LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 122-32-5, alinéa 1er, et L. 122-32-7, respectivement devenus les articles L. 1226-10 du code du travail et L.1226-15 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes, que l'avis des délégués du personnel doit être recueilli avant que la procédure de licenciement d'un salarié déclaré par le médecin du travail inapte à son emploi en conséquence d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ne soit engagée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par contrat de travail à durée indéterminée du 1er juillet 1987 en qualité d'abatteur par la régie à autonomie financière de l'Abattoir municipal de Puylaurens, puis, par contrat du 15 juillet 1993, comme adjoint au chef de service, par la société des Abattoirs Puylaurentais qui a repris l'activité de la régie, a été victime d'un accident de travail le 7 mai 2001 ; que par deux avis du médecin du travail, en date des 11 et 25 février 2002, il a été déclaré inapte au poste sur la chaîne d'abattage, avec possibilité de reclassement sur un poste adapté à son état de santé, sans utilisation d'outils à main, sans effort physique, sans manutention, sans station debout prolongée, sans exposition au froid ; que le 6 mars 2002, l'employeur lui a notifié son licenciement pour inaptitude médicale et impossibilité de trouver un poste de reclassement ; que le salarié, contestant notamment le bien-fondé de cette mesure, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'article L. 122-32-5 du code du travail, après avoir relevé que l'inaptitude de M. X... était en relation, au moins partielle, avec son accident du travail du 7 mai 2001 et constaté qu'il résultait de l'attestation du délégué du personnel, M. Y..., que la consultation des délégués du personnel était intervenue le 15 février 2002, la cour d'appel a considéré que la procédure de licenciement était régulière, les délégués du personnel ayant été consultés avant le licenciement, au vu de l'avis du médecin du travail précisant les contraintes du reclassement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations, que la consultation des délégués du personnel était intervenue le 15 février 2002, soit entre les deux examens médicaux de la visite de reprise de sorte que la procédure était irrégulière et, s'agissant d'une formalité substantielle, ouvrait droit pour le salarié à l'indemnité prévue par l'article L. 122-32-7, devenu l'article L. 1226-15, du code du travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit que l'inaptitude de M. X... au poste de travail était en relation au moins partielle avec l'accident du travail dont il avait été victime, l'arrêt rendu le 4 juillet 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne la société Abattoirs Puylaurentais aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Abattoirs Puylaurentais ; la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE à l'arrêt n° 748 (SOC.) ;
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, Avocat aux Conseils, pour M. X... ;
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté Monsieur X... de ses demandes de dommages-intérêts d'un montant de 40.500 euros pour licenciement abusif et d'un montant de 1.481 euros au titre de l'article L.122-32-5 du Code du travail, de sa demande de dommages-intérêts d'un montant de 3.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et de sa demande de remboursement des dépens, dont 1.200 euros de frais d'expertise, et de l'avoir condamné à payer la moitié des frais d'expertise.
