociétés BOSCH et SIEMENS ELECTROMENAGER ; qu'ils ont estimé ensuite qu'on ne pouvait pas demander aux sociétés HEPPNER et WOEHL de supporter les frais de mise en conformité de l'installation alors que la conformité s'apprécie du point de vue de l'ensemble du site qui comprend en raison de leur mitoyenneté, outre leurs locaux, des entrepôts appartenant à la société KLEPIERRE loués à la société SENSIENT FLAVOR et d'autres appartenant à la société LOCINDUS loués à la société HEPPNER ; que la société KLEPIERRE soutient de son côté que déclarations et autorisations ne concernent pas l'unité immobilière mais l'usage qui en est fait qui relève de ses locataires et sous-locataires ; qu'elle ajoute que l'obtention des autorisations nécessaires à leur activité ainsi que la réalisation des travaux de mise en conformité sont à leur charge en vertu des dispositions du bail ; que les sociétés HEPPNER et WOEHL ont certainement commis une faute en exploitant pendant plusieurs années un entrepôt sans vérifier si celui-ci respectait la réglementation environnementale ; que toutefois la première faute a été commise par le bailleur qui a acheté en l'état futur d'achèvement un entrepôt dont la finalité intrinsèque première est le stockage sans se préoccuper de la réglementation alors qu'il reconnaît expressément (page 29, 7e alinéa de ses conclusions) que celle-ci est applicable à la grande majorité des activités de stockage ; que cette faute a été reprise par le premier locataire des lieux qui les a exploités sans se préoccuper plus que le bailleur des autorisations requises ; que les intimés ne viennent qu'ensuite dans des conditions telles qu'ils pouvaient penser qu'avaient été obtenues ces autorisations puisqu'elles n'étaient pas spécifiques à leur activité mais procédaient de l'usage normal de l'entrepôt ; que la société KLEPIERRE considère que l'obligation de demander ces autorisations et notamment son obligation à l'égard du propriétaire du terrain, a été transférée par le bail aux preneurs ; que la stipulation, ainsi visée a pour seul objet d'exonérer la société KLEPIERRE de toute responsabilité à l'égard de son locataire et d'obliger celui-ci à exploiter son commerce en se conformant aux prescriptions administratives pour que son bailleur ne soit pas inquiété du fait de son activité ; qu'elle n'a pas pour but de transférer au preneur les obligations que le propriétaire des murs supporterait en raison de l'activité commandée par la configuration des lieux ; enfin que les intimés relèvent sans qu'il leur soit répondu que dès avant l'arrêté du 5 août 2002, la distance d'éloignement des limites n'était pas respectée en tous points sur le site puisque la façade sud était implantée à 9 mètres d'un parc de stationnement alors que la réglementation existante exigeait un prospect de 10 mètres de telle sorte que l'autorisation demandée n'aurait pas été accordée ; que la société KLEPIERRE ne démontre donc pas que les loyers qu'elle a pu perdre ou la moins-value qu'elle a pu réaliser sur la vente de l'immeuble sont imputables à la faute des sociétés HEPPNER et WOEHL » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE « la Société HEPPNER et la Société Transports Internationaux WOEHLet Cie sollicitent la condamnation de la Société KLEPIERRE à leur payer des dommages-intérêts ainsi qu'une réduction du montant du loyer versé pour manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance ; que cependant elles ont exploité les lieux loués à usage d'entrepôt jusqu'en mars 2006, date de résiliation du bail à l'initiative de la Société HEPPNER, et ne justifient en conséquence d'aucun préjudice ; qu'elles seront donc déboutées de leur demande de ce chef ; que la Société KLEPIERRE demande à titre reconventionnel la condamnation de la Société HEPPNER et de la Société Transports-Internationaux WOEHL et Cie pour violation de leurs obligations légales et contractuelles au motif que - du fait de l'absence de demande d'autorisation d'exploiter, l'entrepôt litigieux est désormais soumis aux prescriptions de l'arrêté ministériel du 5 août 2002 relatif à la prévention des sinistres dans les entrepôts couverts soumis à autorisation, réglementation plus stricte que la circulaire du 4 février 1987 antérieurement applicable, rendant la mise en conformité de l'entrepôt difficile et sa relocation impossible pour une activité relevant de la rubrique 1510 de la nomenclature ICPE (Installations classées pour la protection de l'environnement) ; que la Société KLEPIERRE ne saurait cependant engager la responsabilité contractuelle de la Société HEPPNER et de la Société Transports Internationaux WOEHLet Cie pour manquement à leur obligation de demander l'autorisation d'exploiter, alors qu'elle a délivré à la Société HEPPNER le 24 décembre 1997 un local à usage d'entrepôt sans lui mentionner que ce bâtiment qu'elle avait acquis en l'état futur d'achèvement, près de dix ans auparavant, le 17 novembre 1988, puis loué à usage d'entrepôt à la société BOSCH et SIEMENS ÉLECTROMÉNAGER, n'avait jamais fait l'objet d'aucune déclaration ni demande d'autorisation d'exploiter, ni au moment de son installation, ni lors de sa première exploitation par la société BOSCH et SIEMENS ÉLECTROMÉNAGER, ainsi qu'il résulte du courrier de la Préfecture du Bas-Rhin en date du 23 août 2004 et de la mise en demeure adressée par la même autorité le 21 octobre 2004, faisant état de ce qu'« aucune autorisation n'a été sollicitée pour l'exploitation de cette installation alors que le bâtiment a été construit à partir de 1988 » ; que la Société KLEPIERRE ne saurait davantage reprocher à la Société HEPPNER et à la Société Transports Internationaux WOEHL et Cie de n'avoir pas réalisé les travaux de mise en conformité de l'entrepôt ; qu'il résulte en effet du courrier du 30 août 2005 de la Préfecture du BAS RHIN, que la Société HEPPNER a fourni à l'autorité administrative des éléments relatifs à :