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L 122-32-5 du Code du travail, si le salarié victime d'un accident du travail est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de proposer, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise et après avis des délégués du personnel, un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement de temps de travail ; que l'employeur ne peut prononcer le licenciement que s'il justifie de l'impossibilité où il se trouve de proposer un emploi dans les conditions ci-dessus ou du refus par le salarié de l'emploi proposé ; qu'il résulte de la description des 23 postes de travail existant au sein de la SA des ABATTOIRS PUYLAURENTAIS, telle qu'elle a été effectuée pas l'employeur et par l'expert le docteur Z..., que : - les 12 postes de la chaîne d'abattage ne pouvaient pas être proposés à André X..., la chaîne se trouvant en atmosphère froide, le travail s'effectuant debout et la plupart des postes exigeant des efforts physiques importants, - les autres postes ne pouvaient convenir ni à l'état de santé de l'intéressé, parce qu'ils comportaient des manipulations pénibles (postes transport, expédition, pesée, nettoyage, bouvier) ou l'usage de coureaux (poste triperie) ou à ses compétences techniques (deux administratifs, ingénieur, agent d'entretien en matière électrique et mécanique) ; que, par ailleurs, l'attestation du délégué du personnel Monsieur Y... confirmant le compte-rendu de la consultation du 15 février 2002 qu'il a manuscrit sur un cahier, ainsi que celle de Madame A..., comptable de l'entreprise qui a assisté à l'entretien préalable, établissent qu'au cours de ce dernier, le poste de concierge de l'entreprise, alors vacant, a été proposé à Monsieur X..., qui l'a aussitôt refusé ; que certes, ce refus pouvait être justifié, car le poste proposé ne satisfait pas aux prescriptions de l'avis médical, puisqu'il comporte la réception des animaux et la manipulation des carcasses qui impliquent des efforts physiques conséquents et l'exposition, au moins temporaire, au froid ; que cependant, l'offre de la SA des ABATTOIRS PUYLAURENTAIS, effectuée lors de l'entretien préalable, concernant l'unique poste de travail disponible dans l'entreprise, constituait la seule possibilité de reclassement de Monsieur X..., eu égard aux prescriptions précises et concrètes du médecin du travail et aux contraintes de tous les autres postes qui ne pouvaient être transformés ou aménagés en raison du caractère pénible par nature des travaux de l'entreprise et des capacités de l'intéressé ; que l'employeur, qui n'apparaît pas faire partie d'un groupe d'entreprises, justifie ainsi de son impossibilité de reclasser le salarié et a donc valablement procédé à son licenciement ; que la procédure est régulière puisque les délégués du personnel ont été consultés avant le licenciement, au vu de l'avis du médecin du travail précisant les contraintes du reclassement et que l'obligation d'indiquer par écrit les motifs empêchant le reclassement ne s'applique pas lorsqu'une proposition d'emploi a été formulée ; qu'en conséquence, le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses demandes en réparation du non respect de la procédure de licenciement et en dommages-intérêts au titre de l'article L.122-32-5 du code du travail, précision étant faite que l'inaptitude du salarié à son poste de travail est en relation, au moins partielle, avec l'accident du travail du 7 mai 2001 et que le licenciement est régulier et a une cause réelle et sérieuse.
ALORS d'une part QUE l'avis des délégués du personnel sur le reclassement du salarié prévu par l'article L.122-32-5 alinéa 1 du Code du travail en cas d'accident du travail d'origine professionnelle doit être recueilli après que l'inaptitude de l'intéressé a été constatée dans les conditions prévues à l'article R.241-51-1 du même code, soit postérieurement aux deux visites médicales de reprise ; que Monsieur X... avait soutenu devant la Cour d'appel que la consultation du délégué du personnel était irrégulière pour avoir été faite avant la seconde visite obligatoire du médecin du travail ; que la Cour d'appel qui a considéré que la procédure était régulière puisque les délégués du personnel avaient été consultés avant le licenciement, au vu de l'avis du médecin du travail précisant les contraintes du reclassement sans rechercher si la consultation du délégué du personnel avait eu lieu postérieurement à la seconde visite médicale de reprise, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.122-32-5 alinéa 1 et R.241-51-1 du Code du travail.
ALORS d'autre part QU'aux termes de l'article L.122-32-5 alinéa 2 du Code du travail, si l'employeur ne peut proposer un autre emploi au salarié, il est tenu de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement ; que le défaut de notification des motifs s'opposant au reclassement occasionne nécessairement un préjudice au salarié, fût-il d'ordre purement moral, et doit donner lieu à des dommages et intérêts, de sorte que cette obligation n'est pas purement formelle ; qu'il en résulte que l'employeur ne saurait être dispensé de cette information lorsqu'il formule une proposition d'emploi ne satisfaisant pas aux prescriptions données par le médecin du travail ; que la Cour d'appel a relevé que la société avait proposé à Monsieur X... le poste de concierge de l'entreprise, lequel ne satisfaisait pas aux prescriptions de l'avis médical ; qu'en considérant néanmoins que l'obligation d'indiquer par écrit les motifs empêchant le reclassement ne s'appliquait pas lorsqu'une proposition d'emploi avait été formulée, la Cour d'appel a violé l'article susvisé.