- la remise en service de l'installation de détection d'un incendie dans toutes les cellules,
- le gardiennage des locaux, y compris nocturne,
- le caractère suffisant et le bon état des moyens internes de lutte contre l'incendie (RIA, extincteurs),
- la disponibilité totale en eau depuis les poteaux d'incendie existants sur le site ; en ce qui concerne les poteaux extérieurs, une demande a été engagée auprès du service de l'eau de la CUS,
- le caractère suffisant du débit total disponible, pour lequel une étude a été demandée à un bureau d'études ; de sorte que le Préfet a pris un arrêté portant prescriptions provisoires pour l'exploitation par la Société HEPPNER d'un stockage de matières combustibles visé à la rubrique 1510-1 de la nomenclature des installations classées, autorisant la société-locataire à exploiter l'entrepôt jusqu'au mois de mars 2006, date à laquelle la Société HEPPNER a quitté les lieux litigieux ; qu'en conséquence, la Société HEPPNER, comme elle y était tenue en vertu des stipulations contractuelles, s'est conformée aux injonctions de l'autorité administrative jusqu'à la date de résiliation du bail, intervenue le 1er mars 2006, l'état des lieux dressé contradictoirement à la sortie le 2 mars 2006 ne mentionnant aucune difficulté particulière dans la restitution des locaux ; qu'au surplus, la bailleresse n'est pas fondée à demander aux sociétés locataire et sous locataire de supporter intégralement le coût des travaux, de mise en conformité nécessaires à la régularisation de la situation administrative de l'entrepôt en vue d'une nouvelle location, alors que pour obtenir une régularisation, lesdits travaux devraient être mis en oeuvre sur l'ensemble du site et non seulement dans les lieux loués par la Société KLEPIERRE à la Société HEPPNER, la préfecture n'admettant pas le principe d'entrepôts distincts sur un même site et considérant en conséquence que la régularisation doit concerner l'ensemble du bâtiment, ainsi qu'il résulte du courrier susvisé du 23 août 2004 ; qu'il suit des développements qui précèdent que la Société KLEPIERRE sera déboutée de ses demandes aux fins de condamnation de la Société HEPPNER et de la Société Transports Internationaux WOEHL et Cie au paiement des travaux et de désignation d'un expert pour déterminer et chiffrer les travaux à réaliser, et le préjudice subi » ;

ALORS DE PREMIERE PART QUE l'obligation d'obtenir une autorisation administrative pour l'exploitation d'une installation classée au sens des articles L. 511-1 à L. 517-2 du Code de l'environnement incombe à l'exploitant de l'activité soumise à autorisation et non au propriétaire des lieux dans lesquels l'activité est exercée ; qu'en cas de bail, cette obligation pèse donc sur le preneur et non sur le bailleur ; qu'en l'espèce, en retenant, pour rejeter la demande de la Société KLEPIERRE visant à obtenir l'indemnisation par les Sociétés HEPPNER et WOEHL et Cie du préjudice résultant de la perte des loyers et de la moins-value réalisée sur la vente de l'immeuble non conforme à la réglementation, que le bailleur avait commis une faute en ne sollicitant pas l'autorisation requise, la Cour d'appel a violé les articles L. 511-1 et suivants du Code de l'environnement ;

ALORS DE DEUXIEME PART QU'en tout état de cause, la clause du bail par laquelle le preneur accepte formellement de prendre à sa charge l'obtention de toutes les autorisations administratives éventuellement nécessaires à l'exploitation de son activité dans les locaux objets du bail et de se conformer, pendant toute la durée du bail, à toutes les exigences administratives a nécessairement pour effet de mettre à la charge du preneur l'obligation d'indemniser le bailleur du préjudice résultant du manquement à ces obligations contractuelles ; qu'en l'espèce en considérant, pour exonérer le preneur de toute responsabilité, que la stipulation avait pour seul objet d'exonérer la Société KLEPIERRE de toute responsabilité à l'égard de son locataire et d'obliger celui-ci à exploiter son commerce en se conformant aux prescriptions administratives pour que son bailleur ne soit pas inquiété du fait de son activité et qu'elle n'avait pas pour but de transférer au preneur les obligations que le propriétaire des murs supporterait en raison de l'activité commandée par la configuration des lieux, la Cour d'appel a méconnu la loi des parties, dénaturé la clause précitée et a ainsi violé l'article 1134 al. 1er du Code civil ;

ALORS DE TROISIEME PART QU'en constatant que les Sociétés HEPPNER et WOEHL ont certainement commis une faute en exploitant pendant plusieurs années un entrepôt sans vérifier si celui-ci respectait la réglementation environnementale tout en considérant que les obligations imposées par cette réglementation pèse sur le seul propriétaire des murs en raison de l'activité commandée par la configuration et l'usage normal des lieux, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

ALORS ENFIN QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 33), la Société KLEPIERRE faisait valoir qu'au moment de la conclusion du bail, le bâtiment loué par la Société KLEPIERRE à la Société HEPPNER était parfaitement conforme à réglementation alors en vigueur, la circulaire du 4 février 1987 imposant à l'époque une distance minimale de 10 mètres entre un entrepôt relevant des installations classées et « les immeubles habités ou occupés par des tiers et les établissements recevant du public » ; qu'en effet, selon le rapport réalisé en décembre 2004 par OTE Ingénierie, la distance d'éloignement séparant l'entrepôt des bâtiments voisins était supérieure à 10 mètres, sauf au niveau de la façade Sud implantée à 9 mètres d'un parking réservé aux poids lourds ; que, néanmoins, cette façade n'était pas la propriété de la Société KLEPIERRE mais celle de la Société LOCINDUS et que ce parking ne rentrait pas dans les catégories visées par la circulaire, de sorte qu'en définitive, lors de la conclusion du bail, les locaux loués par la Société KLEPIERRE à la Société HEPPNER présentaient toutes les caractéristiques requises afin de permettre au locataire d'obtenir ultérieurement l'autorisation d'exploiter dans l'entrepôt une installation classée relevant de la rubrique 1510 de la nomenclature, selon les règles alors applicables ; qu'en considérant toutefois que les intimés relèvent sans qu'il leur soit répondu que dès avant l'arrêté du 5 août 2002 la distance d'éloignement des limites n'était pas respectée en tous points sur le site puisque la façade sud était implantée à 9 mètres d'un parc de stationnement alors que la réglementation existante exigeait un prospect de 10 mètres de telle sorte que l'autorisation demandée n'aurait pas été accordée, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de la Société KLEPIERRE et ainsi violé l'article 4 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-12126
Date de la décision : 04/06/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROTECTION DE LA NATURE ET DE L'ENVIRONNEMENT - Installations classées - Bail du terrain - Autorisation d'exploiter - Défaut - Faute du bailleur et des preneurs - Portée

BAIL (règles générales) - Bailleur - Obligations - Demande d'autorisation d'exploiter une installation classée - Défaut - Faute - Portée

Ayant relevé que le bailleur avait acheté en l'état futur d'achèvement un entrepôt à finalité intrinsèque de stockage dix ans avant de le louer aux actuels locataire et sous-locataire, qui en faisaient un usage normal, sans que cette installation ait fait l'objet d'une demande d'autorisation d'exploiter tant au moment de la construction que de l'installation d'un premier locataire, la cour d'appel a pu en déduire que cette première faute commise par le bailleur était seule à l'origine du préjudice résultant, pour celui-ci, de l'impossibilité de mettre l'immeuble en conformité avec la réglementation relative aux installations classées en exécution d'une mise en demeure faite par l'administration à l'exploitant


Références :

article L. 511-1 du code de l'environnement

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 décembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 04 jui. 2009, pourvoi n°08-12126, Bull. civ. 2009, III, n° 134
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 134

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Bruntz
Rapporteur ?: Mme Nési
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.12126
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